Tribunal administratif de Nantes, 22 décembre 2011, n° 0807457

  • Impôt·
  • Déficit·
  • Argent·
  • Contribution sociale généralisée·
  • Justice administrative·
  • Construction·
  • Administration·
  • Revenus fonciers·
  • Imposition·
  • Procédures fiscales

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 22 déc. 2011, n° 0807457
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 0807457

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE NANTES

N° 087457

___________

M. et Mme Y X

___________

M. Geffray

Rapporteur

___________

Mme Allio-Rousseau

Rapporteur public

___________

Audience du 24 novembre 2011

Lecture du 22 décembre 2011

___________

19-01-03-04

19-04-02-02

C+

ell

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Nantes,

(4e chambre),

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif DE NANTES ,

(4e chambre),

Vu la requête, enregistrée le 31 décembre 2008, présentée pour M. et Mme Y X, demeurant XXX à Olonne-sur-Mer (85340), par la CMS Bureau Francis Lefebvre société d’avocats ; M. et Mme X demandent au Tribunal :

— la décharge des compléments d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée et des intérêts de retard auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

— la condamnation de l’Etat à leur verser une somme de 3 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

— la lettre de l’administration du 10 mars 2006 qui leur a été adressée ne constituait pas une proposition de rectification susceptible d’interrompre de nouveau le délai de prescription car elle confirme le montant et les motifs du redressement initialement notifié à la SCI 3J Vif Argent le 17 novembre 2004 ; en application de l’article 169 du livre des procédures fiscales, le délai de reprise de l’administration à l’égard des impositions dues au titre de l’année 2003 expirait le 31 décembre 2007 ; la prescription n’était pas acquise aux 25 avril et 19 juin 2008, dates des avis de mise en recouvrement de l’impôt sur le revenu au titre des années 2003 et 2004 ;

— l’indemnité de 896 000 euros hors taxes perçue par la SCI 3J Vif Argent ne saurait être qualifiée de loyer car elle constitue la contrepartie de la cession ou du transfert de propriété des immeubles préexistants au profit de la SARL Jode ; le prix de vente des constructions existantes a été fixé conformément à leur valeur vénale telle qu’elle a été établie par un expert ; le montant des loyers prévus n’est pas anormalement bas ; l’indemnité, qui compense une dépréciation du patrimoine à la suite de la démolition des constructions préexistantes, doit être traitée comme un profit immobilier et être donc soumis au régime des plus-values immobilières ;

Vu la décision du 31 octobre 2008 par laquelle le directeur général des finances publiques de la Vendée a statué sur la réclamation préalable ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2009, présenté par le directeur des services fiscaux de la Vendée qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

— la proposition de rectification en date du 10 mars 2006, qui a été adressée aux requérants, n’est pas confirmative de celle du 17 novembre 2004 qui avait été adressée à la SCI 3J Vif Argent ;

— dans le cas où un immeuble aurait été acquis en vue d’être démoli pour réaliser une nouvelle construction, la valeur de l’immeuble démoli entre nécessairement dans le prix de revient de l’immeuble construit, si bien qu’aucune perte liée à la diminution de l’actif résultant de la démolition ne peut être constatée ;

— il résulte de l’acte du 29 mai 2002 relatif à l’acquisition du terrain et des bâtiments préexistants que l’ensemble immobilier avait vocation à être démoli ; que, dans ces conditions, la dépréciation du patrimoine ne saurait être évoquée ; que la démolition est bien indissociable du projet global de construction existant dès l’origine de l’opération;

Vu le mémoire, enregistré le 31 juillet 2009, présenté pour M. ou Mme X qui concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Ils soutiennent en outre que :

— le délai de reprise porte atteinte aux stipulations de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales;

— la destruction de l’ensemble immobilier préexistant en vue de leur remplacement par des constructions utilisées pour la restauration rapide entraîne une minoration de la valeur de ces constructions ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 août 2010, présenté par le directeur départemental des finances publiques de la Vendée qui conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que les stipulations du §1 de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peuvent être utilement invoquées devant le juge de l’impôt, qui ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil, quand bien même il ferait application d’une législation ayant pour effet de priver rétroactivement le contribuable de la possibilité d’obtenir la décharge d’une imposition ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 février 2011, présenté pour M. et Mme X qui concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 novembre 2011 :

— le rapport de M. Geffray, rapporteur ;

— et les conclusions de Mme Allio-Rousseau, rapporteur public ;

Considérant que, le 29 mai 2002, la SCI 3J Vif Argent dont M. et Mme X détiennent la totalité des parts, a acquis un ensemble immobilier situé sur le territoire d’Olonne-sur-Mer et composé d’une terrain et de trois bâtiments commerciaux ; que, par acte notarié du 17 avril 2003, la SCI 3J Vif Argent a consenti à la SARL Jode un bail à construction d’une durée de trente-cinq ans, ayant le même terrain d’assiette et prévoyant la démolition des trois bâtiments commerciaux par le preneur et l’édification d’un ensemble commercial avec un pôle de restauration, des commerces de surface moyenne et des aires de circulation et de stationnement ; que l’acte du 17 avril 2003 prévoyait le versement par le preneur d’une indemnité de 896 000 euros hors taxes au bailleur ; que l’administration fiscale, qui a assimilé l’indemnité à un droit d’entrée versé par la SARL Jode en sa qualité de preneur du bail à construction, ayant le caractère d’un supplément de loyer, l’a regardée comme un revenu foncier perçu par M. et Mme X, auxquels elle a assigné la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée en résultant au titre des années 2003 et 2004 ; que M. et Mme X demandent la décharge de ces compléments ainsi que celle des intérêts de retard auxquels ils ont été assujettis ;

Sur la procédure d’imposition :

Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L.169 du livre des procédures fiscales : « Pour l’impôt sur le revenu …, le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due » ; qu’aux termes de l’article L.189 du même livre : « La prescription est interrompue par la notification d’une proposition de redressement … » ; qu’aux termes de l’article L. 53 du livre des procédures fiscales : « En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l’impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l’administration des impôts et la société elle-même » ; qu’il ressort de la combinaison de ces dispositions et de celles de l’article 8 du code général des impôts qu’une notification régulière à une société de personnes imposable conformément à l’article 8 du code général des impôts de redressements apportés à ses résultats déclarés interrompt nécessairement la prescription à l’égard de ses associés, en tant que redevables de l’impôt sur la quote-part des résultats de la société correspondant à leurs droits dans celle-ci ;

Considérant qu’il est constant que le 17 novembre 2004, l’administration a adressé à la SCI 3J Vif Argent, en retenant une indemnité litigieuse d’un montant de 896 000 euros hors taxes versée par la SARL Jode comme élément de revenus fonciers, une proposition de rectification au titre de l’année 2003 servant de base au calcul des impositions dues par chaque associé en raison de la détention d’une quote-part du résultat imposable de la SCI 3 J Vif Argent en application de l’article 8 du Code général des impôts ; que cette proposition de rectification régulièrement notifiée à la SCI 3J Vif Argent a interrompu le délai de reprise à l’égard des associés qui, pour l’année 2003, expirait initialement le 31 décembre 2006 ; que ce délai a couru à nouveau entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2007 ; que si une proposition de redressement a été adressée par l’administration, le 10 mars 2006, cette fois-ci aux associés de la société, M. et Mme X, elle n’a pas eu pour effet d’interrompre à nouveau le délai de reprise dès lors qu’elle mentionnait les mêmes bases de redressement que celles notifiées à la SCI 3J Vif Argent en 2004 et avait seulement pour objet de permettre aux associés de présenter leurs observations s’agissant de la détermination de leur revenu global en application de l’article 156 du code général des impôts ; qu’ainsi, la prescription était acquise au 25 avril 2008, date de l’avis de mise en recouvrement des compléments de l’impôt sur le revenu au titre de l’année 2003 et des contributions sociales correspondantes ;

Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 156 du code général des impôts : « L’impôt sur le revenu est établi d’après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l’article 6, aux professions qu’ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu’aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n’est pas suffisant pour que l’imputation puisse être intégralement opérée, l’excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu’à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n’est pas autorisée l’imputation : …3º Des déficits fonciers, lesquels s’imputent exclusivement sur les revenus fonciers des cinq années suivantes » ;

Considérant que même s’il est admis que l’administration est en droit de contrôler l’existence et le montant du déficit reportable lorsqu’un contribuable entend imputer sur les revenus fonciers d’une année non prescrite un report déficitaire provenant d’années antérieures, alors même que les années au cours desquelles se serait produit le déficit sont couvertes par la prescription, une telle vérification et, le cas échéant, la réintégration d’un déficit reportable ne sauraient être légales dès lors que le juge de l’impôt a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu au titre de l’année au cours de laquelle le déficit reportable est né ;

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus l’année 2003 étant prescrite, le service ne pouvait procéder à la rectification du résultat de la SCI 3 J Vif argent au titre de cette même année ; qu’ainsi, compte tenu des déficits fonciers antérieurs non encore imputés pour un montant de 2 170 euros et du déficit constaté au titre de l’année 2003 dans la catégorie des revenus fonciers, le service ne pouvait annuler le déficit foncier reportable en 2004 et porter le revenu foncier net taxable de M. et Mme X de la somme de 5 910 euros à celle de 8 080 euros ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont fondés à demander la décharge des compléments d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée et des intérêts de retard auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l’Etat le versement à M. et Mme X de la somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : M. et Mme X sont déchargés des suppléments d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée et des intérêts de retard auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004.

Article 2 : L’Etat est condamné à verser à M. et Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme Y X et au directeur départemental des finances publiques de la Vendée.

Délibéré après l’audience du 24 novembre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Quillévéré, président,

M. Geffray, premier conseiller,

M. Dussuet, premier conseiller,

Lu en audience publique le 22 décembre 2011.

Le rapporteur, Le président,

Signé : J.-E. GEFFRAY Signé : G. QUILLÉVÉRÉ

Le greffier,

Signé : E. LE LUDEC

La République mande et ordonne

au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat

en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce

requis en ce qui concerne les voies de droit commun

contre les parties privées, de pourvoir

à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Nantes, 22 décembre 2011, n° 0807457