Tribunal administratif de Mayotte, 21 septembre 2018, n° 1800887

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Chronologie de l’affaire

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SW Avocats · 2 mai 2021

Par une décision du 8 décembre 2020, le Conseil d'Etat confirme la tendance jurisprudentielle qui se dessinait depuis quelques temps au fond, selon laquelle les réserves formulées sur le fondement de l'article 41.6 du CCAG-Travaux au moment de la réception, ne font pas obstacle à ce que les délais prévus aux articles 13.3.2 et suivants commencent à courir. De manière très didactique, le Conseil d'État a ainsi considéré que « lorsque le pouvoir adjudicateur entend prononcer la réception en faisant application des dispositions de l'article 41.6 du CCAG Travaux relatives à la réception avec …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Mayotte, 21 sept. 2018, n° 1800887
Juridiction : Tribunal administratif de Mayotte
Numéro : 1800887
Décision précédente : Tribunal administratif de Mayotte, 10 mai 2018

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF sl

DE MAYOTTE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE N°1800887

__________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

GTA MAYOTTE

__________
M. Couturier Le juge des référés du Tribunal Administratif Juge des référés de Mayotte, __________

Ordonnance du 21 septembre 2018 __________ 54-03-015-03 C

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée au greffe le 3 juillet 2018 présentée par Me Cerveaux, avocat, la société GTA Mayotte demande au juge des référés, saisi sur le fondement des dispositions de l’article R. 541-1 du code de justice administrative de :

- condamner l’Etat à lui verser à titre de provision la somme de 2 033 833,23 euros au titre du lot 2 du marché de construction de collège de Kwalé, ainsi que la somme de 32 776,48 euros au titre du lot 3b du même marché, assorties des intérêts moratoires ;

- condamner le même à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a respecté la procédure prévue par les articles 13 du CCAG Travaux et 3-2-6 du CCAP. Le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre n’ont pas répondu. Les réserves ayant été auparavant levées, de même qu’un mémoire en réclamation avait été préalablement présenté en annexe au projet de décompte final pour un montant de 1 906 408,84 euros correspondant à des sujétions imprévues rencontrées lors de l’exécution du lot n°2. Il existe ainsi un décompte général définitif tacite entre les parties portant sur chacun des deux lots ;

- ses créances, qui ont par ailleurs donné lieu à une demande préalable, ne sont pas sérieusement contestables et répondent aux exigences de l’article R. 541-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 30 juillet 2018 le vice-recteur de Mayotte conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les créances sont sérieusement contestables dans leur existence même, la société requérante n’ayant pas respecté la procédure de levée des réserves prévues par les articles 41-5 et 41-6 du CCAG travaux applicable. La procédure de réception des travaux a donné lieu



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le 9 mars 2017 puis le 8 décembre 2017 à une réception avec réserves et à une réception sous réserve conformément aux stipulations des articles précités du CCAG. En l’absence de levée des réserves en cours et en l’absence d’ un procès verbal achèvement des travaux au sens des article 9-2-1 du CCAP du marché et de l’article 13-3-1 du CCAG, régulièrement notifié, aucun projet de décompte final n’a pu être valablement transmis de façon à entraîner un décompte général devenu définitif ;

- le mémoire en réclamation portant sur le lot n° 2, pour un montant de 1 906 408,84 euros est insuffisamment détaillé et ne comporte notamment pas les bases de calcul des différents postes ;

- les sommes réclamées le 2 mai 2018 sont injustifiées et disproportionnées par rapport à celles réclamées auparavant ;

- il existe en conséquence une contestation sérieuse sur le bien fondé des provisions demandées.

Vu :

- les pièces du dossier ;

- la décision du 11 mai 2018 par laquelle le président du tribunal administratif de Mayotte a désigné M. Couturier, vice-président, en qualité de juge pouvant statuer sur les référés.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le CCAG- travaux ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Le vice-rectorat de Mayotte représentant le ministère de l’éducation nationale, pouvoir adjudicateur, a confié le 19 mars 2015 à la société GTA Mayotte les marchés des lots n°2 (gros œuvre) et 3b (menuiserie bois) pour la construction du collège de Kwale, d’un montant respectif de 8 035 000 euros augmenté par avenant de 310 364,71 euros, et d’un montant de 250 000 euros augmenté par avenant de 30 793,60 euros.Le 1er mars 2018 la société GTA Mayotte a adressé au maître d’œuvre X Y architecte Desa et au maître d’ouvrage d’une part un projet de décompte final portant sur le lot n°2 établi le même jour pour un montant restant à régler de 2 098 756,03 euros et comprenant une somme de 1 906 408,84 euros au titre d’un mémoire en réclamation. Ce mémoire comprend 7 postes de demandes dont «décalage de planning» (998 676,07 €), «sous couverture des frais généraux 2015» (111 607 €), « incidence financière des conventions collectives du BTP en date des 15 décembre 2015» (386 866,79 €) , des « travaux complémentaires  » (48 596,21 €), « intérêts moratoires » (188 130,77 €, «  frais de constitution et de gestion du mémoire » ( 20 532 €) et « préjudice moral et commercial » (150 000 €).D’autre part, un projet de décompte final portant sur le lot n°3b pour un montant de 32 776,48 euros dont 14 039,68 € au titre de la retenue de garantie. Par courriers datés du 6 avril 2018, reçus les 7 et 12 avril suivant la société GTA Mayotte a adressé au maitre d’ouvrage et au maitre d’œuvre, un projet de décompte général portant sur les mêmes sommes au titre des deux lots. Sans réponse à ces différents envois, et après avoir adressé au vice-rectorat de Mayotte un courrier daté du



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2 mai 2018 lui demandant de régler les sommes précitées, la société GTA Mayotte demande à titre principal au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l’Etat à lui payer, à titre de provision ces deux sommes respectivement à hauteur de 2 033 833,23 euros et 32 776,48 euros.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article R. 541-1 du code de justice administrative :

2. Aux termes de l’article R. 541-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie» .Il résulte de ces dispositions qu’il appartient au juge des référés de s’assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à établir l’existence d’une créance non sérieusement contestable avec un degré suffisant de certitude tant dans le principe de la créance que dans son quantum.

3. Il ressort de l’article 2B du CCAP (cahier des clauses administratives particulières) du marché que si les parties ont entendu faire application des stipulations du CCAG (cahier des clauses administratives générales) du 8 septembre 2009, ce dernier a été modifié par arrêté du 3 mars 2014 entré en vigueur le 1er avril 2014, avant la publication de

l’avis d’appel public à la concurrence paru pour le marché en cause le 13 mai 2014. Dès lors en application de l’article 8 de l’arrêté du 3 mars 2014 il y a lieu dans la présente instance de faire application du CCAG ainsi modifié. Aux termes de l’article 13.3.1 du CCAG-Travaux applicable : « Après l’achèvement des travaux, le titulaire établit le projet de décompte final (…)Ce projet de décompte final est la demande de paiement finale du titulaire, établissant le montant total des sommes auquel le titulaire prétend du fait de l’exécution du marché dans son ensemble, son évaluation étant faite en tenant compte des prestations réellement exécutées…». Aux termes de l’article 13.3.2 « Le titulaire transmet son projet de décompte final, simultanément au maître d’œuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur, par tout moyen permettant de donner une date certaine, dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu’elle est prévue à l’article 41.3 ou, en l’absence d’une telle notification, à la fin de l’un des délais de trente jours fixés aux articles 41.1.3 et 41.3. Toutefois, s’il est fait application des dispositions de l’article 41.5, la date du procès-verbal constatant l’exécution des travaux visés à cet article est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus. S’il est fait application des dispositions de l’article 41.6, la date de notification de la décision de réception des travaux est la date retenue comme point de départ des délais ci-dessus » ; aux termes de l’article 13.4.2 : « …Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général à la plus tardive des deux dates ci-après

: – trente jours à compter de la réception par le maître d’œuvre de la demande de paiement finale transmise par le titulaire ; – trente jours à compter de la réception par le représentant du pouvoir adjudicateur de la demande de paiement finale transmise par le titulaire (…) » Et aux termes de l’article 13.4.4 : « Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire le décompte général dans les délais stipulés à l’article 13.4.2, le titulaire notifie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d’œuvre, un projet de décompte général signé, composé :-du projet de décompte final tel que transmis en application de

l’article 13.3.1 ;-du projet d’état du solde hors révision de prix définitive, établi à partir du projet de décompte final et du dernier projet de décompte mensuel, faisant ressortir les éléments définis à l’article 13.2.1 pour les acomptes mensuels ;-du projet de récapitulation



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des acomptes mensuels et du solde hors révision de prix définitive. Dans un délai de dix jours

à compter de la réception de ces documents, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie le décompte général au titulaire. Le décompte général et définitif est alors établi dans les conditions fixées à l’article 13.4.3. Si dans un délai de 10 jours, le représentant du pouvoir adjudicateur n’a pas notifié au titulaire le décompte général, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif (…) Le décompte général et définitif lie définitivement les parties (….).

4. Il ressort de la chronologie exposée au point 1 que le vice rectorat de Mayotte, représentant du pouvoir adjudicateur, n’a notifié à la société GTA Mayotte de décompte général ni dans le délai de 30 jours stipulé à l’article 13.4.2 ni dans le délai de 10 jours prévu à l’article 13.4.4 du CCAG Travaux dans sa version applicable au marché litigieux. Dans ces conditions, en application de l’article 13.4.4, le décompte général devrait en principe lier définitivement les parties.

5. Toutefois l’article 41.5 du CCAG-Travaux auquel se réfère l’article 13.2.2 du même document stipule que : « S’il apparaît que certaines prestations prévues par les documents particuliers du marché et devant encore donner lieu à règlement n’ont pas été exécutées, le maître de l’ouvrage peut décider de prononcer la réception, sous réserve que le titulaire s’engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n’excède pas trois mois. La constatation de l’exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception prévu à l’article 41.2 ». De la même façon il est stipulé à l’article 41.6 du même document :«Lorsque la réception est assortie de réserves, le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par le représentant du pouvoir adjudicateur ou, en l’absence d’un tel délai, trois mois avant l’expiration du délai de garantie défini à l’article 44.1.Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, le maître de l’ouvrage peut les faire exécuter aux frais et risques du titulaire, après mise en demeure demeurée infructueuse».

6. Il n’est pas contesté que la réception du 9 mars 2017 des deux lots a donné lieu à une réception « avec réserves » ainsi qu’à une « réception sous réserve » conformément aux stipulations précitées des articles 41-5 et 41-6 du CCAG. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, notamment du document EXE8 dit « procès verbal de levée des réserves » et de la liste figurant à son annexe, établis par le maître d’œuvre le 31 octobre 2017 et signé le 11 décembre suivant par l’entreprise GTA Mayotte, qu’il subsistait, à cette dernière date, des réserves quant aux prestations des deux lots 2 et 3b dont certaines n’avaient pas été entièrement réalisées. Il ne ressort pas des pièces du dossier ni n’est allégué, que le maître d’ouvrage ait, sous réserve que l’entreprise les exécute dans un délai de moins de trois mois, accepté la réception des travaux dans les conditions prévues à l’article 45-1 précité du CCAG et ait ainsi levé définitivement les réserves émises et relevées par le maître d’œuvre lui-même dans le document EXE 8. En l’absence du procès-verbal d’exécution des travaux ou prestations ayant fait l’objet de réserves le 31 octobre 2017 ou de la notification ultérieure au titulaire, par le maitre d’ouvrage, de la réception définitive du marché, le vice-rectorat est fondé, en l’état de l’instruction, à soutenir qu’il existe au vu des stipulations précitées de l’article 13.3.2 du CCAG Travaux, une contestation sérieuse sur les conditions dans lesquelles la société requérante a présenté un projet de décompte final et partant, sur l’existence des deux créances dont cette société se prévaut au titre d’un décompte général devenu définitif.



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7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société GTA Mayotte tendant à ce que l’Etat soit condamné à lui payer les deux provisions demandées de 2 033 833,23 euros et 32 776,48 euros doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l’application des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ».

9. Ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas partie perdante, soit condamné à payer à la société GTA Mayotte la somme de 4 000 euros qu’elle demande à ce titre.

ORDONNE :

er : La requête de la société GTA Mayotte est rejetée. Article 1

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société GTA Mayotte et au ministre de l’éducation nationale. Copie en sera adressée pour information au vice-rectorat de Mayotte et au préfet de Mayotte.

Fait à Mayotte, le 21 septembre 2018.

Le juge des référés,

E. COUTURIER

La République mande et ordonne au préfet de Mayotte en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme, Le greffier,

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