Tribunal administratif de Lyon, 7ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2109373

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 7e ch., 30 déc. 2022, n° 2109373
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 2109373
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance du 1er septembre 2021, enregistrée au greffe du tribunal le 24 novembre suivant, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a transmis au tribunal la requête présentée par Mme B A.

Par une requête, enregistrée le 27 août 2021 au greffe du tribunal administratif de Montpellier et trois mémoires, enregistrés les 8 décembre 2021 et les 18 avril et 2 décembre 2022, Mme A demande au tribunal d’annuler le titre de perception émis à son encontre le 30 novembre 2020 par le département d’exécution budgétaire et comptable (DEBC) de la plateforme interrégionale (PFI) du ministère de la justice de Lyon en vue du recouvrement de la somme de 1 024,51 euros, ainsi que la majoration de 10 % pour retard de paiement ayant porté cette somme à 1 126,51 euros.

Elle soutient que :

— le titre de perception en litige est mal fondé ;

— le délai de prescription de deux ans était écoulé.

La requête a été communiquée à la direction régionale des finances publiques Auvergne-Rhône-Alpes qui n’a pas produit de mémoire.

La requête a été communiquée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui n’a pas produit de mémoire en défense avant la clôture de l’instruction malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 11 juillet 2022, en application des dispositions de l’article R. 612-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général de la fonction publique ;

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

— la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

— la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ;

— la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 ;

— l’ordonnance n° 58-696 du 6 août 1958 ;

— le décret n° 66-874 du 21 novembre 1966 ;

— le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

— le décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 ;

— le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience, à laquelle elles n’étaient ni présentes, ni représentées.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. C ;

— et les conclusions de M. Arnould, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, surveillante principale de l’administration pénitentiaire affectée au pôle de rattachement des extractions judiciaires (PREJ) de Saint-Quentin-Fallavier, a été placée en congé de maladie ordinaire du 4 juin au 2 juillet 2018 et du 20 août au 15 octobre 2018, puis en congé pour maternité du 16 octobre 2018 au 15 avril 2019, et, enfin, en congé parental du 1er août 2019 au 30 août 2020, avant d’être réintégrée à compter du 31 août 2020. Par une lettre du 26 novembre suivant, la directrice des ressources humaines et des relations sociales de la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) Auvergne-Rhône-Alpes l’a informée de ce qu’un indu sur rémunération d’un montant de 1 024,51 euros avait été constaté et de ce qu’un titre de perception lui serait prochainement adressé. Le 30 novembre 2020, le département d’exécution budgétaire et comptable (DEBC) de la plateforme interrégionale (PFI) du ministère de la justice de Lyon a émis à l’encontre de l’intéressée un titre de perception d’un montant de 1 024,51 euros, correspondant à un « indu sur rémunération issu de paye de août 2019 ». Cette somme sera portée à 1 126,51 euros après une majoration de 10 % pour retard de paiement. Mme A a adressé au comptable assignataire de la créance une réclamation préalable qui a été transmise à l’administration le 3 mai 2021, puis rejetée le 21 mai suivant. La requérante demande au tribunal de prononcer l’annulation de la décision précitée du 30 novembre 2020 et de la pénalité pour retard de paiement qui lui a été infligée.

2. Selon les termes de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dans sa version applicable au litige : « Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n’est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l’absence d’information de l’administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d’avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d’informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale. / Les deux premiers alinéas ne s’appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits prise en application d’une disposition réglementaire ayant fait l’objet d’une annulation contentieuse ou une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font pour cette raison l’objet d’une procédure de recouvrement. ».

3. Il résulte de ces dispositions qu’une somme indûment versée par une personne publique à l’un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Dans les deux hypothèses mentionnées au deuxième alinéa de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, la somme peut être répétée dans le délai de droit commun prévu à l’article 2224 du code civil.

4. Sauf dispositions spéciales, les règles fixées par l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont applicables à l’ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération, y compris les avances et, faute d’avoir été précomptées sur la rémunération, les contributions ou cotisations sociales. En l’absence de toute autre disposition applicable, les causes d’interruption et de suspension de la prescription biennale instituée par les dispositions de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont régies par les principes dont s’inspirent les dispositions du titre XX du livre III du code civil. Il en résulte que tant la lettre par laquelle l’administration informe un agent public de son intention de répéter une somme versée indûment qu’un ordre de reversement ou un titre exécutoire interrompent la prescription à la date de leur notification. La preuve de celle-ci incombe à l’administration.

5. En l’espèce, il résulte de l’instruction, et en particulier de la lettre du 26 novembre 2020 par laquelle la directrice des ressources humaines et des relations sociales de la DISP Auvergne-Rhône-Alpes a informé Mme A de son intention de répéter des sommes qui lui avaient été indument versées, que le titre de perception en litige a été émis en vue du recouvrement d’une somme totale de 1 024,51 euros correspondant à des indus de rémunération sur la période comprise entre les mois de juin et octobre 2018, période au cours de laquelle d’une part, le jour de carence du 4 juin 2018, n’avait été que partiellement retiré de son traitement et où d’autre part, elle avait été rémunérée à plein traitement du 20 août au 15 octobre 2018, alors qu’elle avait été placée en congé de maladie ordinaire et ne devait percevoir qu’un demi-traitement. Les bulletins de paie de la requérante révèlent que ces sommes, versées à tort, ont été respectivement mises en paiement les 25 juin, 27 août, 24 septembre et 25 octobre 2018. Dès lors qu’il ne résulte pas de l’instruction qu’elles auraient été indûment versées à Mme A en raison de l’absence d’information de l’administration par l’intéressée de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d’avoir une incidence sur le montant de sa rémunération ou de la transmission d’informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale, la requérante soutenant à cet égard, sans être contredite, que sa situation était alors connue de son employeur a qui elle avait transmis ses différents arrêts de travail par courriels, ces sommes ne pouvaient respectivement être répétées que jusqu’aux 1er juillet, 1er septembre, 1er octobre et 1er novembre de l’année 2020, conformément aux dispositions précitées du premier alinéa l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000. Aussi, dès lors que ni la lettre précitée du 26 novembre 2020, ni le titre de perception contesté du 30 novembre suivant ne peuvent avoir été de nature à interrompre la prescription biennale prévue par ces dispositions, alors en outre qu’il ne résulte pas de l’instruction que cette lettre et ce titre auraient été notifiés à Mme A, qui soutient sans être contredite qu’ils ont été envoyés à deux adresses erronées, distinctes, alors enfin, que l’intéressée avait informé son employeur de son changement d’adresse dès le 25 octobre 2019 et que le garde des sceaux, ministre de la justice, qui n’a pas produit de mémoire en défense, n’établit ni même ne fait valoir que ce délai de prescription aurait été interrompu ou suspendu par une autre cause, la requérante est fondée à soutenir que la créance de l’État à son encontre était prescrite et l’exception de prescription biennale ainsi opposée doit, par suite, être accueillie.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l’annulation du titre de perception émis à son encontre le 30 novembre 2020 en vue du recouvrement de la somme de 1 024,51 euros, ainsi que, par voie de conséquence, celle de la majoration de 10 % pour retard de paiement ayant porté cette somme à 1 126,51 euros en application des dispositions de l’article 55 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010.

D É C I D E :

Article 1er : Le titre de perception émis le 30 novembre 2020 par le DEBC de la PFI du ministère de la justice de Lyon à l’encontre de Mme A, en vue du recouvrement de la somme de 1 024,51 euros et la majoration y afférente de 10 % pour retard de paiement ayant porté cette somme à 1 126,51 euros sont annulés.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée, pour information, au directeur régional des finances publiques Auvergne-Rhône-Alpes.

Délibéré après l’audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Baux, présidente,

M. Pineau, premier conseiller,

M. Gueguen, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

Le rapporteur,

C. C

La présidente,

A. Baux

La greffière,

S. Rolland

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Un greffier,

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