Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 26 septembre 2003, n° 2679

  • Ordre des médecins·
  • Assurances sociales·
  • Urgence·
  • Facturation·
  • Artisan·
  • Assurance maladie·
  • Commerçant·
  • Amnistie·
  • Acte·
  • Maladie

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Cotation 5V + ID pour une patiente vue 3 fois. Rédaction de 3 feuilles de soins distinctes portant les mêmes dates et les mêmes heures pour le même patient. Actes fictifs exclus de l’amnistie.

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CNOM, sect. des assurances soc., 26 sept. 2003, n° 2679
Numéro(s) : 2679
Dispositif : Interdiction temporaire de donner soins aux assurés sociaux Publication Réformation Publication pendant 3 semaines

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 2679 Dr Gérard M Séance du 11 juin 2003 Lecture du 26 septembre 2003
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, 1°), enregistrée au secrétariat du Conseil national de l’Ordre des médecins le 24 juin 1996, la requête présentée pour le Dr Gérard M, qualifié en médecine générale, déclarant faire appel de la décision, en date du 25 janvier 1996, par laquelle la section des assurances sociales du conseil régional de Provence-Côte-d’Azur-Corse, statuant sur la plainte de la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes, dont le siège est 48 avenue Roi Robert 06100 NICE, et du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice dont l’adresse postale est 5, avenue Romain Rolland, BP 85, 06102 NICE CEDEX 2, et sur la plainte présentée par la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte d’Azur, dont le siège est 33/35 rue Tranchel 06004 NICE CEDEX 1, et par le médecin-conseil régional près cette caisse, a prononcé à son encontre la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de quarante-cinq jours ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, 2°), enregistrée comme ci-dessus le 1er juillet 1996, la requête présentée par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice, tendant à l’aggravation de la sanction prononcée en première instance qui n’est pas à la hauteur des manquements à l’honneur et à la probité du Dr M en rappelant les griefs invoqués : doubles facturations d’actes fictifs, rédaction d’un certificat erroné, facturation d’actes simultanés pour plusieurs assurés, facturation d’actes en « V » au lieu de « C », facturation d’indemnités de déplacement alors que le patient s’est rendu dans les locaux d'« Urgence 24 » en particulier les griefs non retenus par le premier juge bien que suffisamment établis ;

Vu, 3°), enregistrée comme ci-dessus les 1er et 24 juillet 1996, la requête présentée par la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes demandant l’aggravation de la sanction prononcée à l’encontre du Dr M ;

Vu, 4°), enregistrée comme ci-dessus les 1er juillet et 28 août 1996, la requête présentée par la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur et le médecin-conseil régional près cette caisse tendant à l’aggravation de la sanction prononcée à l’encontre du Dr M compte tenu de son comportement : les actes en « V » erronés et six frais de déplacement facturés à tort ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 22 septembre 1998, le mémoire présenté pour le Dr M confirmant son appel et tendant au rejet des plaintes par les motifs que la section des assurances sociales a écarté à bon droit les griefs tirés de la facturation d’actes fictifs et de la rédaction d’un certificat erroné ; qu’il convient de rejeter le grief tiré de facturation simultanée d’actes qui a été regardé à tort par le premier juge comme établi ; que le grief de doubles facturations n’est pas démontré ; que la série d’anomalies prétendues, notamment sur les cotations en « V » au lieu de « C » résulte d’une mauvaise compréhension de la création et du fonctionnement de la structure « Urgence 24 » qui a fait l’objet d’une enquête de la caisse primaire d’assurance maladie en 1987 dont la production des conclusions est expressément demandée ; que les organismes sociaux n’ont pu donner un avis sur la cotation des actes effectués dans la structure ; que la cotation de « V » provient de cette absence de prise de position alors que la cotation était la plus proche de l’acte médical ; que la situation est celle prévue par l’article L 122-3 du code pénal ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 29 décembre 1998, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice persévérant dans ses conclusions par les mêmes moyens en répondant au dernier mémoire du Dr M ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 15 janvier 1999, le mémoire présenté par la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes persévérant dans ses conclusions par des motifs similaires à ceux analysés à propos du précédent mémoire ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 2 juin 1999, le mémoire présenté pour le Dr M persévérant dans ses conclusions précédentes en précisant qu’il a pu croire pouvoir légitimement coter les actes litigieux en « V » par une erreur de droit qu’il ne pouvait éviter ; qu’en ce qui concerne les facturations litigieuses il convient de rappeler que les feuilles sont paraphées par des secrétaires ; qu’il est fait litière du contexte de la médecine d’urgence ; qu’enfin, en tout état de cause, l’amnistie est applicable ;

Vu la décision n° 2679 de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins du 6 juillet 1999 réformant la décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Provence-Côte d’Azur-Corse en date du 25 janvier 1996, et prononçant à l’encontre du Dr Gérard M la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant quarante cinq jours dont quinze jours avec le bénéfice du sursis ;

Vu la décision n° 212 084 du Conseil d’Etat statuant au contentieux, en date du 3 février 2003, annulant la décision visée ci-dessus du 6 juillet 1999, et renvoyant l’affaire devant la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins ;

Vu, enregistré au secrétariat du Conseil national de l’Ordre des médecins les 28 mai et 2 juin 2003, les mémoires conjoints présentés par le directeur de la caisse maladie régionale des professions indépendantes de la Côte d’Azur et le médecin-conseil régional, tendant à ce que soit prononcée à l’encontre du Dr M l’une des sanctions prévues à l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale ; en effet, ce praticien a facturé dix actes en « V » alors qu’il s’agissait d’actes non dispensés au domicile du malade, ce qui est contraire à l’article 2 des dispositions générales de la nomenclature des actes professionnels, le fait que ces facturations litigieuses aient été paraphées par des secrétaires constituant une circonstance aggravante ; en outre, il a facturé à tort six frais de déplacement, en méconnaissance de l’article 13 de la nomenclature générale, et sans pouvoir justifier ces manquements du fait qu’il y aurait eu urgence ; qu’au reste rien ne démontre le caractère original de la structure « Urgence 24 » dont se prévaut le Dr M. Vu, enregistré comme ci-dessus le 10 juin 2003, le mémoire présenté pour le Dr M, se rapportant à ses précédents mémoires, et tendant à ce que les dispositions de la loi d’amnistie du 3 août 1995 bénéficient au Dr M, lequel n’a commis aucun fait attentatoire à l’honneur ou à la probité ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale et notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;

Vu la loi n°95-884 du 3 août 1995 ensemble la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002, portant amnistie ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins ;

Vu le code de déontologie médicale ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Après avoir entendu en séance publique :

 – Mme le Dr GUERY en la lecture de son rapport ;

 – Me HENTZ, avocat, en ses observations pour le Dr M qui n’était pas présent ;

 – le Dr LAMBRUSCHINI, médecin-conseil, pour le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice, en ses observations ;

 – M. GANIER, représentant la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur, en ses observations ;

 – Le Dr PAUMIER, médecin-conseil régional près la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur, en ses observations ;

La caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes ne s’étant pas fait représenter ;

Le défenseur du Dr M ayant eu la parole en dernier ;


APRES EN AVOIR DELIBERE, Sur la procédure.

Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose une procédure préliminaire de conciliation avant la saisine de la juridiction disciplinaire ;

Sur le grief tiré de la cotation en V et de frais de déplacement pour des actes effectués dans la structure « Urgence 24 ».

Considérant que la section des assurances sociales trouve au dossier les éléments nécessaires pour statuer ; qu’il n’est pas indispensable de demander la production du rapport que la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes aurait établi sur le fonctionnement d'« Urgence 24 » en 1987 ;

Considérant qu’il est fait grief au Dr M d’avoir, en avril et mai 1993, coté en V avec frais de déplacement des actes effectués, dans le cadre de la médecine d’urgence, pour des patients se rendant dans les locaux d’une « structure » gérée par une société civile de moyens et dite « Urgence 24 » ; que, dans les conditions particulières dans lesquelles fonctionnait à Nice « Urgence 24 », celle-ci devait être considérée comme une extension des cabinets des médecins y effectuant des actes médicaux ; que le Dr M ne pouvait coter « V » et demander des frais de déplacement dès lors que les actes n’étaient pas accomplis au domicile du patient ainsi que le prévoient les articles 2 et 13 de la nomenclature générale des actes professionnels ; que ces actes ne pouvaient être cotés qu’en C et, éventuellement en K ; que les cotations retenues par le Dr M étaient en infraction aux dispositions de la nomenclature texte réglementaire qui s’impose aux médecins dans leurs rapports avec les organismes de sécurité sociale ;

Considérant, cependant, que ces cotations étaient utilisées depuis le début du fonctionnement d'« Urgence 24 » en 1986 sans que la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes et le service médical de Nice, comme également la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur, y trouvent à redire jusqu’en 1993 où une procédure disciplinaire a été engagée sans mise en garde préalable ; que les caisses et le service médical ne pouvaient qu’être au courant du fonctionnement d'« Urgence 24 » et de la manière de coter de ses médecins ; que les responsables d'« Urgence 24 » soutiennent, sans être démentis, qu’ils avaient saisi, dès l’origine, les organismes sociaux des questions de cotation dans le cadre de cet organisme qui présentait un caractère nouveau ; que la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes a, de plus, examiné en 1987 le fonctionnement d'« Urgence 24 » et n’a pu éviter de prendre conscience du problème de cotations litigieuses ; que compte tenu de la tolérance accordée, si longtemps, à ses cotations le Dr M ne peut être regardé comme de mauvaise foi ; qu’il doit, en tout état de cause, pour ce grief, bénéficier des dispositions de la loi d’amnistie du 3 août 1995 ;

Sur les autres griefs.

Considérant en premier lieu, qu’il est reproché au Dr M un certificat de complaisance délivré à un accidenté du travail ; qu’au vu des pièces du dossier et des explications du praticien il n’apparaît pas que le grief soit établi avec certitude ; qu’il pouvait seulement être reproché un manque de vigilance dans les conditions de délivrance d’un certificat complémentaire, ce qui n’est pas suffisamment caractérisé pour être retenu au titre de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale ;

Considérant en second lieu, qu’il résulte des pièces du dossier et des éléments fournis lors de l’audience, que dans le dossier n° 7 pour une patiente vue trois fois, le Dr M a coté 5V + ID, procédant ainsi à la cotation de deux actes fictifs ; que, dans le dossier n° 4, trois feuilles de soins distinctes portent les mêmes dates et les mêmes heures pour le même patient ; que la facturation d’actes fictifs comme la double facturation de mêmes actes constituent des actes frauduleux et doivent être regardées comme des fautes au sens de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale ; que de tels actes, contraires à l’honneur et à la probité, ne peuvent bénéficier des dispositions des lois d’amnistie du 3 août 1995 et du 6 août 2002 ;

Considérant en revanche, que, dans les dossiers 6, 7, 14, 15, la facturation d’actes simultanés pour plusieurs assurés à la même date et à la même heure révèle davantage une négligence du médecin, tenant aux particularités de la médecine d’urgence qu’il exerce ; qu’il y a lieu, pour ce motif, de considérer que de tels manquements, qui ne sont pas contraires à l’honneur et à la probité, peuvent bénéficier des dispositions de la loi d’amnistie du 3 août 1995 ;

Considérant que, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de ramener la sanction prononcée à l’encontre du Dr M à l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un mois, dont huit jours avec le bénéfice du sursis ;

Considérant qu’il y a lieu d’ordonner la publication de cette sanction, en application du deuxième alinéa de l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale, dans les locaux ouverts au public de la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes, mais à l’exclusion des locaux de la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte d’Azur, les seuls griefs avancés par cette caisse bénéficiant de l’amnistie ;

Considérant que les frais de première instance et d’appel doivent être partagés par moitié entre le Dr M, d’une part, et les plaignants, d’autre part ;


PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1er : Il est prononcé à l’encontre du Dr Gérard M la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un mois dont huit jours avec le bénéfice du sursis.

Article 2 : L’exécution de la sanction, pour la partie non assortie du sursis, prendra effet le 1er février 2004 à 0 H 00 et cessera de porter effet le 21 février 2004 à minuit.

Article 3 : La sanction sera publiée par les soins de la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes dans ses locaux ouverts au public pendant la période indiquée à l’article 2.

Article 4 : La décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Provence-Côte-d’Azur-Corse, en date du 25 janvier 1996, concernant le Dr M, est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.

Article 5 : Les frais de première instance et d’appel (300,63 euros) seront supportés pour moitié par le Dr M et pour moitié par les plaignants. Ils devront être versés dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 6 : Les appels de la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes, du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice, de la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur et du médecin-conseil régional près cette caisse et le surplus des conclusions du Dr M sont rejetés.

Article 7 : La présente décision sera notifiée au Dr Gérard M, à la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-Maritimes, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nice, à la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur, au médecin-conseil régional près la caisse régionale des artisans et commerçants de la Côte-d’Azur , à la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Provence-Côte-d’Azur-Corse, au conseil départemental de l’Ordre des médecins des Alpes-Maritimes, au directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, au chef du service régional de l’inspection du travail, de l’emploi et de la politique sociale agricoles de Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse, au ministre chargé de la sécurité sociale, au ministre chargé de la santé et au ministre chargé de l’agriculture.

Délibéré dans la séance du 11 juin 2003, où siégeaient M. SAUZAY, Conseiller d’Etat, président ; M. le Dr NATTAF, membre titulaire, et M. le Dr MIRE, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr HECQUARD, membre titulaire, et Mme le Dr GUERY membre suppléant, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Lu en séance publique le 26 septembre 2003.

LE CONSEILLER D’ETAT PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

P. SAUZAY
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 26 septembre 2003, n° 2679