Tribunal administratif de Poitiers, 3ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100770

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Sur la décision

Référence :
TA Poitiers, 3e ch., 30 déc. 2022, n° 2100770
Juridiction : Tribunal administratif de Poitiers
Numéro : 2100770
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 mars 2021 et le 21 mars 2022, M. D B et Mme C A, représentés par Me Guillard, demandent au tribunal :

1°) de condamner la commune de Taugon à leur verser une somme de 11 811,85 euros en réparation des préjudices subis du fait de l’obligation qui leur a été faite d’installer un dispositif d’assainissement individuel ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Taugon la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— la responsabilité de la commune est engagée dès lors que le maire n’a pas vérifié les conditions de réalisation des travaux nécessaires au raccordement de leur future habitation à l’assainissement collectif, en méconnaissance de l’article L. 111-11 du code de l’urbanisme ;

— la nécessité de prévoir un assainissement individuel a engendré un surcoût lié à l’achat d’un équipement d’un montant de 5523,85 euros ;

— l’allongement du délai du chantier a engendré des loyers supplémentaires d’un montant de 6 288 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 mai 2022, la commune de Taugon, représentée par Me Verger, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’urbanisme ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme E,

— les conclusions de Mme Bréjeon, rapporteure publique,

— et les observations de Me Finkelstein, représentant la commune de Taugon.

Considérant ce qui suit :

1. M. B et Mme A ont acquis un terrain au lieu-dit Chemin vert à Taugon (Charente-Maritime) en vue d’y faire construire une maison d’habitation. Par courrier du 9 janvier 2019, le syndicat des eaux de la Charente-Maritime (Eau 17) a émis un avis favorable au projet de réalisation d’un assainissement individuel. En janvier 2019, M. B et Mme A ont déposé une demande de permis de construire comprenant un dispositif d’assainissement individuel. Par courrier du 12 février 2019, la régie d’exploitation des services d’eau de la Charente-Maritime (RESE 17) leur a indiqué qu’un réseau public d’assainissement existait et que, dès lors, conformément au règlement du plan local d’urbanisme, leur habitation devrait y être raccordée, ce qui nécessitera « une extension du réseau gravitaire sur environ 225 m à partir du réseau existant ». Le 20 février 2019, le maire de Taugon leur a délivré un permis de construire assorti de certaines prescriptions, dont celle relative au raccordement au réseau public d’assainissement. Toutefois, les services du département n’ont pas autorisé les travaux de terrassement requis par l’extension du réseau car la voirie départementale avait été nouvellement refaite. Par courrier du 3 décembre 2019, le syndicat Eau 17 a donc finalement prescrit aux requérants, à titre dérogatoire, l’installation d’un dispositif d’assainissement individuel. Par courrier du 10 décembre 2019, M. B et Mme A ont adressé une réclamation au maire de Taugon tendant à ce que leur habitation soit raccordée au réseau d’assainissement collectif ou à titre subsidiaire, à ce qu’une compensation financière correspondant aux frais d’installation d’un système d’assainissement individuel leur soit versée. Leur demande a été implicitement rejetée le 20 janvier 2020.

2. Aux termes de l’article L. 111-11 du code de l’urbanisme : « Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l’aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d’eau, d’assainissement ou de distribution d’électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d’aménager ne peut être accordé si l’autorité compétente n’est pas en mesure d’indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. Lorsqu’un projet fait l’objet d’une déclaration préalable, l’autorité compétente doit s’opposer à sa réalisation lorsque les conditions mentionnées au premier alinéa ne sont pas réunies. () ».

3. Ces dispositions poursuivent notamment le but d’intérêt général d’éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d’être contraints, par le seul effet d’une initiative privée, de réaliser des travaux d’extension ou de renforcement des réseaux publics de distribution d’eau, d’assainissement ou d’électricité et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement, en prenant en compte les perspectives d’urbanisation et de développement de la collectivité. Il en résulte qu’un permis de construire doit être refusé lorsque, d’une part, des travaux d’extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d’autre part, l’autorité compétente n’est pas en mesure d’indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

4. Les requérants soutiennent que le maire de Taugon n’aurait pas dû leur délivrer le permis de construire sans avoir vérifié les conditions de réalisation des travaux d’extension du réseau d’assainissement ni anticipé la nécessité d’obtenir une autorisation de voirie par le gestionnaire du domaine public départemental, et que, dès lors, la responsabilité de la commune de Taugon est engagée. Ils font valoir qu’une coordination entre la commune et le département leur aurait permis de connaître les conditions et délais dans lesquels l’extension de réseau pouvait être réalisée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions précitées du code de l’urbanisme, le maire a sollicité l’avis des gestionnaires compétents des réseaux publics de distribution d’eau, d’assainissement et de distribution d’électricité. L’arrêté du 20 février accordant le permis de construire vise en particulier l’avis rendu par la RESE 17 le 12 février 2019 et le cite in extenso à l’article 1er : " le raccordement du projet nécessitera une extension du réseau gravitaire sur environ 225 m à partir du réseau existant ; la prise en charge financière de cette prestation sera effectuée en totalité par le syndicat des eaux ". Par suite, le maire a accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation et a notamment indiqué aux pétitionnaires la collectivité publique compétente pour réaliser les travaux d’extension du réseau d’assainissement. Il ne ressort d’aucune disposition législative ou réglementaire qu’il appartenait au maire de s’assurer lui-même de la possibilité de délivrance d’une autorisation de voirie par le gestionnaire du domaine public routier.

5. Au demeurant, à supposer même que le maire aurait commis une faute en ne mentionnant pas dans quel délai les travaux d’extension du réseau d’assainissement pouvaient être réalisés, les requérants ne démontrent pas l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et les préjudices allégués relatifs, d’une part, au financement de l’installation d’assainissement individuel et, d’autre part, aux loyers engendrés par un retard de chantier.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B et Mme A doit être rejetée, y compris leurs conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge des requérants la somme réclamée par la commune de Taugon sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B et Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Taugon sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. D B, Mme C A et à la commune de Taugon.

Délibéré après l’audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Bruston, présidente,

Mme Thèvenet-Bréchot, première conseillère,

Mme Gibson-Théry, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé

A. THEVENET-BRECHOTLa présidente,

Signé

S. BRUSTON

La greffière,

Signé

N. COLLET

La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef par intérim,

La greffière,

N. COLLET

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