Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 16 octobre 2013, n° 5013

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Si pour des infiltrations, le praticien a systématiquement utilisé le code AFLB 007 pour huit patients au lieu du code AGLB 001, ne peut être retenu le grief d’assocociation irrégulière de cotation pour l’évacuation de collection articulaire et de cotation pour l’injection thérapeutique dans une articulation. La CCAM juge que la quantité du liquide enlevé est trop faible pour qu’il s’agisse d’une collection articulaire justifiant son évacuation sans fournir aucune précision quant à la quantité de liquide articulaire susceptible de nécessiter une évacuation et que celle-ci se justifiait pour les patients en cause. En revanche est fautive la facturation dans cinq dossiers de Hyalgan dans l’épaule, ce produit ne disposant pas de l’AMM dans cette indication.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, sect. des assurances soc., 16 oct. 2013, n° 5013
Numéro(s) : 5013
Dispositif : Annulation Interdiction temporaire de donner soins aux assurés sociaux Remboursement à la caisse Remboursement de 4790,29 euros pour les assurés sociaux

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 5013 Dr Jean-François M Séance du 19 septembre 2013 Lecture du 16 octobre 2013
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, 1°), enregistrés au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins le 13 décembre 2012, la requête et le mémoire présentés par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle dont l’adresse postale est 9, boulevard Joffre, B.P. 30443, 54001 NANCY CEDEX, et par la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, dont le siège est 9, boulevard Joffre, 54047 NANCY CEDEX, tendant à ce que la section réforme une décision, en date du 15 novembre 2012, par laquelle la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Lorraine statuant sur leur plainte conjointe, a prononcé à l’encontre du Dr Jean-François M, qualifié spécialiste en rhumatologie, la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de quatre mois dont deux mois avec le bénéfice du sursis, par les motifs que les premiers juges n’ont pas retenu certains des griefs exposés dans leur plainte, n’ont pas fait une juste appréciation de la gravité des manquements retenus, n’ont pas prononcé la publication de leur décision, et n’ont pas condamné le Dr M au reversement à l’assurance maladie du trop remboursé et du remboursement aux assurés du trop perçu par l’intermédiaire de la caisse primaire d’assurance maladie ; qu’en ce qui concerne le grief d’abus d’actes de radiographie avec surfacturations par associations incompatibles d’actes au regard de la classification commune des actes médicaux (CCAM), la juridiction a reconnu ces surfacturations, mais en les qualifiant d’erreurs de codage, alors qu’il s’agit de manquements systématiques, faisant courir aux patients en cause un risque injustifié, avec un caractère massif, puisque 731 actes ont été codés NAQK 023 au lieu de NAQK 015, entrainant un préjudice financier pour l’assurance maladie de 11 631,09 euros et un remboursement aux assurés d’un trop perçu de 4004,61 euros, sommes dont le remboursement par le Dr M aurait dû être ordonné par les premiers juges ; qu’en ce qui concerne le grief d’anomalies de facturation d’actes techniques médicaux, la juridiction a bien reconnu la pratique fautive ou abusive des facturations du Dr M pour des injections épidurales à visée antalgique avec évaluation diagnostique et pronostique, pour l’association quasi systématique des codes MZJB 001 et MZLB 001 pour des évacuations de collection articulaire du membre supérieur et de collection articulaire du membre inférieur codées à tort NZJB 001 au lieu de NZLB 001, mais elle n’en a pas ordonné le remboursement de 6945,02 euros, ni à la caisse primaire d’assurance maladie, ni aux assurés, le trop perçu se montant à 1040,91 euros ; qu’en ce qui concerne le grief de discordance entre les comptes rendus communiqués au médecin-conseil et ceux adressés au médecin traitant, si la juridiction a bien constaté ces discordances dans huit dossiers, c’est à tort qu’elle a écarté le grief au motif que le faible nombre de dossiers n’est pas de nature à en établir la réalité ; qu’il y a lieu, en conséquence, d’aggraver la sanction prononcée, de condamner le Dr M à reverser la somme de 18 576,11 euros à la caisse primaire d’assurance maladie, et la somme de 5045,52 euros aux assurés en cause, de prévoir la publication de la sanction, et d’ordonner le remboursement par ce praticien au service du contrôle médical des deux taxes relatives à l’aide juridictionnelle pour un montant de 70 euros ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, 2°), enregistrés comme ci-dessus le 14 décembre 2012 et le 23 janvier 2013, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Jean-François M, tendant à ce que la section réforme la décision en date du 15 novembre 2012 de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Lorraine ci-dessus analysée, rejette la plainte et l’appel du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle et de la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, et mette à leur charge une somme de 3000 euros en application de l’article L 761-1 du code de justice administrative, par les motifs qu’à titre d’observation préliminaire, le Dr M affirme n’avoir jamais fait l’objet de rappel à la réglementation par l’assurance maladie pour des faits similaires à ceux de la plainte du 14 novembre 2011 ; qu’en ce qui concerne le contrôle de son activité précédant le dépôt de la plainte, la période durant laquelle il a été effectué a varié ; qu’il relève des vices entachant la décision attaquée, d’abord en ce qu’il y a une erreur dans ses visas en ce qui concerne la production de ses mémoires, qu’ensuite, dans un de ses mémoires, il soulevait un moyen tiré du non respect de la procédure prévue à l’article D 315-3 du code de la sécurité sociale, de même que la différence entre les griefs qui lui avaient été initialement signifiés et ceux retenus dans la plainte, points sur lesquels les premiers juges n’ont pas répondu ; que leur décision est entachée d’insuffisance de motivation, celle relative aux griefs retenus par eux ne permettant pas de comprendre en quoi elle justifiait la sanction prononcée ; que la présence parmi les assesseurs siégeant à l’audience, du Dr S, lequel en sa qualité de médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle avait été l’auteur d’une lettre en date du 14 novembre 2005 adressée au Dr M au sujet de la cotation de certains actes, ne garantissait pas l’impartialité des débats et de la décision ; qu’en ce qui concerne les griefs, pour celui d’abus d’actes de radiographie avec surfacturation, le Dr M a reconnu qu’il avait pu commettre des erreurs de codage, qu’on ne pouvait aucunement qualifier d’abus, et que le reproche de risque qu’il aurait fait courir à ses patients par sa pratique n’est pas fondé, aucune irradiation anormale n’en résultant ; qu’en ce qui concerne le grief d’anomalies de facturation d’actes techniques médicaux, les critiques ne sont pas fondées ; que, en premier lieu, le reproche fait au Dr M d’avoir facturé avec le code AGLB 001 au lieu du code AFLB 007 ne peut être retenu dans la mesure où il repose sur l’absence d’intervalle de temps suffisant entre le premier et le deuxième geste, alors qu’il n’existe pas de chronologie déterminée et que toutes les infiltrations pratiquées sont péridurales, par voie haute, inter-épineuse ou inter-lombaire, que cette façon de facturer n’a fait l’objet d’aucun signalement par le service médical, et qu’il relève des cas où, pour des pathologies identiques, on a admis la cotation litigieuse ; que, en second lieu, en ce qui concerne le codage pour l’évacuation d’une collection articulaire pour lequel il lui est reproché des associations abusives et quasi systématique de la cotation MZJB 001 avec MZLB 001, ou NZJB 001 avec NZLB 001, il est fait remarquer qu’il n’existe aucune définition de l’expression « collection articulaire » ; que l’association de deux codages n’est pas proscrite et peut être justifiée lorsqu’on poursuit un but diagnostic, thérapeutique ou médico-légal ; que le but thérapeutique assigné à l’acte de ponction évacuation du liquide articulaire a été poursuivi par le Dr M et atteint dans l’intérêt des patients concernés par les seize dossiers litigieux ; qu’en réalisant ces actes il n’a fait que se conformer aux règles de bonne pratique, puisque, dès lors que le liquide articulaire peut être évacué par le professionnel de santé, celui-ci se trouve en présence d’une situation pathologique justifiant la ponction entreprise ; qu’en ce qui concerne le troisième grief, c’est à bon droit que les premiers juges l’ont écarté en considérant que la discordance entre les comptes rendus communiqués aux médecins-conseils et ceux adressés au médecins traitants n’était pas établie ; qu’il y a lieu, en conséquence, d’annuler la décision attaquée, ou à défaut, de faire preuve d’indulgence à l’égard du Dr M ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 7 mars 2013, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle et la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ; il tend aux mêmes fins que leur requête, avec les mêmes moyens ; il est confirmé que le Dr M a bien précédemment fait l’objet d’un rappel à la réglementation pour des faits similaires ; il est répondu que le Dr SIMONIN, auteur de la lettre du 10 octobre 2012, qui ne relevait d’aucune procédure contentieuse, n’était pas, à la date où il a siégé comme assesseur, sous l’autorité hiérarchique de l’auteur de la plainte ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 15 avril 2013, le mémoire présenté pour le Dr M ; il tend aux mêmes fins que sa requête avec les mêmes moyens et arguments ; il est précisé que le praticien dispose d’une salle de radiologie numérisée et d’un manipulateur radio à temps plein, ce qui lui donne du temps pour la réalisation d’actes techniques ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 21 mai 2013, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle et la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ; il tend aux mêmes fins que leur requête en rappelant que le mémoire de saisine a montré que le Dr M n’a pas réalisé de ponction évacuatrice, mais uniquement des infiltrations ; il est remarqué que le fait de disposer d’une salle et d’un manipulateur ne doit pas conduire à surfacturer ces actes à l’assurance maladie ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 19 août 2013, le mémoire présenté pour le Dr M ; il tend aux mêmes fins que sa requête ; il insiste sur le fait que les plaignants n’établissent pas le bien fondé de leurs allégations ; que les patients n’ont ni déclaré ni confirmé que les actes en cause n’auraient pas été réalisés ; il produit des pièces et documents pour démontrer qu’il peut être nécessaire de recourir aux actes de ponctions évacuatrices avant infiltration de certains produits ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 9 septembre 2013, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle et la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ; il tend aux mêmes fins que leur requête, en observant qu’il a déjà été répondu à l’argumentaire du Dr M, et que, en ce qui concerne la facturation d’actes techniques, il est inexact d’affirmer comme il l’a fait que les associations d’actes de ponction, d’injection ou d’infiltration sont fréquentes, les actes de ponction d’une affection articulaire du membre supérieur n’apparaissant pas sur la liste des cinquante premiers actes les plus fréquemment pratiqués par les rhumatologues ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de la santé publique, notamment ses articles R 4127-1 et suivants ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-67 ;

Vu les dispositions du décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins maintenues en vigueur par les dispositions de l’article 8 du décret n° 2013-547 du 26 juin 2013 ;

Vu le décret n° 2013-547 du 26 juin 2013, relatif à l’organisation et au fonctionnement des juridictions du contentieux du contrôle technique des professions de santé ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Vu la classification commune des actes médicaux ;

Après avoir entendu en séance publique :

 – Le Dr COLSON en la lecture de son rapport ;

 – Mme le Dr PIERRE, médecin-conseil, en ses observations pour la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle et le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle ;

 – Me QUADERI, avocat, en ses observations pour le Dr M et le Dr Jean-François M en ses explications orales ;

Le Dr M ayant eu la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, Sur la régularité de la décision attaquée :

Considérant qu’il résulte des termes mêmes de la décision attaquée qu’elle a été rendue dans une composition mentionnant la présence, en qualité d’assesseur représentant les organismes de sécurité sociale, du Dr S, médecin-conseil ; qu’il ressort de l’instruction que celui-ci, alors médecin-chef de service adjoint du service médical de Meurthe-et-Moselle, avait adressé au Dr M une lettre datée du 14 novembre 2005 ; que si cette correspondance avait pour seul objet de donner au Dr M des précisions quant à l’application de certaines cotations, elle mentionnait notamment les codes NZJB 001, NZLB 001 et AGLB 001 ; que, dans la présente instance, l’application par le Dr SM de ces cotations fait l’objet de contestations de la part des organismes de l’assurance maladie ; que, dans ces conditions, c’est à juste titre que le Dr M soutient que, de ce fait, l’impartialité du Dr S peut être mise en doute ; qu’il y a lieu de considérer que l’impartialité de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Lorraine pouvant être mise en cause du fait de la présence, à l’audience du 10 octobre 2012, du Dr S parmi les assesseurs, il y a lieu, pour ce motif, d’annuler la décision attaquée ;

Considérant que l’affaire étant en état, il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement ;

Considérant qu’à l’occasion d’un contrôle ayant porté sur l’activité du Dr M pendant la période du 15 mars 2008 au 15 mars 2010 des anomalies ont été relevées dans les cotations d’actes réalisés par ce praticien et présentés au remboursement de l’assurance maladie ; que la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle et le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle ont saisi la section des assurances sociales de plaintes à l’encontre du Dr M en demandant qu’en application des dispositions des articles L 145-1 et L 145-2 du code de la sécurité sociale lui soit infligée une sanction à raison des griefs qui lui sont reprochés ;

Sur la recevabilité de la plainte de la caisse primaire d’assurance maladie de la Meurthe-et-Moselle :

Considérant qu’aux termes de l’article D 315-3 du code de la sécurité sociale « A l’expiration des délais prévus au second alinéa de l’article D 315-2 ou, à défaut, à l’expiration du délai d’un mois mentionné à l’article R 315-1-2, la caisse informe dans un délai de trois mois le professionnel de santé des suites qu’elle envisage de donner aux griefs initialement notifiés. A défaut, la caisse est réputée avoir renoncé à poursuivre le professionnel de santé contrôlé » ; que le Dr M soutient que la caisse primaire d’assurance maladie n’aurait pas respecté ces dispositions en ne l’informant pas de son intention de porter plainte en raison des griefs qui lui avaient été notifiés ; qu’il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 30 novembre 2010, la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle a notifié au Dr M comme griefs retenus contre lui : le non respect de la classification commune des actes médicaux (CCAM), la prescription et l’utilisation de produits hors de leur autorisation de mise sur le marché (AMM), des actes faisant courir des risques injustifiés à ses patients, et des divergences entre les comptes rendus communiqués au médecin-conseil et ceux adressés aux médecins traitants des patients en cause ; que par la suite dans le délai mentionné à l’article D 315-3 précité, la caisse primaire d’assurance maladie a, par lettre du 12 mai 2011, informé le Dr M qu’elle entendait saisir la section des assurances sociales des griefs dont il avait reçu précédemment notification ; qu’ainsi, la caisse primaire d’assurance maladie ayant respecté les dispositions sus rappelées, le Dr M n’est pas fondé à soutenir qu’elle serait réputée avoir renoncé à le poursuivre et que sa plainte serait de ce fait irrecevable ;

Sur la régularité des opérations des contrôles préalables au dépôt des plaintes :

Considérant que les conditions dans lesquelles s’est déroulée la procédure de contrôle de l’activité du Dr M avant le dépôt des plaintes, notamment en ce qui concerne la modification de la période de ce contrôle, sont sans incidence sur la régularité de la procédure suivie devant la présente juridiction ; qu’il appartient à celle-ci d’apprécier la valeur probante des documents qui lui sont soumis tant par les plaignants que par le praticien poursuivi, dans le cadre de la procédure juridictionnelle contradictoire qui se déroule devant elle ; que dès lors le Dr M n’est pas fondé à soutenir que les conditions dans lesquelles s’est déroulée la procédure d’enquête suivie entacheraient d’irrégularité la saisine de la section des assurances sociales ;

Sur les griefs :

1 – Sur le grief d’abus d’actes de radiographie, avec surfacturation par association incompatibles d’actes au regard de la classification commune des actes médicaux (CCAM) :

Considérant qu’il résulte des termes de la CCAM qu’en cas d’association d’actes avec une radiographie du bassin, seule la radiographie du bassin selon une incidence (NAQK 015) peut être facturée (chapitre 12-1-3-1), et qu’en cas d’association d’une radiographie de l’articulation coxo-fémorale, quel que soit le nombre d’incidences, avec la radiographie du bassin, seule la radiographie du bassin selon une incidence (NAQK 015) peut être facturée (chapitre 14-1-2) ; que cependant, dans 656 dossiers (nos 1 à 190 et 200 à 665), retenus dans les plaintes, le Dr M a facturé un total de 731 actes, en associant à d’autres radiographies le code NAQK 023, mentionné à la CCAM pour la radiographie du bassin selon trois incidences et plus ; qu’en tout état de cause, cette cotation ne pouvait être, comme il l’a fait, associée à la cotation d’un autre segment ; que s’il admet avoir pu commettre des erreurs de façon involontaire, cette circonstance ne peut conduire à écarter le grief, dans la mesure où il a ainsi majoré les durées d’exposition de ses patients, leur faisant courir un risque d’irradiation anormale injustifié, et indument facturé à l’assurance maladie les actes en cause qui ne pouvaient recevoir que la cotation NAQK 015 ;

2 – Sur le grief d’anomalies de facturation d’actes techniques médicaux :

Considérant, en premier lieu, que, selon la CCAM, le code AGLB 001, figurant pour les actes diagnostiques, est appliqué pour le premier geste infiltratif épidural à visée antalgique avec réalisation d’une évaluation diagnostique et pronostique, tandis que les injections épidurales suivant le premier geste, considérées comme actes thérapeutiques, reçoivent le codage AFLB 007 ; que cependant il ressort des pièces du dossier que le Dr M a systématiquement utilisé le code AFLB 007 pour huit patients cités dans les plaintes : n° 518 (à 10 reprises en un an), n° 196 (à 8 reprises), n° 491 (à 7 reprises), n° 195 (à 6 reprises), n° 106 (à 4 reprises), n° 404 (à 2 reprises) et nos 78, 439, 612 et 666 (à une reprise) ; qu’ainsi les facturations correspondant à ces actes ont revêtu un caractère abusif ;

Considérant, en second lieu, qu’il est reproché au Dr M d’avoir systématiquement associé, dans 27 dossiers, la cotation MZJB 001, correspondant à l’évacuation d’une collection articulaire du membre supérieur, et la cotation MZLB 001, correspondant à l’injection thérapeutique dans une articulation du membre supérieur, ainsi que, dans 16 dossiers, la cotation NZJB 001, prévue pour l’évacuation d’une collection articulaire du membre inférieur et la cotation NZLB 001, prévue pour une injection thérapeutique dans une articulation du membre inférieur ; que cette association est qualifiée d’abusive par les plaignants au motif que la quantité du liquide enlevé est trop faible pour qu’il s’agisse d’une collection articulaire justifiant son évacuation ; que cependant le Dr M fait à juste titre valoir que la CCAM ne fournit aucune précision quant à la quantité de liquide articulaire susceptible de nécessiter une évacuation et que celle-ci se justifiait pour les patients en cause ; que, dans ces conditions, le grief d’actes techniques abusifs ne peut être retenu pour les dossiers cités à ce titre dans les plaintes ; qu’en revanche il y a lieu de retenir comme fautive la facturation dans cinq dossiers (nos 34, 114, 439, 540, 609) de Hyalgan ® dans l’épaule, ce produit ne disposant pas de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication ;

3 – Sur le grief relatif à la discordance entre les comptes rendus communiqués au médecin-conseil et ceux adressés aux médecins traitants :

Considérant, qu’ainsi qu’il en est fait reproche au Dr M, les discordances de rédaction constatées dans huit dossiers (nos 167, 191, 193, 194, 190, 439, 535 et 667) sont de nature à jeter un doute important quant à la sincérité des mentions portées sur les comptes rendus établis par lui ;

Considérant que ceux des faits ci-dessus relevés à l’encontre du Dr M doivent être qualifiés de fautes et abus et sont susceptibles de lui valoir le prononcé d’une sanction, en application des dispositions des articles L 145-1 et L 145-2 du code de la sécurité sociale ; qu’il sera fait une juste appréciation de la gravité du comportement fautif du Dr M en lui infligeant une interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une période de six mois, dont trois mois avec le bénéfice du sursis ; que, en application des dispositions de l’article L 145-2-4 du code de la sécurité sociale, le Dr M devra d’une part, reverser à la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle la somme de 12815,24 euros correspondant au trop remboursé par elle en raison des facturations abusives d’actes de radiographie et d’actes techniques médicaux retenues dans les dossiers ci-dessus cités, et d’autre part verser à cette même caisse les sommes de 1334,07 euros, correspondant au trop perçu d’honoraires par le Dr M du fait de facturations abusives d’actes de radiographie pour les dossiers nos 1 à 190, et de 3276,90 euros pour de telles facturations dans les dossiers nos 200 à 665, et de la somme de 179,32 euros correspondant au trop perçu d’honoraires par le Dr M du fait de facturations abusives d’actes techniques médicaux pour les dossiers nos 78, 106, 195, 196, 439, 518 et 612, lesquelles sommes seront réparties par la caisse primaire d’assurance maladie entre les assurés sociaux ayant indument versé ces honoraires ;

Considérant qu’il y a lieu d’ordonner la publication de cette sanction pendant une période de six mois ;

Sur l’application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans la présente instance, les plaignants n’étant pas la partie perdante, il n’y a pas lieu de les condamner à verser au Dr M la somme de 3000 euros qu’il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur le timbre fiscal :

Considérant qu’il y a lieu de condamner le Dr M à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle la somme de 70 euros correspondant au montant des timbres fiscaux acquittés en première instance et en appel ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1er : La décision de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Lorraine, en date du 15 novembre 2012, est annulée.

Article 2 : Il est infligé au Dr Jean-François M la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant six mois. Il sera sursis pour une durée de trois mois à l’exécution de cette sanction dans les conditions fixées à l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale.

Article 3 : L’exécution de cette sanction pour la partie non assortie du sursis, prononcée à l’encontre du Dr M prendra effet le 1er janvier 2014 à 0 h et cessera de porter effet le 31 mars 2014 à minuit.

Article 4 : Le Dr M devra reverser à la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, d’une part, la somme de 12815,24 euros, et d’autre part verser à cette même caisse la somme de 4790,29 euros qui sera répartie par elle pour le remboursement des assurés sociaux mentionnés dans la présente décision.

Article 5 : Le Dr M devra rembourser la somme de 70 euros à la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle.

Article 6 : La publication de cette sanction sera assurée par les soins de la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, par affichage, dans ses locaux administratifs ouverts au public pendant six mois à compter du 1er janvier 2014.

Article 7 : La requête du Dr M est rejetée.

Article 8 : La présente décision sera notifiée au Dr M, à la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Meurthe-et-Moselle, à la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Lorraine, au conseil départemental de l’Ordre des médecins de Meurthe-et-Moselle, au directeur général de l’Agence régionale de santé de Lorraine, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé de l’agriculture.

Délibéré dans la même composition qu’à l’audience du 19 septembre 2013, où siégeaient M. SAUZAY, Conseiller d’Etat honoraire, président ; M. le Dr COLSON, membre titulaire, et M. le Dr LE DOUARIN, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr HECQUARD, membre titulaire et Mme le Dr GUERY, membre suppléant, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Lu en séance publique le 16 octobre 2013.

LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

P. SAUZAY
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER

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Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 16 octobre 2013, n° 5013