CEDH, Note d’information sur l'affaire 58188/00, 27 août 2002, 58188/00

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Sur la décision

Référence :
CEDH, 27 août 2002, n° 58188/00
Numéro(s) : 58188/00
Type de document : Note d'information
Niveau d’importance : Publiée au Recueil
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Irrecevable
Identifiant HUDOC : 002-5181
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Texte intégral

Note d’information sur la jurisprudence de la Cour 45

Août-Septembre 2002

Didier c. France (déc.) - 58188/00

Décision 27.8.2002 [Section II]

Article 6

Procédure pénale

Article 6-1

Tribunal impartial

Participation du juge rapporteur chargé de l’instruction de l’affaire au délibéré du jugement: irrecevable

Tribunal établi par la loi

Allégation selon laquelle le Conseil des marchés financiers ne constituerait pas un tribunal: irrecevable

Article 2 du Protocole n° 7

Réexamen de la condamnation

Allégation selon laquelle le Conseil des marchés financiers et le Conseil d’Etat n’offrirait pas un double degré de juridiction dans le cadre de procédures disciplinaires: irrecevable

La Commission des opérations en bourse (COB) saisit le Conseil des marchés financiers (CMF) en vue de l’ouverture d’une procédure disciplinaire à l’encontre du requérant. Le CMF, statuant en formation disciplinaire, décida de lui retirer sa carte professionnelle pour une durée de six mois et prononça à son encontre une sanction pécuniaire de 5 000 000 francs. Le requérant forma un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’Etat en demandant, d’une part, l’annulation de la décision litigieuse et, d’autre part, le sursis à son exécution. Le Conseil d’Etat rejeta le recours du requérant. Le Conseil d’Etat nota que bien que le CMF siégeant en formation disciplinaire ne fût pas une juridiction au regard du droit interne, une atteinte au principe d’impartialité découlant de l’article 6 § 1 pouvait être invoqué devant le Conseil d’Etat à l’appui d’un recours contre une décision du CMF. Le requérant se plaignait devant la Cour notamment d’une atteinte à la présomption de son innocence du fait de l’absence d’effet suspensif du recours en appel devant le Conseil d’Etat. Il soutenait également que la non-communication des conclusions du commissaire du gouvernement du Conseil d’Etat avait enfreint son droit à un procès équitable. Il estimait, par ailleurs, que la participation du rapporteur du CMF au délibéré après qu’il eut instruit le dossier avait porté atteinte au principe de tribunal impartial. Il estimait enfin que le CMF ne constituait pas un « tribunal » au sens de l’article 6 § 1 et que, dès lors, il n’avait pu bénéficier d’un double degré de juridiction au sens de l’article 2 du Protocole No 7.

Irrecevable sous l’angle de l’article 6 § 2: Quant l’atteinte alléguée par le requérant au principe de présomption d’innocence du fait de l’absence d’effet suspensif du recours en appel devant le Conseil d’Etat, ce grief appelait un contrôle par la Cour du bien-fondé du refus du sursis à exécution opposé au requérant. Or, le sursis à exécution n’est jamais de droit et il échappe à la compétence ratione materiae de la Cour: incompatible ratione materiae.

Irrecevable sous l’angle de l’article 6 § 1: a)  S’agissant de la non-communication des conclusions du commissaire du gouvernement, la procédure devant le Conseil d’Etat offre suffisamment de garanties au justiciable et aucun problème ne se posait quant au droit à un procès équitable pour ce qui est du respect du débat contradictoire (Kress c. France, arrêt du 7 juin 2001): manifestement mal fondée.

b) Quant à la participation du rapporteur chargé de l’instruction de l’affaire au délibéré du jugement, il devait être établi en premier lieu si au cours de l’instruction puis du délibéré, compte tenu de la nature et de l’étendue des fonctions de rapporteur, ce dernier avait fait preuve, au regard de sa connaissance approfondie du dossier, de parti pris quant à la décision à rendre par le CMF. Dès lors qu’un juge ne dresse pas d’acte d’accusation, sa connaissance approfondie du dossier ne permet pas de mettre en doute son impartialité pour trancher au fond. Or, dans le système dont il est ici question, le rapporteur, qui est désigné après la saisine du CMF par le président de la COB, ne peut être à l’origine de cette saisine. En outre, il ne participe pas à la formulation des griefs, n’a pas le pouvoir de classer l’affaire ou, au contraire, d’élargir le cadre de la saisine. Son travail consiste à « consigner le résultat de ces opérations par écrit ». Dès lors, si le rapporteur a traité des mêmes questions que celles sur lesquelles il a statué par la suite au sein du CMF, il l’a fait sans dresser d’acte d’accusation et son intervention s’est limitée à la vérification de la véracité des faits pour ensuite consigner le résultat de ces opérations par écrit. Ainsi, même si le rapporteur participe au délibéré, le fait qu’il ait acquis une connaissance précise de l’affaire pour en avoir mener l’instruction ne contrevient pas au principe d’impartialité. S’agissant de définir si l’appréciation préliminaire du rapporteur pouvait passer comme préjugeant l’appréciation finale, cette dernière appréciation s’appuie sur un dossier tenu à la disposition de la personne mise en cause. Ce dossier fait l’objet d’une présentation par le rapporteur lors d’une séance précédant les débats. La personne mise en cause et, le cas échéant, son conseil doivent pouvoir prendre la parole en dernier. L’appréciation finale, résultant du délibéré, intervient avec le jugement et s’appuie sur des éléments débattus à l’audience. En conclusion, aucun motif objectif ne permettait de penser que la nature et l’étendue des tâches du rapporteur durant la phase d’instruction aient porté atteinte à son impartialité objective lors du délibéré: manifestement mal fondée.

Irrecevable sous l’angle des articles 6 § 1 et 2 du Protocole No 7:  L’article 8 du décret no 96-872 du 3 octobre 1996 relatif aux formations disciplinaires du CMF prévoit un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’Etat. En conséquence, pas plus l’article 2 du Protocole No 7 que l’article 6 § 1 n’ont été violés. En effet, quelle que soit la qualification donnée en droit interne, le CMF peut être considéré comme un « tribunal » au sens autonome de l’article 6. Or, un « tribunal » au sens de cet article l’est aussi au sens de l’article 2 du Protocole No 7. Le contrôle exercé par le Conseil d’Etat sur les décisions du CMF est un contrôle de pleine juridiction, si bien qu’en se livrant à ce contrôle le Conseil d’Etat est lui aussi un « organe judiciaire de pleine juridiction », c’est-à-dire un « tribunal ». Dès lors, le requérant a eu droit à un double degré de juridiction en matière pénale: manifestement mal fondée.

© Conseil de l’Europe/Cour européenne des droits de l’homme
Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

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Textes cités dans la décision

  1. Décret n°96-872 du 3 octobre 1996
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CEDH, Note d’information sur l'affaire 58188/00, 27 août 2002, 58188/00