Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, rapport du rapporteur, Affaire 207 - Respect du principe d'impartialité, n° 486-D

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
ONPH

Texte intégral

AFFAIRE Mme A
Document n°486-R
Le rapporteur
Le 7 novembre 2005, a été enregistrée au conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de
Rhône-Alpes, une plainte formée par le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de cette région à l’encontre de Mme A qui, par arrêté préfectoral du 20 mai 2005, venait d’obtenir l’autorisation de transférer son officine du … au …. L’intéressée, dans sa déclaration d’exploitation enregistrée par arrêté préfectoral du 17 août 2005, avait fait savoir qu’elle exercerait dans ses nouveaux locaux à compter du 26 août 2005.

I- ORIGINE DE LA PLAINTE
Le 8 septembre 2005, Mme B, pharmacien inspecteur, se rendait sur les lieux et constatait que le local dans lequel le transfert avait été autorisé était en cours de démolition et que la pharmacie avait été installée à proximité dans un module de type algéco de 55 m2.
Par ailleurs, Mme A a précisé :
• avoir fermé son officine …, le 31 juillet ;
• avoir transféré son activité le 26 août du … au … ;
• avoir exercé la journée du 26 août dans un local ayant fait l’objet de la licence de transfert et de la déclaration d’exploitation ;
• l’avoir fait constater par huissier de justice ;
• avoir fermé du 27 août au 31 août inclus après une seule journée d’exercice ;
• avoir emménagé dans son algéco le 1er septembre.
Le DRASS a estimé qu’il n’était pas contestable que Mme A avait abusé l’administration et les instances de l’Ordre en s’installant, à l’issue d’un exercice d’une journée dans le local initialement autorisé, dans une structure de type algéco qui, elle, ne l’était pas. En agissant de la sorte, Mme A a voulu sciemment enfreindre les dispositions d’ordre réglementaire et déontologique. En effet, il n’est pas imaginable que Mme A ait procédé aux aménagements auxquels elle s’était engagée pour une seule journée d’exercice avant démolition. En cela, elle n’aurait donc pas respecté l’aménagement des locaux tel qu’il était prévu dans la demande de licence de transfert. Par ailleurs, le « transfert sauvage » dans un algéco n’a fait l’objet d’aucune déclaration à l’inspection régionale de la pharmacie et au conseil régional de l’Ordre des pharmaciens, ainsi que le prévoit l’article R. 5125-12 du code de la santé publique (CSP).
Faisant remarquer que, de surcroît, le transfert dans les nouveaux locaux n’avait aucun caractère d’urgence (art. L. 5125-7 du CSP laissant un délai d’un an à courir à partir du jour de notification de l’arrêté accordant la licence), le plaignant visait dans sa plainte des infractions aux articles R. 5125-12, R. 4235-17 et R. 4235-30 du CSP (ANNEXE I).
I- PREMIERE INSTANCE
Par courrier enregistré le 22 novembre 2005, Mme A informait l’Ordre qu’en exécution d’une ordonnance du juge des référés du TGI de …, en date du 2 novembre 2005, elle 4, avenue Ruysdaël 75379 Paris Cedex 08
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Ordre national des pharmaciens n’exerçait plus dans sa structure algéco, mais dans une partie du local initialement prévu, dans le bâtiment en cours de travaux (ANNEXE II).
Le rapporteur de première instance a rencontré Mme A à son officine le 9 janvier 2006.
Celle-ci lui a déclaré ne pas avoir « enfreint sciemment » des dispositions réglementaire ou déontologique. Elle n’avait pas prévu en effet de réaliser immédiatement les travaux envisagés. En fait, leur programmation a été avancée parce qu’au cours des aménagements réalisés début août, le toit et la charpente du bâtiment se sont avérés défectueux. Mme A affirme que les aménagements décrits dans le dossier de transfert ont bien été réalisés en août par son mari, le mobilier de l’ancienne pharmacie ayant été installé dans les nouveaux locaux. Mme A conteste le terme de démolition avant le réaménagement (seuls le toit et les baies vitrées ayant été démontés). Elle considère n’avoir nullement transféré dans l’urgence et si la charpente et le toit ne s’étaient pas avérés défectueux, elle aurait exploité son officine dans la configuration du dossier de transfert, bien au-delà d’une journée. Mme A conteste également avoir effectué un « transfert sauvage », mais ne pouvant travailler dans des conditions raisonnables, reconnaît avoir simplement exercé pendant les travaux dans un algéco situé à la même adresse. Si elle reconnaît ne pas avoir déclaré immédiatement à l’inspection et à l’Ordre les modifications de ses conditions d’installation (cela ne sera fait que le 2 septembre 2005), elle relève que l’art. R. 5125-12 du CSP, s’il précise bien l’obligation d’une déclaration, ne semble pas stipuler que celle-ci doive être faite avant qu’il ne soit procédé auxdites modifications. Selon elle, si un aménagement dans un algéco, pendant des travaux, doit être déclaré, il n’est pas établi que celui-ci, comme le suggère le plaignant, doive être préalablement autorisé. En fin d’entretien, Mme A a fait part au rapporteur de plusieurs remarques :
- elle a déclaré, tout d’abord, exercer dans le respect des lois et des bonnes pratiques ;
- elle s’est étonnée du fait que, lors de l’inspection, Mme B ne l’ait pas informée qu’une plainte serait déposée pour non déclaration d’aménagement dans un algéco ;
- elle s’est étonnée également d’avoir reçu une plainte en référé avec ordre de fermeture sans avoir été au préalable contactée, ni par l’Ordre, ni par l’inspection et que si tel avait été le cas, elle aurait été tout à fait disposée à faire ou fournir tout ce qui lui était demandé, (référé reçu le 16 novembre 2005, fermeture de l’ algéco le 19 novembre 2005, ouverture d’une partie des nouveaux locaux le 21 novembre 2005) ;
- elle s’est étonnée, enfin, ayant vu passer de façon régulière à proximité de son officine des confrères de …, que personne ne l’ait prévenue des erreurs qu’elle reconnaît avoir commises en toute bonne foi, estimant cette démarche peu confraternelle (ANNEXE III).
Le 9 février 2006, le CROP de Rhône-Alpes a décidé la traduction de Mme A en chambre de discipline (ANNEXE IV).
Avant l’audience disciplinaire, un mémoire dans l’intérêt de Mme A a été versé au dossier (ANNEXE V). A titre principal, cette dernière demandait le renvoi de l’examen du dossier à un autre conseil régional et, à titre subsidiaire, qu’aucune faute disciplinaire ne soit retenue à son encontre.
Lors de son audience du 31 janvier 2008, la chambre de discipline du CROP de Rhône-Alpes a prononcé à l’encontre de Mme A, une interdiction d’exercer la pharmacie pour une durée d’un mois (ANNEXE VI).
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Ordre national des pharmaciens 2 II- APPEL
Cette décision lui ayant été notifiée le 15 février 2008, Mme A en a interjeté appel, sa requête étant enregistrée au greffe du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens le 7 mars 2008 (ANNEXE VII). L’intéressée rappelle ses différentes tentatives pour transférer son officine du … à … … en 2004 (avis défavorable du CROP du 26 février 2004) puis au … en 2005 (avis négatif du CROP du 24 mars 2005). Le transfert a été malgré tout accepté par un arrêté préfectoral du 20 mai 2005. Le CROP a déposé alors un recours contre cet arrêté en juillet 2005, toujours pendant devant le tribunal administratif de …. Mme A a procédé, néanmoins, à l’ouverture de son officine le 26 août 2005 dans les circonstances décrites en première instance. Par acte en date du 3 octobre 2005, le conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Rhône-Alpes a assigné Mme A devant le juge des référés du tribunal de grande instance de … et a sollicité, sur le fondement des dispositions de l’art. L. 5125-3 et suivants du code de la santé publique et l’art. 809, alinéa 1, du nouveau code de procédure civile, qu’il soit ordonné la suspension de l’activité de pharmacie exercée par Mme A, …, à …, et ce jusqu’à la production d’une licence de transfert prenant pour référence les locaux dans lesquels sera effectivement exercée l’activité. Le conseil de l’Ordre a sollicité l’exécution de cette mesure sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et a demandé la condamnation de Mme A à verser une somme de 3 000 euros au conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de RhôneAlpes sur le fondement des dispositions de l’art. 700 du nouveau code de procédure civile.
Par la suite, et dans le cadre de conclusions déposées, le conseil régional des pharmaciens modifiait son dispositif et indiquait que l’illégalité consistait en ce que Mme A exerçait dans des algéco, sans autorisation. Finalement, le juge des référés du tribunal de grande instance de …, dans son ordonnance en date du 2 novembre 2005, a statué exclusivement sur la question de savoir si Mme A pouvait, durant le temps des travaux, exercer son activité dans une structure mobile de type algéco. Le juge des référés ordonnait à Mme A, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter du 5e jour suivant la signification de la présente, ordonnance, de suspendre son activité de pharmacie dans un module algéco implanté …, à …, et ce jusqu’à la réinstallation dans le bâtiment situé à la même adresse et actuellement en cours de travaux. Le conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Rhône-Alpes n’a pas interjeté appel de cette décision. C’est en raison de ces différentes actions intentées par le
CROP Rhône-Alpes à l’encontre de Mme A que celle-ci estime que la chambre de discipline dudit conseil, compte tenu de sa composition, ne peut être qualifié de « tribunal impartial » et qu’il y a donc eu violation de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
« Dans sa décision, le conseil régional a estimé que le fait que le même conseil régional de l’Ordre ait contesté la légalité de l’arrêté du préfet de … et ait engagé une action devant le juge des référés n’entachait pas de partialité, ni de dépendance, la décision qui devait être rendue par la chambre de discipline sous la présidence d’un magistrat de l’ordre administratif. Or, cette décision est critiquable, dans la mesure où il ne peut pas être contesté que le conseil de discipline est constitué par des membres du conseil de l’Ordre qui sont à l’origine de procédures engagées à l’encontre de Mme A. Le fait que le président ait une voix prépondérante dans le cas de partage de voix n’est pas un élément suffisamment déterminant dans la décision rendue, pour être un gage d’impartialité. » 4, avenue Ruysdaël 75379 Paris Cedex 08
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Ordre national des pharmaciens 3 Ensuite, à titre subsidiaire, Mme A revient sur chacune des infractions reprochées :
- Art. R. 5125-12 du CSP, il n’est pas contesté que, postérieurement à l’octroi de la licence, Mme A a entendu procéder à des travaux autres que ceux qui étaient prévus initialement. En effet, si, en janvier 2005, Mme A n’avait pas prévu de réaliser les travaux qu’elle a ensuite projeté de faire, cela n’impliquait pas pour autant qu’elle renonçait à réaliser dans le futur des travaux dans le local dont il s’agit. Il s’avère que la programmation de ces travaux a été avancée parce que, aux cours de l’été 2005, le toit et la charpente du bâtiment se sont avérés défectueux. La prise de possession du local a eu lieu début juillet. Une entrée d’argent concomitante a facilité les choses.
Qui plus est, un compromis de vente en date du 6 juillet 2005 avait été régularisé sur le local rue …. Lorsque, par nécessité, Mme A a projeté d’effectuer des travaux dans le local où elle avait obtenu l’autorisation d’exploiter, elle en a informé rapidement les services de l’inspection par courrier daté du 2 septembre 2005. Bien qu’elle regrette de ne pas avoir dans le même temps prévenu l’Ordre, il n’y a pas eu d’infraction à l’art. R. 5125-12 du CSP suffisamment établi pour justifier une sanction disciplinaire. De plus, Mme A, contrairement à ce qui a été indiqué dans la décision de première instance, n’a jamais pensé que le déplacement de son activité dans un algéco pour une durée maximum de trois mois puisse constituer une « modification substantielle des conditions d’installation de l’officine ». En tout état de cause, l’art.
R. 5125-12 ne précise pas ce qu’il faut entendre par « modification substantielle dans les conditions d’installation ». Sa lecture peut légitimement laisser penser que la déclaration préalable ne s’impose pas dans le cas de modification temporaire. D’autre part, autant la sanction est légitime dans le cas où l’absence de déclaration est faite dans le but d’échapper à tout contrôle, autant elle est illégitime, dans le cas où l’absence de déclaration est faite par méconnaissance des textes ou imprécision des textes. Ce qui est le cas en l’espèce.
- Art. R. 4235-17 du CSP, Mme A estime que, là encore, elle n’a nullement manqué aux dispositions de cet article. En effet, le fait que, postérieurement à l’octroi de la licence, elle est entendue procéder à des travaux, n’a eu aucune incidence sur la licence de transfert, dans la mesure où ces travaux ne modifiaient pas l’emplacement de la pharmacie. Il doit être rappelé que si le transfert d’une officine d’un point à un autre dans une même commune est encadré, c’est afin d’assurer une desserte optimale de la population. C’est d’ailleurs pour cette raison que la licence qui autorise le transfert est donnée pour un emplacement déterminé. En l’espèce, l’arrêté du 20 mai 2005 a autorisé le transfert de l’officine au …. En l’espèce, les travaux projetés ne modifiaient pas l’accès à la pharmacie, ni l’emplacement du bâtiment puisque la structure porteuse du bâtiment a été conservée. Les travaux qui ont été réalisés consistaient à refaire la toiture et la devanture et non pas à démolir pour reconstruire un nouveau bâtiment, comme cela semble avoir été mentionné dans le rapport d’enquête. Mme A a, d’ailleurs, bien confirmé que les travaux de réaménagement n’ont pas nécessité la démolition de murs porteurs, ni de surélévation, seuls le toit et les baies vitrées du bâtiment ont été démontés. A ce titre, Mme A a fait remarquer que les engins de chantier présents sur les lieux avaient uniquement servi à l’extraction des cuves à essence et non pas au creusement d’une cave, comme cela a été sousentendu. Sur ce point, il convient de noter qu’un pharmacien appartenant au conseil de l’Ordre s’est plaint auprès des services de l’urbanisme de …, qu’il y avait eu démolition sans permis de démolition. Après instruction du dossier, les services de 4, avenue Ruysdaël 75379 Paris Cedex 08
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Ordre national des pharmaciens 4 l’urbanisme ont estimé qu’aucune demande de permis de démolir n’était exigible, puisqu’il n’y avait pas démolition. De la même façon, le fait que Mme A ait dû exercer temporairement son activité dans l’algéco ne peut pas s’analyser comme étant un transfert. En effet, le transfert nécessite qu’il y ait déplacement de l’officine d’un lieu à un autre, ce qui n’est pas le cas s’agissant des algéco.
Enfin, concernant l’art. R. 4235-30 du CSP, Mme A, réaffirmant sa bonne foi, ne considère pas avoir abusé l’administration ou les instances ordinales.
Par courrier enregistré le 9 avril 2008, le DRASS de Rhône-Alpes n’a pas souhaité faire de remarque sur l’appel interjeté par Mme A (ANNEXE VIII).
Enfin, le 17 novembre 2008, j’ai reçu au siège du Conseil national Mme A assistée de M. A (pharmacien inscrit en Section D). Ils ont confirmé que l’ouverture de la pharmacie, après transfert, a bien été faite dans des locaux conformes aux plans déposés à la DASS, mais qu’en raison d’une rentrée d’argent de biens propres, ils avaient réalisé d’importants travaux dans la nouvelle officine ayant entraîné l’exercice provisoire dans un Algéco. L’intéressée estime que la sanction de première instance est disproportionnée par rapport aux faits reprochés et demande qu’elle soit ramenée à de plus justes proportions (ANNEXE IX).
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il vous appartient de dire la suite devant être réservée à l’appel interjeté par Mme A.

20 novembre 2008
Le rapporteur
Signé 4, avenue Ruysdaël 75379 Paris Cedex 08
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