Tribunal administratif de La Réunion, n° 0300871

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Sur la décision

Référence :
TA La Réunion, n° 0300871
Juridiction : Tribunal administratif de La Réunion
Numéro : 0300871
Décision précédente : Tribunal administratif de La Réunion, 5 septembre 2002

Texte intégral

DP/NR

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE SAINT DENIS DE LA REUNION

N° 0300871

___________

M. Z Y

c/

Service des pensions de la Poste

Ministre de l’économie, des finances

et de l’industrie

__________

Audience du 21 aoùt 2003

Lecture du 21 aoùt 2003

___________

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Juge des référés

du Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion

rend l’ordonnance suivante :

1) Le litige et la procédure

Par une requête enregistrée au greffe le 25 juillet 2003, sous le n° 0300871, M. Z Y, fonctionnaire de l’Etat en fonction à la Poste de la Réunion, domicilié XXX, XXX, demande au Juge des référés du Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion de suspendre l’exécution de la décision du 2 juillet 2003 par laquelle le directeur de la Poste de la Réunion a refusé de faire droit à sa demande d’admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension ; il demande en outre d’enjoindre à la Poste, de statuer à nouveau sur sa demande dans le délai de quinze jours, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

Il soutient que l’urgence est établie ; que sa demande était conforme aux dispositions de l’article 3 du décret du 2 octobre 1980 ; que l’urgence s’apprécie en fonction des conséquences du refus de l’administration au regard de la date du 31 décembre 2003 ; que sa requête au fond ne sera pas jugée dans des délais compatibles avec les exigences posées au second alinéa de l’article 3 du décret du 2 octobre 1980 ; que la constitution de son dossier de pension se trouve paralysée ; que ce refus le prive de son droit fondamental à percevoir sa pension laquelle s’avère substantielle eu égard à des états de services ; que seule la voie du référé peut lui permettre de sauvegarder ses droits eu égard aux délais incompressibles pour la constitution de son dossier de pension ; qu’en outre, un moyen sérieux existe, tiré du fait qu’au regard de l’article 141 du traité instituant la communauté européenne, un père de trois enfants vivants est en droit d’être admis à faire valoir ses droits à la retraite en vue d’obtenir la concession d’une pension à jouissance immédiate ; qu’en l’espèce, il a quatre enfants vivants ;

Par un mémoire enregistré le 5 aoùt 2003, la Poste et le service des pensions de la Poste et de France Télécom concluent au rejet de la requête ;

Ils font valoir que le droit interne en la matière n’a pas été modifié et que la demande d’astreinte n’est pas adaptée à l’espèce ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience publique qui a eu lieu le 21 aoùt 2003 ;

Le juge des référés a examiné la requête, la décision attaquée ainsi que les mémoires et les pièces produits par les parties ;

Il a présenté son rapport à l’audience publique et entendu les observations de :

— M. Y, requérant ;

2) La décision

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative et notamment l’article L 521-1 du code, la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, le décret 80-792 du 2 octobre 1980 et le code des pensions civiles et militaires de retraite, notamment son article L 24-1-3 a ;

Vu la décision en date du 6 septembre 2002 par laquelle le président du Tribunal administratif de Saint-Denis a désigné M. X, vice président, en qualité de juge des référés ;

Vu la requête n° 0300870 enregistrée le 25 juillet 2003 par laquelle M. Y demande au Tribunal administratif de Saint-Denis de prononcer l’annulation du refus de la Poste de l’admettre à la retraite avec jouissance immédiate à compter du 31 décembre 2003 ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : “Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…)” ;

Sur l’urgence ;

Considérant que M. Y a présenté le 26 juin 2003 une demande sollicitant son admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension pour le 31 décembre 2003 et ce, en conformité avec la procédure définie à l’article 3 du décret 80-792 du 2 octobre 1980 tendant à accélérer le règlement des droits à pension des retraités de l’Etat, lequel article dispose que cette demande doit être présentée six mois au moins avant la date à laquelle l’agent souhaite cesser son activité, ainsi que le souligne le requérant, eu égard aux délais d’instruction incompressibles d’une demande de liquidation et concession de pension ; que le 2 juillet 2003, la Poste de la Réunion a refusé de prononcer l’admission à la retraite de M. Y, pour le 31 décembre 2003, avec jouissance immédiate de sa pension ;

Considérant que l’urgence s’apprécie ce jour, en fonction des conséquences du refus au regard de la date pour laquelle M. Y a sollicité son admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension soit le 31 décembre 2003, dès lors qu’à cette date, l’intéressé remplit les conditions requises pour y être admis, contrairement à ce que soutient la Poste en défense ;

Considérant que le jugement de la requête 0300870 présentée par M. Y, tendant à l’annulation du refus qui lui a été opposé le 4 juillet 2003, n’interviendra pas dans un délai compatible avec les exigences posées par les articles 3, 5 et 6 du décret du 2 octobre 1980 ; que ce refus paralyse, ainsi que le souligne le requérant, la constitution de son dossier de pension et la concession de cette dernière pour le 30 novembre 2003 au plus tard conformément aux exigences de l’article 6 de ce même décret, l’admission à la retraite constituant un préalable à toute opération de concession ; qu’ainsi il résulte de l’ensemble de ces circonstances, et de la portée elle-même d’un tel refus, que l’intéressé se voit privé du droit fondamental qu’il possède de mettre un terme à sa carrière dans l’administration le 30 décembre 2003 par le biais d’une mise à la retraite, et d’obtenir par suite, avec jouissance immédiate, “l’allocation pécuniaire et viagère accordée en rémunération des services qu’il a accomplis”, prévue à l’article L1 du code des pensions civiles et militaires de retraites, allocation constitutive d’un revenu substantiel eu égard à l’état de services important dont fait état le requérant dans sa demande présentée le 26 juin 2003 ; que dès lors, eu égard à tout ce qui précède et aux conséquences graves et immédiates en résultant, la situation qui est celle de M. Y caractérise l’urgence à ce que soit suspendue l’exécution du refus qui lui a été opposé ;

Sur le sérieux des moyens ;

Considérant qu’aux termes de l’article 141 du traité instituant la Communauté européenne : “1. Chaque Etat membre assure l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces, ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier. L’égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d’une même unité de mesure ; b) que

la rémunération accordée pour travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail” ; que les pensions servies par le régime français de retraite des fonctionnaires entrent dans le champ d’application de ces stipulations ; que, nonobstant les stipulations de l’article 6, paragraphe 3, de l’accord annexé au protocole n° 14 sur la politique sociale, joint au traité sur l’Union européenne, le principe de l’égalité des rémunérations s’oppose à ce que la jouissance immédiate d’une pension de retraite accordée aux personnes qui ont assuré l’éducation de trois enfants au moins, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l’éducation de trois enfants au moins seraient exclus du bénéfice de cette mesure ;

Considérant que le a) du 3° du I de l’article L 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite institue la jouissance immédiate de la pension et en réserve le bénéfice aux “femmes fonctionnaires” lorsqu’elles sont mères de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre ou les ont élevés pendant au moins neuf ans ; que le moyen tenant à ce que ledit article, en n’accordant la pension à jouissance immédiate qu’aux agents de sexe féminin à la seule condition qu’elles soient mères de trois enfants, en excluant cette possibilité pour les agents de sexe masculin pères de trois enfants, introduirait une discrimination de rémunération en fonction du sexe contraire aux dispositions précitées de l’article 141 du Traité et qu’ainsi, l’autorité administrative, ne peut rejeter, sur ce fondement, la demande d’admission à la retraite de M. Y ; que ce moyen paraît, en l’état de l’instruction de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du refus opposé, l’intéressé ayant quatre enfants vivants ;

Considérant qu’il résulte de tout de ce qui précède qu’il y a lieu d’ordonner la suspension de la décision dont s’agit ;

Sur les mesures d’exécution ;

Considérant que, lorsque le juge des référés est saisi de conclusions tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l’exécution d’une décision de rejet, il lui appartient, si les conditions mises à l’octroi de la suspension sont réunies et alors au surplus qu’il est saisi de conclusions en ce sens, d’assortir le prononcé de la suspension de l’indication des obligations qui en découlent pour l’administration et qui peuvent notamment consister à réexaminer la demande dans un délai déterminé ;

Considérant qu’eu égard à la suspension du refus opposé à la demande de M. Y, il y a lieu d’enjoindre à la Poste, de statuer à nouveau sur la demande de radiation des cadres présentée par l’intéressé en vue de son admission à la retraite au 31 décembre 2003, avec jouissance immédiate de sa pension, et ce, dans le délai d’un mois suivant la notification de la présente ordonnance, en prenant en compte le droit actuel d’un père ayant élevé quatre enfants, d’être admis à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension ; qu’il devra être justifié de l’intervention de cette nouvelle décision par sa production devant le Tribunal de céans dans les 48 heures suivant l’expiration du délai d’un mois ci-dessus édicté ; qu’il y a lieu d’assortir cette injonction de production de la décision devant de Tribunal, d’une astreinte de quatre cents euros par jour de retard passé le délai de 48 heures ci-dessus précisé ;

ORDONNE :

Article 1er : L’exécution de la décision en date du 2 juillet 2003 du directeur de la Poste de la Réunion rejetant la demande d’admission à la retraite présentée par M. Y avec jouissance immédiate de sa pension est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au service des pensions de la Poste de statuer à nouveau sur la demande de M. Y visée à l’article 1er ci-dessus dans le mois de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : Il devra être justifié au Tribunal de céans de l’intervention de la nouvelle décision visée à l’article 2 ci-dessus, par sa production, au plus tard, dans les quarante huit heures suivant l’expiration du délai d’un mois visé à ce même article.

Article 4 : Une astreinte est prononcée à l’encontre du service des pensions de la Poste si la décision à intervenir visée à l’article 2 ci-dessus n’a pas été produite devant le Tribunal de céans dans le délai imparti à l’article 3 ci-dessus, et ce jusqu’à la date de sa production effective. Le taux de cette astreinte est fixé à quatre cents euros (400 euros) par jour de retard à compter de l’expiration du délai visé à l’article 3 ci-dessus.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Y, au service des pensions de la Poste et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

Prononcé en audience publique, le 21 aoùt 2003.

Le juge des référés, Le greffier en chef,

P. X R. BOURGIN

La République mande et ordonne

au ministre sus-indiqué, et à tous huissiers

de justice à ce requis en ce qui concerne

les voies de droit commun, contre les parties privées,

de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition certifiée conforme,

Le greffier en chef,

R. BOURGIN

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