Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 13 novembre 2001

  • Denomination avec apposition du sigle sur un magazine·
  • Article l 713-2 code de la propriété intellectuelle·
  • Usurpation de la denomination et du nom commercial·
  • Action en contrefaçon et en concurrence déloyale·
  • Volonte de profiter des investissements d'autrui·
  • Atteinte à l'image de marque du service public·
  • Detournement des investissements publicitaires·
  • Volonte de profiter de la notoriete d'autrui·
  • Sigle France 2 sur couverture de magazine·
  • Faits distincts des actes de contrefaçon

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 13 nov. 2001
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : FRANCE 2
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 92401176
Classification internationale des marques : CL09; CL16; CL35; CL38; CL41
Liste des produits ou services désignés : Journaux et periodiques
Référence INPI : M20010962
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La société nationale de télévision FRANCE 2, anciennement ANTENNE 2, est titulaire de la marque complexe FRANCE 2 déposée à titre de logo le 14 janvier 1992 et enregistrée sous le n°92 401 176 en classes 9, 16, 35, 38 et 41, visant notamment les journaux et périodiques. La cession à son profit de la quote-part de copropriété de la société nationale de programme FRANCE REGIONS 3, aujourd’hui dénommée FRANCE 3, sur cette marque a été inscrite au Registre national des marques le 9 décembre 1996 sous le n°209851. La société 1633 édite le magazine mensuel PLAYBOY dans sa version française. Le numéro 2 de mai 2000 de ce magazine comporte en couverture un titre intégrant le sigle de FRANCE 2, ainsi libellé : « TELE (sigle de FRANCE 2) Jezabel Valero nue ». Par acte du 5 mai 2000, la société FRANCE 2 a assigné la société 1633 devant le tribunal de céans pour obtenir, en l’état de ses dernières écritures du 29 janvier 2001, et avec exécution provisoire, sur le fondement de l’article L 713-2 du code de la propriété intellectuelle, la constatation judiciaire des actes de contrefaçon de sa marque FRANCE 2 ainsi que des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son encontre, des mesures d’interdiction sous astreinte et de publication, et enfin 500 000 francs à titre de dommages et intérêts pour la contrefaçon, 500 000 francs à titre de dommages et intérêts pour la concurrence déloyale et le parasitisme, ainsi que 50 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La société FRANCE 2 fait valoir que la reproduction en couverture du sigle FRANCE 2 n’a pas d’autre but que d’attirer l’attention du lecteur sur la marque utilisée, comme si la chaîne du service publique avait donné sa caution ou se trouvait associée à cet effet d’annonce ou aux photographies contenues dans le magazine. Elle soutient qu’en usurpant la dénomination sociale et le nom commercial FRANCE 2, elle a entendu tirer indûment partie de la notoriété de FRANCE 2 et a ainsi porté atteinte à l’image de la chaîne de télévision, ces agissements parasitaires pouvant être sanctionnés indépendamment de toute situation de concurrence. Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 3 novembre 2000, la société 1633 conclut au débouté de l’ensemble des demandes de la société FRANCE 2 et sollicite la somme de 25 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. A l’appui de ses prétentions, la société 1633 soutient que la référence de l’appartenance de Jezabel V à la chaîne d’information qui a contribué à la faire connaître en France est

exclusivement effectuée dans un but d’information des lecteurs et qu’en conséquence la reproduction du logo FRANCE 2 ne constitue pas une contrefaçon. Elle ajoute qu’il serait d’usage tant dans la presse écrite qu’en matière audiovisuelle d’apposer le sigle d’une chaîne de télévision pour identifier l’origine de photographies extraites d’émission et que de ce fait l’autorisation de la société FRANCE 2 n’était pas requise. Elle relève l’absence de faits distincts de la contrefaçon reprochée pouvant fonder une action en concurrence déloyale et parasitaire et l’absence de situation de concurrence commerciale entre les parties.

DECISION I – SUR LA CONTREFAÇON. Attendu qu’aux termes de l’article L 713-2 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés lors de l’enregistrement ; Attendu que la société FRANCE 2 est propriétaire de la marque complexe FRANCE 2 n°92 401 176 exploitée à titre de logo et désignant, parmi d’autres produits et services, les journaux et périodiques ; Attendu que s’il peut être admis, comme le soutient la société 1633, que le droit exclusif de la société FRANCE 2 sur sa marque n’empêche pas sa citation dans un but d’information, encore faut-il pour être licite qu’un tel usage soit loyal, nécessaire à l’information et ne dépasse pas ce strict cadre ; Attendu qu’en l’espèce, le sigle FRANCE 2 apposé au mot TELE. est reproduit nettement en évidence en couverture du magazine PLAYBOY au dessus de l’annonce de l’article « Jezabel V nue » ; Attendu qu’il apparaît que l’utilisation du sigle FRANCE 2 dépasse le cadre de la simple information et ne tend qu’à attirer l’attention du lecteur sur la marque utilisée, une telle accroche laissant effectivement croire, comme le fait observer la demanderesse, que la chaîne de télévision a donné sa caution, voire été associée au reportage concerné, dont le but premier n’est d’ailleurs pas de présenter les qualités d’animatrice de Jezabel V, Mais d’en présenter la beauté plastique par des photographies de nus ; Attendu que l’usage d’apposer le sigle d’une chaîne de télévision pour identifier l’origine de photographies extraites d’émission invoqué par la société 1633 pour se soustraire à la demande d’autorisation de la société FRANCE 2, outre le fait qu’il n’est corroboré par

aucune des pièces produites, est inopérant en l’espèce, la couverture du magasine litigieux, seule visée dans l’assignation, ne comportant pas une telle photographie ; Attendu qu’en l’absence d’autorisation de la société FRANCE 2, une telle exploitation de sa marque pour un périodique, produit qu’elle vise, constitue une contrefaçon ; II – SUR LA CONCURRENCE DELOYALE ET LE PARASITISME. Attendu que la dénomination FRANCE 2 constitue le nom commercial et l’élément distinctif de la dénomination sociale de la demanderesse ; Attendu que celle-ci est recevable à se plaindre de l’usurpation et de l’atteinte à ces signes distinctifs du fait de l’emploi par la société du sigle FRANCE 2 1633 ; Attendu que s’il n’existe pas par hypothèse de concurrence déloyale en l’absence de concurrence commerciale entre les parties, il est exact de dire, comme le soutient la demanderesse, que la société 1633, en utilisant la dénomination FRANCE 2 en dehors du cadre de la stricte information, a entendu tirer indûment partie de la notoriété de la société FRANCE 2 pour se placer dans son sillage et bénéficier à peu de frais de l’impact produit par son nom et ses programmes sur la clientèle ; Attendu qu’en outre, l’association, sans le consentement de la demanderesse, du nom de FRANCE 2 à un magazine dit « de charme » et à un reportage de nus ne peut que porter atteinte à son image de télévision de service public qu’elle entend maîtriser et lui est préjudiciable ; Attendu que les agissements fautifs, distincts de la contrefaçon de marque alléguée, sont établis ; qu’ils engagent la responsabilité civile de la société 1633 qui en doit réparation ; III – SUR LES MESURES REPARATRICES. Attendu qu’il sera fait droit aux mesures d’interdiction dans les termes du dispositif ; Attendu que le préjudice de la société FRANCE 2 tient à l’atteinte à sa marque notoire, à son utilisation détournée, à l’atteinte à son image et au détournement de ses investissements publicitaires au profit de la société 1633, Attendu que la circonstance selon laquelle la société 1965 BROADWAY, ayant les mêmes dirigeants que la société 1633) et éditant le magazine PENTHOUSE, a déjà été condamnée pour des faits semblables, si elle peut éclairer le tribunal sur les méthodes utilisées par ses dirigeants, ne saurait, compte tenu des personnalités juridiques distinctes des deux sociétés, avoir de conséquence sur la réparation du préjudice qui n’est fonction que de l’ampleur du dommage ; Attendu qu’au vu des éléments de la cause, le tribunal fixe la réparation de ce préjudice à 100 000 francs pour la contrefaçon et à 100 000 francs pour les agissements fautifs ;

Attendu que la publication du jugement sera autorisée à titre de dommages et intérêts complémentaires comme précisé au dispositif, Attendu que l’exécution provisoire, compatible avec la nature de l’affaire, s’avère justifiée pour les mesures d’interdiction et pour le tiers du montant des dommages et intérêts seulement ; Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société FRANCE 2 ses frais irrépétibles ; qu’il convient de condamner la société 1633 à lui payer la somme de 16 000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement, par décision contradictoire, en premier ressort, Dit qu’en reproduisant et en faisant usage du sigle FRANCE 2 sans l’autorisation de la Société nationale de télévision FRANCE 2 pour l’édition française de son magazine PLAYBOY du mois de mai 2000, la société 1633 a commis des actes de contrefaçon de la marque FRANCE 2 n° 92 101176 dont la Société nationale de télévision FRANCE 2 est propriétaire ; Dit qu’en usurpant son nom commercial et la partie distinctive de sa dénomination sociale, la société 1633 a également commis des agissements fautifs à l’encontre de la Société nationale de télévision FRANCE 2 ; En conséquence, Interdit à la société 1633 de faire usage de la marque FRANCE 2 sous astreinte de 1000 francs par infraction constatée à compter de la signification du présent jugement ; Condamne la société 16333 à payer à la Société nationale de télévision FRANCE 2 la somme de 100 000 francs ( 15 244, 90 euros ) à titre de dommages et intérêts pour la contrefaçon et celle de 100 000 francs ( 15 244, 90 euros ) pour les agissements fautifs ; Autorise la Société nationale de télévision FRANCE 2 à faire publier le dispositif du présent jugement par extraits ou entier, dans deux journaux de son choix aux frais de la défenderesse, le coût total de ces insertions à sa charge ne pouvant excéder la somme globale hors taxes de 40 000 francs ( 6097, 96 euros) ; Ordonne l’exécution provisoire pour les mesures d’interdiction et pour un tiers du montant total des condamnations à dommages et intérêts seulement ; Condamne la société 1633 à payer à la Société nationale de télévision FRANCE 2 la somme de 16 000 francs ( 2439, 18 Euros ) sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne la société 1633 aux dépens.

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