Conseil national de l'ordre des médecins, Chambre disciplinaire nationale, 4 janvier 2013, n° 11302

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Résumé de la juridiction

Ordonnances – Papiers professionnels – Praticien, qualifié en médecine générale, diplômé de la faculté de médecine de Paris en 1993, a une activité orientée vers la médecine et la chirurgie du pied. Si le papier à en-tête du «service de chirurgie viscérale-orthopédique-urologique» de l’hôpital où il exerçait à l’époque des faits, comporte la mention de son nom associée à "Chirurgie du pied" et si le praticien ne conteste pas ne pas avoir demandé la rectification de cette mention erronée, le manquement à l’article R. 4127-20 CSP, selon lequel : «Le médecin doit veiller à l’usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations», n’est pas exclu du bénéficie de l’amnistie.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, ch. disciplinaire nationale, 4 janv. 2013, n° 11302
Numéro(s) : 11302
Dispositif : Rejet de la plainte Annulation

Sur les parties

Texte intégral

N° 11302 ________________
Dr Alain C ________________
Audience du 15 novembre 2012
Décision rendue publique par affichage le 4 janvier 2013
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, enregistrée au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins le 27 avril 2011, la requête présentée pour le Dr Alain C, qualifié en médecine générale ; le Dr C demande à la chambre :
- l’annulation de la décision n° C.2010-2581, en date du 25 mars 2011, par laquelle la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France, statuant sur la plainte de Mme Fatima T, transmise par le conseil départemental de la Ville-de-Paris, qui s’y est associé, lui a infligé la peine du blâme ;
- le rejet des plaintes ;
- la condamnation de Mme T à lui verser la somme de 2.000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Le Dr C soutient que, le 24 novembre 1998, il a opéré Mme T d’une déformation du pied gauche (hallux valgus et quintus varus) ; qu’il l’a suivie régulièrement jusqu’en 2000 sans observer aucune anomalie ; que la patiente, qui, en 2006, souffrait de douleurs du rachis, a incriminé l’opération de 1998 et attaqué l’Hôpital Notre-Dame de Bon Secours et le Dr C devant le tribunal de grande instance de Paris qui a ordonné une expertise ; que cette expertise est toujours en cours ; que Mme T estime avoir été trompée sur la qualification du Dr C qui se serait présenté comme « chirurgien orthopédique podologue » alors qu’il est seulement « médecin podologue » ; qu’à l’époque des faits, il exerçait à l’hôpital Notre-Dame de Bon Secours dans le service du Dr Guy D ; qu’il ne s’est jamais présenté à ses patients comme chirurgien ; qu’en tant que médecin salarié, il n’avait pas compétence pour la rédaction des formulaires du service ; qu’aucune violation des articles R. 4127-35 et -36 du code de la santé publique ne peut lui être imputée ; qu’eu égard à sa formation et à son expérience, il était parfaitement qualifié pour pratiquer des actes de chirurgie du pied ; que l’échec de sa demande de qualification résulte de la fermeture des services dans lesquels il exerçait ; qu’en tout état de cause, les faits qui lui sont reprochés doivent être amnistiés en application de la loi du 6 août 2002 ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 30 juin 2011, le mémoire en défense présenté pour Mme Fatima T, tendant au rejet de la requête et à ce que la somme de 3.000 euros soit mise à la charge du Dr C au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Mme T soutient qu’il est incontestable que le Dr C n’était pas qualifié en chirurgie du pied lorsqu’il l’a opérée en 1998 ; que la podologie n’est pas une spécialité reconnue ; qu’elle conteste les résultats de l’expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Paris qui a été très traumatisante pour elle ; que le Dr C s’est présenté à elle comme chirurgien du pied ; qu’il est responsable de l’usage fait de son nom et de sa qualification par l’hôpital qui l’employait ; qu’elle a été trompée ; que le Dr C a méconnu les articles suivants du code de déontologie : 48 (liberté de choix du médecin par le malade), 35 (qualité de l’information donnée aux patients), 81 (titres et diplômes reconnus) ; que le Dr C dont les attestations produites établissent qu’il assistait des chirurgiens qualifiés a, en l’espèce, opéré seul ; que les faits reprochés, étant contraires à la probité, ne peuvent être amnistiés ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 5 août 2011, le mémoire en réplique présenté pour le Dr C qui reprend les conclusions et les moyens de sa requête ;

Le Dr C soutient, en outre, qu’il n’a jamais délivré d’information inexacte à ses patients et, au contraire, a fait tout ce qui était nécessaire pour régulariser son exercice ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 16 octobre 2012, le mémoire présenté pour le conseil départemental de la Ville-de-Paris qui conclut au rejet de la requête ;

Le conseil départemental soutient qu’à l’époque des faits, le Dr C se présentait comme chirurgien du pied ainsi qu’il résulte de l’ensemble des documents figurant au dossier (papier à en-tête du service de chirurgie orthopédique de l’hôpital Notre-Dame de Bon Secours, compte rendu opératoire du 24 novembre 1998, documents du dossier médical, expertises) ; que la qualification du médecin fait partie des informations qui doivent être données aux patients ; que le fait pour un médecin de se faire passer pour chirurgien est exclu de l’amnistie ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 9 novembre 2012, le mémoire en réponse présenté pour le Dr C qui persiste dans les conclusions et les moyens de sa requête et demande la condamnation in solidum de Mme T et du conseil départemental à lui verser 2.000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Le Dr C s’étonne, en outre, des accusations portées contre lui par le conseil départemental de la Ville-de-Paris qui avait encouragé et encadré ses démarches pour régulariser sa situation et s’était servi de son cas pour montrer une lacune de la réglementation relative aux qualifications ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de la santé publique, notamment le code de déontologie médicale figurant aux articles R. 4127-1 à R. 4127-112 ;

Vu la loi n°2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu l’article 75-I de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Vu le rapport d’expertise, en date du 10 février 2011, et le jugement du tribunal de grande instance de Paris, en date du 18 juin 2012 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 novembre 2012 :

 – Le rapport du Dr Ducrohet ;

 – Les observations de Me Vogel pour le Dr C et celui-ci en ses explications ;

 – Les observations de Me El Heit-Araimi pour Mme T et celle-ci en ses explications ;

 – Les observations de Me Piralian pour le conseil départemental de la Ville-de-Paris ;

Le Dr C ayant été invité à reprendre la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, 1. Considérant que, par une plainte à laquelle le conseil départemental de la Ville de Paris s’est associé, Mme T a reproché au Dr C, qui l’a opérée du pied en 1998, de lui avoir donné une information inexacte sur sa qualification et d’avoir pratiqué un acte chirurgical pour lequel il ne disposait pas des compétences requises ; que la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France a accueilli ces plaintes et, estimant que les faits reprochés étaient insusceptibles de bénéficier de l’amnistie, a infligé un blâme au Dr C ;

2. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le Dr C, diplômé de la faculté de médecine de Paris en 1993, a, dès le début de sa carrière, orienté son activité vers la médecine et la chirurgie du pied, spécialité qu’il a pratiquée continûment pendant plusieurs années au sein d’équipes hospitalières de référence ; que, bien qu’il n’ait pas obtenu la qualification de chirurgien orthopédiste, qui ne pouvait d’ailleurs pas lui être reconnue en raison de la spécificité de son expérience professionnelle, il n’en était pas moins compétent pour pratiquer des actes, y compris chirurgicaux, relevant de la podologie ; qu’il résulte du rapport de l’expertise diligentée par le tribunal de grande instance de Paris qui en a entériné les conclusions par un jugement du 18 juin 2012, que les soins dispensés à Mme T par le Dr C ont été « attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science » et qu’aucun lien n’existait entre l’intervention de 1998 et les troubles dont se plaint Mme T ; qu’ainsi, en pratiquant seul l’intervention dont il s’agit, le Dr C n’a pas excédé ses compétences ; qu’il n’est pas établi qu’il se soit présenté lui-même à la patiente autrement que comme médecin podologue ;

3. Considérant que, si le papier à en-tête du « service de chirurgie viscérale-orthopédique-urologique » de l’hôpital Notre-Dame de Bon Secours, où le Dr C exerçait à l’époque des faits, comporte la mention « Assistants : Docteur A. C Chirurgie du pied » et si le Dr C ne conteste pas ne pas avoir demandé la rectification de cette mention erronée, le manquement ainsi constitué aux dispositions de l’article R. 4127-20 du code de la santé publique, selon lesquelles : « Le médecin doit veiller à l’usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations», n’est pas contraire à l’honneur professionnel et à la probité ; que, commis avant le 17 mai 2002, il doit bénéficier de l’amnistie ;

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le Dr C est fondé à demander l’annulation de la décision attaquée lui infligeant la peine du blâme ;

5. Considérant que le I de l’article 75 de la loi de 1991 fait obstacle à ce qu’une somme soit allouée à Mme T au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions du Dr C ayant le même objet ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1er : La décision de la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France, en date du 25 mars 2011 est annulée.

Article 2 : Les plaintes de Mme T et du conseil départemental de la Ville-de-Paris ainsi que le surplus des conclusions de la requête du Dr C sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au Dr Alain C, à Mme Fatima T, au conseil départemental de la Ville-de-Paris, à la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France, au préfet de Paris, au directeur général de l’agence régionale de santé d’Ile-de-France, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, au conseil national de l’Ordre des médecins, au ministre chargé de la santé.

Ainsi fait et délibéré par : Mme Aubin, président de section honoraire au Conseil d’Etat, président ; M. le Pr Zattara, MM. les Drs Blanc, Chow-Chine, Ducrohet, Kennel, Marchi, membres.

Le président de section honoraire au Conseil d’Etat, président de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins

Marie-Eve Aubin
Le greffier en chef


Isabelle Levard

La République mande et ordonne au ministre de la santé en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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