Tribunal administratif de Lyon, 1er avril 2016, n° 1601980

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 1er avr. 2016, n° 1601980
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 1601980

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE LYON

N° 1601980

___________

Mme G B

___________

M. E Z

Juge des référés

___________

Ordonnance du 1er avril 2016

__________

C – EC

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 14 mars 2016 sous le n° 1601980, Mme G B, représentée par Me X, demande au juge des référés :

1°) de l’admettre au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d’ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision du 11 décembre 2015 par laquelle le centre communal d’action sociale de Lyon a rejeté sa demande de domiciliation, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

3°) d’ordonner au centre communal d’action sociale de Lyon de réexaminer sa demande dans un délai de sept jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du centre communal d’action sociale de Lyon une somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me X renonce à la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

Sur l’existence d’un moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée :

— la décision rejetant sa demande de domiciliation au motif qu’elle dispose d’un hébergement stable est entachée d’erreur de fait, d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation ;

— le dispositif d’hébergement d’urgence en milieu hôtelier dont bénéficie sa famille ne permet pas de retenir l’existence d’un hébergement stable pour l’application de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles ;

Sur la condition d’urgence :

— l’absence de domiciliation fait obstacle à son insertion sociale et professionnelle, ne permet pas d’assurer dans des conditions satisfaisantes le suivi médical de son enfant et la prive d’un accès aux droits sociaux ;

— la délivrance d’une carte de séjour temporaire est également compromise par l’absence de domiciliation ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2016, le centre communal d’action sociale de Lyon, représenté par la Selarl Cabinet d’Avocats Philippe Petit et Associés, avocat, conclut au rejet de la requête susvisée et à ce que soit mise à la charge de Mme B une somme de 100 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

— Mme B ne justifie pas d’une situation d’urgence dès lors que, compte tenu de l’antériorité de l’état de santé de son enfant, elle n’établit pas être dans l’attente d’une réponse concernant sa demande de couverture médicale universelle et que l’association auprès de laquelle elle était antérieurement domiciliée bénéficie d’un agrément délivré par le préfet du Rhône et est recensée dans le schéma départemental et métropolitain de domiciliation des personnes sans domicile stable ;

— la requérante ainsi que sa famille bénéficient d’une prise en charge par la cellule Hôtal-Association Le Mas dans la structure hôtelière Park & Suites Saint Cyr à Lyon depuis le 8 avril 2014 et ne remplit pas ainsi les conditions pour obtenir une domiciliation auprès du centre communal d’action sociale.

Vu la requête numéro 1601114, enregistrée le 11 février 2016 par laquelle Mme B demande l’annulation de la décision du 11 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’action sociale et des familles ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Z, président, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience, tenue le 31 mars 2016 à 14 heures.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Z, président,

— les observations de Me X, représentant Mme B, qui a repris les faits, moyens et conclusions exposés dans le mémoire introductif d’instance,

— les observations de Me Garaudet, représentant le centre communal d’action sociale de Lyon qui persiste dans ses écritures.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

1. Considérant que M. G B, de nationalité albanaise née le XXX, demande au juge des référés de suspendre l’exécution de la décision en date du 11 décembre 2015 par laquelle le directeur général des services du centre communal d’action sociale de Lyon a refusé de lui délivrer l’attestation de domiciliation prévue par les dispositions de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles ;

Sur la demande d’aide juridictionnelle provisoire :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : « Dans les cas d’urgence, sous réserve de l’application des règles relatives aux commissions ou désignations d’office, l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée (…) par la juridiction compétente ou son président » ; qu’il y a lieu d’accorder à Mme B le bénéfice de l’aide juridictionnelle à titre provisoire ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

3. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. » ; que l’article R. 522-1 de ce code précise, en son premier alinéa : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit (…) justifier de l’urgence de l’affaire. » ; que l’élection de domicile prévue par l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles est indispensable aux personnes sans domicile stable pour leur permettre d’accéder, notamment, « au service des prestations sociales, légales, réglementaires et conventionnelles » auxquelles ils sont susceptibles de prétendre et « à l’exercice des droits civils qui leur sont reconnus par la loi » ;

4. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que l’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ; qu’il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue ; que l’urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu des circonstances de l’espèce ;

5. Considérant qu’il ressort des pièces versées au cours de l’instruction que Mme B, ainsi que son conjoint et leur fils Y, né le XXX, ont bénéficié d’une précédente domiciliation auprès du centre communal d’action sociale de Lyon et font l’objet depuis le mois de mars 2014 d’un accompagnement par l’association Le Mas dans le cadre de leur hébergement au sein du dispositif d’hébergement d’urgence hôtelier ; que pour justifier d’une situation d’urgence à suspendre la décision refusant de renouveler cette domiciliation, Mme B, qui a levé le secret médical, se prévaut de l’état de santé de l’enfant Y, lequel fait l’objet d’une prise en charge et d’un suivi réguliers pour une pathologie cardiaque lourde et des troubles de la vision auprès de l’hôpital C D à Bron et de l’hôpital Edouard Herriot de Lyon ; que, par ailleurs, l’intéressée justifie avoir déposé auprès des services de la préfecture du Rhône une demande de titre de séjour à laquelle il a été favorablement répondu par un courrier du 23 octobre 2015, adressé au centre communal d’action sociale de Lyon, invitant l’intéressée à prendre rendez-vous en vue de déposer un dossier complet ; que si, à la suite du refus de renouvellement de la domiciliation dont elle bénéficiait, M. et Mme B et leur enfant ont pu être domiciliés à compter du mois de janvier 2016, auprès de l’association Le Mas par l’intermédiaire d’une assistante sociale de ladite association, cette domiciliation présente un caractère exceptionnel et temporaire ; que, dans ces conditions, le refus de renouvellement de la domiciliation dont bénéficiait antérieurement Mme B est de nature à révéler l’existence d’une situation d’urgence au sens des dispositions précitées de l’article L. 521-1 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu’aux termes de l’article L. 264-5 du code de l’action sociale et des familles : « L’organisme qui assure la domiciliation y met fin lorsque l’intéressé le demande, lorsqu’il acquiert un domicile stable ou lorsqu’il ne se manifeste plus. » ; que le moyen tiré de ce que le directeur général des services du centre communal d’action sociale de Lyon, en estimant que Mme B justifiait d’un domicile stable sur la commune de Lyon, a fait une inexacte application des dispositions précitées de l’article L. 264-5 du code de l’action sociale et des familles, est de nature à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision par laquelle a été refusé le renouvellement de l’attestation de domiciliation dont bénéficiait antérieurement la requérante ;

7. Considérant que, les conditions fixées par l’article L. 521-1 du code de justice administrative étant réunies, il y a lieu d’ordonner la suspension de la décision du directeur général des services du centre communal d’action sociale de Lyon du 11 décembre 2015 ;

8. Considérant que la présente ordonnance, eu égard aux motifs qui fondent la suspension prononcée, implique nécessairement que le centre communal d’action sociale de Lyon procède au réexamen de la situation de Mme B au regard de sa demande de domiciliation et prenne une nouvelle décision dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de la présente ordonnance ; qu’il n’y a pas lieu d’assortir cette mesure d’exécution d’une astreinte

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par le centre communal d’action sociale de Lyon et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du centre communal d’action sociale de Lyon la somme que demande Mme B sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée ;

O R D O N N E :

Article 1er : M. B est admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : L’exécution de la décision du 11 décembre 2015 par laquelle le directeur général des services du centre communal d’action sociale de Lyon a refusé de renouveler la domiciliation de Mme A suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au centre communal d’action sociale de Lyon de procéder au réexamen de la demande de domiciliation de Mme B et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme B est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par le centre communal d’action sociale de Lyon sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme G B et au centre communal d’action sociale de Lyon.

Fait à Lyon, le 1er avril 2016.

Le juge des référés, Le greffier,

D. Z E. COZETTE

La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

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