Tribunal administratif de Mayotte, 8 décembre 2006, n° 0600253

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Mayotte, 8 déc. 2006, n° 0600253
Juridiction : Tribunal administratif de Mayotte
Numéro : 0600253
Décision précédente : Tribunal administratif de Mayotte, 26 novembre 2006

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF CL

DE MAMOUDZOU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

N° 0600253

___________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

SOCIETE X B

___________

M. Y

Président Le juge des référés du Tribunal administratif

___________ de Mamoudzou,

Audience du 8 décembre 2006

Lecture du 8 décembre 2006

___________

Vu la requête enregistrée le 25 novembre 2006, présentée pour la Société X B, Compangie Générale des Eaux, direction de la Réunion sise XXX, par Me Cabanes, avocat ; la Société X B demande au juge des référés sur le fondement de l’article L.551-1 du code de justice administrative :

— d’annuler la procédure d’attribution par le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte (SIEAM), de la délégation, par affermage, du service public de production, de traitement, de stockage et de distribution d’B potable à Mayotte, et d’ordonner la reprise intégrale de cette procédure ;

— de condamner le SIEAM à lui verser la somme de 3000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— la procédure de publicité s’est déroulée de façon irrégulière et ce, d’un double point de vue : droit interne et droit européen ;

— la composition de la Commission de délégation de service public était irrégulière d’un double point de vue ;

— la Consultation de deux instances a été omise en cours de procédure, à savoir, le comité technique paritaire et la commission consultative des services publics locaux ;

— la Visite commune des installations le 17 mai 2006 a porté atteinte au principe de confidentialité et a, en outre, eu un impact sur l’établissement des offres et a ainsi porté atteinte à la libre concurrence entre candidats ;

— GTA Mayotte ne disposant pas des références requises, cette société n’aurait pas dû être admise à présenter une offre ;

— le choix de l’attributaire pressenti, intervient au regard d’un critère, social, sans rapport avec les critères d’ordre technique et financier prévus par le règlement de consultation ; que ce critère social favorise le fermier sortant et est, par suite, discriminatoire ;

Vu le mémoire enregistré le 30 novembre 2006, présenté pour le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte, par la Selarl interbarreaux LLC & Associés, représentée par Me Lefort, avocat ; le SIEAM conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société X B à lui verser la somme de 5000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

— l’ensemble des dispositions sur la délégation de service public en vigueur en métropole ne sont pas applicables à Mayotte ; qu’il en va de même du droit communautaire ; que l’avis d’appel public à la concurrence n’avait pas a être publié au niveau européen ;

— les moyens tirés de l’irrégularité afférente à la composition de la commission, à l’absence de convocation du comptable public et du représentant de la concurrence, au défaut de consultation du comité technique paritaire, de la commission consultative des services publics doivent être écartés ;

— la visite groupée du 17 mai 2006 s’est déroulée dans une stricte égalité entre les candidats ;

— GTA Mayotte a été admise à concourir sur la base d’éléments objectifs, le moyen soulevé s’avérant, en outre, inopérant ;

— le choix du délégataire n’est pas encore intervenu ; et en tout état de cause, le juge ne saurait se prononcer sur les mérites des candidats ;

Vu le mémoire enregistré le 1er décembre 2006 présenté pour la SOGEA Mayotte par Me Balique, avocat ; la SOGEA conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société X B à lui verser 5000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

— les règles de publicité ont été respectées au niveau national et que la publicité au niveau européen ne s’imposait pas ;

— les moyens relatifs aux diverses irrégularités de procédure invoquées doivent être écartés (composition de la commission, avis du CTP, de la commission consultative des services publics, absence du comptable public et du représentant de la concurrence ) ;

— la visite des installations n’a pas constitué une atteinte à l’égalité de traitement entre candidats ;

— GTA Mayotte est une société nouvellement créée qui devait être admise à présenter une offre ; qu’il n’est pas établi que les éléments exigés n’aient pas été produits ; que le moyen est, en outre, inopérant, son offre n’ayant pas été retenue ;

Vu le mémoire enregistré le 6 décembre 2006 présenté pour X B par Me Cabanes, avocat ; X B conclut aux mêmes fins que sa requête ;

Elle fait valoir les mêmes moyens et, en outre, que :

— l’avis d’appel public à la concurrence était imprécis s’agissant de l’exploitation de l’usine de dessalement de Pamandzi ;

— une inégalité de traitement entre les candidats doit être constatée s’agissant de la présentation des offres relatives aux options, les candidats, autres que SOGEA, ne disposant pas d’informations suffisantes pour ce faire ;

— l’information sur le personnel devant être repris par l’attributaire était tardive et inexacte ;

— le rapport du président du SIEAM a dénaturé l’offre de X B ;

Vu le mémoire enregistré le 7 décembre 2006 présenté pour X B par Me Cabanes, avocat ; X B conclut aux mêmes fins que sa requête ;

Elle fait valoir les mêmes moyens et, outre que :

— une obligation d’informations suffisantes des candidats s’agissant de la reprise des salariés résulte tant des règles de droit interne que du droit européen ; qu’en l’espèce, cette information a été insuffisante s’agissant des renseignements concernant les personnels déjà affectés au service du délégataire sortant ;

— en exigeant une reprise intégrale des personnels, le SIEAM n’a pas suivi une procédure permettant une mise en concurrence équitable ;

Vu le mémoire enregistré le 8 décembre 2006 présenté pour la société SOGEA Mayotte par Me Balique, avocat, la société SOGEA Mayotte maintient ses conclusions ;

Elle fait valoir les mêmes moyens et, en outre, que :

— il n’appartient pas au juge du référé pré-contractuel d’examiner les moyens n’ayant pas trait à la libre concurrence des candidats ;

— le moyen critiquant le choix de l’attributaire de la délégation est inopérant, dès lors que le juge des référés ne peut se prononcer sur les mérites respectifs de chacun des candidats ;

— l’information des candidats relative aux personnels à reprendre a été effective dès le 18 mai 2006 ;

Vu la décision en date du 29 novembre 2004, prise en application de l’article L.511-2 du code de justice administrative, par laquelle le président du Tribunal a désigné M. Y, président, en qualité de juge des référés ;

Vu le code de justice administrative et notamment l’article L.551-1 et les articles L.781-1 et R.781-1 de ce code ;

Vu le code général des collectivités territoriales, dans ses dispositions applicables à Mayotte ;

Vu l’ordonnance en date du 27 novembre 2006 par laquelle le Vice-Président délégué par le président du tribunal administratif de Mamoudzou a enjoint au Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte de différer la signature du contrat de délégation de service public en cause jusqu’au 14 décembre 2006 au plus tard ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience public qui a eu lieu le 8 décembre 2006, le magistrat constituant la formation de jugement compétente siégeant au tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion, dans les conditions prévues à l’article L.781-1 et aux articles R.781-1 et suivants du code de justice administrative, M. Z étant greffier d’audience au tribunal administratif de Mamoudzou ;

Le tribunal a examiné la requête, ainsi que les mémoires et pièces produites par les parties ;

Après avoir, au cours de l’audience publique du 8 décembre 2006 à 9H00, présenté son rapport et entendu :

— les observations de Me Neveu, substituant Me Cabanes, avocat, représentant la société X B, requérante ;

— les observations de Me Balique, avocat, représentant la société SOGEA ;

— et les observations de Me Lefort, et de Me Marchesini, avocats, représentant le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics, et des conventions de délégation de service public. Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement, ainsi que le représentant de l’Etat dans le département dans le cas où le contrat est conclu ou doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local. Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations.

Considérant que le SIEAM a diligenté l’ouverture d’une procédure de délégation, par affermage, du service public de production, de traitement, de stockage et de distribution d’B potable sur Mayotte, le choix de l’attributaire n’étant pas encore arrêté selon les écritures du SIEAM produites en défense ; que le règlement de consultation précise dans son article 2 que : « la présente mise en concurrence est soumise aux dispositions de la loi Sapin n° 93-122 du 29 janvier 1993 », référence également insérée dans l’avis d’appel public à la concurrence ; que ce faisant, le Syndicat a entendu se soumettre volontairement pour cette procédure, à l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires de droit interne applicables en métropole au régime de la délégation de service public ; qu’il y a lieu d’examiner, dans ce cadre, la demande de X B présentée sur le fondement de l’article L.551-1 du code de justice administrative ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte :

Considérant que celle-ci est dépourvue de toute précision dans son mémoire en défense ; que contrairement à ce qui est soutenu à l’audience, la société doit être regardée comme étant régulièrement représentée, s’agissant d’une action en référé que, dès lors, la fin de non-recevoir doit être écartée ;

Sur les moyens soulevés par X :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

S’agissant de l’irrégularité de procédure liée au déroulement de la visite groupée des ouvrages :

Considérant que la société X B fait valoir que la visite des ouvrages et installations du service à affermer, organisée le 17 mai 2006 par le SIEAM, s’est déroulée en présence de l’ensemble des candidats admis à présenter une offre et que le déroulement de cette visite a directement influé sur la présentation des offres du fait des échanges intervenus au cours de celle-ci, ce qui caractérise, aux dires de la requérante, un manquement du syndicat délégant à ses obligations de mise en concurrence ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que le 17 mai 2006, les sociétés SOGEA, X B et GTA Mayotte, candidats admis à présenter une offre dans le cadre de la délégation de service public de production, de traitement, de stockage et de distribution d’B potable à Mayotte, ont participé à une visite groupée de 14 ouvrages et installations du service à affermer ; que le compte rendu de cette visite fait apparaître que la présentation de ces 14 ouvrages a été opérée, non par le seul chef du service AEP représentant le SIEAM, mais également par le représentant de SOGEA Mayotte ; que la description de l’état et du fonctionnement de ces ouvrages faite à ses deux concurrents par le représentant d’une société candidate à l’attribution de la délégation de service public, et les échanges l’accompagnant, ont été de nature à influencer la présentation des offres de ces deux concurrents, lesquels devaient prévoir, conformément aux articles 434 et 435 du règlement de consultation, un mémoire de présentation et un compte d’exploitation prévisionnel incluant l’entretien de ces ouvrages ; qu’une telle situation induit une inégalité de traitement entre les candidats caractérisant un manquement du syndicat à ses obligations de mise en concurrence ;

S’agissant de l’admission de GTA Mayotte à concourir :

Considérant qu’il appartient au juge administratif, saisi en application de l’article L.551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l’administration ; que, dans le cadre de ce contrôle de pleine juridiction, le juge vérifie en particulier les motifs de l’admission et de l’exclusion d’un candidat de la procédure d’attribution de la délégation de service public ; que, par suite, il appartient au juge des référés pré-contractuels de contrôler le bien fondé des motifs par lesquels le SIEAM a estimé que la candidature de GTA Mayotte était recevable au regard des critères, mentionnés dans l’avis d’appel à candidatures, relatifs à la production d’un mémoire présentant ses moyens financiers, matériels, humains, ainsi que les références professionnelles récentes équivalentes dont elle dispose en précisant le type de contrat et les principales caractéristiques de la prestation gérée ; ces critères devant permettre de déterminer si ce candidat dispose des capacités techniques et financiers pour assurer le service public susceptible de lui être délégué ; que la circonstance que cette société soit nouvellement créée ne la dispense pas de produire, fut-ce par l’intermédiaire d’un groupement, les éléments permettant de déterminer si elle dispose des capacités sus-analysées ;

Considérant qu’il résulte du procès-verbal de la commission de délégation de service public en date du 10 avril 2006 et notamment de l’analyse des candidatures qui y figure, que GTA Mayotte n’a présenté aucune garantie s’agissant des moyens financiers dont elle dispose, les 2 banques de Mayotte contactées par ses soins n’ayant pris aucun engagement à son égard, alors qu’à ce jour, le capital social de la société est limité à 250 000 € ; qu’en outre, la mise en œuvre de moyens humains et techniques est subordonnée à la réalisation d’accords à passer avec divers partenaires ; qu’enfin les références professionnelles de GTA Mayotte, dont les divers contacts ne se sont pas traduits par la formation d’un groupement candidat, se limitent à l’expérience personnelle de son gérant ; que la Commission, elle-même a conclu, le 10 avril 2006, : « qu’il y avait lieu de s’interroger sur la capacité de GTA Mayotte à gérer la continuité du service au démarrage du contrat, si tous les accords ne sont pas trouvés avec ses partenaires et avec l’ancien délégataire ; que, dès lors, c’est à tort que le SIEAM a admis GTA Mayotte à présenter une offre dans le cadre de la présente délégation, et à participer de ce fait aux opérations de visite groupée du 17 mai 2006, au mépris des règles de mise en concurrence qu’il avait lui-même fixées, alors, en outre, que la hauteur des exigences figurant dans l’avis d’appel public à la concurrence a été de nature à dissuader d’autres entreprises nouvellement créées de présenter leurs candidatures ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la procédure actuellement en cours pour l’attribution de la délégation de service public de production, de traitement, de stockage et de distribution d’B potable à Mayotte doit être annulée et qu’il y a lieu d’enjoindre au président du SIEAM de reprendre intégralement cette procédure ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte (SIEAM) à verser à X B, la somme de 1000 € au titre des frais exposés par elle à l’occasion de la présente procédure et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions précitées du code de justice administrative font obstacle à ce que X B soit condamnée à verser au SIEAM et à SOGEA Mayotte, parties perdantes, la somme que ces dernières demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er : La procédure d’attribution par le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte de la délégation, par affermage, du service public de production, de traitement, de stockage et de distribution d’B potable à Mayotte est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au président du SIEAM de reprendre intégralement la procédure d’attribution visée à l’article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte est condamné à verser à X B, la somme de 1000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du SIEAM et de SOGEA Mayotte présentées au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société X B, au Syndicat Intercommunal d’B et d’Assainissement de Mayotte, à SOGEA Mayotte, et à GTA Mayotte.

Lu en audience publique le 8 décembre 2006.

Le juge des référés, Le greffier,

P. Y C. Z

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