Tribunal administratif de Melun, 21 mai 2015, n° 1201382

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Melun, 21 mai 2015, n° 1201382
Juridiction : Tribunal administratif de Melun
Numéro : 1201382
Sur renvoi de : Conseil d'État, 25 octobre 2011

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MELUN

N°1201382

___________

Mme B X épouse A

___________

Mme Fullana

Rapporteur

___________

Mme Bruston

Rapporteur public

___________

Audience du 30 avril 2015

Lecture du 21 mai 2015

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Melun

(2e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2012, présentée pour Mme B X épouse A, demeurant Le Courtial à Villossanges (63380), par Me Scherman ; Mme X épouse A demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle la Banque de France a rejeté sa demande en date du 16 novembre 2011 de reconnaissance de la maladie déclarée le 4 avril 1993 comme imputable au service et donc comme maladie professionnelle ;

2°) d’enjoindre à la Banque de France de soumettre son cas à la commission de réforme de la banque ;

Elle soutient :

— que la commission de réforme de la Banque de France, pour la déclarer invalide lors de sa séance du 22 juin 2000, s’est fondée sur les symptômes mentionnés dans le certificat médical de déclaration de maladie professionnelle du 4 avril 1993 et confirmés dans le certificat du 20 décembre 1999 accompagnant la demande de mise en invalidité ;

— qu’en retenant ces symptômes, la commission de réforme a implicitement reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée le 4 avril 1993 ;

— que la Banque de France n’a pas contesté la déclaration de maladie professionnelle dans le délai légal de l’article R. 441-10 du code de la sécurité sociale ;

— que les jugements rendus par le tribunal des affaires de sécurité sociale ainsi que les arrêts de la cour d’appel de Riom, de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat ont été prononcés hors des délais impartis par la loi et sont caducs ;

— que l’arrêt du 14 juin 2005 de la cour d’appel de Riom a ignoré les termes du courrier du 26 septembre 1991 qu’elle avait adressé au médecin du travail et au directeur du site de Chamalières et qui établissait la faute inexcusable de l’employeur selon les dispositions de l’article L. 231-8-1 du code du travail ;

— que la cour d’appel de Riom a jugé qu’elle était apte à la reprise du travail sur la base des dires de médecins rémunérés par la Banque de France et ne remplissant pas les conditions prévues par l’article L. 241-6 du code du travail ;

— que la cour d’appel a également violé les dispositions de l’article R. 141-1 du code de la sécurité sociale ;

— que la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel sans examen sérieux et probant de son dossier ;

— que la prescription relative à toute contestation susceptible d’être engagée à l’encontre de la reconnaissance implicite de la maladie professionnelle du 4 avril 1993 est acquise depuis le 6 juin 1995 ;

— que le médecin expert, le Dr Z, impute dans son rapport du 3 mars 2010 la maladie qu’elle a contractée au service ;

— que la Banque de France est tenue de saisir la commission de réforme ;

Vu la demande préalable et son avis de réception ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2012, présenté par la Banque de France, représentée par le chef du service du Droit institutionnel et social, qui conclut au rejet de la requête ;

La Banque de France fait valoir :

— que la requête est entachée de plusieurs irrecevabilités dès lors que la demande de l’intéressée est sans objet et présente un caractère manifestement abusif ;

— que le rapport d’expertise ordonné par le jugement du tribunal de céans le

2 juillet 2009 est devenu sans objet compte tenu de l’intervention de l’arrêt du Conseil d’Etat ;

— que la demande de la requérante du 16 novembre 2011 ne saurait constituer une demande préalable dans la mesure où la commission de réforme ne pouvait rendre un avis sur sa demande et qu’aucun acte faisant grief n’était susceptible d’intervenir ;

— que la requête est insuffisamment motivée et ne comporte l’exposé d’aucun moyen de droit ;

— que la requête ne vise qu’à remettre en cause l’autorité de chose jugée par les différentes décisions de justice devenues aujourd’hui définitives ;

— qu’en l’absence d’élément nouveau, la requérante n’est pas fondée à saisir à nouveau la Banque de France et ne justifie d’aucun intérêt légitime ;

— que les symptômes qu’elle présente ne sont pas imputables à ses conditions de travail ;

— que la cour d’appel de Riom a reconnu le caractère professionnel de sa maladie qu’en raison du non respect du délai de réponse de l’administration à la déclaration de maladie professionnelle ;

— qu’elle a en revanche débouté Mme A de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et de ses demandes accessoires en réparation de ses divers préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux ;

— que la commission de réforme qui a reconnu l’invalidité de Mme A le

22 juin 2000 n’a jamais reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée le

4 avril 1993 ;

— que la requérante ne peut remettre en cause l’autorité de chose jugée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 3 mai 2012, présentée pour Mme A, par Me Lantourne, substituant Me Scherman, qui conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens et demande en outre au tribunal d’ordonner à la Banque de France de présenter son dossier de maladie professionnelle devant la commission de réforme en vue de l’imputabilité au service de cette maladie et afin qu’elle bénéficie de l’ensemble des droits qui sont attachés à une telle reconnaissance, de mettre à la charge de la Banque de France une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et, à titre subsidiaire, d’ordonner une expertise médicale ;

Elle soutient en outre :

— que le rapport médical du Dr Z peut être utilisé à titre d’information ;

— que sa requête n’est pas sans objet et ne revêt pas un caractère abusif ;

— qu’elle est suffisamment motivée ;

— que l’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision du Conseil d’Etat du

26 octobre 2011 ne faisait pas obstacle à ce qu’elle présente une nouvelle demande accompagnée d’éléments nouveaux, à savoir le rapport de l’expert ;

— que sa demande du 16 novembre 2011 n’ayant fait l’objet d’aucune décision expresse, une décision implicite de rejet est intervenue et est susceptible de recours pour excès de pouvoir ;

— que la preuve irréfutable de l’usage de produits chimiques à l’imprimerie et de la dangerosité du site est apportée ;

— qu’elle peut se prévaloir de la faute inexcusable de son employeur en application de l’article L. 231-8-1 du code du travail ;

— qu’elle a également droit, après reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie par la commission de réforme, au rétablissement de son plan de carrière et au rétablissement de ses droits à complément de traitement au titre de sa maladie professionnelle, à une pension d’invalidité basée sur une pension versée par le régime spécial de retraite du personnel titulaire de la Banque de France et à une rente viagère d’invalidité au taux de 81 % ;

— qu’elle sollicite le doublement de sa rente viagère d’invalidité pour maladie professionnelle afin de compenser pour partie les souffrances endurées depuis le

26 septembre 1991 et les humiliations subies, ainsi que le rétablissement de ses droits tout au long de sa carrière ;

— qu’elle n’est pas le seul agent de la Banque de France à être victime des pollutions générées lors de la fabrication des billets et de la dangerosité du site de Chamalières ;

Vu les mémoires en réplique, enregistrés le 29 avril 2014 et le 12 juillet 2014, présentés pour Mme X épouse A, représentée par Me Simard, substituant Me Lantourne, qui persiste dans ses écritures, demande que l’injonction sollicitée soit ordonnée dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et assortie d’une astreinte de 200 euros par jour de retard, et porte à la somme de 3 500 euros la somme qu’elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elle fait valoir en outre :

— que la Banque de France était tenue de saisir à nouveau la commission de réforme, seule compétente pour émettre un avis sur le fondement des dispositions de l’article 41 du règlement annexé au décret n°2007-262 du 27 février 2007 ;

— que la décision attaquée sera annulée en raison de la violation des articles 41 et 42 du règlement annexé au décret du 27 février 2007 et de l’article 49 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

— que le Dr Y a rédigé le 14 juin 2014 un certificat médical précisant que les symptômes ressentis peuvent être liés à une intoxication professionnelle et que l’attribution d’une rente au titre de la maladie professionnelle avec un taux d’invalidité évalué à 95 % est justifiée ;

— que cet élément médical constitue un élément nouveau qui doit être soumis à la commission de réforme ;

Vu l’ordonnance du 19 décembre 2014 fixant la clôture d’instruction au 12 janvier 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2015, présenté pour la Banque de France qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

La Banque de France fait valoir en outre :

— que la requête est irrecevable dès lors qu’elle remet en cause l’autorité de chose jugée par l’arrêt du Conseil d’Etat du 26 octobre 2011 ;

— qu’il y a bien triple identité d’objet, de cause et de parties entre la présente instance et celle ayant donné lieu à la décision du Conseil d’Etat ;

— qu’en raison de cette décision, le rapport d’expertise du Dr Z est sans effet ;

— que le litige ayant déjà été jugé par le Conseil d’Etat, Mme A ne peut valablement apporter de nouvelles pièces que dans le cadre d’un recours en révision devant le Conseil d’Etat ;

— que l’article R. 834-1 du code de justice administrative limite les motifs de révision contre une décision juridictionnelle du Conseil d’Etat et les conditions fixées par cet article ne sont pas remplies ;

— que la nouvelle pièce médicale produite a eu pour effet de modifier l’objet des conclusions et que les conclusions nouvelles ne sont plus recevables après l’expiration du délai de recours ;

Vu le nouveau mémoire en réplique, enregistré le 12 février 2015, présenté pour Mme X épouse A, représentée par Me Duval, substituant Me Simard, qui persiste dans ses précédentes écritures, porte à la somme de 4 000 euros la somme qu’elle réclame en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et demande au tribunal de faire droit à l’ensemble de ses demandes formulées et chiffrées dans son mémoire du 2 mai 2012 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 21 mars 2015, présenté par la Banque de France qui maintient ses précédentes conclusions et par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le décret n°2007-262 du 27 février 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 30 avril 2015 :

— le rapport de Mme Fullana, rapporteur ;

— et les conclusions de Mme Bruston, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme X épouse A a été recrutée en qualité de chef adjoint d’atelier à l’imprimerie de la Banque de France à Chamalières à compter du 1er juillet 1972 ; qu’elle a été placée en congé de maladie à plusieurs reprises pour des pathologies qu’elle estime imputables au service sur la période du 26 septembre 1991 au 8 août 1996, date à laquelle elle a été licenciée pour abandon de poste ; qu’elle a bénéficié d’une pension d’invalidité au taux de 66,6 % à compter du 25 décembre 1999 en vertu d’une décision du 30 juin 2000 du conseil général de la Banque de France prise en application de l’article D. 172-1 du code de la sécurité sociale relatif à la coordination entre le régime général et les régimes spéciaux d’assurances sociales ; qu’elle bénéficie depuis le 1er septembre 2007 d’une pension de retraite du régime spécial de la Banque de France pour la période pendant laquelle elle a été agent titulaire et d’une pension de sécurité sociale au titre du décret de coordination pour la période entre le 10 août 1996 et le 31 août 2007 ; qu’elle a demandé à bénéficier, en complément de cette retraite à compter du 1er septembre 2007, de la rente viagère d’invalidité mentionnée à l’article 41 du règlement annexé au décret susvisé du

27 février 2007 relatif au régime de retraite des agents titulaires de la Banque de France ; qu’après avis négatif de la commission de réforme sur l’imputabilité au service des affections dont elle souffre, cet avantage lui a été refusé par décision du 15 janvier 2009 du conseil général de la Banque de France ; que, par un jugement du 2 juillet 2009, le tribunal de céans a annulé cette décision et, après avoir reconnu l’imputabilité au service de la maladie contractée par l’intéressée, l’a renvoyée devant l’administration pour la liquidation de ses droits en ce qui concerne la rente viagère d’invalidité et a ordonné avant-dire-droit la désignation d’un expert afin de déterminer le déficit fonctionnel permanent dont elle souffre et le taux d’invalidité auquel elle peut prétendre ; que, par une décision du 26 octobre 2011, le Conseil d’Etat a annulé ce jugement et a rejeté la requête de Mme A ; que, toutefois, sur la base du rapport de l’expert désigné par le tribunal et rendu le 3 mars 2010, Mme A a saisi la Banque de France d’une demande tendant à ce que son dossier soit présenté devant la commission de réforme en vue de la reconnaissance de l’imputabilité au service des affections dont elle souffre et doit être, ainsi, regardée comme ayant sollicité de nouveau le bénéfice d’une rente viagère d’invalidité ; qu’en raison du silence gardé par la Banque de France sur cette demande reçue le 17 novembre 2011, une décision implicite de rejet de cette demande est intervenue le 17 janvier 2012 ; que la requérante demande au tribunal d’annuler cette décision et d’enjoindre à la Banque de France de saisir la commission de réforme afin que l’imputabilité au service de ses pathologies soit reconnue et qu’elle bénéficie de l’ensemble des droits qu’elle estime tenir d’une telle reconnaissance ;

2. Considérant que la décision du conseil général de la Banque de France du

15 janvier 2009 refusant d’attribuer à Mme A une rente viagère d’invalidité est devenue définitive à la suite de l’intervention de la décision du Conseil d’Etat du 26 octobre 2011 ; que la demande présentée par la requérante le 16 novembre 2011 et reçue le 17 novembre suivant avait le même objet que la demande ayant donné lieu à l’intervention de la décision du 15 janvier 2009 ; que si Mme A soutient que cette seconde demande s’appuyait sur des éléments de fait nouveaux résultant de l’intervention du rapport du Dr Z du 3 mars 2010, il résulte de ce rapport, dont l’objet était exclusivement de déterminer le déficit fonctionnel permanent de l’intéressée, que l’expert n’a formulé aucune conclusion médicale et scientifique quant à l’imputabilité au service des affections dont souffre l’intéressée et s’est seulement livré à une interprétation personnelle de l’arrêt de la cour d’appel de Riom du 14 juin 2005 ; que ce rapport ne peut donc être regardé comme révélant des faits nouveaux de nature à rendre recevable la demande de Mme A ; qu’en outre, si celle-ci a produit à l’instance, en réponse à la fin de non-recevoir opposée par la Banque de France, un certificat médical du 14 juin 2014 établi par le Dr Y, médecin généraliste qui la suit depuis au moins 1991, lequel décrit la symptomatologie des pathologies dont souffre la requérante, indique que ces différentes manifestations peuvent être liées à une intoxication professionnelle chimique et précise que l’attribution d’une rente avec un taux d’invalidité de 95 % est justifiée, ce certificat du Dr Y, dont de nombreux certificats ont déjà été produits tant devant la Banque de France que devant les différentes juridictions saisies par l’intéressée, ne constitue pas davantage une circonstance de fait nouvelle ; qu’ainsi, en l’absence de tout changement dans les circonstances de fait, la décision implicite de rejet de la Banque de France intervenue le 17 janvier 2012 n’a fait que confirmer la précédente décision de refus du

15 janvier 2009 et n’a pas ouvert à Mme A un nouveau délai de recours contentieux ; qu’ainsi, les conclusions de Mme A dirigées contre la décision implicite du 17 janvier 2012 sont irrecevables ; que, dès lors, ces conclusions, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d’injonction et celles présentées en application des dispositions de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme X épouse A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B X épouse A et à la Banque de France.

Délibéré après l’audience du 30 avril 2015, à laquelle siégeaient :

M. Jarrige, président,

Mme Fullana, conseiller,

Mme Tocut, conseiller,

Lu en audience publique le 21 mai 2015.

Le rapporteur, Le président de la 2e chambre,

M. FULLANA A. JARRIGE

Le greffier,

V. VAN HOOTEGEM

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier

P. ARMAND

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