Tribunal administratif de Nantes, 10ème chambre, 26 décembre 2022, n° 2204493

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 10e ch., 26 déc. 2022, n° 2204493
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 2204493
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2022, M. C A, représenté par Me Chelly, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision de l’autorité consulaire française à Tunis (Tunisie) refusant de lui délivrer un visa d’entrée et de long séjour en qualité de salarié ;

2°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur, à titre principal, de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de faire réexaminer la demande dans les mêmes conditions de délai et d’astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il doit être regardé comme soutenant que :

— la décision attaquée méconnaît les dispositions de l’article L. 114-5 du code des relations entre le public et l’administration ;

— elle est insuffisamment motivée ;

— elle est entachée d’un défaut d’examen réel et sérieux de sa situation ;

— elle est entachée d’une erreur d’appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2022, le ministre de l’intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour le requérant a été enregistré le 24 novembre 2022 et n’a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code du travail ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme B a été entendu au cours de l’audience publique du 5 décembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. M. C A, ressortissant tunisien, a sollicité auprès de l’autorité consulaire française à Tunis la délivrance d’un visa de long séjour en qualité de travailleur salarié dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée. L’autorité consulaire a rejeté sa demande. Il a saisi la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France d’un recours contre la décision consulaire, dont il a été accusé réception le 21 janvier 2022. M. A demande au tribunal l’annulation de la décision implicite de rejet née du silence de la commission.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Aux termes de l’article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d’y exercer une profession salariée, l’étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l’autorité administrative ou une autorisation de travail ".

3. L’accusé de réception du recours administratif préalable obligatoire indique : « En l’absence d’une réponse expresse de la commission dans un délai de deux mois à compter de la date de réception du recours mentionnée ci-dessus, le recours est réputé rejeté pour les mêmes motifs que ceux de la décision contestée (CAA de Nantes, 17 novembre 2020, n°20NT00588). ». La décision consulaire comporte deux cases cochées portant les numéros 3 et 5 et les mentions « Il existe un risque de détournement de l’objet du visa à des fins de maintien illégal en France après l’expiration de votre visa ou pour mener en France des activités illicites » et « Les informations communiquées pour justifier les conditions du séjour sont incomplètes et/ou ne sont pas fiables ».

4. M. A soutient sans être contesté avoir produit les pièces justifiant des conditions de son séjour en France, dont l’autorisation de travail visée par l’autorité administrative compétente ainsi qu’une attestation d’hébergement. Dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation.

5. La circonstance qu’un travailleur étranger dispose d’un contrat de travail visé par la direction régionale interdépartemental de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) ou d’une autorisation de travail, ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente refuse de lui délivrer un visa d’entrée en France en se fondant, sous le contrôle des juges de l’excès de pouvoir, sur tout motif d’intérêt général. Constitue un tel motif l’inadéquation entre l’expérience professionnelle et l’emploi sollicité, et par conséquent le détournement de cette procédure de visa.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter d’une date prévisionnelle fixée au 1er août 2021 pour occuper un poste de technicien d’installation de réseaux câblés de communication en fibre au sein de la société CNS’Profibre. Pour justifier de l’adéquation entre, d’une part, ses qualifications et son expérience professionnelles, et, d’autre part, l’emploi auquel il postule, le requérant produit notamment un certificat portant la mention « Fibre optique » délivré le 11 février 2019 par le centre de formation professionnelle Bootcamp. Il verse également au dossier diverses attestations de stage et de travail, dont il ressort que l’intéressé a exercé des missions de raccordements, tirages et soudure de fibres optiques en qualité de technicien. Dans ces conditions, et alors que les bulletins de salaire et contrat de travail ne sont pas les seuls éléments susceptibles de rapporter la preuve de l’adéquation du profil professionnel au poste proposé, M. A est fondé à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que le requérant est fondé à demander l’annulation de la décision attaquée.

Sur les conclusions à fin d’injonction sous astreinte :

8. Le présent jugement, eu égard au motif d’annulation retenu, implique nécessairement qu’il soit enjoint au ministre de l’intérieur et des outre-mer de faire délivrer à M. A le visa de long séjour sollicité. Il y a lieu, par suite, d’enjoindre au ministre de faire délivrer à l’intéressé ce visa dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu’il soit besoin d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les frais d’instance :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 200 euros à verser à M. A au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l’intérieur et des outre-mer de faire délivrer à M. A le visa de long séjour sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L’Etat versera à M. A la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. C A et au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 5 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Rimeu, présidente,

M. Guilloteau, conseiller,

Mme Louazel, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 décembre 2022.

La rapporteuse,

M. B

La présidente,

S. RIMEU

La greffière,

S. LE DUFF

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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