Tribunal administratif de Nice, 12 janvier 2016, n° 1303814

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nice, 12 janv. 2016, n° 1303814
Juridiction : Tribunal administratif de Nice
Numéro : 1303814
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Marseille, 1er juin 2014, N° 11MA03606

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE NICE

N°s 1303814, 1303854

_________

SARL AMENAGEMENT SERVICES

_______________________________

M. Z

Magistrat rapporteur

________________

M. Taormina

Rapporteur public

_______________

Audience du 8 décembre 2015

Lecture du 12 janvier 2016

_____________________

01-02-01-02-09

01-04-005

01-04-03-04

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Nice,

(5e Chambre) Vu la procédure suivante :

1°) Par une requête, enregistrée au greffe le 10 septembre 2013, sous le n° 1303814, la société à responsabilité limitée Aménagement Services, représentée par Me Boitel, demande au tribunal :

1. d’annuler le certificat administratif du 8 juillet 2013 émis par la Métropole Nice Côte d’Azur à son encontre pour avoir paiement d’un montant de 75 171, 36 euros hors taxes au titre d’une redevance d’occupation du domaine public et d’un montant de 3 180 euros hors taxes au titre des charges et accessoires pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 ;

2. de mettre à la charge de la Métropole Nice Côte d’Azur la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— l’auteur de l’acte est incompétent ;

— le certificat administratif du 8 juillet 2013 est irrégulier ; sa motivation fondée sur le jugement du tribunal administratif de Nice du 5 février 2013 est erronée ;

— la créance réclamée n’est pas certaine, liquide et exigible :

▪ la SOMINICE a donné son accord aux sociétés du groupe Aménagement Services pour la gratuité du stationnement de leurs véhicules au marché d’intérêt national (MIN) de Nice ; cet accord contractuel n’a jamais été résilié ;

▪ le montant de la créance est erroné et méconnaît les dispositions de l’article L.2125-3 du code général des collectivités territoriales : il est fondé sur un nombre d’emplacements qui aurait été occupé en 2010 et calculé à partir de relevés limités à la période de juin à août 2010, d’une attestation censée porter sur des faits relevés un dimanche et à partir du tarif d’abonnement annuel ; la réalité de l’occupation domaniale est méconnue ; la créance est demandée à la seule société Aménagement et Services alors que certains véhicules appartiennent à la société STEM ; la Métropole Nice Côte d’Azur a laissé perdurer la situation sans agir pendant deux ans ; les montants de la créance retenus par le jugement du tribunal administratif du 5 février 2013 sont également erronés ;

Par un mémoire, enregistré au greffe le 21 novembre 2013, la Métropole Nice Côte d’Azur prise en la personne de son président en exercice et représentée par la Selarl Symchowicz-Weissberg et Associés conclut au rejet de la requête et demande, en outre, au tribunal de mettre à la charge de la société requérante la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu’elle est dirigée contre un acte qui ne fait pas grief ;

— à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés :

• le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte manque en fait ;

• le moyen tiré du défaut de motivation est inopérant ;

• la société requérante, à défaut d’un titre exprès, est tenue de payer une redevance en contrepartie de l’avantage dont elle a bénéficié pour stationner ses véhicules sur le domaine public ; elle n’a, en tout état de cause, jamais été tacitement autorisée à stationner à titre gratuit ses véhicules sur le marché d’intérêt national de Nice ;

• le montant de l’indemnité d’occupation réclamée n’est entachée d’aucune irrégularité ;

Par ordonnance du 8 octobre 2014, le président de la 5e chambre a clos au 7 novembre 2014 à 13 h 00, l’instruction de la présente affaire ;

Par un mémoire, enregistré le 7 novembre 2014, la société Aménagement Services, représentée par la Selas LLC et Associés, a conclu aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir, en outre, que :

— la requête est recevable : elle est dirigée contre une décision qui lui fait grief en mettant à sa charge une somme de 89 904, 95 euros ;

— la motivation est erronée dès lors qu’elle n’est pas une occupante irrégulière du domaine public ;

— les bases de liquidation sont irrégulières : elles sont fondées sur des grilles tarifaires qui lui sont pas opposables ;

— le règlement intérieur du marché d’intérêt national a été méconnu ; il résulte de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 2 juin 2014 qu’elle était un occupant régulier du domaine public ; la Métropole Nice Côte d’Azur n’a pas subi de préjudice et a eu un comportement fautif à son encontre ; au titre des années 2011 et 2012, elle ne devait pas acquitter la somme de 23 300 euros au titre de la liquidation d’astreinte pour la période du 1er janvier 2011 au 10 avril 2012 ; la somme de 25 090 euros doit, en tout état de cause, être déduite des redevances réclamées au titre des années 2011 et 2012 ;

— le montant de la créance réclamée est incertain et inexact : aucun relevé n’est produit pour 2012 ; les véhicules et engins figurant sur les relevés de 2011 ne lui appartiennent pas tous ;

Par ordonnance du 13 novembre 2014, le président de la 5e chambre a réouvert l’instruction de la présente affaire ;

Par un mémoire, enregistré le 18 novembre 2015, la Métropole Nice Côte d’Azur conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir, en outre, que :

— le fait que le certificat administratif contesté mentionne le mode de calcul de la somme mise à la charge de la société requérante ne lui confère pas le caractère d’une décision faisant grief ; ce certificat n’a en lui-même aucun effet propre ;

— l’indemnité réclamée n’est en aucun cas subordonnée à la publication préalable et régulière du règlement intérieur du marché d’intérêt national et des grilles tarifaires ; en tout état de cause, les décisions relatives aux tarifs des redevances d’occupation du domaine public ont été régulièrement publiées et le règlement intérieur n’avait pas à être notifié à la société requérante ;

— les bases de liquidation sont détaillées dans le certificat administratif ; la société requérante doit démontrer que les véhicules ne lui appartiennent pas ;

— elle n’a commis aucune faute à l’encontre de la société requérante ; les dispositions du règlement intérieur du marché d’intérêt national n’ont, en aucun cas, été méconnues ;

— la compensation sollicitée ne peut qu’être écartée dès lors que la société requérante ne détient aucune créance à l’égard de la Métropole ;

— la convention d’occupation des locaux du marché d’intérêt national n’inclut pas la redevance due au titre de l’occupation des places de stationnement ;

— la méthode de calcul de l’indemnité a conduit à déterminer « le volume réel de stationnement » en se fondant sur un nombre minimum de véhicules alors que la société requérante n’a fourni aucun élément sur le nombre de ses véhicules, leur tonnage, leur charge utile ;

Par un mémoire, enregistré au greffe le 4 décembre 2015, la société Aménagement Services conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures et fait, en outre, valoir, que :

— les principes et les règles du droit de la concurrence ont été méconnues : la Métropole Nice Côte d’Azur a abusé de sa position et de ses pouvoirs ;

2°) Par une requête, enregistrée au greffe le 17 septembre 2013, sous le n° 1303854, la société à responsabilité limitée Aménagement Services, représentée par Me Boitel, demande au tribunal :

1. d’annuler le titre exécutoire n° 00250-0051 émis le 15 juillet 2013 par la Métropole Nice Côte d’Azur à son encontre pour avoir paiement d’une somme de 89 904,95 euros toutes taxes comprises au titre d’une redevance d’occupation du domaine public ;

2. de mettre à la charge de la Métropole Nice Côte d’Azur la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— l’auteur de l’acte est incompétent ;

— le titre exécutoire attaqué est irrégulier ; sa motivation, fondée sur le jugement du tribunal administratif de Nice du 5 février 2013, est erronée ; la motivation est insuffisante : aucune explication n’est donnée sur le mode de calcul des charges et accessoires ;

— les bases de liquidation sont irrégulières ;

— la créance réclamée n’est pas certaine, liquide et exigible :

▪ la SOMINICE a donné son accord aux sociétés du groupe Aménagement Services pour la gratuité du stationnement de leurs véhicules ; cet accord contractuel n’a jamais été résilié ;

▪ le montant de la créance est erroné et méconnaît les dispositions de l’article L.2125-3 du code général des collectivités territoriales : il est fondé sur un nombre d’emplacements qui aurait été occupé en 2010 et calculé à partir de relevés limités à la période de juin à août 2010, d’une attestation censée porter sur des faits relevés un dimanche et à partir du tarif d’abonnement annuel ; la réalité de l’occupation domaniale est méconnue ; la créance est demandée à la seule société Aménagement et Services alors que certains véhicules appartiennent à la société STEM ; la Métropole Nice Côte d’Azur a laissé perdurer la situation sans agir pendant deux ans ; les montants de la créance retenus par le jugement du tribunal administratif du 5 février 2013 sont erronés ;

Par un mémoire, enregistré au greffe le 21 novembre 2013, la Métropole Nice Côte d’Azur représentée par son président en exercice et par la Selarl Symchowicz-Weissberg et Associés conclut au rejet de la requête et demande, en outre, au tribunal de mettre à la charge de la société requérante la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— les moyens soulevés ne sont pas fondés :

• le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte manque en fait ;

• le moyen tiré du défaut de motivation est inopérant et manque en fait ; les bases de liquidation du titre ont été détaillées, poste par poste, dans le certificat administratif du 8 juillet 2013 joint au titre attaqué ;

• la société requérante, à défaut d’un titre exprès l’autorisant à occuper le domaine public, est tenue de payer une redevance en contrepartie de l’avantage dont elle a bénéficié pour stationner ses véhicules sur le domaine public ; elle n’a, en tout état de cause, jamais été tacitement autorisée à stationner à titre gratuit ses véhicules au marché d’intérêt national ;

• le montant de l’indemnité d’occupation réclamée n’est entachée d’aucune irrégularité ;

Par ordonnance du 8 octobre 2014, le président de la 5e chambre a clos au 7 novembre 2014 à 13 h 00, l’instruction de la présente affaire ;

Par un mémoire, enregistré le 7 novembre 2014, la société Aménagement Services représentée par la Selas LLC et Associés a conclu aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir, en outre, que :

— la motivation est erronée dès lors qu’elle n’est pas une occupante irrégulière du domaine public ;

— les bases de liquidation sont irrégulières : la Métropole Nice Côte d’Azur n’établit pas que le règlement intérieur du MIN de Nice a été régulièrement publié, ni qu’il lui a été notifié ; elles sont fondées sur des grilles tarifaires qui lui sont pas opposables ; elles ne permettent pas de connaître la part de redevance réclamée imputable à la société STEM ;

— le règlement intérieur du marché d’intérêt national a été méconnu ; il résulte de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 2 juin 2014 qu’elle était un occupant régulier du domaine public ; la Métropole Nice Côte d’Azur n’a pas subi de préjudice et a eu un comportement fautif à son encontre ; au titre des années 2011 et 2012, elle ne devait pas acquitter la somme de 23 300 euros au titre de la liquidation d’astreinte pour la période du 1er janvier 2011 au 10 avril 2012 ; la somme de 25 090 euros doit, en tout état de cause, être déduite des redevances réclamées au titre des années 2011 et 2012 ;

— le montant de la créance réclamée est incertain et inexact : aucun relevé n’est produit pour 2012 ; les véhicules et engins figurant sur les relevés 2011 ne lui appartiennent pas tous ;

Par ordonnance du 13 novembre 2014, le président de la 5e chambre a réouvert l’instruction de la présente affaire ;

Par un mémoire, enregistré le 18 novembre 2015, la Métropole Nice Côte d’Azur conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir, en outre, que :

— l’indemnité réclamée n’est en aucun cas subordonnée à la publication préalable et régulière du règlement intérieur du marché d’intérêt national et des grilles tarifaires ; en tout état de cause, les décisions relatives aux tarifs des redevances d’occupation du domaine public ont été régulièrement publiées et le règlement intérieur n’avait pas à être notifié à la société requérante ;

— les bases de liquidation sont détaillées dans le certificat administratif ; la société requérante doit démontrer que les véhicules ne lui appartiennent pas ;

— elle n’a commis aucune faute à l’encontre de la société requérante ; les dispositions du règlement intérieur du marché d’intérêt national n’ont, en aucun cas, été méconnues ;

— la compensation sollicitée ne peut qu’être écartée dès lors que la société requérante ne détient aucune créance à l’égard de la Métropole ;

— la convention d’occupation des locaux du marché d’intérêt national n’inclut pas la redevance due au titre de l’occupation des places de stationnement ;

— la méthode de calcul de l’indemnité a conduit à déterminer « le volume réel de stationnement » en se fondant sur un nombre minimum de véhicules alors que la société requérante n’a fourni aucun élément sur le nombre de ses véhicules, leur tonnage, leur charge utile ;

Par un mémoire, enregistré au greffe le 4 décembre 2015, la société Aménagement Services conclut aux mêmes fins par les moyens que ses précédentes écritures et fait, en outre, valoir, que :

— les principes et les règles du droit de la concurrence ont été méconnues : la Métropole Nice Côte d’Azur a abusé de sa position et de ses pouvoirs ;

Vu :

— les actes attaqués ;

— les pièces constatant la notification aux parties des requête et mémoires ainsi que les avis d’audience ;

— les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code général de la propriété des personnes publiques ;

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code civil ;

— la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public ;

— le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

— le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 8 décembre 2015 :

— le rapport de M. Z, premier conseiller,

— les conclusions de M. Taormina, rapporteur public,

— les observations de Me Alonzo pour la société Aménagement Services et de Me Mariet pour la Métropole Nice Côte d’Azur ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 décembre 2015, présentée pour la société Aménagement Services dans les affaires n°s 1303814 et 1303854 ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n°s 1303814 et 1303854, présentées par la société à responsabilité limité Aménagement Services, présentent à juger des questions semblables et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement

2. Il résulte de l’instruction que la société Aménagement Services a conclu, le 15 mai 2005, avec la société d’économie mixte pour la construction et la gestion du marché d’intérêt national de Nice (SOMINICE), gestionnaire de ce marché jusqu’au 31 décembre 2010, une convention d’occupation en vue d’exercer, sur un emplacement d’une superficie de 1 300 m², une activité de récupération et de recyclage d’emballages ainsi qu’une activité de transport. Le marché d’intérêt national (MIN) de Nice est exploité en régie, depuis le 1er janvier 2011, d’abord par la ville de Nice, puis, à compter du 1er janvier 2012, par la Métropole Nice Côte d’Azur. Par arrêté du 18 février 2010, le préfet des Alpes-Maritimes a prononcé l’exclusion du MIN-produits alimentaires de Nice de la société Aménagement Services et le retrait de son contrat d’occupation du 15 mai 2005 précité. Le préfet a également prononcé l’exclusion de toutes les sociétés hébergées irrégulièrement par la société Aménagement Services. Par un arrêt n° 11MA03606 du 2 juin 2014, la Cour administrative d’appel de Marseille a annulé l’arrêté préfectoral du 18 février 2010. Enfin, par un jugement n° 1102169 du 5 février 2013, confirmé par l’arrêt n° 13MA01375 de la Cour administrative d’appel de Marseille du 19 mai 2015, le tribunal de céans a condamné solidairement les sociétés Aménagement Services et STEM à payer à la SOMINICE la somme de 50 767, 42 euros au titre de l’indemnité d’occupation pour le stationnement de leurs véhicules sur le parking du marché d’intérêt national de Nice du 1er janvier au 31 décembre 2010.

3. Par lettre en date du 9 juillet 2013, la Métropole Nice Côte d’Azur a notifié à M. C Y, gérant de la société Aménagement Services, un certificat administratif daté du 8 juillet 2013 qui certifie, selon les termes de son article 1er, que cette société « … est redevable envers la Métropole Nice Côte d’Azur d’une redevance d’occupation du domaine public pour 30 emplacements de parkings d’un montant de soixante quinze mille cent soixante et onze euros et trente six centimes (75 171, 36 €) HT ainsi que des charges et accessoires pour une somme de trois mille cent quatre-vingts euros (3180 €) HT, et ce pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. Par un titre exécutoire n° 00250, émis le 15 juillet 2013, la Métropole Nice Côte d’Azur demande à la société Aménagement Services de lui payer la somme de 89 904, 95 euros au titre de la « redevance d’occupation du domaine public pour 30 emplacements de parkings pour la période du 01/01/2011 au 31/12/2012 ». Par la requête n° 1303814, la société Aménagement Services demande au tribunal d’annuler le certificat administratif du 8 juillet 2013. Par la requête n° 1303854, cette société doit être regardée comme demandant au tribunal de la décharger de la somme de 89 904, 95 euros.

Sur la recevabilité de la requête n° 1303814 :

4. Par le certificat administratif du 8 juillet 2013 précité, la Métropole Nice Côte d’Azur informe la société requérante qu’elle est redevable, pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, de la somme de 75 171, 36 euros hors taxes au titre d’une redevance d’occupation du domaine public et d’un montant de 3 180 euros hors taxes au titre des charges et accessoires. Il ne résulte pas de l’instruction qu’un précédent décompte ait été adressé à cette société. Le certificat mentionne le fondement juridique de la créance réclamée, à savoir notamment l’article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes physiques, et les modalités de calcul de ladite créance. Un tel certificat doit, dès lors, être regardé, ainsi qu’il se qualifie lui-même, comme une décision nonobstant la possibilité offerte à la société requérante d’en contester le bien fondé lors de la contestation du titre de recettes pris pour la mise en recouvrement. La fin de non recevoir opposée par la Métropole Nice Côte d’Azur et tirée de l’absence de caractère de décision faisant grief du certificat du 8 juillet 2013 ne peut, dès lors, qu’être écartée.

Sur les conclusions à fin d’annulation et à fin de décharge de la somme de 89 904, 95 euros :

En ce qui concerne la légalité externe :

S’agissant du moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte :

5. Selon l’article 1er de l’arrêté du 12 janvier 2012 portant délégation de fonctions à M. A X, conseiller métropolitain, membre du bureau, le président de la Métropole Nice Côte d’Azur a confié « délégations de fonctions, sous ma surveillance et ma responsabilité, …. à monsieur A X … pour les domaines suivants : budget, rapporteur général du budget. A cet effet, délégation de signature lui est confiée pour les actes suivants : … les bordereaux de titres de recettes… ». Il résulte de ces dispositions que M. X, signataire de la décision était bien compétent pour signer les actes attaqués. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte doit être écarté comme manquant en fait.

S’agissant des moyens tirés de l’insuffisance de motivation et de l’insuffisance des précisions des bases de liquidation du titre exécutoire attaqué :

S’agissant du certificat administratif du 8 juillet 2013 :

6. Le certificat du 8 juillet 2013 précise que « … la SARL Aménagement Services a occupé 30 places de parkings sur le domaine public sans droit ni titre du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 … conformément à l’article L.2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques, toute occupation ou utilisation du domaine public donne lieu au paiement d’une redevance… » et que le montant réclamé correspond à la « redevance qu’elle [société Aménagement Services] aurait payée si elle avait été régulièrement titrée, ainsi que les charges et accessoires y afférents, pour la période concernée ». Dans son article 2, le certificat détaille les redevances, charges et accessoires dus pour les années 2011 et 2012 au titre du stationnement de 30 véhicules, 4 véhicules de charge utile (CU) de 801 à 1 500 kg, 6 véhicules de CU de 1501 à 5 000 kg et 20 véhicules de CU supérieure à 5 000 kg, en précisant les prix unitaires appliqués correspondant au tonnage des véhicules et aux charges et accessoires. Cet acte précise ainsi le fondement juridique de l’indemnité d’occupation réclamée à la société requérante et détaille les montants réclamés au titre des années 2011 et 2012. Par suite, le moyen tiré d’un défaut de motivation du certificat administratif du 8 juillet 2013 ne peut qu’être écarté.

S’agissant du titre de recettes :

7. Un ordre de recettes doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu’il est émis par une personne publique autre que l’Etat, pour lequel cette obligation est expressément prévue par l’article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 susvisé. En vertu de ce principe, une collectivité publique ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par une référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge de ce débiteur. La seule référence dans un titre de perception à l’intitulé d’un litige et d’une décision administrative ne peut constituer l’indication des bases de liquidation d’une créance si aucun document explicitant le contenu de ces mentions n’est joint à ce titre ou n’a été porté antérieurement à la connaissance du débiteur. En revanche, il ne constitue pas une décision devant être motivée en application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée.

8. Le titre exécutoire n° 00250 émis, le 15 juillet 2013, à l’encontre de la société Aménagement Services comporte les indications suivantes : « redevance d’occupation du domaine public pour 30 emplacements de parkings pour la période du 01/01/2011 au 31/12/2012 … Certificat administratif du 08/07/2013 Ordonnance TA du 10/05/2012 Ordonnance TA du 28/06/2010 Décision préfecture du 18/02/2010 Jugement TA du 05/02/2013 ». Il résulte de l’instruction qu’était notamment joint à ce titre le certificat du 8 juillet 2013 précité, lequel document précise, ainsi qu’il a été dit au point 6, le fondement juridique de la créance et les modalités de calcul de l’indemnité d’occupation. En se bornant à faire valoir que le titre attaqué fait mention de décisions de justice sans rapport avec la redevance réclamée et que la Métropole Nice Côte d’Azur fait application du règlement intérieur des marchés d’intérêt national qui ne lui serait notamment pas opposable, la société requérante ne conteste pas utilement que le titre litigieux précise le fondement juridique de la créance et détaille les modalités de calcul du montant réclamé. Le titre attaqué indique ainsi les bases de la liquidation avec une précision suffisante pour permettre au débiteur de les vérifier. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut d’indication des bases de liquidation de la créance en litige doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne le bien fondé des actes attaqués :

9. Une personne publique est fondée à réclamer à l’occupant sans titre de son domaine public, au titre de la période d’occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu’elle aurait pu percevoir d’un occupant régulier pendant cette période. A cette fin, elle doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l’occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l’occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu’aurait pu produire l’occupation régulière de la partie concernée du domaine public.

S’agissant de l’obligation de payer une indemnité d’occupation :

10. La société Aménagement Services fait valoir qu’un accord tacite conclu avec la SOMINICE l’autorisait à stationner gratuitement ses véhicules sur les parkings publics du MIN de Nice. Toutefois, la circonstance que la société SOMINICE n’a pas, pendant plusieurs années, facturé de redevances à cette société à raison des stationnements de ses camions ou de camions d’autres sociétés sur le parking du marché d’intérêt national ne signifie ni que ladite société aurait bénéficié d’un contrat tacite lui accordant la gratuité pour lesdits emplacements ni que la société SOMINICE s’interdisait de lui facturer les sommes dues en application du règlement intérieur du marché d’intérêt national.

11. Si la société Aménagement Services soutient qu’elle a acquitté la redevance d’occupation domaniale pour les années 2011 et 2012, elle ne l’établit pas. Si elle fait valoir que par une ordonnance n° 1201278 du 10 mai 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Nice l’a condamnée à payer la somme de 23 300 euros au titre de la liquidation de l’astreinte, pour la période du 1er janvier 2011 au 10 avril 2012, à laquelle elle a été condamnée par ordonnance n° 11001916 du 25 juin 2010 en raison de son absence d’évacuation du MIN suite à la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 18 février 2010 prononçant son expulsion, elle ne conteste pas utilement qu’elle n’a pas acquitté, en 2011 et en 2012, de redevances au titre de places de parking occupées par ses véhicules. Par ailleurs, la société requérante soutient qu’elle occupe régulièrement le domaine public dès lors que l’arrêté préfectoral du 18 février 2010 précité prononçant son expulsion a été annulé par un arrêt n° 11MA03606 du 2 juin 2014 de la Cour administrative d’appel de Marseille et que les parties sont toujours liées par la convention du 15 mai 2005 précitée. Toutefois, la convention conclue le 15 mai 2005 entre la SOMINICE et la société Aménagement Services porte exclusivement sur les locaux d’exploitation et non sur les places de parking. En tout état de cause, cette société n’établit pas, comme il vient d’être dit, qu’elle a acquitté, pour les places de parking qu’elle a occupées, les redevances d’occupation du domaine public au titre des années 2011 et 2012.

Sur le tarif appliqué :

12. Il ressort du certificat administratif du 8 juillet 2013 que la Métropole Nice Côte d’Azur a appliqué, pour déterminer le montant de l’indemnité d’occupation due, les tarifs unitaires applicables aux abonnements annuels des « véhicules des activités complémentaires », en vigueur en 2011 et en 2012 en ajoutant, pour ces mêmes années, les prix unitaires dus au titre des charges et accessoires. En se bornant à faire valoir que la Métropole Nice Côte d’Azur aurait pu mettre en œuvre le système des « tickets à la journée » permettant de connaître avec précision, selon elle, le nombre de ses véhicules stationnant chaque jour au MIN, la société requérante ne conteste pas utilement que l’application de redevances à la journée ne correspondait pas à la situation d’une entreprise garant à l’année ses véhicules sur le MIN. La Métropole Nice Côte d’Azur a, dès lors, pu légalement retenir le tarif d’abonnement annuel pour déterminer le montant des redevances qui auraient été appliquées si l’occupant avait été placé dans une situation régulière. Si la société fait, par ailleurs, valoir que les tarifs ne lui sont pas opposables à défaut de lui avoir été communiqués, de telles redevances sont prévues par le règlement du MIN qui présente un caractère réglementaire et sont, dès lors, exigibles lorsque des véhicules stationnent sur le domaine public du MIN.

Sur la méconnaissance du droit de la concurrence :

13. En se bornant à faire valoir que la Métropole Nice Côte d’Azur a tardé à lui demander le paiement des redevances d’occupation du domaine public au titre des années 2011 et 2012, la société requérante ne conteste pas utilement, ainsi qu’il a été dit aux points 9 à 12, que le gestionnaire du MIN était tenu de lui demander un tel paiement pour le stationnement de ses véhicules sur le domaine public. Le moyen tiré de la violation du principe de la liberté du commerce et de l’industrie et des règles de la concurrence ne peut, dès lors, qu’être écarté.

Sur les véhicules présents sur le site en 2011 :

14. La société Aménagement et Services fait valoir que les montants réclamés ne sont ni exacts, ni précis, qu’ils ont été calculés arbitrairement sans tenir compte de la réalité des stationnements et que la méthode d’extrapolation appliquée par la Métropole Nice Côte d’Azur multiplie les erreurs et les inexactitudes. Il résulte de l’instruction que la Métropole Nice Côte d’Azur a retenu, en 2011, la présence quotidienne de 30 véhicules, 4 véhicules de CU de 801 à 1 500 kg, 6 véhicules de CU de 1501 à 5 000 kg et 20 véhicules de CU supérieure à 5 000 kg. Le chiffre de 30 véhicules et leur répartition dans les trois catégories de charges utiles ont été retenus par le gestionnaire du MIN à partir de nombreux relevés des véhicules effectués, de janvier à septembre 2011, par les gardiens du parking, soit pendant neuf mois. Si la société requérante fait valoir que ce chiffre ne constitue qu’ « une base forfaitaire d’occupation minimale », elle ne conteste pas utilement la réalité des emplacements occupés quotidiennement par ses véhicules. Par ailleurs, si elle fait valoir que des véhicules d’autres sociétés ont pu être comptabilisés par la Métropole Nice Côte d’Azur, il est constant, toutefois, que seule la société requérante dispose des données, notamment du nombre et du type de ses véhicules stationnant chaque jour sur le site du MIN, qui auraient permis de calculer le montant exact des redevances « accès parking » dues au titre de l’année 2011. Par suite, la société Aménagement Services ne conteste pas utilement que le montant de l’indemnité d’occupation du domaine public due au titre de l’année 2011 doit être arrêté à la somme de 44 952, 47 euros toutes taxes comprises.

Sur les véhicules présents sur le site en 2012 :

15. Il est constant que la Métropole Nice Côte d’Azur a également fixé à la somme de 44 952, 47 euros le montant de l’indemnité d’occupation due pour l’année 2012 au titre du stationnement de 30 véhicules. Aucun relevé de véhicules au cours de cette année n’est, toutefois, versé au dossier. En se bornant à produire un courrier daté du 10 mars 2011 à l’en tête des sociétés Aménagement Services, STEM et Avenir Recyclage et adressé au président du MIN, dans lequel M. Y, gérant, se dit prêt à accepter la facturation pour « une vingtaine de véhicules », la Métropole Nice Côte d’Azur ne peut pas être regardé comme apportant des éléments sur le nombre de véhicules de la société Aménagement Services qui ont effectivement stationné en 2012 sur les parkings du MIN, ni sur leur tonnage. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir qu’elle n’est pas redevable de la somme de 44 952, 47 euros au titre d’une indemnité d’occupation du domaine public pour l’année 2012.

16. Il résulte de tout ce qui précède que la société Aménagement Services est uniquement fondée à demander l’annulation du certificat administratif de la Métropole Nice Côte d’Azur du 8 juillet 2013 en tant qu’il met à sa charge la somme de 75 171,36 euros hors taxes (89 904, 95 euros toutes taxes comprises) au titre des redevances, charges et accessoires du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et à être déchargée de la somme de 44 952, 47 euros.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ».

18. Les dispositions précitées font obstacle à ce que le Tribunal fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge ; les conclusions présentées à ce titre par la Métropole Nice Côte d’Azur doivent, dès lors, être rejetées.

19. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la Métropole Nice Côte d’Azur la somme que demande la société Aménagement Services au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le certificat administratif de la Métropole Nice Côte d’Azur du 8 juillet 2013 est annulée en tant qu’il met à la charge de la société Aménagement Services la somme de 75 171, 36 euros hors taxes (89 904, 95 euros toutes taxes comprises) au titre des redevances d’occupation du domaine public, charges et accessoires du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012.

Article 2 : La société Aménagement Services est déchargée de l’obligation de payer de la somme de 44 952, 47 euros (quarante quatre mille neuf cent cinquante deux euros et quarante sept centimes).

Article 3 : Le surplus de la requête de la société Aménagement Services est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la Métropole Nice Côte d’Azur tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Aménagement et Services et à la Métropole Nice Côte d’Azur.

Copie sera faite au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré à l’issue de l’audience publique du 8 décembre 2015, où siégeaient :

M. Parisot, président,

MM. Z et d’Izarn de Villefort, premiers conseillers,

M. Benoit, greffier.

Lu en audience publique le 12 janvier 2016.

Le magistrat-rapporteur, Le président,

F. Z B. Parisot Le greffier,

XXX

La République mande et ordonne au préfet des Alpes-Maritimes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

ou par délégation le greffier

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Tribunal administratif de Nice, 12 janvier 2016, n° 1303814