Tribunal de grande instance de Nanterre, 5 juin 2001, n° 00/13735, 00/14803

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Nanterre, 5 juin 2001, n° 00/13735, 00/14803
Juridiction : Tribunal de grande instance de Nanterre
Numéro(s) : 00/13735, 00/14803

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE

N° R.G.: 00/13735

[…]

AFFAIRE

X-I E

Pour Z,

G H J MIOU-MIOU,

X-I E épouse E-B

A,

Y D

C/

S.N.C. PRISMA PRESSE

VOICI,

JUGEMENT DU

05 Juin 2001

лен с 2001 1 181

GRANDE INSTANCE DE NANTERRE Extrait des minutes du Secrétariat-Greffe du Tribunal de Grande Instance de la Circonscription Judiciaire 1ère Chambre C de Nanterre (Hauts-de-Seine)

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Pascal CHAUVIN, Vice-Président

Pascale CHARDONNET, Juge

X-Christine DAUBIGNEY, Juge

Fabienne MOTTAIS, Greffier

DEMANDEURS
Madame G H J MIOU-MIOU […]

[…]

représentée par Me Lamiel BARRET-KRIEGEL, avocat au barreau de PARIS
Monsieur Y D

[…]

5003 PARIS

représentés par Me Lamiel BARRET-KRIEGEL, avocat au barreau de PARIS, M.1576
Madame X-I E ayant pour nom d’usage Madame A E- B […] agissant en sa qualité d’administratrice légale de son fils mineur Z D – né le […]
Madame E X I ayant pour nom d’usage Mme A E B […]

représentés par Maître STEFANAGGI, Avocat au arreau de

PARIS, D.1156

1



Hindi sik

[…]

DEFENDERESSE

S.N.C. SOCIETE PRISMA PRESSE

[…]

[…]

représentée par la SCP D’ANTIN BROSSOLLET, avocats au barreau de PARIS, P.336

DEBATS

A l’audience du 10 Mai 2001 tenue publiquement ;

JUGEMENT

Contradictoire, prononcé publiquement et en premier ressort

2

N

|



Dans son numéro 675, daté du 16 au 22 octobre 2000,

l’hebdomadaire VOICI, édité par la société PRISMA PRESSE, a publié, en N 24 et 25, un article illustré de plusieurs photographies et consacré à

G H J MIOU-MIOU et à Y D, dont le titre principal est: « Miou-Miou – Y D – Tout va bien, on ne se quitte plus ».

Outre en page de sommaire, l’article est annoncé en page de couverture par une photographie de G H et Y D (format

5,7 cm x 3,9 cm), accompagnée de la légende suivante : « Miou-Miou – Tout va bien avec Y ».

*****

Estimant cet article attentatoire au respect dû à leur vie privée et à leur image, G H et Y D ont, le 31 octobre 2000, assigné la société PRISMA PRESSE afin d’obtenir chacun, sous le bénéfice de

l’exécution provisoire, une somme de 500.000 F à titre de dommages et intérêts, une mesure de publication sous astreinte, ainsi qu’une indemnité de

50.000 F au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dans des conclusions signifiées le 26 mars 2001, ils ont repris leurs

demandes initiales. D

G H et Y D soulignent le fait que, depuis le début de leur relation, ils ont tout mis en oeuvre pour préserver leur intimité et qu’aucune publication n’avait jusqu’alors fait état de leurs sentiments.

G H rappelle son souci constant de discrétion.

Y D indique qu’à la suite de la parution de l’article litigieux, il a été contraint d’annuler sa participation à une émission de télévision "afin

d’éviter toute confusion dans l’esprit du public".

-3


*****

Estimant l’article précité attentatoire au respect dû à sa vie privée, ainsi qu’à celui dû la vie privée et à l’image de son enfant Z D âgé de huit ans, X-I E ayant pour nom d’usage A

E-B, agissant en son nom personnel et en qualité

d’administratrice légale de son fils mineur, a, le 21 novembre 2000, assigné la société PRISMA PRESSE afin d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution

provisoire :

- deux sommes de 50.000 F à titre de dommages et intérêts, ainsi qu’une indemnité de 15.000 F au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, au profit de son fils, une somme de 100.000 F, ainsi qu’une indemnité de 15.000 F au

-

titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, à son profit.

Dans des conclusions signifiées le 22 février 2001, elle a repris ses

demandes initiales.

A E-B, qui précise qu’elle élève son fils, soutient que l’article litigieux accrédite l’idée que Z vivrait avec son père et la nouvelle compagne de celui-ci.

Elle prétend en outre que son enfant est parfaitement identifiable sur la photographie qui le représente.

Elle considère qu’en indiquant que son fils ne vivrait pas avec elle, le magazine révèle des informations sur la vie familiale de Z et par conséquent sur la sienne.

*****

-4



Dans des conclusions signifiées le 2 mars 2001, G H et

Y D ont sollicité la jonction des instances.

*****

Dans des conclusions signifiées le 27 février 2001, la société PRISMA

PRESSE a sollicité, à titre principal, que G H et Y D soient déboutés de l’ensemble de leurs demandes, à titre subsidiaire, que ceux-ci ne se voient allouer d’autre réparation que symbolique, faute de démontrer le préjudice allégué, et qu’ils soient déboutés de leur demande de publication judiciaire.

**** *

Dans des conclusions signifiées le 22 février 2001, la société PRISMA

PRESSE a sollicité, à titre principal, que A E-B soit déboutée des demandes qu’elle a formées tant en son nom personnel qu’au nom de son fils Z, au motif que les atteintes aux droits de la personnalité alléguées ne sont pas caractérisées, à titre subsidiaire, que

A E-B soit déboutée de ses demandes, au motif que le préjudice allégué n’est pas justifié, en tout état de cause, que A

E-B soit condamnée à lui verser une indemnité de 12.000 F

au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle soutient que l’article ne comporte aucune référence ou allusion

à la vie de A E-B.

Elle prétend qu’à aucun moment il n’est indiqué que Z vivrait avec son père et la nouvelle compagne de celui-ci.

Elle considère que, le visage de l’enfant ayant été « crypté », Z

n’est pas identifiable.

-5



MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les deux instances ont leur origine dans un même article.

En outre, Z D est le fils de Y D et de A

E-B, demandeurs dans chacune des instances.

Dans ces conditions, il convient, dans l’intérêt d’une bonne justice,

d’ordonner la jonction des instances.

*****

Toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et peut s’opposer à la divulgation d’informations la concernant.

De même, chacun dispose d’un droit exclusif et absolu sur son image et peut s’opposer à sa fixation, à sa reproduction ou à son utilisation sans son autorisation préalable.

En l’espèce, l’article litigieux a pour thème central la relation sentimentale existant entre G H et Y D.

L’évocation (conjointe) de leur actualité professionnelle et en particulier du dernier film interprété par MIOU-MIOU, dont le titre est paraphrasé par le magazine ("Tout va bien, on s’en va !« devenant »Tout va bien, on ne se quitte plus"), ne sert en réalité que de prétexte à une intrusion dans la vie privée de la comédienne et de l’écrivain, ainsi qu’en attestent le titre de l’article et le reportage photographique l’illustrant.

VOICI précise ainsi que Y D partage la vie de G

H « depuis deux ans », que ceux-ci se sont rencontrés "sur un plateau

-6


de cinéma« , que tous deux aiment »les promenades dans le quartier du

Marais où ils vivent".

En s’intéressant à leur relation sentimentale, la société PRISMA

PRESSE s’immisce dans la sphère de la vie privée de G H et de

Y D, une telle intrusion n’étant pas dictée par les nécessités de

l’information sur un événement d’actualité et n’ayant reçu aucun assentiment

de la part des intéressés.

En revanche, en l’absence de référence ou même d’allusion à A

E-B dans l’article, celle-ci ne peut valablement prétendre qu’il

a été porté atteinte au respect dû à sa vie privée.

Quatre des cinq photographies publiées représentent G H

et Y D dans la rue.

Z D apparaît sur l’une d’elles, une partie du visage

« mosaïquée ».

Ces photographies ont été manifestement réalisées à l’aide d’un

téléobjectif, à l’insu des personnes concernées.

La société PRISMA PRESSE ne justifie d’aucune autorisation

expresse et spéciale quant à leur publication.

Il a par conséquent été porté atteinte au respect dû à l’image de

G H et de Y D.

Bien que le visage de l’enfant soit partiellement dissimulé par une mosaïque, le fait que l’ensemble de sa personne soit représenté et soit donc reconnaissable réalise une atteinte objective au respect dû à son image.

-7



La légende apposée sur la photographie représentant Z D

est ainsi rédigée :

« Avec son compagnon et le fils de celui-ci, la vie de famille, c’est moins dur qu’au cinéma ».

L’expression “la vie de famille" peut être interprétée comme signifiant que Z D vit avec son père et la nouvelle compagne de celui-ci.

Le fait que, dans le texte de l’article, il soit indiqué que les promenades dans le Marais se déroulent "parfois en compagnie du fils de

Y" ne remet pas en cause cette interprétation.

Par conséquent, la légende énoncée, en pouvant laisser croire que

Z D vit avec son père, alors qu’il habite avec sa mère, porte atteinte au respect dû à la vie privée du jeune garçon.

Une dernière photographie fait apparaître MIOU-MIOU en compagnie de deux autres comédiennes.

Sa publication n’est pas attentatoire au respect dû à l’image de

l’actrice, dès lors qu’elle peut être considérée comme se rapportant à la partie de l’article consacrée à son actualité professionnelle.

Dans ces conditions, la publication litigieuse, par son contenu et

l’essentiel de son illustration, contrevient à l’article 9 du code civil en ce qui

concerne G H, Y D et Z D.

La seule constatation de l’atteinte au respect dû à la vie privée et à

l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le montant en étant souverainement apprécié par le juge du fond en fonction du contenu de la publication et, le cas échéant, des éléments librement invoqués et débattus par les parties.

-8



A cet égard, il doit être observé que G H (dont le souci de discrétion dans le domaine de sa vie privée est constant) et Y D

n’ont jamais fait état d’une relation sentimentale qui, aux dires mêmes du magazine VOICI, dure depuis deux années.

Par ailleurs, il ne peut être sérieusement soutenu que la publication de l’article litigieux a « contraint » Y D à annuler sa participation à une émission de télévision « afin d’éviter toute confusion dans l’esprit du public ».

De même, les allégations de A E-B, selon lesquelles, s’agissant de Z, l’article litigieux "a eu pour conséquence de remettre au jour la question de la séparation de ses parents, d’une manière

d’autant plus déstabilisante que celle-ci lui est rappelée par des personnes qui lui sont étrangères« et »a conduit certaines personnes à interroger d’une manière insistante Z D sur sa vie avec MIOU MIOU, afin d’obtenir

des informations sur la vie et la façon d’être de la célèbre actrice", ne sont soutenues par aucune pièce.

Dès lors, les atteintes subies par G H doivent être indemnisées par la somme de 80.000 F allouée à titre de dommages et intérêts, celles subies par Y D par la somme de 50.000 F et celles subies par Z D par la somme de 30.000 F, sans qu’il y ait lieu

d’ordonner une mesure de publication à titre complémentaire.

L’exécution provisoire étant nécessaire, afin d’assurer une réparation la plus proche possible dans le temps de la parution de l’article, et compatible avec la nature de l’affaire, il convient de l’ordonner.

Au titre de l’équité, il y a lieu d’allouer à G H et Y

D une indemnité de 15.000 F et à A E-B ès qualités une indemnité de 12.000 F en application des dispositions de l’article

-9



PAR CES MOTIFS :

Ordonne la jonction des instances n° 00/13735 et […],

Dit que la société PRISMA PRESSE a porté atteinte au respect dû à la vie privée de G H, de Y D et de Z D, en publiant, en N 1, 5, 24 et 25, du numéro 675, daté du 16 au 22 octobre

2000, de l’hebdomadaire VOICI, un article intitulé : "Miou-Miou – Y D -

Tout va bien, on ne se quitte plus",

Condamne la société PRISMA PRESSE à payer à G H la somme de 80.000 F à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société PRISMA PRESSE à payer à Y D la somme de 50.000 F à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société PRISMA PRESSE à payer à A E

B, ès qualités d’administratrice légale des biens de son fils mineur

Z D, la somme de 30.000 F à titre de dommages et intérêts,

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, D

Condamne la société PRISMA PRESSE à verser à G H et Y D une indemnité de 15.000 F au titre de l’article 700 du

nouveau code de procédure civile,

Condamne la société PRISMA PRESSE à verser à A

E-B ès qualités une indemnité de 10.000 F au titre de l’article

700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

-10



Condamne la société PRISMA PRESSE aux dépens,

Accorde à Maîtres Lamiel BARRET-KRIEGEL et C

STEFANAGGI le droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.

NANTERRE, le 5 juin 2001.

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER

thais

Pour copie certifiée conforme

Nanterre le, usiozing DE INSTANCE D E N A R

e Greffier en chef G

[…]

1

-11


1. K L M N

700 du nouveau code de procédure civile.

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Textes cités dans la décision

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