Tribunal administratif de Montreuil, 7 janvier 2011, n° 0812722

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Montreuil, 7 janv. 2011, n° 0812722
Juridiction : Tribunal administratif de Montreuil
Numéro : 0812722

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MONTREUIL

N° 0812722

___________

BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE

___________

M. Noël

Rapporteur

___________

Mme Peton-Philippot

Rapporteur public

___________

Audience du 17 décembre 2010

Lecture du 7 janvier 2011

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Montreuil,

(10e chambre)

19-04-02-01-01

19-06-02-01

C

Vu, en date du 15 septembre 2009, l’ordonnance par laquelle le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transféré la requête n° 0812722 au Tribunal administratif de Montreuil ;

Vu la requête, enregistrée le 27 novembre 2008, présentée pour la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE, dont le siège est XXX V, à Ariana – Tunis (Tunisie), par Me Masson ; la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE demande au tribunal la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er août 2004 au 31 mars 2006 et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés et de contribution sociale à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 et d’imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Elle soutient que le service ne lui a pas fourni les documents demandés en application de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales et qu’ainsi la procédure d’imposition est irrégulière ; qu’elle ne peut pas être assujettie à l’impôt sur les sociétés ; que le marché conclu avec la société Technip France est un simple marché de fourniture portant sur du matériel transformé préalablement en Tunisie et placé à cette fin sous un régime d’admission temporaire exonéré de taxe sur la valeur ajoutée ; que les travaux d’assemblage de « spools » ont été effectués en Tunisie par la société Sabourin, qui s’était vu attribuer par elle la mission d’effectuer ces travaux de sous-traitance pour le compte de la société Technip France ; que les erreurs constatées dans les mentions portées par la société Technip France sur les documents administratifs uniques ne lui sont pas opposables ; que la société Technip France a fait l’objet d’un rappel de taxe sur la valeur ajoutée par les services douaniers qui atteste que les opérations d’assemblage de pièces de tuyauteries ont été effectuées en Tunisie ;

Vu la décision par laquelle le directeur des résidents à l’étranger et des services généraux a statué sur la réclamation préalable ;

Vu la mise en demeure adressée le 6 août 2009 à la direction des résidents à l’étranger et des services généraux, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 octobre 2009, présenté par le directeur des résidents à l’étranger et des services généraux, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir, s’agissant de la procédure d’imposition, qu’il résulte des articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales que la société pouvait être régulièrement taxée d’office sans mise en demeure préalable, et qu’au surplus les déclarations déposées par la société après une première mise en demeure ne mentionnent aucune des informations essentielles pour leur validité ; que la proposition de rectification a mentionné la teneur et l’origine des documents fondant les rehaussements, ainsi que l’identité de la personne auprès de laquelle le droit de communication a été exercé, en application de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales, et qu’au surplus la société n’a pas, en réponse à la seconde proposition de rectification, réitéré la demande concernant les documents obtenus dans le cadre du droit de communication qu’elle avait formulée en réponse à la première proposition de rectification en date du 16 mai 2007, dont les conséquences financières ont été abandonnées le 10 décembre 2007 ; que la société a effectué des travaux immobiliers s’incorporant dans un immeuble sis en France exécutés durant une période d’un an et demi, et qu’ainsi elle est imposable à la taxe sur la valeur ajoutée et à l’impôt sur les sociétés au nom et pour le compte de l’établissement stable ainsi créé ; que le service s’est fondé sur la livraison de biens qui s’incorporent dans un ensemble immobilier sis en France pour imposer à la taxe sur la valeur ajoutée la société à défaut de preuve relative à l’importation de ces biens en France ; que les documents administratifs uniques produits n’ont pas été jugés suffisamment probants pour justifier la réimportation par la société Technip France de produits exportés en Tunisie pour perfectionnement ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2010, présenté pour la société

BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE, qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Elle soutient, s’agissant de la régularité de la procédure, que le mécanisme de taxation d’office sans mise en demeure préalable prévu par les articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales dote l’administration de pouvoirs de taxation exorbitants alors même qu’elle n’use pas de ses pouvoirs d’investigation ; que l’administration n’a pas fait droit à la demande de documents faite dans le cadre de la réponse à la première proposition de rectification, et que cette demande restait valide dans le cadre de la nouvelle procédure ; s’agissant du bien-fondé de l’imposition, que l’administration ne peut se fonder sur les documents douaniers communiqués par la société Technip France, dès lors que ces documents ne sont pas directement liés à la liste des factures produites par la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE ; que le montant total de la valorisation des approvisionnements en « spools » et supports présentés au service des douanes tunisiennes par la société Sabourin correspond à ce qui est prévu dans le contrat initial entre la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE et la société Technip France ; que le rappel effectué par le service des douanes à l’encontre de la société Technip France est injustifié, dès lors qu’il n’est pas tenu compte de l’admission temporaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 août 2010, présenté par le directeur des résidents à l’étranger et des services généraux, qui conclut aux mêmes fins ;

Il fait valoir en outre que les documents douaniers tunisiens produits par la requérante ne sont pas établis au nom de la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE, alors que cette dernière est titulaire du contrat avec la société Technip France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale entre la France et l’Egypte du 28 mai 1973 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 décembre 2010 :

— le rapport de M. Noël, rapporteur ;

— et les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin de décharge et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que dans le cadre de son droit de communication exercé lors du contrôle de la société Technip France, l’administration s’est procuré un contrat de sous-traitance liant la société Technip France et la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE au vu duquel elle a considéré que celle-ci disposait d’un établissement stable en France et exerçait une activité assujettie à l’impôt sur les sociétés à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l’administration a ainsi taxé d’office la société requérante, qui n’avait déposé aucune déclaration, à l’impôt sur les sociétés et contributions annexes ainsi qu’à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société requérante demande la décharge de ces impositions ;

Sur le principe de l’imposition à l’impôt sur les sociétés :

Considérant qu’aux termes de l’article 209 du code général des impôts : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l’impôt sur les sociétés sont déterminés (…) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (…) » ; qu’aux termes de l’article 4 de la convention franco-tunisienne du 28 mai 1973 : « 1. Au sens de la présente Convention, l’expression « établissement stable » désigne une installation fixe d’affaires où une entreprise exerce tout ou partie de son activité. / 2. L’expression « établissement stable » comprend notamment : (…) / h. un chantier de construction (…) » ;

Considérant que le contrat du 2 août 2004, produit par l’administration, rédigé en anglais et partiellement traduit, qui est relatif aux « termes particuliers et conditions » du contrat de sous-traitance ne mentionne pas l’objet du contrat conclu entre la société

Technip France et la société requérante ; qu’il ressort du d du 1 de l’avenant n° 1 à ce contrat du 30 mars 2005 que la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE transporte des éléments de tuyauterie dénommé « spools » d’un site de production se trouvant en Tunisie vers un entrepôt à Gonfreville par bateau jusqu’à Marseille puis par route ; que l’avenant susmentionné ainsi que le second avenant du 31 janvier 2006 au même contrat ne mentionnent pas d’autre information relative à l’activité de la société requérante ; qu’il ne ressort ni de ces pièces, ni d’aucune autre pièce du dossier que la société requérante aurait assemblé les éléments de tuyauterie en France ni qu’elle aurait incorporé ces éléments aux usines sises sur le site de Gonfreville ; qu’ainsi, en l’absence d’élément relatif à l’existence en France d’un établissement stable de la société requérante, elle ne peut être qualifiée d’entreprise exploitée en France au sens de l’article 209 du code général des impôts ; que, pour les mêmes raisons, la société requérante ne peut être regardée comme étant intervenue sur un chantier de construction au sens des dispositions précitées de la convention franco-tunisienne et qu’ainsi elle ne dispose pas davantage d’un établissement stable au sens de ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la société requérante ne dispose pas d’établissement stable et ne peut être assujettie à l’impôt sur les sociétés, en application des dispositions de l’article 209 du code général des impôts, est fondé ; qu’il suit de là que la société est fondée à demander la décharge de ces impositions ;

Sur le principe de l’imposition à la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu’aux termes de l’article 257 du code général des impôts : « Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles » ; qu’aux termes de l’article 258 du même code : « (…) II. Le lieu des opérations immobilières mentionnées aux 6° et 7° de l’article 257 se situe en France lorsqu’elles portent sur un immeuble sis en France » ; que doivent être regardés comme des « opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles » au sens de l’article 257-7 du C.G.I. les travaux entrepris sur des immeubles existants lorsqu’ils ont pour effet de créer de nouveaux locaux, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ou d’apporter une modification importante à leur gros œuvre ou d’y réaliser des aménagements internes qui, par leur importance, équivalent à une véritable reconstruction ou enfin d’accroître leur volume ou leur surface ;

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit, il ne résulte pas de l’instruction que la société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE aurait assemblé des éléments de tuyauterie en France ni aurait incorporé ces éléments aux usines sises à Gonfreville ; qu’ainsi, elle n’a exercé aucune opération concourant à la production ou livraison d’immeuble au sens des dispositions précitées ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir qu’elle ne devait pas être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée est fondé ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société

BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE est fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er août 2004 au

31 mars 2006 et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés et de contribution sociale à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 et d’imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ;

D E C I D E :

Article 1er : La société BOCCARD INTERNATIONAL SERVICE est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du

1er août 2004 au 31 mars 2006 et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés et de contribution sociale à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 et d’imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la société BOCCARD

INTERNATIONAL SERVICE et au directeur des résidents à l’étranger et des services généraux.

Copie en sera adressée au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat.

Délibéré après l’audience du 17 décembre 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Goff, président,

Mme Arrivabene, premier conseiller,

M. Noël, conseiller,

Lu en audience publique le 7 janvier 2011.

Le rapporteur, Le président,

Signé Signé

C. Noël R. Le Goff

Le greffier,

Signé

XXX

La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Montreuil, 7 janvier 2011, n° 0812722