Tribunal de commerce de Paris, 15e chambre, 26 septembre 1997

  • Articles retires de la vente en attendant la décision·
  • Investissements importants faits par le defendeur·
  • Action en contrefaçon et en concurrence déloyale·
  • Volonte de s'inscrire dans le sillage d'autrui·
  • Anteriorite du modèle argue de contrefaçon·
  • Mainlevee de la saisie-contrefaçon·
  • Demande reconventionnelle·
  • Exploitation sous son nom·
  • Ressemblance d'ensemble·
  • Action en contrefaçon

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 15e ch., 26 sept. 1997
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Référence INPI : D19970338
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La société CHACOK DIFFUSION, qui crée, fabrique et commercialise des vêtements de prêt-à-porter féminin, et plus particulièrement des vêtements en maille, accuse la société SOLYNE, rue du Sentier à Paris, de s’être rendue coupable de contrefaçon de son modèle de pull référence « LEGER » et de concurrence déloyale et entend obtenir réparation. Par acte du 6 janvier 1997 délivré en mairie de Paris 2e, la société CHACOK DIFFUSION assigne la SA SOLYNE devant ce tribunal afin de :

- dire que le modèle de pull référencé LEGER et lui appartenant est nouveau et original, digne de bénéficier des dispositions des articles L 111.1 et suivants du CPI,
- dire que SOLYNE, en commercialisant un modèle de pull identique au sien, s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon au sens des dispositions du CPI et de concurrence déloyale sur le fondement de l’article 1382 du Code civil ; en conséquence,
- interdire à SOLYNE de fabriquer, faire fabriquer, vendre directement ou indirectement tout article contrefaisant le pull LEGER appartenant à CHACOK DIFFUSION, ce, sous astreinte de 2 000 F par infraction constatée,
- condamner SOLYNE à lui verser 500 000 F de dommages-intérêts pour contrefaçon, et 500 000 F de dommages-intérêts pour concurrence déloyale,
- ordonner la publication de la décision à intervenir aux frais de SOLYNE dans 10 journaux au choix de CHACOK DIFFUSION sans que le montant total de ces publications n’excède 250 000 F HT,
- condamner SOLYNE à verser à CHACOK DIFFUSION 30 000 F au titre de l’article 700 du NCPC, aux dépens de l’instance,
- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir sans constitution de garantie. Par conclusions du 6 juin 1997, la SA SOLYNE prie ce tribunal de :

- juger les demandes de CHACOK irrecevables, et en tous cas, mal fondées et l’en débouter, reconventionnellement :

- ordonner la mainlevée de la saisie-contrefaçon pratiquée le 4 décembre 1996 par CHACOK au siège de SOLYNE en vertu d’une ordonnance sur requête rendue le 26 novembre 1996 par Mme le président du TGI de Paris,
- condamner CHACOK à lui payer à titre de dommages-intérêts pour le manque à gagner commercial la somme de 22 950 F HT et au titre de l’article 700 du NCPC la somme de 20 000 F, le tout avec ITL à compter de la décision à intervenir.

- ordonner l’exécution provisoire sans constitution de garantie,
- condamner CHACOK aux dépens. Par conclusions régularisées à l’audience du 5 septembre 1996, la société CHACOK sollicite le débouté de la SA SOLYNE et l’adjudication du bénéfice de ses précédentes écritures.

DECISION Sur la contrefaçon Attendu que la société CHACOK se dit titulaire des droits de création et d’exploitation d’un modèle de pull original, référencé « LEGER », créé en juillet 1995, commercialisé à partir de juillet 1996, digne de bénéficier de la protection des articles L 111-1 et suivants du CPI ; qu’ayant constaté que la société SOLYNE proposait à la vente un modèle similaire au sien, elle a fait diligenter par huissier une saisie-contrefaçon le 4 décembre 1996, sur ordonnance du T.G.I. du 26 novembre 1996 ; que cette opération a permis de constater la présence dans les locaux de SOLYNE de 150 pulls contrefaisant le modèle « LEGER », ce dont elle demande réparation. Attendu que SOLYNE conteste tant l’originalité que la nouveauté du modèle « LEGER », et partant, les droits allégués par CHACOK ; que la forme du pull comme l’association de bandes verticales qui caractérisent le modèle ne sont que le fruit obligé de l’utilisation d’une technique particulière de tricotage de maille dite « maille unie », mise au point par SOLYNE avec le fournisseur des machines à tricoter, la société allemande STOLL en 1992 ; que le modèle revendiqué n’est pas neuf, puisqu’il s’inspire de modèle déjà connus, caractérisés par une forme évasée vers le bas et une disposition juxtaposée de bandes verticales multicolores, que l’on retrouve notamment dans un ouvrage de 1985 consacré à Louis F. Attendu que SOLYNE dénie également la prétendue identité des modèles de pull, l’association des coloris des bandes verticales, leurs formes, leurs dimensions ne se ressemblant pas, l’aspect de la maille, la matière utilisée, l’encolure et les manches étant diff€érents. Mais attendu que, en premier lieu, la recevabilité à agir de la société CHACOK ne peut être valablement contestée ; qu’elle apporte en effet, par les factures produites, la preuve qu’elle a commercialisé pour la première fois le modèle de pull « LEGER » dès juillet 1996 ; qu’en l’absence de revendication d’un éventuel créateur dudit modèle, elle doit en être présumée propriétaire. Attendu en second lieu que ni l’originalité ni l’antériorité du modèle de CHACOK ne peuvent être davantage contestées ;

- que le modèle se caractérise en effet par une forme tunique en maille plissée partant de la taille et s’évasant en corolle vers le bas du vêtement en intercalant des bandes de couleur noire et de couleurs vives (rouge, bordeaux et vert) ; que l’effort créatif le rend digne de protection ;

— que la société SOLYNE, affirmant n’avoir commercialisé son modèle argué de contrefaçon que fin 1996, reconnaît d’elle-même l’antériorité du modèle « LEGER » vendu dès juillet 1996. Attendu en revanche que la comparaison du modèle de CHACOK et du modèle SOLYNE argué de contrefaçon montre qu’il s’agit de deux modèles différents au point que ni une acheteuse d’attention moyenne, ni le tribunal ne sauraient les confondre ; que cette impression de différence tient à la matière, à la grosseur de maille utilisées, à la forme de l’encolure et des manches, à la dimension des bandes verticales noires, aux coloris des bandes de couleur ainsi qu’au plissé et à la finesse du vêtement CHACOK, qui font que ce dernier se distingue très nettement du pull SOLYNE ; que le tribunal dira en conséquence qu’il n’y a pas contrefaçon et rejettera la demande de CHACOK à ce titre. Sur la concurrence déloyale Attendu que CHACOK soutient que SOLYNE s’est également rendue coupable de concurrence déloyale en commercialisant au prix public de 590 F une copie du modèle qu’elle vend 1500 F, du fait de l’absence de frais de recherche et d’une qualité inférieure, de sorte que sa clientèle a pu croire qu’elle diffusait sous une sous-marque ou pratiquait des prix discriminatoires. Attendu que SOLYNE rétorque qu’il ne peut y avoir concurrence déloyale en l’absence de faute pour copie servile ou risque de confusion, s’agissant de vêtements différents concernant deux clientèles différentes ; qu’il n’est pas davantage établi que SOLYNE ait fait du parasitisme économique, CHACOK ne justifiant pas des investissements qu’elle prétend avoir faits, alors qu’elle même apporte la preuve des recherches entreprises dès 1992 et des investissements réalisés en 1991 pour acquérir les machines ayant permis l’utilisation de la technique de tricotage « maille unie ». Mais attendu qu’en l’absence de copie servile ou de risque de confusion, CHACOK n’apporte pas la preuve d’une faute de SOLYNE susceptible de justifier sa demande de condamnation pour concurrence déloyale. Qu’il n’est pas davantage établi que cette dernière ait voulu ou pu profiter du sillage des investissements de CHACOK, SOLYNE ayant pour sa part réalisé des investissements matériels importants en acquérant dès 1991 des machines Stoll permettant le tricotage à maille unie qui caractérise le modèle litigieux. Que le tribunal déboutera en conséquence CHACOK de ses demandes au titre de la concurrence déloyale. Sur le préjudice Attendu que CHACOK réclame 500 000 F de dommages-intérêts pour faits de contrefaçon, 500 000 F de dommages-intérêts pour faits de concurrence déloyale, outre la publication de cette décision dans 10 journaux aux frais de SOLYNE, pour un montant

total de 250 000 F HT et l’interdiction de fabriquer et vendre l’article contrefaisant sous astreinte ; Attendu que SOLYNE lui rétorque que le seules pièces versées à l’appui de ses prétentions sont six factures de vente de 54 pulls sur 4 mois pour un chiffre d’affaires HT de 36 990 F n’établissant pas l’existence d’un préjudice, et encore moins son évaluation à 500 000 F. Qu’en l’absence d’actes de contrefaçon et de concurrence déloyale, elle est fondée à solliciter la mainlevée de la saisie pratiquée le 4 décembre 1996 et la réparation du préjudice commercial subi du fait qu’elle a suspendu la vente des 135 pulls dénombrés dans sa salle de montage, lors de la saisie, et qu’elle chiffre à 22 950 F. Mais attendu que le tribunal, déboutant CHACOK de ses prétentions relatives à la contrefaçon et à la concurrence déloyale, ne saurait faire droit à ses demandes indemnitaires. Qu’il convient en revanche de satisfaire la demande de SOLYNE en ordonnant la mainlevée de la saisie pratiquée le 4 décembre 1996 et en lui accordant des dommages- intérêts en réparation du préjudice subi pour avoir préféré suspendre la vente des 135 pulls de son modèle argué de contrefaçon en attente de la présente décision. Que le tribunal dispose de suffisamment d’éléments d’appréciation pour estimer à 20 000 F HT le préjudice subi à ce titre par SOLYNE qu’il condamnera CHACOK à lui verser avec ITL à compter de la signification du présent jugement. Sur les demandes relatives à l’article 700 du NCPC Attendu qu’il serait inéquitable de laisser les frais irrépétibles à la charge de la société SOLYNE, le tribunal condamnera CHACOK à lui verser 20 000 F à ce titre, déboutant la demanderesse qui succombe de ses prétentions relatives à l’article 700 du NCPC. Sur les demandes relatives à l’exécution provisoire Attendu qu’elle est requise par les deux parties et qu’elle est justifiée pour faire cesser sans délai le trouble qui les oppose, le tribunal l’ordonnera. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, statuant en premier ressort par jugement contradictoire,
- déboute la SA CHACOK DIFFUSION de l’ensemble de ses demandes,
- ordonne la mainlevée de la saisie pratiquée le 1 DECEMBRE 1996,
- condamne la SA CHACOK DIFFUSION à verser à la SA SOLYNE VINGT MILLE FRANCS avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement,
- outre VINGT MILLE FRANCS au titre de l’article 700 du NCPC et les dépens de la présente instance,
- ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, sans constitution de garantie,
- dit les parties non fondées pour le restant de leurs demandes, les en déboute,
- lesdits dépens dont ceux à recouvrer par le Greffe, liquidés à la somme de 279, 85 F TTC (App. 5, 25 + Affr. 42, 00 + Emol. 184, 80 + TVA 47, 80).

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