CJUE, n° C-612/18, Arrêt de la Cour, ClientEarth contre Commission européenne, 19 mars 2020

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 19 mars 2020, C-612/18
Numéro(s) : C-612/18
Arrêt de la Cour (dixième chambre) du 19 mars 2020.#ClientEarth contre Commission européenne.#Pourvoi – Accès aux documents des institutions – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, et paragraphe 6 – Exceptions au droit d’accès – Protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales – Documents établis par le service juridique de la Commission européenne concernant le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États ainsi que le système juridictionnel des investissements dans les accords commerciaux de l’Union européenne – Refus partiel d’accès.#Affaire C-612/18 P.
Date de dépôt : 25 septembre 2018
Précédents jurisprudentiels : 19 mars 2013, In ' t Veld/Commission ( T-301/10, EU:T:2013:135
4 mai 2012, In ' t Veld/Conseil ( T-529/09, EU:T:2012:215
arrêt du 14 octobre 2014, Buono e.a./Commission, C-12/13 P et C-13/13 P, EU:C:2014:2284
arrêt du 6 septembre 2018, République tchèque/Commission, C-4/17 P, EU:C:2018:678
Conseil/Bank Mellat, C-176/13 P, EU:C:2016:96
Conseil/In ' t Veld ( C-350/12 P, EU:C:2014:2039
Tribunal de l' Union européenne du 11 juillet 2018, ClientEarth/Commission ( T-644/16
Tribunal ( voir, en ce sens, arrêts du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C-136/92 P, EU:C:1994:211
Solution : Pourvoi : rejet sur le fond, Recours en annulation
Identifiant CELEX : 62018CJ0612
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2020:223
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

19 mars 2020 (*)

« Pourvoi – Accès aux documents des institutions – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, et paragraphe 6 – Exceptions au droit d’accès – Protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales – Documents établis par le service juridique de la Commission européenne concernant le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États ainsi que le système juridictionnel des investissements dans les accords commerciaux de l’Union européenne – Refus partiel d’accès »

Dans l’affaire C-612/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 septembre 2018,

ClientEarth, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par Mes O. W. Brouwer et E. M. Raedts, advocaten, ainsi que par M. N. Frey, solicitor,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par M. J. Baquero Cruz ainsi que par Mmes F. Clotuche-Duvieusart et C. Ehrbar, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis (rapporteur), président de chambre, MM. E. Juhász et C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, ClientEarth demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 11 juillet 2018, ClientEarth/Commission (T-644/16, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:429), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision C(2016) 4286 final de la Commission, du 1er juillet 2016, refusant l’accès à certains documents relatifs à la compatibilité avec le droit de l’Union du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États et du système juridictionnel des investisseurs présents dans les accords commerciaux de l’Union (ci-après la « décision litigieuse »).

Le cadre juridique

2 L’article 4 du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), dispose :

« 1. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection :

a) de l’intérêt public, en ce qui concerne :

[…]

– les relations internationales,

[…]

6. Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées.

7. Les exceptions visées aux paragraphes 1, 2 et 3 s’appliquent uniquement au cours de la période durant laquelle la protection se justifie eu égard au contenu du document. Les exceptions peuvent s’appliquer pendant une période maximale de trente ans. Dans le cas de documents relevant des exceptions concernant la vie privée ou les intérêts commerciaux et de documents sensibles, les exceptions peuvent, si nécessaire, continuer de s’appliquer au-delà de cette période. »

Les antécédents du litige

3 Les antécédents du litige ont été exposés par le Tribunal, aux points 1 à 11 de l’arrêt attaqué, comme suit :

« 1 Le 19 janvier 2016, la requérante, ClientEarth, a introduit auprès de la Commission européenne une demande d’accès aux documents, en se fondant sur le règlement […] n° 1049/2001[…]

2 Cette demande visait à obtenir l’accès à, premièrement, l’“ensemble des documents contenant des avis juridiques formulés par le service juridique de la Commission sur la compatibilité du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États […] et du système juridictionnel des investissements […] dans les accords commerciaux de l’[Union européenne] avec les traités”, deuxièmement, l’“ensemble des documents, y compris la correspondance électronique, les ordres du jour et les procès-verbaux des réunions, relatifs aux discussions entre le service juridique et la [direction générale (DG) ‘Commerce’ de la Commission] sur la compatibilité du [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et du [système juridictionnel des investissements] avec les traités”, troisièmement, l’“ensemble des documents sur l’appréciation par la [DG ‘Commerce’] de ces avis juridiques formulés par le service juridique de la Commission” et, quatrièmement, “toute autre correspondance et tout autre document et rapport de la Commission relatifs à la compatibilité du [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et du [système juridictionnel des investissements] avec les traités […] autres que ceux accessibles au public”.

3 Le 9 mars 2016, la Commission a informé la requérante que sept documents avaient été identifiés comme relevant du champ d’application de la demande. L’accès à certains de ces documents a été partiellement ou totalement refusé sur le fondement, notamment, de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, relatif à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales, de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du même règlement, relatif à la protection des avis juridiques, et de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement, relatif à la protection du processus décisionnel de la Commission.

4 En particulier, l’accès a été partiellement refusé aux documents suivants :

– la note au dossier du 9 décembre 2014 intitulée “La relation entre les tribunaux internationaux compétents en matière d’investissements et les juridictions nationales, et les exigences en matière d’État de droit pour les tribunaux internationaux compétents en matière d’investissements” [Ares(2014) 4123374] ;

– le document intitulé “Le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et le principe d’autonomie du droit de l’Union à la suite de l’avis 2/13” [Ares(2016)947907] ;

– le document intitulé “Examen et application des peines du [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États]” [Ares(2016)948083] ;

– le document intitulé “La relation entre le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et les systèmes judiciaires nationaux” [Ares(2016)948172] ;

5 L’accès a été totalement refusé à la note de réflexion du 26 janvier 2015 intitulée “Conditions pour la compatibilité d’un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États dans un accord de protection d’investissement conclu entre l’Union et un État tiers” [Ares(2015) 306625].

6 Le 1er avril 2016, la requérante a adressé à la Commission une demande confirmative, en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001.

7 Le 1er juillet 2016, la Commission a adopté la décision [litigieuse], confirmant, entre autres choses, la décision initiale de la Commission pour les documents identifiés dans les points 4 et 5 ci-dessus (ci-après les “documents demandés”).

8 Dans la décision [litigieuse], la Commission a notamment indiqué, eu égard à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales, ce qui suit :

“Les (parties de) documents non divulgué[e]s décrivent et évaluent les options juridiques possibles sur des questions sensibles ouvertes en lien avec le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] (y compris la création d’un [système juridictionnel des investissements]) qui sont toujours en cours de négociation dans le cadre du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement […] et d’autres accords. [Les documents en cause] ont été rédigés par des membres du service juridique en tant que contribution à une discussion en cours au sein de la Commission dans le but d’évaluer les options de ce qui est juridiquement possible en relation avec le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et le [système juridictionnel des investissements] et comment cela pourrait être mis en œuvre”.

9 Ensuite, la Commission a expliqué que la divulgation des documents demandés serait de nature à porter atteinte à l’intérêt public en matière de relations internationales, en ce sens que la divulgation révélerait “les considérations juridiques qui sous-tendent les propositions de négociations de la Commission dans les négociations en cours relatives au partenariat transatlantique de commerce et d’investissement et d’autres accords”. Cela affaiblirait sa position de négociation en donnant à ses “partenaires de négociation […] une vue de l’intérieur sur la stratégie de l’Union et sur sa marge de manœuvre dans la négociation”. Cette divulgation aurait, “de manière réaliste et non hypothétique”, un effet néfaste sur l’efficacité de la Commission dans les négociations.

10 En outre, la Commission a estimé, en s’appuyant sur l’arrêt du 19 mars 2013, In ’t Veld/Commission (T-301/10, EU:T:2013:135), que “la divulgation [des parties des documents demandés] révélerait une appréciation des options juridiques relatives au [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et au [système juridictionnel des investissements] et la manière dont l’[Union] pourrait parvenir à un résultat en ce qui concerne le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et le [système juridictionnel des investissements]” et que leur divulgation révélerait ainsi la marge de négociation de l’Union.

11 Pour finir, la Commission a relevé ce qui suit :

“Les [parties de documents non divulguées] portent sur la question de la relation entre le [mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États] et les juridictions nationales au regard du principe de l’autonomie du droit de l’Union. Ces documents ont été préparés dans le cadre spécifique des négociations en cours sur le [partenariat transatlantique de commerce et d’investissement], mais ils sont également pertinents dans le cadre d’autres négociations en matière commerciale et d’investissements avec les pays tiers. Mettre les passages non divulgués de ces documents à la disposition du public pourrait porter gravement préjudice à la position de négociation de l’Union dans toutes ces négociations en cours, dans la mesure où les réflexions qu’ils contiennent restent valables pour toutes les négociations commerciales et d’investissements en cours avec d’autres pays tiers”. »

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

4 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 septembre 2016, ClientEarth a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

5 À l’appui de son recours devant le Tribunal, la requérante a invoqué cinq moyens. Le premier moyen était tiré d’erreurs de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation, ainsi que d’un défaut de motivation, dans l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, tandis que le cinquième moyen était tiré d’erreurs de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation, ainsi que d’un défaut de motivation, dans l’application de l’article 4, paragraphe 6, de ce règlement.

6 Par ordonnance du 15 novembre 2017, le Tribunal a, sur le fondement de l’article 91, sous c), de son règlement de procédure, ordonné à la Commission de produire une copie intégrale des documents demandés. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti. Conformément à l’article 104 du règlement de procédure du Tribunal, ces documents n’ont pas été communiqués à ClientEarth.

7 Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté les premier et cinquième moyens et, sans examiner les autres moyens, a rejeté le recours et condamné ClientEarth à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission. Pour statuer ainsi, il a considéré, essentiellement, que c’était sans commettre d’erreur de droit que la Commission avait pu considérer, eu égard au contexte et au sujet traité, que la divulgation des documents demandés aurait affaibli sa position dans les négociations en cours, ainsi que sa marge de négociation, et aurait donc porté atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales.

Les conclusions des parties devant la Cour

8 Par son pourvoi, ClientEarth demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué,

– de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et

– de réserver les dépens, ou

– si la Cour statue de manière définitive, de condamner la Commission aux dépens.

9 La Commission demande à la Cour :

– de rejeter le pourvoi comme manifestement non fondé ou, en tout état de cause, comme non fondé et

– de condamner ClientEarth aux dépens.

Sur le pourvoi

10 ClientEarth invoque sept moyens à l’appui de son pourvoi. Le premier moyen, tiré d’erreurs de droit et d’irrégularités de procédure qui entacheraient l’arrêt attaqué en ce qui concerne l’argument avancé par elle, selon lequel la divulgation des documents demandés ne pouvait affaiblir la position de la Commission dans les négociations, s’articule en quatre branches. Le deuxième moyen est tiré de ce que le Tribunal a commis une erreur de droit en écartant l’argument de ClientEarth selon lequel la divulgation de ces documents ne porterait pas atteinte aux objectifs de l’Union. Dans le cadre du troisième moyen, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir commis une irrégularité de procédure et une erreur de droit en écartant son argument selon lequel la divulgation desdits documents aurait pour effet de promouvoir plutôt que de porter atteinte à l’intérêt public. Le quatrième moyen est tiré d’une irrégularité de procédure et d’une erreur de droit résultant des considérations du Tribunal en ce qui concerne l’argument de ClientEarth selon lequel la non-divulgation des documents demandés tant que des négociations sont en cours revient à refuser indéfiniment l’accès à ces documents. Dans le cadre du cinquième moyen, ClientEarth allègue une dénaturation des arguments invoqués devant le Tribunal. Le sixième moyen est tiré d’une irrégularité de procédure résultant des considérations du Tribunal en ce qui concerne l’argument de ClientEarth selon lequel la divulgation desdits documents ne saurait dépendre du point de savoir si les partenaires de la Commission prenant part aux négociations sont soumis aux mêmes obligations de transparence. Enfin, le septième moyen est tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001.

11 Il convient d’examiner tout d’abord la première branche du premier moyen, puis, conjointement, la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen, et ensuite, successivement, les troisième et quatrième branches du premier moyen ainsi que les troisième à septième moyens.

Sur la première branche du premier moyen

Argumentation des parties

12 Dans le cadre de la première branche du premier moyen, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir étendu l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 à des informations qui ne sont pas spécifiquement liées à un accord international envisagé. En considérant que les documents demandés étaient susceptibles de relever de cette exception, car ils avaient été rédigés dans le cadre de négociations devant conduire à la conclusion d’un accord international et que, ainsi, l’analyse effectuée par les services juridiques de la Commission se rattachait nécessairement au contexte spécifique de cet accord, le Tribunal aurait à tort élargi le critère d’application de ladite exception retenu par lui dans l’arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil (T-529/09, EU:T:2012:215). Une telle extension aurait pour conséquence que les institutions pourraient invoquer l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 à propos de tout document ou avis juridique traitant d’une question pouvant être pertinente pour un accord international, indépendamment de la question de savoir si le document ou l’avis en question est effectivement lié à une négociation spécifique ou contient des choix concrets portant sur le contenu ou la stratégie d’un accord ou d’une négociation spécifique.

13 La Commission soutient que la première branche de ce moyen est irrecevable, l’argumentation qui y est développée soulevant une question qui n’a pas été débattue en première instance. En tout état de cause, cette branche, selon elle, n’est pas fondée.

Appréciation de la Cour

Sur la recevabilité

14 Il y a lieu de rappeler que, dans le cadre du pourvoi, la compétence de la Cour est limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges. Une partie ne saurait donc soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle aurait pu soulever devant le Tribunal, mais qu’elle n’a pas soulevé, dès lors que cela reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal (voir, en ce sens, arrêts du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C-136/92 P, EU:C:1994:211, point 59, ainsi que du 18 février 2016, Conseil/Bank Mellat, C-176/13 P, EU:C:2016:96, point 116 et jurisprudence citée).

15 Toutefois, la Cour a itérativement jugé qu’un requérant est recevable à former un pourvoi en faisant valoir, devant elle, des moyens nés de l’arrêt attaqué lui-même et qui visent à en critiquer, en droit, le bien-fondé (arrêt du 6 septembre 2018, République tchèque/Commission, C-4/17 P, EU:C:2018:678, point 24 et jurisprudence citée).

16 Or, en l’espèce, s’il ressort de la requête devant le Tribunal et du point 34 de l’arrêt attaqué que ClientEarth a soutenu non pas que les documents demandés ne pouvaient relever en soi du champ d’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, mais que leur divulgation ne pouvait porter atteinte à l’intérêt public protégé par cette exception, le Tribunal a néanmoins considéré, au point 36 de l’arrêt attaqué, que, à supposer que la requérante entendait contester l’applicabilité de ladite exception à ces documents, il y avait lieu de relever que, eu égard à leur contenu et au contexte dans lequel lesdits documents avaient été établis, ils étaient susceptibles de relever de celle-ci.

17 Il s’ensuit que ClientEarth est recevable à critiquer cette appréciation du Tribunal ainsi que les considérations de l’arrêt attaqué qui la fondent. Il en découle que la première branche du premier moyen du pourvoi est recevable.

Sur le fond

18 Contrairement à ce que soutient ClientEarth, le Tribunal n’a pas étendu l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 à des informations qui ne sont pas spécifiquement liées à un accord international envisagé, puisqu’il a constaté, au point 37 de l’arrêt attaqué, que les documents demandés avaient été rédigés dans le cadre de négociations devant conduire à la conclusion d’un accord international, et que, ainsi, l’analyse effectuée par le service juridique de la Commission se rattachait nécessairement au contexte spécifique de l’accord international envisagé.

19 En outre, au point 46 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que les documents demandés constituaient des éléments sur la base desquels la Commission fixait sa position dans les négociations en cours sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ci-après le « RDIE ») et le système juridictionnel des investissements (ci-après le « SJI »), et que, ainsi que cela ressortait de la décision litigieuse, divulguer ces documents reviendrait à révéler les « considérations juridiques qui sous-tendent les propositions de négociations de la Commission dans les négociations en cours ». Il a considéré que, partant, « ces documents se rapport[aient] au contenu spécifique de ces mécanismes dans les accords envisagés, et [que] leur divulgation [était] susceptible de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans ces négociations ».

20 Il en ressort que, en considérant que les documents demandés étaient susceptibles de relever de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, le Tribunal n’a pas étendu cette exception à tout document ou avis juridique traitant d’une question pouvant être pertinente pour un accord international, indépendamment de la question de savoir si le document ou l’avis en question est effectivement lié à une négociation spécifique ou contient des choix concrets portant sur le contenu ou la stratégie d’un accord ou d’une négociation spécifique.

21 Si, certes, le Tribunal n’a pas constaté, comme il l’avait fait dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil (T-529/09, EU:T:2012:215), qui a été confirmé par l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039), que les documents demandés avaient été rédigés spécifiquement en vue de l’ouverture des négociations devant conduire à la conclusion d’un accord international, il a constaté en l’espèce que ces documents, rédigés dans le cadre des négociations en cours de plusieurs accords internationaux, à savoir, notamment, le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, contenaient des considérations juridiques relatives aux mécanismes de règlement des différends inclus dans ces accords, sur lesquelles la Commission fondait sa position dans ces négociations, et que leur divulgation était susceptible de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans lesdites négociations. C’est dès lors sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé que lesdits documents étaient susceptibles de relever de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001.

22 Il y a lieu, par conséquent, d’écarter la première branche du premier moyen du pourvoi comme étant non fondée.

Sur la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen

Argumentation des parties

23 Dans le cadre de la deuxième branche du premier moyen, ClientEarth fait valoir que, à supposer que les documents demandés étaient susceptibles de relever de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, le caractère obligatoire de cette exception ne dispensait pas la Commission de son obligation de démontrer que le risque que la divulgation puisse porter atteinte aux relations internationales était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, de même qu’il ne dispensait pas le Tribunal de contrôler que cette obligation avait été respectée par la Commission.

24 En considérant que tous les éléments présentant un lien avec le contenu spécifique de l’accord envisagé relevaient de ladite exception, le Tribunal aurait fait une interprétation et une application erronées de l’approche retenue par lui dans l’arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil (T-529/09, EU:T:2012:215), confirmée par la Cour dans l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039), de laquelle il découlerait que c’est uniquement si les passages du document demandé dans lesquels figure l’analyse du contenu spécifique de l’accord envisagé sont susceptibles de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union que cette exception s’applique. Le terme « spécifique » employé dans cet arrêt impliquerait, en substance, que le contenu pertinent de l’accord envisagé est clairement indiqué dans les parties non divulguées du document demandé.

25 En l’espèce, sans examiner les documents demandés ni procéder à une analyse concrète de ceux-ci, le Tribunal aurait écarté par principe la possibilité que les parties non divulguées de ces documents concernaient des questions purement juridiques liées à la compatibilité du RDIE avec les traités, en se fondant, aux points 38 à 48 de l’arrêt attaqué, sur des considérations générales et non sur le contenu spécifique desdits documents. Ce faisant, le Tribunal aurait commis une erreur de droit, en considérant que la Commission avait établi à suffisance de droit que la divulgation des documents demandés porterait atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, alors que la Commission n’avait pas démontré que les parties non divulguées de ces documents concernaient le contenu spécifique des accords envisagés et qu’elles révélaient des objectifs stratégiques de l’Union.

26 Par ailleurs, par le deuxième moyen du pourvoi, ClientEarth fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit, aux points 52 et 53 de l’arrêt attaqué, en écartant son argument selon lequel la divulgation des documents demandés ne porterait pas atteinte aux objectifs stratégiques de l’Union. En effet, l’affirmation selon laquelle la divulgation « est susceptible de révéler les aspects des objectifs stratégiques » constituerait une lecture et une application erronées de la jurisprudence issue de l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039), le terme « susceptible » révélant une approche du risque de l’atteinte à l’intérêt public clairement spéculative, hypothétique et excessivement large, et l’expression « des aspects » étant trop vague et extensive, alors que l’institution doit faire état d’un risque concret et effectif.

27 La Commission soutient que la deuxième branche du premier moyen n’est pas fondée. Selon elle, ClientEarth confond le critère général adopté par le juge de l’Union afin d’évaluer l’applicabilité de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, tel qu’énoncé au point 64 de l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039), avec l’analyse concrète réalisée par le Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil (T-529/09, EU:T:2012:215), alors que cette analyse concrète est une simple illustration de la manière dont le critère peut être appliqué dans un cas précis et ne constitue pas un critère d’application générale, transposable à d’autres cas qui peuvent être très différents.

28 Selon la Commission, le Tribunal a correctement énoncé et appliqué le critère général en l’espèce, non pas en appliquant une présomption générale, mais en examinant le contenu des documents demandés. En tout état de cause, les motifs visés de l’arrêt attaqué viendraient apporter une réponse à l’argument de la requérante selon lequel, le contenu des documents demandés étant de nature juridique, sa divulgation ne pouvait avoir d’incidence sur les négociations internationales. En outre, l’argument selon lequel ces documents ne faisaient pas référence au contenu spécifique du moindre accord international envisagé serait manifestement erroné, les parties non divulguées de ceux-ci portant sur le cœur même de la nouvelle génération d’accords commerciaux et le système de résolution des différends en matière d’investissement qui était juridiquement controversé.

29 Par ailleurs, la Commission soutient que le second moyen est inopérant, car il ne fait pas référence à un élément indispensable du raisonnement adopté par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, et qu’il est manifestement dénué de fondement, le terme « susceptible » n’étant employé par le Tribunal que pour écarter l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’était pas parvenue à démontrer que la divulgation des documents demandés révélerait l’objectif stratégique poursuivi par l’Union dans les négociations.

Appréciation de la Cour

30 Contrairement à ce que soutient ClientEarth, l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 ne suppose pas nécessairement que les documents dont la communication est demandée indiquent clairement le contenu de l’accord international envisagé comme le faisaient certains éléments du document en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil (T-529/09, EU:T:2012:215) et à l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039). À cet égard, il convient de faire observer qu’il ne ressort nullement de ces arrêts que telle soit l’unique hypothèse dans laquelle cette disposition est susceptible de s’appliquer, le Tribunal ayant seulement constaté dans cette affaire, ainsi que la Cour l’a relevé au point 65 de son arrêt, que, à l’exception des éléments de ce document, portant sur le contenu spécifique de l’accord envisagé ou des directives de négociation, susceptibles de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans les négociations portant sur cet accord, le Conseil n’avait pas démontré de quelle manière, concrètement et effectivement, l’accès plus large audit document aurait porté atteinte à l’intérêt public en matière de relations internationales.

31 En revanche, ainsi que le fait valoir ClientEarth, l’existence d’un simple lien entre les éléments contenus dans ces documents et des objectifs poursuivis par l’Union dans le cadre de la négociation d’un accord international ne saurait suffire à établir que la divulgation de ceux-ci porterait atteinte à l’intérêt public protégé par cette exception.

32 En effet, la Cour a jugé, aux points 52 et 64 de l’arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/In ’t Veld (C-350/12 P, EU:C:2014:2039), que, lorsque l’institution concernée décide de refuser l’accès à un document dont la communication est demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt public protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 que cette institution invoque. En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

33 Dès lors, saisi d’un recours contre une décision de la Commission refusant l’accès à un document sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, au soutien duquel le requérant fait valoir que la Commission n’a pas démontré que la divulgation de ce document porterait atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à cette disposition, le Tribunal doit vérifier, dans la limite des moyens invoqués devant lui, si la Commission a effectivement fourni dans sa décision les explications requises et établi l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique d’une telle atteinte.

34 En l’espèce, ClientEarth ayant fait valoir, ainsi que cela ressort du point 34 de l’arrêt attaqué, que la divulgation des documents demandés ne saurait affaiblir la position de la Commission dans les négociations, car il ressortirait de leurs titres qu’ils contenaient uniquement des réflexions juridiques et ne donnaient qu’une vision de ce qu’il serait juridiquement possible pour la Commission de négocier, le Tribunal, au point 38 de l’arrêt attaqué, a relevé qu’était erronée la prémisse selon laquelle, la position et la marge de négociation de l’Union étant nécessairement limitées par les traités et l’État de droit, les documents demandés ne pouvaient présenter que des réflexions sur les limites juridiques des accords internationaux concernés et, partant, exposer simplement des positions sur la législation à respecter.

35 À cet égard, le Tribunal a constaté, aux points 43 et 44 de l’arrêt attaqué, que l’Union disposait d’un large pouvoir d’appréciation quant au RDIE et au SJI et quant à leurs modalités de mise en œuvre, que l’appréciation juridique contenue dans les documents demandés ne saurait se limiter à exposer simplement des positions objectives sur la législation à respecter, mais impliquait nécessairement une analyse approfondie de nombreux aspects juridiques, économiques ainsi que politiques et de questions stratégiques liées aux choix que l’Union est appelée à faire. Il a également observé que le RDIE était controversé pour des raisons tant juridiques que politiques.

36 En outre, le Tribunal a relevé, au point 46 de l’arrêt attaqué, que les documents demandés constituaient des éléments sur la base desquels la Commission fixait sa position dans les négociations en cours sur le RDIE et le SJI et que la divulgation de ces documents reviendrait à révéler les considérations juridiques qui sous-tendent les propositions de la Commission dans les négociations en cours, comme l’a constaté la décision litigieuse. Partant, le Tribunal a considéré que lesdits documents se rapportaient au contenu spécifique de ces mécanismes dans les accords envisagés, que leur divulgation était susceptible de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans les négociations et que « [d]onner accès aux avis portant sur ces analyses affaiblirait inévitablement la position de l’Union dans les négociations sur le RDIE et le SJI et, dès lors, est susceptible de nuire aux intérêts de l’Union en matière de relations internationales ».

37 Le Tribunal en a conclu, au point 48 de l’arrêt attaqué, que c’est sans commettre d’erreur de droit que la Commission avait pu considérer, eu égard au contexte et au sujet traité, que la divulgation des documents demandés affaiblirait sa position dans les négociations, ainsi que sa marge de négociation, et porterait donc atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales.

38 Il apparaît que le Tribunal a répondu, aux points 38 à 48 de l’arrêt attaqué, à suffisance de droit à l’argument avancé par ClientEarth, exposé au point 34 du présent arrêt, sans commettre d’erreur de droit.

39 Toutefois, il ressort des points 41 et 42 de la requête devant le Tribunal que ClientEarth avait, en outre, fait valoir devant lui que la Commission n’avait pas démontré de manière concrète que la divulgation des documents demandés était susceptible d’affaiblir la capacité de négociation de la Commission et en quoi cette divulgation révélerait les objectifs stratégiques de l’Union dans le cadre des négociations. Or, la motivation de l’arrêt attaqué, résumée aux points 34 à 37 du présent arrêt, de même que celle contenue au point 53 de l’arrêt attaqué, par laquelle le Tribunal a écarté ce dernier argument en se contentant de relever que la prémisse du raisonnement de la requérante était erronée et que la divulgation de « l’analyse juridique contenue dans ces documents [était] susceptible de révéler les aspects des objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans les négociations », ne contiennent que des considérations générales, aucune référence précise n’étant faite aux documents demandés, ni aux motifs de la décision litigieuse, qui ne répondent pas à suffisance de droit à ces arguments. Le Tribunal a dès lors omis de vérifier concrètement si la Commission avait fourni dans sa décision les explications requises et établi l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique d’une atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001. Il a, par conséquent, procédé à un contrôle insuffisant de la décision litigieuse et a ainsi commis l’erreur de droit reprochée par ClientEarth à l’appui de la deuxième branche de son premier moyen ainsi que de son deuxième moyen.

40 Il convient cependant de rappeler que, si les motifs d’un arrêt du Tribunal révèlent une violation du droit de l’Union, mais que son dispositif apparaît fondé pour d’autres motifs de droit, une telle violation n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cet arrêt (arrêt du 14 octobre 2014, Buono e.a./Commission, C-12/13 P et C-13/13 P, EU:C:2014:2284, point 62 ainsi que jurisprudence citée).

41 Or, en l’espèce, tout d’abord, il ressort de la décision litigieuse résumée aux points 8 à 11 de l’arrêt attaqué et reprise au point 3 du présent arrêt que la Commission a notamment expliqué, dans cette décision, que les parties non divulguées des documents demandés décrivaient et évaluaient les options juridiques concernant des questions sensibles ouvertes en lien avec le RDIE, y compris la création d’un SJI, qui étaient en cours de négociation dans le cadre du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement ainsi que d’autres accords, que la divulgation de ces documents était de nature à porter atteinte à l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales, en ce sens que leur divulgation aurait révélé les considérations juridiques qui sous-tendaient les propositions de la Commission dans les négociations en cours et aurait ainsi affaibli la position de la Commission dans ces négociations en donnant à ses partenaires une vue de l’intérieur sur la stratégie de l’Union et sur sa marge de manœuvre dans lesdites négociations, de telle sorte que cette divulgation aurait eu, de manière réaliste et non hypothétique, un effet néfaste sur l’efficacité de la Commission dans les mêmes négociations.

42 Ensuite, il ressort de la décision litigieuse que, en ce qui concerne les documents nos 2 et 4 à 7 mentionnés dans cette décision, au sujet desquels ClientEarth a déclaré, au point 5 de la requête devant le Tribunal, qu’elle maintenait sa demande d’accès, la Commission a précisé que les parties non divulguées de ces documents portaient sur la question de la relation entre le RDIE et les juridictions nationales au regard du principe de l’autonomie du droit de l’Union, que ces documents avaient été préparés dans le cadre spécifique des négociations en cours sur le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, mais qu’ils étaient également pertinents dans le cadre d’autres négociations en matière commerciale et d’investissements avec les pays tiers et que mettre les passages non divulgués desdits documents à la disposition du public pouvait porter gravement préjudice à la position de l’Union dans toutes ces négociations en cours, dans la mesure où les réflexions qu’ils contenaient restaient valables pour toutes les négociations commerciales et d’investissements en cours avec d’autres pays tiers.

43 Enfin, il convient de relever que, au sujet de ces derniers documents, la Commission a indiqué, dans la décision litigieuse, que d’autres détails ne pouvaient être donnés sans révéler le contenu des parties non divulguées et sans priver ainsi l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 de son objet.

44 Il résulte de ces motifs de la décision litigieuse que la Commission a fourni dans celle-ci les explications qu’elle pouvait donner sans révéler le contenu des parties non divulguées des documents demandés, quant à la manière dont l’accès à ces parties de documents pouvait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1049/2001 et qu’elle a établi que le risque d’une telle atteinte était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

45 Il s’ensuit que l’erreur de droit commise par le Tribunal est sans incidence sur le dispositif de l’arrêt attaqué.

46 Dès lors, la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen du pourvoi sont inopérants et doivent donc être écartés.

Sur la troisième branche du premier moyen

Argumentation des parties

47 Dans le cadre de la troisième branche du premier moyen, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir procédé, au point 43 de l’arrêt attaqué, à une substitution de motifs en relevant que l’« appréciation juridique contenue dans les documents demandés ne saurait se limiter à exposer simplement des positions objectives sur la législation à respecter, mais implique nécessairement une analyse approfondie de nombreux aspects juridiques, économiques ainsi que politiques et de questions stratégiques liées aux choix que l’Union est appelée à faire », alors que la décision litigieuse indiquerait uniquement que la question juridique portant sur la relation entre le RDIE et les juridictions nationales au regard du principe de l’autonomie du droit de l’Union impliquait des options quant à ce qui était juridiquement possible et à la manière dont il convenait de parvenir au résultat souhaité.

48 La Commission fait valoir que cette branche du premier moyen est inopérante.

Appréciation de la Cour

49 Il convient de relever que, pour refuser partiellement l’accès aux documents demandés, la Commission a, certes, expliqué que ces documents contenaient une analyse détaillée de plusieurs options juridiques concernant la substance des mécanismes prévus par le RDIE et le SJI, mais elle a également avancé des raisons d’ordre politique en indiquant que les améliorations proposées par elle, par rapport aux dispositions habituellement contenues dans les traités bilatéraux d’investissement, reflétaient des considérations à la fois politiques et juridiques, que ces améliorations n’avaient pas toujours été immédiatement acceptées par les partenaires de l’Union dans les négociations, qu’elle s’attendait à ce que les négociations avec certains partenaires soient difficiles et que donner accès aux parties non divulguées desdits documents permettrait à ces partenaires de comprendre les différentes composantes de la tactique de l’Union.

50 L’allégation de ClientEarth selon laquelle, en substance, la décision litigieuse ne faisait état que de considérations juridiques est donc inexacte. En revanche, il est vrai que la Commission n’a pas invoqué, dans cette décision, de considérations économiques et que l’affirmation, au point 43 de l’arrêt attaqué, selon laquelle l’appréciation juridique contenue dans les documents demandés impliquait nécessairement une analyse approfondie de nombreux aspects, notamment économiques, n’est pas étayée. Toutefois, cette lacune est sans incidence sur la conclusion, figurant au point 48 de l’arrêt attaqué, selon laquelle c’est sans commettre d’erreur de droit que la Commission a pu considérer que la divulgation de ces documents affaiblirait sa position dans les négociations et porterait donc atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales.

51 Il s’ensuit que la troisième branche du premier moyen du pourvoi est inopérante et doit donc être écartée.

Sur la quatrième branche du premier moyen

Argumentation des parties

52 Dans le cadre de la quatrième branche du premier moyen, ClientEarth invoque une dénaturation des éléments de preuve concernant l’état des négociations en cours, le Tribunal ayant relevé, au point 45 de l’arrêt attaqué, qu’« [i]l [était] constant que, au moment de l’adoption de la décision [litigieuse], la Commission, en tant que négociateur, n’avait pas encore adopté de position définitive sur le RDIE et le SJI », alors que ClientEarth avait fait observer que la Commission avait déjà adopté une position définitive sur ceux-ci dans le cadre des négociations entre l’Union, le Canada, la République de Singapour, la République socialiste du Viêt Nam et les États-Unis d’Amérique, et que les dispositions du RDIE et du SJI étaient déjà publiques. Dans la réplique, ClientEarth ajoute que, en dénaturant ces éléments de preuve, le Tribunal a omis de procéder à une appréciation motivée de cette question de fait.

53 La Commission fait valoir que cette branche du premier moyen est manifestement non fondée.

Appréciation de la Cour

54 Il convient de relever que, au point 46 de la requête devant le Tribunal, ClientEarth soutenait que l’Union avait rendu publics les textes d’un certain nombre de mécanismes de RDIE figurant dans des projets d’accords commerciaux, de telle sorte qu’il était difficile de considérer comme sensible l’analyse figurant dans les documents demandés. À l’appui de cet argument, elle a mentionné et produit plusieurs textes accessibles au public. La Commission, quant à elle, indiquait, aux points 26 et 27 du mémoire en défense devant le Tribunal, que « [l]a question sensible relative au mécanisme de RDIE et au SJI est toujours en cours de négociation dans le cadre du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), et l’était également, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, dans le cadre de l’accord économique et commercial global (CETA) ». Elle indiquait également que la discussion se poursuivait dans d’autres négociations commerciales et d’investissements, par exemple avec le Japon et la République socialiste du Viêt Nam. Elle précisait que, « au moment de l’adoption de cette décision, la Commission, en tant qu’institution, n’avait pas encore adopté de position définitive sur cette question juridique et politique » et qu’« une position a[vait] été prise, du moins implicitement, quelques jours après la décision confirmative, le 5 juillet 2016, lorsque la Commission a transmis au Conseil une proposition de décision relative à la signature, au nom de l’Union […], du CETA, laissant penser qu’elle considérait que le SJI inclus dans cet accord était juridiquement possible ».

55 Il apparaît que, en relevant, au point 45 de l’arrêt attaqué, qu’« [i]l [était] constant que, au moment de l’adoption de la décision [litigieuse], la Commission, en tant que négociateur, n’avait pas encore adopté de position définitive sur le RDIE et le SJI », le Tribunal a considéré ce fait allégué par la Commission, et non contesté par ClientEarth dans la réplique devant le Tribunal, comme étant avéré. Ce faisant, il n’a commis aucune dénaturation des éléments de preuve.

56 Pour autant que ClientEarth invoque un défaut de réponse à son argument, il y a lieu de constater que, au point 50 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que, contrairement à ce qu’elle soutenait, le fait que l’Union avait rendu publics certains textes se rapportant à des mécanismes figurant dans les projets d’accords concernés n’ôtait pas le caractère sensible à l’analyse figurant dans les documents demandés. Le Tribunal a ainsi répondu à cet argument.

57 Il s’ensuit que la quatrième branche du premier moyen du pourvoi doit être écartée comme étant non fondée.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

58 Par le troisième moyen du pourvoi, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir écarté, aux points 54 à 58 de l’arrêt attaqué, son argument selon lequel la divulgation des documents demandés aurait pour effet de promouvoir plutôt que de porter atteinte à l’intérêt public, au motif qu’il ressortait des points 38 à 48 de cet arrêt que la divulgation de l’analyse juridique contenue dans ces documents était susceptible de révéler les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans le cadre des négociations, que « l’initiative et la conduite des négociations en vue de la conclusion d’un accord international sont, en principe, du domaine de l’exécutif et que la participation du public dans la procédure relative à la négociation et à la conclusion d’un accord international est nécessairement restreinte, eu égard à l’intérêt légitime de ne pas dévoiler les éléments stratégiques des négociations », que « ces négociations ne préjugent nullement du débat public susceptible de se développer, une fois l’accord international signé, dans le contexte de la procédure de ratification », et que, « en dehors des cas où de telles compétences lui sont expressément attribuées, la Commission n’est pas habilitée à donner des garanties concernant la compatibilité avec le traité d’un comportement déterminé […] et son service juridique ne saurait avoir pour fonction de donner des conseils aux autres institutions, aux États membres ou au grand public ».

59 Aucun de ces motifs ne permettrait de répondre à l’argument avancé, de telle sorte que le Tribunal aurait commis une irrégularité de procédure et une erreur de droit.

60 La Commission fait valoir que ce moyen est inopérant.

Appréciation de la Cour

61 Le Tribunal ayant, avant d’examiner l’argument de ClientEarth selon lequel la divulgation des documents demandés aurait pour effet de promouvoir plutôt que de porter atteinte à l’intérêt public, constaté, au point 46 de l’arrêt attaqué, que la divulgation de ces documents était susceptible de révéler des objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans le cadre des négociations en cours et conclu, au point 48 de cet arrêt, que c’était sans commettre d’erreur que la Commission avait pu considérer que la divulgation desdits documents affaiblirait sa position dans les négociations, ainsi que sa marge de négociation, et porterait donc atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales, c’est à bon droit que, en se référant notamment à cette constatation et à cette conclusion au point 55 dudit arrêt, il a écarté cet argument.

62 Dès lors que ces motifs étaient suffisants pour écarter ledit argument, les autres motifs de l’arrêt attaqué visés par ce troisième moyen étaient surabondants et les arguments avancés pour les critiquer sont, partant, inopérants.

63 Il s’ensuit que le troisième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le quatrième moyen

Argumentation des parties

64 Par le quatrième moyen du pourvoi, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit et une irrégularité de procédure, aux points 59 à 67 de l’arrêt attaqué, en écartant son argument selon lequel le fait de ne pas divulguer les documents demandés aussi longtemps que des négociations commerciales et d’investissements sont en cours avec d’autres pays tiers permet à la Commission de s’appuyer indéfiniment sur l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 et constitue, de ce fait, une violation de la nécessité de démontrer un risque prévisible et concret d’une atteinte à l’intérêt public protégé par cette exception. Le Tribunal aurait examiné cet argument, aux points 61 à 67 de cet arrêt, au regard de l’article 4, paragraphe 7, de ce règlement, alors qu’elle invoquait une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de celui-ci. La seule considération répondant audit argument figurerait au point 60 dudit arrêt, dans lequel le Tribunal a affirmé que la décision litigieuse ne renvoyait pas à des négociations hypothétiques ou indéterminées, mais à des négociations concrètes. Or, outre que cette décision ne fait état de l’existence d’aucun lien spécifique entre les documents demandés et des négociations, cette considération procéderait de l’application d’un critère erroné, dès lors que l’existence de négociations spécifiques ne permettrait pas d’établir qu’il existe un risque réel et non purement hypothétique d’atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, dudit règlement.

65 La Commission fait valoir que ce moyen est inopérant et, en tout état de cause, manifestement non fondé.

Appréciation de la Cour

66 Il ressort de l’arrêt attaqué que, pour écarter l’argument en cause, le Tribunal, au point 60 de l’arrêt attaqué, a constaté en substance que, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, la question du RDIE et du SJI était évoquée dans le cadre de la négociation en cours de plusieurs accords internationaux et que cette décision ne renvoyait donc pas à des négociations hypothétiques ou indéterminées, mais à des négociations concrètes.

67 En outre, aux points 61 à 67 de l’arrêt attaqué, le Tribunal, relevant qu’il n’était pas clair si la requérante invoquait également une violation ratione temporis de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 du fait qu’elle faisait notamment valoir que le raisonnement de la Commission revenait à faire une application de cette exception pendant une période non définie et disproportionnée, a rappelé, en substance, que l’article 4, paragraphe 7, de ce règlement prévoit que ladite exception s’applique uniquement au cours de la période durant laquelle la protection se justifie eu égard au contenu des documents demandés et pour une période maximale de 30 ans. Le Tribunal a relevé notamment qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier que la Commission entendait invoquer ladite exception au-delà de la conclusion des accords internationaux en cours de négociation ou, en tout état de cause, après que la Cour se soit prononcée éventuellement sur la question de la compatibilité du RDIE et du SJI avec le droit de l’Union.

68 À cet égard, il convient de rappeler que, préalablement à l’examen de cet argument de la requérante, le Tribunal a jugé, au point 48 de l’arrêt attaqué, que c’était sans commettre d’erreur que la Commission avait pu considérer que la divulgation des documents demandés affaiblirait sa position dans les négociations, ainsi que sa marge de négociation, et porterait donc atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales. Une telle appréciation supposant que le risque d’une telle atteinte soit raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, ainsi qu’il a été rappelé au point 32 du présent arrêt, c’est sans commettre d’erreur de droit que, à ce stade de son raisonnement, le Tribunal a écarté l’argument invoqué par les motifs susmentionnés, desquels il ressort que l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 par la Commission était liée à des négociations précises en cours et était limitée dans le temps.

69 Il s’ensuit que le quatrième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le cinquième moyen

Argumentation des parties

70 Par le cinquième moyen du pourvoi, ClientEarth invoque une dénaturation, aux points 68 et 69 de l’arrêt attaqué, de l’argument avancé par la Commission, par lequel celle-ci aurait soutenu que le règlement n° 1049/2001 ne permettait pas la divulgation de documents tant que la position de la Cour n’était pas connue. L’affirmation, contenue au point 69 de cet arrêt, selon laquelle, par cet argument, la Commission faisait uniquement référence à un évènement susceptible de mettre un terme à l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 constituerait une dénaturation manifeste dudit argument.

71 La Commission soutient que ce moyen est inopérant.

Appréciation de la Cour

72 Force est de constater que le cinquième moyen du pourvoi est inopérant, dès lors que l’argument avancé par ClientEarth devant le Tribunal, qui visait non pas à critiquer la décision litigieuse, mais à contester un argument que la Commission avait fait valoir dans le mémoire en défense, n’était pas de nature à entraîner l’annulation de cette décision et que, par conséquent, ce moyen, à le supposer fondé, ne saurait conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué qui a rejeté le recours en annulation de ladite décision.

73 Il s’ensuit que le cinquième moyen du pourvoi doit être écarté.

Sur le sixième moyen

Argumentation des parties

74 Par le sixième moyen du pourvoi, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir, aux points 72 à 74 de l’arrêt attaqué, éludé son argument selon lequel la divulgation de documents ne saurait dépendre du point de savoir si les partenaires de la Commission prenant part aux négociations sont soumis aux mêmes obligations de transparence et d’avoir admis qu’il existe une telle dépendance.

75 La Commission fait valoir que ce moyen est inopérant et, en tout état de cause, manifestement non fondé.

Appréciation de la Cour

76 Aux points 73 et 74 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rappelé que les « documents demandés constitu[aient] […] les éléments sur la base desquels la Commission fixe sa position dans les négociations en cours sur le RDIE et le SJI » et, rappelant sa propre jurisprudence, que, « dans le contexte de négociations internationales, les positions prises par l’Union sont, par hypothèse, susceptibles d’évoluer en fonction du cours de ces négociations, des concessions et des compromis consentis dans ce cadre par les différentes parties prenantes ». Il a ajouté que la « formulation de positions de négociation peut impliquer un certain nombre de considérations tactiques de la part des négociateurs, en ce compris l’Union elle-même », et que, « [d]ans ce contexte, il ne saurait être exclu que la divulgation par l’Union, au public, des éléments qui sous-tendent ses positions de négociation, alors même que les éléments qui sous-tendent les positions de négociation des autres parties demeureraient secrets, puisse avoir pour conséquence d’affecter négativement, en pratique, la capacité de négociation de l’Union ».

77 Il ressort de ces motifs de l’arrêt attaqué que le Tribunal a répondu à l’argument avancé devant lui par ClientEarth et qu’il n’a nullement admis que le droit d’accès aux documents des institutions conféré au public par le règlement n° 1049/2001 dépende du point de savoir si les partenaires de la Commission prenant part aux négociations sont soumis aux mêmes obligations de transparence, s’étant limité à relever en substance que, dans le contexte de négociations internationales, la capacité de négociation de l’Union peut être affectée si les éléments qui sous-tendent ses positions sont divulgués alors que ceux qui sous-tendent les positions de ses partenaires ne sont pas connus.

78 Il s’ensuit que le sixième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le septième moyen

Argumentation des parties

79 Par le septième moyen du pourvoi, ClientEarth fait grief au Tribunal d’avoir violé, aux points 79 à 90 de l’arrêt attaqué, l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 en s’abstenant d’examiner le contenu des documents demandés auxquels il a eu accès, aux fins de déterminer quelles parties de ces documents étaient couvertes par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, de ce règlement et quelles parties ne l’étaient pas. En outre, selon elle, le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 4, paragraphe 6, dudit règlement en semblant justifier l’absence d’examen du contenu desdits documents par le large pouvoir conféré à la Commission pour déterminer si la divulgation d’un document pourrait porter atteinte à l’intérêt public protégé par cette exception, sans rechercher si la Commission avait établi que la divulgation de certaines parties des documents demandés porterait effectivement et concrètement atteinte à cet intérêt public, et que ce risque était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

80 La Commission fait valoir que ce moyen n’est pas fondé.

Appréciation de la Cour

81 Après avoir rappelé, d’une part, aux points 84 et 85 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait donné partiellement accès à quatre des documents demandés ainsi que refusé l’accès à l’intégralité d’un autre document demandé et qu’elle avait, par conséquent, apprécié la possibilité de donner à la requérante un accès partiel à ces documents et, d’autre part, au point 87 de cet arrêt, que la Commission dispose d’une marge d’appréciation lorsqu’elle apprécie si la divulgation d’un document peut porter atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, le Tribunal, au point 88 dudit arrêt, a relevé qu’« [i]l ne ressort[ait] pas des documents produits par la Commission devant le Tribunal […] qu’il aurait été possible de donner un accès plus large aux documents demandés sans que cette démarche implique de révéler la teneur des parties des documents pour lesquelles le refus d’accès était justifié et, notamment, les objectifs stratégiques poursuivis par l’Union dans la négociation ».

82 Il s’en déduit que le Tribunal a réellement examiné les documents demandés pour contrôler si la Commission avait fait une exacte application de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 et n’a pas, comme le prétend ClientEarth, justifié l’absence d’examen du contenu de ces documents par le fait que la Commission dispose d’une marge d’appréciation pour déterminer si la divulgation d’un document pourrait porter atteinte à l’intérêt public protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, de ce règlement.

83 Quant à l’argument selon lequel le Tribunal n’aurait pas recherché si la Commission avait établi que la divulgation de certaines parties des documents demandés porterait effectivement et concrètement atteinte à cet intérêt public et que ce risque était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, il y a déjà été répondu dans le cadre de l’examen de la deuxième branche du premier moyen et du deuxième moyen.

84 Il s’ensuit que le septième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.

85 En conséquence, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

Sur les dépens

86 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.

87 En l’espèce, ClientEarth ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) déclare et arrête :

1) Le pourvoi est rejeté.

2) ClientEarth est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.

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CJUE, n° C-612/18, Arrêt de la Cour, ClientEarth contre Commission européenne, 19 mars 2020