Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 28 janvier 2021, 435946

  • Statuts, droits, obligations et garanties·
  • Droit à la communication du dossier (art·
  • 19 de la loi du 13 juillet 1983)·
  • Fonctionnaires et agents publics·
  • Pièces devant figurer au dossier·
  • Communication du dossier·
  • Discipline·
  • 2) espèce·
  • Procédure·
  • Sport

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

) Lorsqu’une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d’un agent public ou porte sur des faits qui, s’ils sont établis, sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire ou de justifier que soit prise une mesure en considération de la personne d’un tel agent, le rapport établi à l’issue de cette enquête, y compris lorsqu’elle a été confiée à des corps d’inspection, ainsi que, lorsqu’ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l’agent faisant l’objet de l’enquête font partie des pièces dont ce dernier doit recevoir communication en application de l’article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, sauf si la communication de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné.,,,2) Ministre des sports ayant, à la suite d’informations faisant état de la prise en charge par un établissement public des frais de séjour de personnes proches du directeur général de cet établissement et étrangères à cet établissement, confié à l’inspection générale de la jeunesse et des sports une mission d’enquête sur ces faits. Procédure disciplinaire ayant par la suite été engagée à l’encontre du directeur général, à l’issue de laquelle le Président de la République a prononcé à son encontre la sanction de la mise à la retraite d’office.,,,Si la personne sanctionnée n’était pas en droit d’obtenir communication d’éventuels procès-verbaux d’auditions réalisées, pour son rapport, par la Cour des comptes, dont la mission portait, de manière générale, sur le fonctionnement de l’établissement public, il résulte de ce qui a été dit au 1) et alors même que l’administration ne s’est pas bornée à reprendre les préconisations de l’inspection générale de la jeunesse et des sports, que cette personne était en droit d’obtenir communication des procès-verbaux d’audition des personnes entendues par les auteurs de ce rapport. Ainsi, le requérant, qui n’a pas reçu communication de l’ensemble des pièces qu’il était en droit d’obtenir en vertu de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983 préalablement à l’intervention de la sanction de mise à la retraite d’office et a ainsi été privé d’une des garanties de la procédure disciplinaire, est fondé à soutenir que la sanction qui lui a été infligée a été prise au terme d’une procédure irrégulière.

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Commentaires29

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Sur la décision

Référence :
CE, 2-7 chr, 28 janv. 2021, n° 435946, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 435946
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Rappr., s'agissant d'une mesure prise en considération de la personne, CE, 5 février 2020, M.,, n° 433130, p. 24.
Dispositif : Satisfaction totale
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043080024
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2021:435946.20210128

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 novembre 2019, 11 mars 2020 et 8 janvier 2021 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d’Etat, M. D… C… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret du 22 septembre 2019 par lequel le Président de la République a prononcé à son encontre la sanction de la mise à la retraite d’office ;

2°) d’enjoindre au Président de la République de le réintégrer dans le nouveau corps de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche dans les quinze jours de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

 – le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

-le décret n° 2002-53 du 10 janvier 2002 ;

 – le décret n° 2019-1001 du 27 septembre 2019 ;

 – le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Yves Doutriaux, conseiller d’Etat,

— les conclusions de Mme A… B…, rapporteure publique,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. C… ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que M. D… C…, inspecteur général de la jeunesse et des sports de 1re classe, a exercé, à compter de 2013 et jusqu’en mars 2017, les fonctions de directeur général de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP). A la suite d’informations faisant état de la prise en charge par l’INSEP des frais de séjour à Rio-de-Janeiro, à l’occasion des Jeux olympiques, de personnes proches de M. C… et étrangères à cet établissement, la ministre des sports a confié en octobre 2018 à l’inspection générale de la jeunesse et des sports une mission d’enquête sur ces faits. Le 27 mai 2019, une procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre de M. C…. A l’issue de cette procédure, le Président de la République a prononcé à son encontre la sanction de la mise à la retraite d’office par un décret du 22 septembre 2019. Par la présente requête, M. C… demande au Conseil d’Etat d’annuler ce décret pour excès de pouvoir.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Selon l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, « le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l’intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes ».

3. Lorsqu’une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d’un agent public ou porte sur des faits qui, s’ils sont établis, sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire ou de justifier que soit prise une mesure en considération de la personne d’un tel agent, le rapport établi à l’issue de cette enquête, y compris lorsqu’elle a été confiée à des corps d’inspection, ainsi que, lorsqu’ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l’agent faisant l’objet de l’enquête font partie des pièces dont ce dernier doit recevoir communication en application de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, sauf si la communication de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné.

4. Il ressort des pièces du dossier que la décision d’engager une procédure disciplinaire à l’encontre de M. C…, laquelle a conduit au prononcé de la sanction de mise à la retraite d’office, a été prise au vu d’un rapport de l’inspection générale de la jeunesse et des sports remis en février 2019.

5. Il ressort également des pièces du dossier que la lettre par laquelle le chef du service de l’inspection générale de la jeunesse et des sports a convoqué M. C… à la séance du conseil de discipline comportait en annexe le rapport de l’inspection générale de la jeunesse et des sports et un rapport de la Cour des comptes sur l’INSEP établi à la même époque. Mais il est constant que l’avocat de M. C… a sollicité en vain la communication des pièces énumérées à l’annexe du rapport de l’inspection générale de la jeunesse et des sports, notamment des procès-verbaux d’audition des personnes entendues par les auteurs de ce rapport.

6. Si le requérant n’était pas en droit d’obtenir communication d’éventuels procès-verbaux d’auditions réalisées, pour son rapport, par la Cour des comptes, dont la mission portait, de manière générale, sur le fonctionnement de l’INSEP, il résulte de ce qui a été dit au point 3 et alors même que l’administration ne s’est pas bornée à reprendre les préconisations de l’inspection générale de la jeunesse et des sports, que M. C… était en droit d’obtenir communication des procès-verbaux d’audition des personnes entendues par les auteurs de ce rapport. Ainsi, le requérant, qui n’a pas reçu communication de l’ensemble des pièces qu’il était en droit d’obtenir en vertu de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983 préalablement à l’intervention de la sanction de mise à la retraite d’office et a ainsi été privé d’une des garanties de la procédure disciplinaire, est fondé à soutenir que la sanction qui lui a été infligée a été prise au terme d’une procédure irrégulière. Par suite, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa requête, il est fondé à demander l’annulation pour excès de pouvoir du décret qu’il attaque.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

7. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution (…) ».

8. L’annulation de la mise à la retraite d’office de M. C…, qui n’est pas atteint par la limite d’âge, implique nécessairement qu’il soit réintégré dans son corps d’origine à la date de son éviction puis reclassé dans le corps de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche, conformément aux dispositions du décret du 27 septembre 2019 relatif au statut particulier de ce nouveau corps. Il est enjoint au ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports d’y procéder dans un délai d’un mois, sans qu’il y ait lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les conclusions relatives aux frais de l’instance :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros à verser à M. C… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------


Article 1er : Le décret du 22 septembre 2019 est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports de réintégrer M. C… dans son corps d’origine et de le reclasser dans le corps de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision.


Article 3 : L’Etat versera à M. C… une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. D… C…, au ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports et au Premier ministre.

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