Tribunal administratif de Paris, 3e section - 2e chambre, 27 avril 2023, n° 2121201

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 3e sect. - 2e ch., 27 avr. 2023, n° 2121201
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 2121201
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 25 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 2121201 le 5 octobre 2021, et deux mémoires, enregistrés les 11 mai et 7 septembre 2022, la commune de Boulogne-Billancourt, représentée par Me Poisson, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté n° 2021 E 112540 du 31 août 2021 de la maire de Paris modifiant, à titre provisoire, la règle de la circulation générale route de Sèvres à Neuilly, à Paris 16e ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— l’arrêté attaqué est entaché d’incompétence ;

— il est insuffisamment motivé ;

— la mesure est disproportionnée et porte une atteinte excessive aux libertés d’aller et venir et du commerce et de l’industrie ;

— elle est entachée d’erreur de droit et de défaut de base légale, l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ne permettant pas d’adopter cette mesure.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 15 mars et 28 juin 2022, la ville de Paris conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

— la requérante n’a pas intérêt à agir contre la décision attaquée ;

— aucun des moyens de la requête n’est fondé.

La clôture de l’instruction est intervenue le 28 septembre 2022.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 2200784 le 12 janvier 2022, et deux mémoires enregistrés les 11 mai et 7 septembre 2022, la commune de Boulogne-Billancourt, représentée par Me Poisson, demande au tribunal, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 2121201 :

1°) d’annuler l’arrêté n° 2021 T 114658 du 16 décembre 2021 de la maire de Paris modifiant, à titre provisoire, la règle de la circulation générale route de Sèvres à Neuilly, à Paris 16e ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 22 avril et 28 juin 2022, la ville de Paris conclut, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 2121201, au rejet de la requête.

La clôture de l’instruction est intervenue le 28 septembre 2022.

III. Par une requête, enregistrée sous le n° 2204338 le 21 février 2022, et des mémoires enregistrés les 11 mai et 7 septembre 2022, la commune de Boulogne-Billancourt, représentée par Me Poisson, demande au tribunal, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 2121201 :

1°) d’annuler l’arrêté n° 2021 P 114823 du 30 décembre 2021 de la maire de Paris modifiant, à titre provisoire, la règle de la circulation générale route de Sèvres à Neuilly, à Paris 16e ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en outre, que la mesure en litige aurait dû faire l’objet d’une procédure de participation du public préalablement à son adoption.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 15 mars et 28 juin 2022, la ville de Paris conclut, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 2121201, au rejet de la requête.

La clôture de l’instruction est intervenue le 28 septembre 2022.

IV. Par une requête, enregistrée sous le n° 2205323 le 3 mars 2022, et des mémoires enregistrés les 20 janvier et 9 février 2023, le syndicat des copropriétaires du 2 bis boulevard Anatole France – 92100 Boulogne-Billancourt, le syndicat des copropriétaires du 3 boulevard Anatole France – 92100 Boulogne-Billancourt, le syndicat des copropriétaires du 13/15 avenue Charles-de-Gaulle – 92100 Boulogne-Billancourt et le syndicat des copropriétaires du 2-4 allée de Longchamp – 92100 Boulogne-Billancourt, représentés par Me Caupert, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d’annuler l’arrêté n° 2021 P 114823 du 30 décembre 2021 de la maire de Paris modifiant, à titre provisoire, la règle de la circulation générale route de Sèvres à Neuilly, à Paris 16e ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 3 000 euros à verser à chacun des syndicats requérants sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— l’arrêté attaqué est entaché d’incompétence ;

— il est entaché d’erreur de droit, l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ne permettant pas d’adopter la mesure en litige ;

— il est entaché d’erreurs de fait ;

— la mesure adoptée est disproportionnée ;

— elle traduit un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2022, la ville de Paris conclut au rejet de la requête ; elle fait valoir qu’aucun des moyens des requérants n’est fondé.

La clôture de l’instruction est intervenue le 10 mars 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

— le code de la route ;

— le code de l’environnement ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code général des collectivités territoriales ;

— la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Rezard, rapporteur,

— les conclusions de Mme Privet, rapporteure publique,

— les observations de Me Samain, représentant la commune de Boulogne-Billancourt,

— les observations de Me Anastaze, représentant le syndicat des copropriétaires du 2 bis boulevard Anatole France – 92100 Boulogne-Billancourt et autres,

— les observations de M. A, représentant la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

2. Par trois arrêtés successifs, n° 2021 E 112540 du 31 août 2021, n° 2021 T 114658 du 16 décembre 2021 et n° 2021 P 114823 du 30 décembre 2021, la maire de Paris a décidé, sur le fondement de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales, de réserver l’accès en véhicule à moteur à certaines catégories d’usagers sur le segment de la route de Sèvres à Neuilly, dans le bois de Boulogne, situé entre l’avenue de l’hippodrome ainsi que, pour le premier arrêté, la porte de l’hippodrome et, pour les deux autres, la route de Seine à la butte Mortemart. Par ses trois requêtes, la commune de Boulogne-Billancourt demande l’annulation de ces trois arrêtés des 31 août 2021, 16 décembre 2021 et 30 décembre 2021. Par leur requête, les quatre syndicats requérants demandent l’annulation de l’arrêté du 30 décembre 2021.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la ville de Paris :

3. La ville de Paris fait valoir que la commune de Boulogne-Billancourt ne justifie pas d’un intérêt lui donnant qualité pour agir à l’encontre des décisions attaquées. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la fermeture de la section de la route de Sèvres à Neuilly aux véhicules à moteur à l’exception de certaines catégories d’usagers a entraîné un report du trafic vers d’autres axes de circulation en particulier sur le territoire de la commune de Boulogne-Billancourt. Celle-ci dispose donc d’un intérêt direct et certain à contester les décisions en litige. La fin de non-recevoir doit dès lors être écartée.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

4. Aux termes de l’article L. 411-1 du code de la route : « Les règles relatives aux pouvoirs de police de la circulation routière dévolus au maire dans la commune () sont fixées par les articles L. 2213-1 à L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales ». Aux termes de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales : « Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l’environnement : / 1° Interdire à certaines heures l’accès de certaines voies de l’agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures ou de manière permanente, à diverses catégories d’usagers ou de véhicules () ». Ces pouvoirs sont exercés à Paris par le maire de Paris, dans les conditions et limites qui sont prévues à l’article L. 2512-14 du même code.

5. Aux termes de l’article R. 110-2 du code de la route : " Pour l’application du présent code, les termes ci-après ont le sens qui leur est donné dans le présent article : /

— agglomération : espace sur lequel sont groupés des immeubles bâtis rapprochés et dont l’entrée et la sortie sont signalées par des panneaux placés à cet effet le long de la route () ".

6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les voies de l’agglomération dont le 1° de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales permet au maire de Paris de réserver l’accès de manière permanente à certaines catégories d’usagers ou de véhicules s’entendent comme les voies qui sont bordées par un groupement d’immeubles bâtis rapprochés.

7. La section de la route de Sèvres à Neuilly, dont la maire de Paris, par trois arrêtés successifs, a réservé de manière permanente l’accès en véhicule à moteur à certaines catégories d’usagers, est bordée à l’Ouest par l’hippodrome de Longchamp et à l’Est par le bois de Boulogne. Il ressort des pièces du dossier qu’aucun groupement d’immeubles bâtis ne se trouve à sa proximité immédiate, que ce soit sur l’un ou l’autre de ses côtés. Par suite, elle ne constituait pas une voie de l’agglomération au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales, de sorte qu’en se fondant sur ces dispositions pour les adopter la maire de Paris a entaché ses décisions d’une erreur de droit.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes, que la commune de Boulogne-Billancourt et les syndicats de copropriété requérants sont fondés à demander l’annulation des décisions attaquées.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la ville de Paris au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, d’une part, la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Boulogne-Billancourt et, d’autre part, la somme de 1 500 euros à verser conjointement aux syndicats de copropriété requérants.

D E C I D E :

Article 1er : Les arrêtés n° 2021 E 112540 du 31 août 2021, n° 2021 T 114658 du 16 décembre 2021 et n° 2021 P 114823 du 30 décembre 2021 de la maire de Paris sont annulés.

Article 2 : La ville de Paris versera la somme de 1 500 euros à la commune de Boulogne-Billancourt au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La ville de Paris versera la somme de 1 500 € conjointement au syndicat des copropriétaires du 2 bis boulevard Anatole France – 92100 Boulogne-Billancourt, au syndicat des copropriétaires du 3 boulevard Anatole France – 92100 Boulogne-Billancourt, au syndicat des copropriétaires du 13/15 avenue Charles-de-Gaulle – 92100 Boulogne-Billancourt et au syndicat des copropriétaires du 2-4 allée de Longchamp – 92100 Boulogne-Billancourt au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Boulogne-Billancourt, au syndicat des copropriétaires du 2 bis boulevard Anatole France – 92 100 Boulogne-Billancourt, premier dénommé, pour l’ensemble des requérants sous le n° 2205323, et à la ville de Paris.

Délibéré après l’audience du 13 avril 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Amat, présidente,

Mme Armoët, première conseillère,

M. Rezard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2023.

Le rapporteur,

A. Rezard

La présidente,

N. Amat

La greffière,

P. Tardy-Panit

La République mande et ordonne au préfet de la région d’Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

N°s 2121201-2200784-2204338-2205323

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