Tribunal administratif de Paris, 14 juin 2016, n° 1511387

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 14 juin 2016, n° 1511387
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 1511387

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

N°1511387/2-1

___________

Mme A X

___________

M. Z

Rapporteur

___________

M. Le Garzic

Rapporteur public

___________

Audience du 31 mai 2016

Lecture du 14 juin 2016

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Paris,

(2e Section – 1re Chambre),

30-02-02

C

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2015, et un mémoire enregistré le 8 janvier 2016, Mme A X, représentée par la SCP Foussard-Froger, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle le chef d’établissement du collège Montaigne à Paris a refusé l’inscription de sa fille Valentine X en classe de 6e, au sein de la section internationale polonaise de cet établissement pour l’année scolaire 2015-2016, ensemble la décision du recteur de l’académie de Paris rejetant son recours hiérarchique ;

2°) d’enjoindre au recteur de l’académie de Paris et au chef d’établissement du collège Montaigne d’inscrire sa fille en classe de 6e, au sein de la section internationale polonaise de cet établissement, ou, à défaut, de réexaminer sa demande d’inscription ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le chef d’établissement du collège Montaigne a excédé sa compétence et méconnu l’article D. 421-133 du code de l’éducation en refusant cette inscription alors même qu’une décision d’affectation au collège Montaigne avait été prise par le recteur le 15 juin 2015 ;

— à supposer que le recteur de l’académie de Paris ait entendu retirer sa décision d’affectation, il ne pouvait légalement le faire dès lors que cette décision individuelle créatrice de droit n’était pas illégale ;

— le refus d’inscription est entaché d’erreur de droit, dès lors qu’il est fondé sur un critère géographique de sectorisation, tandis que seuls devaient être pris en compte la réussite au test de sélection et le carnet scolaire ;

— le refus d’inscription méconnaît le principe d’égalité et le principe de non discrimination, dans la mesure où le critère de sectorisation géographique est discriminant, puisqu’il favorise des élèves en fonction de leur lieu de résidence, alors que cet élément est sans rapport avec l’aptitude à intégrer une filière, et si les dispositions de l’article D. 421-133 du code de l’éducation et de l’arrêté ministériel précisant les conditions d’admission dans une section internationale devaient être interprétées comme permettant un tel critère, elles seraient alors elles-mêmes entachées d’illégalité comme contraires à ces principes ;

— le refus d’inscription, du fait de la décision soudaine et tardive d’opérer une sélection sur la base d’un critère de sectorisation géographique, est contraire au principe de sécurité juridique et d’espérance légitime de maintien des situations acquises ;

— le refus d’inscription est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2015, le recteur de l’académie de Paris conclut au rejet de la requête.

Le recteur de l’académie de Paris soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’éducation ;

— l’arrêté du 28 septembre 2006 relatif aux sections internationales de collège ;

— l’arrêté du 3 mars 2015 modifiant l’arrêté du 30 mars 2012 modifié fixant la liste des sections internationales dans les écoles, collèges et lycées ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Z ;

— les conclusions de M. Le Garzic, rapporteur public ;

— et les observations de Me Froger, pour Mme X, et de M. Y, pour le recteur de l’académie de Paris.

1. Considérant que Valentine X, inscrite en CM2 à l’école Firmin Gémier d’Aubervilliers lors de l’année scolaire 2014-2015, a été admise, à l’issue de cette année scolaire, en classe de 6e ; que ses parents ont souhaité l’inscrire, à compter de la rentrée 2015, dans la section internationale polonaise du collège Montaigne, situé dans le 6e arrondissement de Paris ; qu’elle a passé, à cette fin, un test écrit et oral de ses connaissances en langue polonaise organisé par le collège Montaigne le 6 mai 2015 ; que ses parents ont été informés par une mention mise en ligne sur le site du rectorat de l’académie de Paris que, par une décision du 15 juin 2015, elle était affectée, à la rentrée 2015, au collège Montaigne ; qu’ils se sont en conséquence rendus au collège Montaigne pour une réunion d’information sur l’entrée en 6e organisée par l’établissement le 18 juin 2015, au cours de laquelle devaient être remis les dossiers d’inscription ; que, toutefois, le chef d’établissement du collège Montaigne a refusé d’inscrire Valentine X dans son établissement ; qu’un courriel de Mme X, la mère de Valentine X, du 22 juin 2015, adressé au chef d’établissement, contestant cette décision, est demeuré sans réponse ; que par un courriel en date du 6 juillet 2015, Mme X a demandé à la directrice académique des services de l’éducation nationale en charge du second degré d’ordonner l’inscription de sa fille au collège Montaigne, en application de la décision rectorale du 15 juin 2015 ; que ce courriel est également demeuré sans réponse ; que, par la présente requête, Mme X demande l’annulation de la décision par laquelle le chef d’établissement du collège Montaigne a refusé l’inscription de sa fille en classe de 6e au sein de la section internationale polonaise pour l’année scolaire 2015-016, ensemble la décision de rejet de son recours hiérarchique auprès du rectorat, et qu’il soit enjoint au recteur de l’académie de Paris et au chef d’établissement du collège Montaigne d’inscrire sa fille en classe de 6e au sein de la section internationale polonaise de cet établissement ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant qu’aux termes de l’article D. 421-131 du code de l’éducation : « Des sections internationales scolarisant des élèves français et des élèves étrangers peuvent être créées par arrêté du ministre chargé de l’éducation dans les écoles, les collèges et les lycées pour permettre à des élèves étrangers et à des élèves français d’acquérir ensemble une formation impliquant l’utilisation progressive d’une langue étrangère dans certaines disciplines » ; qu’aux termes de l’article D. 421-133 du même code : « L’admission des élèves dans les sections internationales est prononcée, dans les conditions fixées par le ministre chargé de l’éducation, par le directeur académique des services de l’éducation nationale agissant sur délégation du recteur d’académie, sur proposition du directeur d’école et du chef d’établissement qui aura vérifié au préalable l’aptitude des enfants français et étrangers à suivre le type d’enseignement dispensé dans ces sections (…) » ; qu’aux termes de l’article 1er de l’arrêté susvisé du 28 septembre 2006 relatif aux sections internationales de collège : « L’admission des élèves dans une section internationale de collège est prononcée par le directeur académique des services de l’éducation nationale agissant sur délégation du recteur d’académie, sur proposition du chef d’établissement au vu d’un dossier de candidature et des résultats à un examen » ; qu’aux termes de l’article 5 de ce même arrêté : « Au vu du dossier et des résultats obtenus à l’examen, le chef d’établissement arrête la liste des élèves dont il propose l’admission dans la section internationale au directeur académique des services de l’éducation nationale agissant sur délégation du recteur d’académie » ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que par une décision du 15 juin 2015, dont le recteur de l’académie de Paris ne conteste pas l’existence, Valentine X a été affectée au collège Montaigne à compter de la rentrée 2015 ; que, dès lors, le chef d’établissement du collège Montaigne ne pouvait légalement refuser de procéder à son inscription dans cet établissement ; que si le recteur de l’académie de Paris soutient qu’il a procédé au retrait de la décision du 15 juin 2015, il n’apporte aucune précision sur la date à laquelle un tel retrait serait intervenu et n’en établit pas l’existence, alors qu’il est constant que la décision affectant Valentine X au collège Montaigne est demeurée en ligne au moins jusqu’au 14 août 2015 ; qu’en tout état de cause, le recteur de l’académie de Paris ne pouvait procéder à un tel retrait, dès lors que l’autorité administrative ne peut, sous certaines conditions, retirer une décision individuelle explicite créatrice de droit que lorsque cette décision est illégale, et qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision d’affectation du 15 juin 2015 serait entachée d’illégalité ; qu’à cet égard, le recteur de l’académie de Paris n’est pas fondé à soutenir que l’affectation dans une section internationale du collège Montaigne serait réservée aux élèves résidant dans l’académie de Paris ou venant de l’étranger, dès lors qu’aucune des dispositions du code de l’éducation ni de l’arrêté du 28 septembre 2006 relatif aux sections internationales de collège ne prévoit une telle règle pour l’accès aux sections internationales, qui n’existent pas dans toutes les académies ; que si le lieu de résidence est l’un des éléments du dossier de l’élève qui peut être pris en compte par l’administration pour se prononcer sur son affectation dans une section internationale, le recteur de l’académie de Paris n’était pas pour autant tenu de rejeter la demande de la famille X au motif qu’elle résidait en Seine-Saint-Denis et ne peut dès lors se prévaloir, pour ce motif, de l’illégalité de sa décision d’affectation du 15 juin 2015 ; qu’il en résulte que Mme X est fondée à demander l’annulation de la décision par laquelle le chef d’établissement du collège Montaigne a refusé l’inscription de sa fille en classe de 6e au sein de la section internationale polonaise pour l’année scolaire 2015-2016 et de la décision par laquelle le recteur de l’académie de Paris a rejeté son recours hiérarchique, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

4. Considérant qu’aux termes de l’article L 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution » ;

5. Considérant que par une ordonnance du 27 juillet 2015, le juge des référés du tribunal de céans a enjoint au recteur de l’académie de Paris d’inscrire provisoirement la fille de Mme X en classe de 6e dans la section internationale polonaise au collège Montaigne jusqu’au prononcé du jugement au fond ; que l’exécution du présent jugement, eu égard au motif de l’annulation, implique nécessairement qu’il soit procédé à cette inscription pour l’année scolaire 2015-2016 à titre définitif ; qu’il y a donc lieu, en application des dispositions précitées de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, d’enjoindre au recteur de l’académie de Paris et au chef d’établissement du collège Montaigne d’y procéder dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision par laquelle le chef d’établissement du collège Montaigne a refusé l’inscription de Valentine X en classe de 6e au sein de la section internationale polonaise de cet établissement pour l’année scolaire 2015-2016 et la décision par laquelle le recteur de l’académie de Paris a rejeté le recours hiérarchique de Mme X sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint au recteur de l’académie de Paris et au chef d’établissement du collège Montaigne de procéder à l’inscription définitive de Valentine X en classe de 6e au sein de la section internationale polonaise de cet établissement pour l’année scolaire 2015-2016 dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L’Etat versera à Mme X la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme A X et à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée, pour information, au recteur de l’académie de Paris.

Délibéré après l’audience du 31 mai 2016, à laquelle siégeaient :

M. Mendras, président,

M. Z, premier conseiller,

Mme Troalen, conseillère,

Lu en audience publique le 14 juin 2016.

Le rapporteur, Le président,

C. Z A. MENDRAS

Le greffier,

C. LELIEVRE

La République mande et ordonne à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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