CJCE, n° C-266/99, Arrêt de la Cour, Commission des Communautés européennes contre République française, 8 mars 2001

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Chronologie de l’affaire

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www.jmseevagenavocat.com · 5 mai 2023

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 8 mars 2001, Commission / France, C-266/99
Numéro(s) : C-266/99
Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 8 mars 2001. # Commission des Communautés européennes contre République française. # Manquement d'Etat - Qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire - Directive 75/440/CEE - Conditions de la production d'eau de consommation humaine en Bretagne. # Affaire C-266/99.
Date de dépôt : 16 juillet 1999
Précédents jurisprudentiels : arrêt du 7 décembre 2000, Commission/Royaume-Uni, C-69/99
Commission/Allemagne, C-58/89
Commission/Belgique, C-207/97
Commission/Espagne, C-298/97
Solution : Recours en constatation de manquement : obtention
Identifiant CELEX : 61999CJ0266
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2001:142
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

|

61999J0266

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 8 mars 2001. – Commission des Communautés européennes contre République française. – Manquement d’Etat – Qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire – Directive 75/440/CEE – Conditions de la production d’eau de consommation humaine en Bretagne. – Affaire C-266/99.


Recueil de jurisprudence 2001 page I-01981


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


1. Rapprochement des législations – Qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire – Directive 75/440 – Exécution par les États membres – Obligation de parvenir à des réductions effectives des teneurs en produits nocifs, y compris en nitrates, afin d’améliorer la qualité des eaux – Portée

(Directive du Conseil 75/440, art. 4, § 1 et 2)

2. Rapprochement des législations – Qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire – Directive 75/440 – Exécution par les États membres – Établissement d’un plan d’action pour l’assainissement des eaux – «Plan d’action organique» – Notion

(Directive du Conseil 75/440, art. 4, § 2)

Sommaire


1. Les États membres sont tenus, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 75/440, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres, de parvenir à des réductions effectives des teneurs en produits nocifs, y compris en nitrates, afin d’améliorer la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire. Les États membres doivent consacrer à cette fin les moyens appropriés.

S’il est vrai que l’article 4, paragraphe 2, de la directive ne contient aucune prescription qualitative ou quantitative expresse pour ce qui est desdites améliorations, il est cependant clair que cette disposition impose aux États membres de parvenir, dans le délai de dix ans qu’elle prévoit, à des valeurs quantitatives inférieures aux valeurs limites qu’ils sont tenus d’atteindre à l’expiration du délai de transposition de deux ans prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive.

Les États membres sont donc dans l’obligation, pendant la période de dix ans prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, de parvenir à des teneurs en nitrates se situant, en tout état de cause, au-dessous de la valeur limite de 50 mg/l.

( voir points 25-27 )

2. Si plusieurs plans d’assainissement limités au plan régional peuvent en principe constituer un «plan» au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 75/440, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres, la somme des pièces présentées par un État membre doit en toute hypothèse faire apparaître un plan d’ensemble reflétant une approche globale et cohérente.

Tel n’est pas le cas lorsque les mesures communiquées par un État membre à la Commission ont un domaine d’application restreint, d’un point de vue matériel ou géographique, ou se présentent comme une opération simplement ponctuelle. De telles mesures, en effet, manquent de la cohérence nécessaire pour constituer un plan d’action organique au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

( voir points 29, 31, 40 )

Parties


Dans l’affaire C-266/99,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. M. Nolin, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République française, représentée par Mme K. Rispal-Bellanger et M. D. Colas, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet de faire constater que, en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour que la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire soit conforme aux valeurs fixées en vertu de l’article 3 de la directive 75/440/CEE du Conseil, du 16 juin 1975, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres (JO L 194, p. 26), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive, et en particulier de son article 4,

LA COUR (sixième chambre),

composée de MM. C. Gulmann, président de chambre, V. Skouris, J.-P. Puissochet, R. Schintgen et Mme F. Macken (rapporteur), juges,

avocat général: Mme C. Stix-Hackl,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l’audience du 26 octobre 2000,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 décembre 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 16 juillet 1999, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l’article 226 CE, un recours visant à faire constater que, en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour que la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire soit conforme aux valeurs fixées en vertu de l’article 3 de la directive 75/440/CEE du Conseil, du 16 juin 1975, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres (JO L 194, p. 26, ci-après la «directive»), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive, et en particulier de son article 4.

2 Selon son article 1er, la directive a pour objet de fixer les exigences auxquelles doit satisfaire la qualité des eaux douces superficielles utilisées ou destinées à être utilisées pour la production d’eau alimentaire, après application des traitements appropriés.

3 L’article 2 de la directive subdivise les eaux superficielles en trois groupes de valeurs limites, dits «A1», «A2» et «A3», qui correspondent à différents traitements types permettant la transformation des eaux superficielles en eaux alimentaires adaptées à la consommation humaine. Les caractéristiques de ces traitements types sont définies à l’annexe I de la directive.

4 L’article 3, paragraphes 1 et 2, de la directive énonce ce qui suit:

«1. Les États membres fixent pour tous les points de prélèvement, ou pour chaque point de prélèvement, les valeurs applicables aux eaux superficielles en ce qui concerne les paramètres indiqués à l’annexe II.

[…]

2. Les valeurs fixées en vertu du paragraphe 1 ne peuvent pas être moins sévères que celles indiquées dans les colonnes I de l’annexe II.»

5 Pour le paramètre des nitrates, la valeur limite maximale impérative prévue à la colonne I de l’annexe II de la directive est de 50 mg/l, et ceci pour chacune des trois catégories A1, A2 et A3.

6 Selon l’article 3, paragraphe 3, de la directive et son annexe II, les États membres s’efforcent de respecter la valeur guide de 25 mg/l pour la teneur en nitrates.

7 Aux termes de l’article 4 de la directive:

«1. Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que les eaux superficielles soient conformes aux valeurs fixées en vertu de l’article 3. Ce faisant, chaque État membre applique également la présente directive aux eaux nationales et à celles qui franchissent les frontières.

2. Dans le cadre des objectifs de la présente directive, les États membres prennent les dispositions nécessaires pour assurer une amélioration continue de l’environnement. À cette fin, ils définissent un plan d’action organique comprenant un calendrier pour l’assainissement des eaux superficielles, notamment de celles de la catégorie A3. Des améliorations substantielles doivent être réalisées à cet égard au cours des dix prochaines années dans le cadre des programmes nationaux.

Pour la fixation du calendrier visé au premier alinéa, il sera tenu compte, d’une part, de la nécessité d’améliorer la qualité de l’environnement, et notamment des eaux, et, d’autre part, des contraintes d’ordre économique et technique qui existent ou qui peuvent intervenir dans les différentes régions de la Communauté.

La Commission procédera à un examen approfondi des plans d’action visés au premier alinéa, y compris les calendriers, et, le cas échéant, elle présentera au Conseil, à leur sujet, des propositions appropriées.

3. Les eaux superficielles qui ont des caractéristiques physiques, chimiques et microbiologiques inférieures aux valeurs limites impératives correspondant au traitement type A3 ne peuvent être utilisées pour la production d’eau alimentaire. Toutefois, une eau d’une telle qualité inférieure peut être exceptionnellement utilisée s’il est employé un traitement approprié – y compris le mélange – permettant de ramener toutes les caractéristiques de qualité de l’eau à un niveau conforme aux normes de qualité de l’eau alimentaire. Les justifications d’une telle exception, fondée sur un plan de gestion des ressources en eau à l’intérieur de la zone intéressée, doivent être notifiées dans les délais les plus brefs à la Commission en ce qui concerne les installations existantes et au préalable en cas de nouvelles installations. La Commission procédera à un examen approfondi de ces justifications et, le cas échéant, elle présentera au Conseil, à leur sujet, des propositions appropriées.»

8 L’article 10 de la directive prévoit que les États membres mettent en vigueur, dans un délai de deux ans à compter de sa notification, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour s’y conformer. La notification de la directive à la République française a eu lieu le 18 juin 1975.

La procédure précontentieuse

9 À la suite de plusieurs plaintes concernant la teneur en nitrates des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire en Bretagne, la Commission a adressé au gouvernement français, le 1er avril 1992, une demande d’information, à laquelle celui-ci a répondu le 11 mai 1993.

10 Considérant que cette réponse n’était pas satisfaisante, la Commission a envoyé, le 30 novembre 1993, une lettre de mise en demeure à la République française. La Commission y indiquait qu’elle considérait que la République française avait manqué aux obligations découlant de la directive, et plus particulièrement de son article 4.

11 Par lettres des 1er février 1994, 28 novembre 1994 et 1er mars 1995, les autorités françaises ont répondu à la lettre de mise en demeure de la Commission.

12 Le 28 octobre 1997, la Commission a adressé à la République française un avis motivé dont les griefs reprenaient ceux avancés dans la lettre de mise en demeure. Le délai pour se conformer à la directive a été fixé par la Commission à deux mois à compter de la notification de l’avis motivé.

13 Les autorités françaises ont répondu par lettres des 2 janvier et 18 juin 1998 à l’avis motivé.

14 N’étant pas convaincue par cette réponse, la Commission a formé le présent recours.

Sur le fond

15 La Commission soulève trois griefs à l’encontre de la République française.

16 Par son premier grief, la Commission soutient que, en permettant le dépassement des valeurs limites en nitrates dans l’eau utilisée pour la production d’eau de consommation humaine en Bretagne, la République française a violé l’article 4, paragraphe 1, de la directive.

17 En vertu de l’article 4, paragraphe 1, de la directive, lu conjointement avec son article 3 et son annexe II, les États membres sont tenus, à l’expiration du délai de transposition, de garantir pour l’ensemble des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire des teneurs en nitrates inférieures à la valeur de 50 mg/l.

18 Il ressort des pièces de procédure que, au terme du délai fixé dans l’avis motivé, la teneur en nitrates des eaux de certains bassins de Bretagne n’était pas conforme aux exigences de la directive, ainsi que l’a reconnu la République française elle-même.

19 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer comme fondé le premier grief de la Commission.

20 Par son deuxième grief, la Commission reproche à la République française une violation de l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

21 D’une part, la Commission fait aux autorités françaises le reproche que leur plan d’action organique, prévu à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, ne répond pas en pratique à l’objectif d’une amélioration de l’environnement. Elle fait valoir que cette disposition impose notamment aux États membres une obligation de résultat, à savoir parvenir à une amélioration continue de l’environnement. La Commission estime que les mesures adoptées à cette fin par les autorités françaises concernant la Bretagne n’ont été prises que tardivement et elle conteste l’effectivité desdites mesures. Elle soutient que ces mesures sont à la fois trop générales et trop ponctuelles pour qu’un effet sur la pollution des eaux puisse en être attendu.

22 D’autre part, la Commission n’accepte pas l’affirmation du gouvernement français selon laquelle les mesures prises par celui-ci satisfont en tout état de cause à l’obligation de moyen visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive. Elle fait valoir que ces mesures ne sont pas encore en vigueur en Bretagne ou sont applicables uniquement dans une partie de cette région. Les mesures qui ont été prises ne constitueraient pas, dès lors, l’approche globale et cohérente, ayant le caractère d’une planification concrète de la réduction de la pollution, qui serait exigée par l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

23 Le gouvernement français considère, en ce qui concerne le prétendu manquement à une obligation de résultat, que les obligations d’amélioration continue et substantielle de l’environnement prévues à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, ainsi que la valeur guide de 25 mg/l visée à l’article 3, paragraphe 3, et à l’annexe II de la directive, ne sont pas suffisamment absolues pour constituer des obligations de résultat. Il soutient que le deuxième grief de la Commission, en tant qu’il implique que les plans d’action organique doivent atteindre un résultat, n’a pas un contenu autonome par rapport au premier grief, qui portait sur l’article 4, paragraphe 1, de la directive. À cet égard, le gouvernement français reconnaît que la situation constatée par certains prélèvements en Bretagne n’est pas conforme à la directive.

24 En ce qui concerne le prétendu manquement à l’obligation de moyen prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, le gouvernement français fait valoir que les mesures visant l’amélioration de la qualité des eaux en Bretagne, qu’il a prises et communiquées à la Commission, constituent «un plan d’action organique comprenant un calendrier» au sens de cette disposition.

25 En ce qui concerne la première branche du deuxième grief, il y a lieu de souligner que les États membres sont tenus, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de la directive, de parvenir à des réductions effectives des teneurs en produits nocifs, y compris en nitrates, afin d’améliorer la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire. Les États membres doivent consacrer à cette fin les moyens appropriés.

26 S’il est vrai que l’article 4, paragraphe 2, de la directive ne contient aucune prescription qualitative ou quantitative expresse pour ce qui est desdites améliorations, il est cependant clair que cette disposition impose aux États membres de parvenir, dans le délai de dix ans qu’elle prévoit, à des valeurs quantitatives inférieures aux valeurs limites qu’ils sont tenus d’atteindre à l’expiration du délai de transposition de deux ans prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive.

27 Les États membres sont donc dans l’obligation, pendant la période de dix ans prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, de parvenir à des teneurs en nitrates se situant, en tout état de cause, au-dessous de la valeur limite de 50 mg/l.

28 Ainsi qu’il ressort du point 18 du présent arrêt, au terme du délai fixé dans l’avis motivé, la teneur en nitrates des eaux de certains bassins de Bretagne n’était pas conforme aux exigences de la directive. La République française a donc également contrevenu à l’article 4, paragraphe 2, de la directive en ce qui concerne les zones de Bretagne qui ont fait l’objet des investigations de la Commission et dans lesquelles la valeur limite de 50 mg/l pour les nitrates n’a pas été respectée.

29 Pour ce qui est de la seconde branche du deuxième grief de la Commission, il convient de rappeler que, si plusieurs plans d’assainissement limités au plan régional peuvent en principe constituer un «plan» au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive, la somme des pièces présentées par un État membre doit en toute hypothèse faire apparaître un plan d’ensemble reflétant une approche globale et cohérente (voir, en ce sens, arrêts du 17 octobre 1991, Commission/Allemagne, C-58/89, Rec. p. I-4983, point 25, et du 21 janvier 1999, Commission/Belgique, C-207/97, Rec. p. I-275, point 40).

30 Il y a lieu également de souligner que, en revanche, des actions matérielles partielles ou des réglementations fragmentaires ne peuvent satisfaire à l’obligation incombant à un État membre d’établir un programme global en vue d’atteindre certains objectifs (voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 1998, Commission/Espagne, C-298/97, Rec. p. I-3301, point 16).

31 Or, il y a lieu de constater que les mesures communiquées par le gouvernement français à la Commission ont un domaine d’application restreint, d’un point de vue matériel ou géographique, ou se présentent comme une opération simplement ponctuelle.

32 En effet, le programme «Bretagne Eau Pure» (BEP) I concernait l’amélioration de la qualité des eaux du littoral et non celle de la qualité des eaux superficielles visée à l’article 1er, paragraphe 1, de la directive, de sorte que ce programme ne saurait constituer un «plan» au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

33 Quant au programme national de maîtrise des pollutions d’origine agricole, qui a été négocié entre les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement et les organismes de représentation agricole, est entré en vigueur en 1994 et couvre en principe tout le territoire métropolitain, il y a lieu de constater qu’il ne s’étend qu’aux entreprises agricoles dépassant une certaine taille et ne concerne qu’une partie relativement faible des exploitations agricoles bretonnes.

34 Compte tenu d’une telle limitation, ce programme ne saurait être considéré comme remplissant l’obligation de moyen prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

35 Les programmes de résorption pour les zones d’excédent structurel (ci-après les «ZES») et le programme «Bretagne Eau Pure» (BEP) II ne concernent que des secteurs géographiques particulièrement pollués de Bretagne, et non toutes les eaux superficielles présentant des taux préoccupants de nitrates. En effet, le concept des ZES a pour objectif de résorber l’azote excédentaire dans les cantons de France les plus touchés. Pour sa part, le programme BEP II ne s’applique que de façon limitée sur le territoire breton, étant donné qu’il ne couvre que les 20 bassins versants les plus problématiques.

36 Dans ces conditions, ces mesures ne sauraient être considérées comme constituant un «plan» au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

37 Enfin, pour ce qui est des schémas d’aménagement et de gestion des eaux (ci-après les «SAGE») à élaborer dans le cadre du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux de Bretagne pour différents bassins versants, le gouvernement français a reconnu lui-même que, au terme du délai fixé dans l’avis motivé, aucun SAGE n’était encore opérationnel.

38 Or, il résulte d’une jurisprudence constante que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé. Les changements intervenus par la suite ne sauraient donc être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêt du 7 décembre 2000, Commission/Royaume-Uni, C-69/99, non encore publié au Recueil, point 22).

39 Il s’ensuit que les SAGE ne peuvent être pris en considération dans la présente affaire.

40 Il résulte des points 31 à 39 du présent arrêt que les mesures sur lesquelles s’appuie le gouvernement français manquent de la cohérence nécessaire pour constituer un plan d’action organique au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

41 Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de constater que le deuxième grief de la Commission est fondé.

42 Par son troisième grief, la Commission reproche à la République française d’avoir utilisé pour la production d’eau de consommation humaine en Bretagne des eaux superficielles de qualité insuffisante, sans notifier à la Commission ni la justification de cette utilisation ni un plan de gestion des ressources en eau, en dépit de l’obligation prévue à l’article 4, paragraphe 3, de la directive.

43 Le gouvernement français ne conteste pas avoir, tout au moins partiellement, utilisé aux fins de la production d’eau alimentaire en Bretagne des eaux superficielles dont la teneur en nitrates excédait la valeur maximale prescrite par la directive. En revanche, il conteste l’affirmation de la Commission selon laquelle il ne lui a pas notifié un plan de gestion des ressources en eau, au sens de l’article 4, paragraphe 3, de la directive.

44 Force est de constater que ce n’est que par une lettre du 18 juin 1998, donc après l’expiration du délai prévu à l’avis motivé, que les autorités françaises ont présenté à la Commission un synopsis de toutes les eaux superficielles de Bretagne chargées en nitrates, assorti d’indications exhaustives sur le mélange de ces eaux avec des eaux superficielles non chargées en produits nocifs, afin de lui permettre de superviser l’utilisation faite des eaux superficielles, comme l’exige l’article 4, paragraphe 3, de la directive.

45 Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le troisième grief de la Commission est fondé.

46 Par conséquent, il y a lieu de constater que, en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour que la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire soit conforme aux valeurs fixées en vertu de l’article 3 de la directive, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de cette directive.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

47 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République française et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

déclare et arrête:

1) En ne prenant pas les dispositions nécessaires pour que la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire soit conforme aux valeurs fixées en vertu de l’article 3 de la directive 75/440/CEE du Conseil, du 16 juin 1975, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de cette directive.

2) La République française est condamnée aux dépens.

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