CEDH, Cour (première section), AFFAIRE POLYCHRONAKOS c. GRECE, 11 octobre 2007, 23032/05

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CEDH · 11 octobre 2007

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CEDH · 5 octobre 2007

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Première Section), 11 oct. 2007, n° 23032/05
Numéro(s) : 23032/05
Type de document : Arrêt
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Violation de l'art. 6-1
Identifiant HUDOC : 001-82650
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2007:1011JUD002303205
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Sur les parties

Texte intégral

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE POLYCHRONAKOS c. GRÈCE

(Requête no 23032/05)

ARRÊT

STRASBOURG

11 octobre 2007

DÉFINITIF

11/01/2008

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.


En l'affaire Polychronakos c. Grèce,

La Cour européenne des Droits de l'Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

MM.L. Loucaides, président,
C.L. Rozakis,
MmeN. Vajić,
M.A. Kovler,
MmeE. Steiner,
MM.S.E. Jebens,
G. Malinverni, juges,
et de M. A. Wampach, greffier adjoint de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 20 septembre 2007,

Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1.  A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 23032/05) dirigée contre la République hellénique par un ressortissant de cet Etat, M. Georgios Polychronakos (« le requérant »), qui a saisi la Cour le 14 juin 2005 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).

2.  Le requérant est représenté par Mes G. Foufopoulos et F. Karayannopoulos, avocats au barreau d'Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») est représenté par les délégués de son agent, M. M. Apessos, conseiller auprès du Conseil juridique de l'Etat et Mme O. Patsopoulou, auditrice auprès du Conseil juridique de l'Etat.

3.  Le 25 octobre 2006, la Cour a décidé de communiquer le grief tiré de la durée de la procédure au Gouvernement. Se prévalant de l'article 29 § 3 de la Convention, elle a décidé qu'elle se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.

EN FAIT

LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE

4.  Le requérant réside à Sparte (Péloponnèse). Il est propriétaire d'un terrain de 7 500 m², situé près de l'ancienne acropole de la ville de Sparte. En 1973, muni d'un permis de construire, il fit ériger sur son terrain une école maternelle, qu'il agrandit en 1977.

5.  Le 13 mai 1992, il déposa une demande tendant à obtenir un permis de construire un nouveau bâtiment de deux étages, à côté de l'école existante. Les 10 et 30 septembre 1993 respectivement, le cinquième comité des antiquités de Sparte et le conseil local des monuments et archéologies rendirent des décisions favorables à la construction envisagée. Toutefois, se fondant sur un avis négatif du conseil central d'archéologies (avis no 37/1994), le ministre de la Culture débouta finalement le requérant de sa demande (décision no A1/Φ5/6495/314 du 8 février 1995).

6.  Le 19 avril 1995, le requérant saisit le Conseil d'Etat d'un recours en annulation de la décision ministérielle susmentionnée.

7.  Entre-temps, le ministre de la Culture qualifia la zone autour de l'ancienne acropole de Sparte comme « zone A – de protection absolue », à savoir une zone où la construction et l'exploitation sont totalement interdites, sauf la culture d'oliviers (décision no A1/Φ5/37652/2107, publiée au Journal officiel no 754 du 27 août 1996).

8.  Le 6 avril 1998, la cinquième chambre du Conseil d'Etat annula la décision no A1/Φ5/6495/314 pour vice de forme. En particulier, elle considéra que le jour où il rendit son avis no 37/1994, sur lequel s'était fondée la décision ministérielle attaquée, le conseil central d'archéologies n'était pas légalement constitué (arrêt no 1432/1998).

9.  Le 8 décembre 1998, le conseil central d'archéologies émit un nouvel avis défavorable sur la construction envisagée par le requérant (avis no 68/1998).

10.  Le 31 mars 1999, le ministre de la Culture refusa à nouveau qu'un permis de construire soit délivré au requérant, afin de protéger la zone autour de l'ancienne acropole de la ville de Sparte, désormais qualifiée de zone non constructible en vertu de la décision ministérielle no A1/Φ5/37652/2107 (décision no A1/Φ5/16051/808).

11.  Le 9 juin 1999, le requérant saisit le Conseil d'Etat d'un recours en annulation de la décision ministérielle no A1/Φ5/16051/808. Entre autres, il mettait en cause la légalité de la décision ministérielle no A1/Φ5/37652/2107, ainsi que celle de l'avis no 68/1998 du conseil central d'archéologies. L'audience eut lieu le 18 octobre 2000.

12.  Le 23 mai 2001, la cinquième chambre du Conseil d'Etat, se fondant sur l'article 24 de la Constitution, qui garantit la protection de l'environnement naturel et culturel, rejeta une partie des moyens soulevés par le requérant ; au demeurant, elle renvoya l'affaire devant la formation plénière de la haute juridiction pour que celle-ci se prononçât sur la nature juridique de la décision ministérielle no A1/Φ5/37652/2107 et l'utilité pour le requérant de soulever des moyens de cassation tirés de la légalité, d'une part, de la composition du conseil central d'archéologies et, d'autre part, de la procédure suivie pour l'adoption de son avis (décision no 1822/2001). L'audience eut lieu le 20 septembre 2002.

13.  Le 28 février 2003, la formation plénière du Conseil d'Etat décida que la décision ministérielle no A1/Φ5/37652/2107 qui qualifiait la zone où se situait le terrain litigieux comme « zone A – de protection absolue » était un acte réglementaire et que le ministre de la Culture était tenu de l'appliquer lors de l'examen de la demande du requérant tendant à obtenir un permis de construire ; dès lors, il était inutile pour le requérant de remettre en cause la légalité de l'avis no 68/1998 du conseil central d'archéologies, car, de toute façon, le ministre ne pouvait pas faire droit à sa demande. Après avoir ainsi répondu aux questions qui lui étaient soumises, la formation plénière renvoya l'affaire devant la cinquième chambre du Conseil d'Etat (arrêt no 530/2003). L'audience eut lieu le 1er octobre 2003.

14.  Le 15 décembre 2004, la cinquième chambre du Conseil d'Etat rejeta le recours en annulation formé par le requérant contre la décision no A1/Φ5/16051/808 du ministre de la Culture. Se référant à la richesse archéologique de la zone autour de l'ancienne acropole de Sparte, ainsi qu'aux vestiges datant des 2ème et 3ème siècles après J.C. qui se trouvaient sur le terrain litigieux, le Conseil d'Etat considéra notamment que la décision attaquée était prise conformément à la décision no A1/Φ5/37652/2107, laquelle devait être appliquée même si elle introduisait une réglementation plus sévère que celle en vigueur à l'époque de la demande de permis de construire formulée par le requérant. Selon la haute juridiction, cette solution ne portait pas atteinte au droit du requérant à un procès équitable, car rien n'empêche le pouvoir législatif d'adopter de nouvelles dispositions qui réglementent pour l'avenir le sort des affaires déjà pendantes devant l'administration ; elle estima en outre que l'argument du requérant, selon lequel la décision no A1/Φ5/37652/2107 avait été prise pour influencer l'issue du procès à l'époque pendant devant le Conseil d'Etat, n'était aucunement étayé. La haute juridiction jugea enfin que les moyens tirés de la légalité de l'avis du conseil central d'archéologies étaient inopérants, car, de toute façon, l'administration était tenue de lui refuser le permis de construire (arrêt no 3627/2004). Cet arrêt fut mis au net et certifié conforme le 3 mars 2005. Le Conseil d'Etat ne notifie pas ses arrêts. Le requérant en obtint copie le 9 juin 2005.

EN DROIT

I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION AU REGARD DE LA DURÉE DE LA PROCÉDURE

15.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l'article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

16.  Le Gouvernement s'oppose à cette thèse. Il argue que l'affaire était complexe et que le requérant n'a pas cherché à accélérer la procédure. Il souligne qu'on ne saurait exiger de la haute juridiction administrative d'avoir le même rythme que les juridictions inférieures dans le traitement des affaires.

17.  Selon le requérant, la procédure débuta le 12 mai 1992, avec le dépôt de sa demande tendant à obtenir un permis de construire et se termina le 9 juin 2005, avec la notification de l'arrêt no 3627/2004 du Conseil d'Etat. Il affirme que cette durée est excessive et aucunement justifiée.

A.  Sur la recevabilité

18.  La Cour constate que ce grief n'est pas manifestement mal fondé au sens de l'article 35 § 3 de la Convention. Elle relève en outre qu'il ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B.  Sur le fond

1.  Période à prendre en considération

19.  La procédure litigieuse a débuté le 19 avril 1995, avec la saisine du Conseil d'Etat et a pris fin le 15 décembre 2004, avec l'arrêt no 3627/2004 de la cinquième chambre de cette juridiction. La période à considérer devant la haute juridiction saisie s'étale donc au total sur plus de huit ans et six mois pour une instance.

2.  Caractère raisonnable de la durée de la procédure

20.  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l'affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l'enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d'autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).

21.  La Cour a traité à maintes reprises d'affaires soulevant des questions semblables à celle du cas d'espèce et a constaté la violation de l'article 6 § 1 de la Convention (voir Frydlender précité).

22.  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n'a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. En particulier, la Cour relève qu'au sein de la juridiction saisie, l'affaire a donné lieu à quatre arrêts, trois de la cinquième chambre et un de la formation plénière, examinant notamment au fond différents aspects du recours et admet que, de ce fait, une certaine complexité en découle. Toutefois, elle estime que cela ne suffit pas pour justifier la durée globale que connut la procédure.

23.  La Cour réaffirme qu'il incombe aux Etats contractants d'organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent garantir à chacun le droit d'obtenir une décision définitive sur les contestations relatives à ses droits et obligations de caractère civil dans un délai raisonnable (voir Comingersoll S.A. c. Portugal [GC], no 35382/97, § 24, CEDH 2000-IV). Dès lors, compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu'en l'espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l'exigence du « délai raisonnable ».

Partant, il y a eu violation de l'article 6 § 1.

II.  SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES

A.  Sur les griefs tirés de l'équité de la procédure

24.  Le requérant se plaint de plusieurs violations de son droit à un procès équitable, garanti par l'article 6 § 1 de la Convention. Tout d'abord, il affirme qu'en adoptant la décision ministérielle no A1/Φ5/37652/2107, alors que son premier recours en annulation était pendant devant le Conseil d'Etat, le pouvoir exécutif s'est immiscé dans le fonctionnement du pouvoir judicaire, en portant ainsi atteinte au principe de l'égalité des armes. En outre, il se plaint qu'en rendant un second avis défavorable sur la construction qu'il envisageait sur son terrain, l'administration ne s'est pas conformée à l'arrêt no 1432/1998 du Conseil d'Etat. Par ailleurs, le requérant se plaint que, lors de l'examen de son second pourvoi devant lui, le Conseil d'Etat a jugé que certains de ses moyens étaient inopérants. Dans les situations susmentionnées, le requérant voit également une violation de l'article 13 de la Convention, dans la mesure où il estime ne pas avoir eu droit à un recours effectif, ainsi qu'une violation de l'article 14 de la Convention, sans autre précision.

Sur la recevabilité

25.  Dans la mesure où ils sont tirés de son premier recours en annulation, la Cour estime que les griefs du requérant sont manifestement mal fondés : le requérant se plaint du refus de l'administration de se conformer à l'arrêt no 1432/1998 du Conseil d'Etat, alors que cet arrêt a simplement annulé la décision attaquée pour vice de forme sans se prononcer sur un éventuel droit du requérant d'obtenir le permis de construire ; par ailleurs, le requérant se plaint que l'adoption, lors de la litispendance, d'une décision ministérielle imposant une protection absolue de la zone dans laquelle se situait son terrain constitue une immixtion du pouvoir exécutif dans l'administration de la justice, alors que la procédure qui était pendante se solda, la Cour le répète, par l'annulation de la décision attaquée pour vice de forme. Autrement dit, la décision ministérielle incriminée n'a eu aucune influence sur l'issue du procès qui, par ailleurs, se termina de façon favorable pour le requérant.

26.  Dans la mesure où les griefs du requérant tirés de l'article 6 § 1 de la Convention visent son second recours en annulation, la Cour rappelle qu'aux termes de l'article 19 de la Convention, elle a pour tâche d'assurer le respect des engagements résultant de la Convention pour les Parties contractantes. En particulier, il ne lui appartient pas de connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention (voir, notamment, García Ruiz c. Espagne [GC], no 30544/96, § 28, CEDH 1999-I). De plus, il incombe au premier chef aux autorités nationales, et singulièrement aux cours et tribunaux, d'interpréter et d'appliquer le droit interne (voir, parmi beaucoup d'autres, Streletz, Kessler et Krenz c. Allemagne [GC], nos 34044/96, 35532/97 et 44801/98, § 49, CEDH 2001-II).

27.  Or, en l'espèce, la Cour ne décèle aucun indice d'arbitraire dans le déroulement de la procédure devant la haute juridiction, qui a respecté le principe du contradictoire et au cours de laquelle le requérant avait la possibilité de présenter tous les arguments pour la défense de ses intérêts. Quant aux griefs tirés des articles 13 et 14 de la Convention, combinés avec l'article 6 § 1, la Cour note qu'ils sont peu développés par le requérant dans sa requête et qu'ils ne soulèvent aucun problème particulier. En conclusion, la Cour estime que, considérée dans son ensemble, la procédure litigieuse a revêtu un caractère équitable, au sens de l'article 6 § 1 de la Convention.

28.  Il s'ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l'article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

B.  Sur les griefs tirés du droit du requérant au respect de ses biens

29.  Le requérant se plaint d'une atteinte à son droit au respect de ses biens, garanti par l'article 1 du Protocole no 1. Il affirme qu'en lui interdisant désormais de construire sur son terrain, les autorités étatiques le privent de la jouissance de son bien, qu'il ne peut plus exploiter à sa guise, sans pour autant lui accorder une indemnité pour l'ingérence subie. Or, selon lui, cette ingérence est d'autant plus injustifiée qu'elle ne poursuit aucun but d'utilité publique. Il y voit également une discrimination contraire à l'article 14 de la Convention, dans la mesure où il considère que la « zone A – de protection absolue » touche exclusivement sa propriété et ne comprend pas les autres terrains voisins.

Sur la recevabilité

30.  La Cour relève que la mesure litigieuse signifie que le requérant n'a pas le droit de construire sur son terrain. A n'en pas douter, cette limitation apportée à la libre disposition du droit d'usage constitue une ingérence dans la jouissance des droits que le requérant tire de sa qualité de propriétaire. Dès lors, le grief doit être examiné sous l'angle du second alinéa de cette disposition.

31.  La Cour constate en premier lieu que l'ingérence litigieuse répond à la condition de légalité, car elle trouve sa source dans l'article 24 de la Constitution relatif à la protection de l'environnement. Par ailleurs, le but de la limitation incriminée, à savoir la protection de l'environnement naturel et culturel, entre dans le cadre de l'intérêt général au sens du second alinéa de l'article 1 du Protocole additionnel. Quant à l'exigence de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé, la Cour rappelle que, s'agissant de domaines tels que celui de l'environnement, elle respecte l'appréciation portée à cet égard par les autorités nationales, sauf si elle est manifestement dépourvue de base raisonnable (voir, mutatis mutandis, Immobiliare Saffi c. Italie [GC], no 22774/93, § 49, CEDH 1999–V). Or, dans le cas d'espèce, la mesure litigieuse a été validée par le Conseil d'Etat suite à un examen approfondi de tous les aspects du problème. Il n'y a aucun indice dans le dossier donnant à penser qu'il s'agit d'une mesure disproportionnée par rapport au but légitime visé (voir, mutatis mutandis, Koustelidou et autres c. Grèce (déc.), no 35044/02, 20 novembre 2003).

32.  Enfin, la Cour estime que le grief tiré d'une prétendue violation de l'article 14 de la Convention, combiné avec l'article 1 du Protocole no 1, n'est pas suffisamment étayé.

33.  Il s'ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l'article 35 §§ 1, 3 et 4 de la Convention.

III.  SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

34.  Aux termes de l'article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A.  Dommage

35.  Le requérant réclame 30 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu'il aurait subi.

36.  Le Gouvernement affirme qu'un constat de violation constituerait en soi une satisfaction équitable suffisante au titre du dommage moral prétendument subi par le requérant. A titre alternatif, il affirme que la somme allouée à ce titre ne saurait dépasser les montants habituellement accordés par la Cour dans des affaires similaires.

37.  La Cour estime que le requérant a subi un tort moral certain. Statuant en équité, comme le veut l'article 41 de la Convention, elle lui accorde 10 000 EUR à ce titre, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt.

B.  Frais et dépens

38.  Le requérant demande également 12 000 EUR pour les frais et dépens encourus devant le Conseil d'Etat et 15 000 EUR pour ceux encourus devant la Cour. A cet égard il produit une facture de 1 500 EUR payés à son avocat pour la procédure devant la formation plénière de la haute juridiction, ainsi que deux factures de 10 000 EUR et 5 000 EUR respectivement établies au nom des avocats qui l'ont représenté devant la Cour.

39.  Le Gouvernement affirme qu'il n'existe pas de lien de causalité entre les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et la violation alléguée de la Convention. En ce qui concerne les frais exposés devant la Cour, le Gouvernement affirme qu'ils sont excessifs et que la somme allouée à ce titre ne saurait dépasser les montants habituellement accordés par la Cour dans des affaires similaires.

40.  La Cour rappelle que l'allocation de frais et dépens au titre de l'article 41 présuppose que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et, de plus, le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce [GC], no 31107/96, § 54, CEDH 2000-XI).

41.  S'agissant des frais et dépens encourus en Grèce, la Cour a déjà jugé que la longueur d'une procédure pouvait entraîner une augmentation des frais et dépens du requérant devant les juridictions internes et qu'il convient donc d'en tenir compte (voir, entre autres, Capuano c. Italie, arrêt du 25 juin 1987, série A no 119-A, p. 15, § 37). La Cour note, cependant, que les frais réclamés en l'occurrence n'ont pas été engendrés par la durée de la procédure, mais sont des frais normalement encourus dans le cadre de la procédure litigieuse. Par ailleurs, en ce qui concerne les frais exposés pour les besoins de la représentation du requérant devant elle, la Cour juge raisonnable de lui allouer 2 000 EUR à ce titre, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt.

C.  Intérêts moratoires

42.  La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

1.  Déclare, à la majorité, la requête recevable quant au grief tiré de la durée excessive de la procédure et irrecevable pour le surplus ;

2.  Dit, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention ;

3.  Dit, à l'unanimité,

a)  que l'Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, 10 000 EUR (dix mille euros) pour dommage moral et 2 000 EUR (deux mille euros) pour frais et dépens, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt ;

b)  qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4.  Rejette, à l'unanimité, la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 11 octobre 2007 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

André WampachLoukis Loucaides
Greffier adjointPrésident

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