Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 17 mai 2013, n° 11/18006

  • Atteinte à la marque de renommée·
  • Usage à titre d'information·
  • Marque notoirement connue·
  • Exploitation injustifiée·
  • Adjonction d'une marque·
  • Usage à titre de marque·
  • Contrefaçon de marque·
  • Secteur d'activité·
  • Dégradé carmillon·
  • Nuance de couleur

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La notoriété des marques composées du "dégradé carmillon" n’est pas démontrée. L’atteinte à la marque verbale et aux marques complexes, qui elles sont notoirement connues, n’est pas constituée. Leur reproduction à l’identique sur des "faux pass Navigo" et "pass Carmillon", insérés dans les porte-cartes des sociétés poursuivies n’a pas pour effet de laisser croire au consommateur qu’il s’agit de Pass SNCF, commercialisés par ces dernières ou bien qu’il existe un partenariat entre ces sociétés. Bien que la mention "fac similé" ne figure pas sur les "pass", alors qu’ils sont la reproduction de cartes à puces existant dans le commerce, il n’en reste pas moins qu’ils ne sont présentés dans les porte-cartes qu’à titre d’illustration des articles de maroquinerie et qu’ils ne portent pas atteinte à l’image des marques. La reproduction des autres marques incriminées, sur des cartes de transports de la SNCF, lesquelles n’ont aucune valeur ou utilité marchande s’agissant d’impression papier sans puce électronique (et non commercialisées par les défendeurs qui ne les utilisent que pour habiller leurs produits), ne peut caractériser des actes de contrefaçon. En reproduisant ces marques sur des facs similés, les sociétés poursuivies ont cherché à illustrer leurs propres articles en donnant des exemples d’utilisation et ce, sans induire le consommateur en erreur sur l’origine de leurs produits parfaitement identifiables du fait de l’adjonction de la marque LAURIGE.

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 17 mai 2013, n° 11/18006
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 11/18006
Publication : PIBD 2013, 991, IIIM-1448
Décision(s) liée(s) :
  • Cour d'appel de Paris, 13 janvier 2015, 2013/13126
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : SNCF ; PASS CARMILLON ; CARMILLON ; T
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3344303 ; 878272 ; 3563469 ; 3565649 ; 3566934 ; 6867048 ; 3594312 ; 1001828 ; 3782543
Classification internationale des marques : CL09 ; CL12 ; CL16 ; CL 18 ; CL24 ; CL25 ; CL28 ; CL35 ; CL35 ; CL38 ; CL39 ; CL41 ; CL42 ; CL43
Référence INPI : M20130356
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 3e chambre 2e section N° RG : 11/18006

JUGEMENT rendu le 17 Mai 2013

DEMANDERESSE Société NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (SNCF) […] représentée par Me Christophe C’ARON de l’Association CABINET CHRISTOPHE CARON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire

DÉFENDERESSES Société LAURICE DURON, […]

Société LAURGE DISTRIBUTION, […]

représentées par Me Sylvie OSTRH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0541 et Me François R de la SCP TEN FRANCE, avocat au Barreau de POITIERS

COMPOSITION DU TRIBUNAL Éric H, Vice-président, signataire de la décision Arnaud D, Vice-président Valérie D. Juge

assistés de Jeanine ROSTAL, FF; Greffier, signataire de la décision

DEBATS A l’audience du 14 Mars 2013 tenue en audience publique

JUGEMENT Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoire en premier ressort

FAITS, PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DKS PARTIES

La SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, établissement public industriel cl commercial créé le 1er janvier 1938 et constituant l’entreprise de référence dans le domaine du transport ferroviaire en FRANCE, indique être titulaire de plusieurs marques françaises et internationales, verbales ou semi-figuratives représentant le signe « SNCF », des marques française cl internationale du dégrade carmillon qu’elle considère toutes comme notoires. File expose avoir par ailleurs déposé de nombreux signes utiles à son activité comme la marque française « PASS CARMILLON », la marque communautaire semi-figurative « CARMILLON » et la marque française semi-figurative

Ayant découvert que les sociétés LAURIGE DISTRIBUTION et LAURIGE DURON qui fabriquent et commercialisent des articles de maroquinerie, offraient à la vente des porte-cartes en cuir contenant d’un côté une fausse carte copiant le « pass Naviguo » utilisé par les voyageurs du réseau SNCF et de l’autre une fausse carte copiant le « pass Carmillon » utilisé par les agents SNCF et après avoir fait réaliser deux constats d’achat par huissier. F un au sein du magasin VIRGIN STORES, avenue des Champs-Élysées à PARIS 8e : le 24 juin 2011 l’autre dans un établissement secondaire de la société LAURIGE DISTRIBUTION situé dans le 15E arrondissement de PARIS le 7 octobre 2011. la SNCF, autorisée par ordonnance sur requête du 17 novembre 2011 a fait procéder à des saisies-contrefaçon le 22 novembre 201 1 au sein de la boutique LAURIGE située […] « m » ainsi qu’au sein du magasin VIRGIN MEGASTORE à PARIS 8e, ces opérations lui ayant continué la commercialisation de porte-cartes comportant selon elle la reproduction des caries « pass Navigo » et « pass Carmillon », C’est dans ce contexte que la SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS FRANCAIS (ci-après SNCF) a. par actes d’huissier du 19 décembre 2011. l’ail assigner les sociétés LAURIGE DISTRIBUTION et LAURIGE DURON (ci-après les sociétés LAURIGE) devant le Tribunal de grande instance de PARIS en contrefaçon de marques pour obtenir, nuire des mesures d’interdiction, de destruction et de publication, des dominées et intérêts en réparation de ses préjudices patrimonial et moral ainsi qu’une indemnité au litre de l’article 700 du code de procédure civile, l’ensemble assorti de l’exécution provisoire. Aux termes de dernières conclusions signifiées par voie électronique le 9 janvier 2013 la SNCF, après avoir réfuté les arguments présentés en défense, demande au Tribunal de :

- se déchirer compétent pour se prononcer sur le présent litige.

- dire et juger que les marques suivantes :

- la marque internationale semi-figurative « SNCF » déposée le 23 août 2005. sous le numéro 878372. en classes 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 39, 41 et 43.

- la marque française semi- figurative « SNCF » déposée le 2 mars 2005. sous le numéro 053344303. en classes 12. 16. 1 S. 25. 28, 39. 41 et 43.

- la marque internationale semi- figurative « SNCF' » déposée le 10 septembre 2008 sous le numéro HXH 673 en classes 9, 16, 18, 24, 35, 36, 38, 39 et 42.

- la marque française semi-figurative "SNCF’ 1e déposée le 14 août 2008, sous le numéro 3594312. en classes 9, 16, 18, 24. 35, 36, 38 et 39.

- la marque verbale « SNCF » déposée le 19 avril 2006, sous le numéro 3424107. en classes 12, 35, 37, 39, 41 et 42
- la marque française du dégradé carmillon déposée en couleurs le 28 mars 2008. sous le numéro 08 3 565 649. en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43.

- et la marque internationale du dégradé carmillon déposée en couleurs le 4 septembre 2008. sous le numéro 1001828, en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43 sont des marques notoires,
- dire et juger que les sociétés LAURIGE DURON et LAURIGE DISTRIBUTION (ci- après dénommées les sociétés LAURIGE) reproduisent de façon identique ou similaire, illicitement. les marques notoires de SNCF.

- dire cl juger que ces reproductions illicites les marques notoires « SNCF » par les sociétés LAL’RIGE sont parfaitement injustifiées et lui portent préjudice.

— en conséquence, dire et juger que les sociétés LAURIGE, engagent leur responsabilité civile car. en reproduisant de façon identique ou similaire, les marques notoires « SNCF » et la marque notoire figurative « dégrade carmillon ». sans autorisation, elles lui portent atteinte, de façon parfaitement injustifiée.

- dire et juger que les signes « T ». « l’ASS CARMILLON » et « CARMILLON » apposés par les sociétés LAURIGH sur les cartes litigieuses sont identiques aux marques enregistrées suivantes :

- la marque française semi-figurative « PASS CARMILLON » déposée le 18 mars 2008. sous le numéro 3563469. pour désigner notamment en classe 9 les « cartes à puces » et en classe 16. les « cartes et coupons papier et/ou en matières plastiques : cartes et coupons de circulation sur les réseaux de transport, litres de transport ».

- la marque communautaire semi-figurative « CARMILLON » déposée le 25 avril 2008. sous le numéro 6867048. la marque française semi-figurative « CARMILLON » déposée le 3 avril 2008. sous le numéro 3566934 et la marque internationale semi- figurative « CARMILLON » déposée le 4 septembre 2008 sous le numéro 1001939, pour désigner notamment en classe 9 les «   »cartes à puces« et en classe 16 les »titres de transport« et les »cartes".

- la marque française semi-figurative « T » déposée le 16 novembre 2010 sous le numéro 3782543 pour désigner notamment en classe 9 les cartes d’abonnement à des services de transport ferroviaires (…) à puce".

- DIRE ET JUGER que les produits distribués par les sociétés LAURIGK sous ces signes, à savoir des cartes, sont identiques à ceux visés dans l’enregistrement de ses marques, puisque les marques L’T« . »PASS CARMILLON« et 'CARMILLON » désignent toutes les cartes et les cartes à puces dans leurs dépôts.

-dire et juger que les sociétés LAURIGE font un usage des signes dans la vie des affaires et à titre de marque et dire et juger que cet usage est de nature à porter atteinte aux fonctions essentielles des marques.

- en conséquence, dire et juger que les sociétés LAURIGE: se sont rendues coupables d’actes de contrefaçon par reproduction à l’identique, sans autorisation, des marques enregistrées par elle.

- en conséquence de ces atteintes, faire interdiction aux sociétés LAURIGE de faire usage, à quelque titre que ce soit, des marques ou de tout autre signe dont elle serait titulaire, sous astreinte de 3 000 euros par infraction constatée, à compter de la signification de la décision à intervenir.

- ordonner aux sociétés LAURIGE de retirer les porte-cartes contenant les caries litigieuses de la vente et de procédera la destruction des caries litigieuses ainsi qu’à la destruction des stocks restants sous contrôle d’huissier, sous astreinte de 3 000 euros par infraction constatée, à compter de la signification de la décision à intervenir.

- condamner in solidum les sociétés LAURIGE. au titre des bénéfices réalisés par elles, à hauteur de 20.000 euros s’agissant de la reproduction des marques notoires de SNCF et 10.000 euros s’agissant des autres marques reproduites il licitement.

- condamner in solidum les sociétés LAURIGE. au litre du préjudice moral, à hauteur de 60.000 euros s’agissant de la reproduction des marques notoires et 20 000 euros s’agissant des autres marques reproduites illicitement.

— en tout état de cause, ordonner la publication de la décision à intervenir sous forme de communiqués dans trois journaux français, tic son choix et aux frais des sociétés LAURIGE. sans que le coût de chaque publication n’excède la somme de 10 000 euros HT,

— ordonner la publication de la décision à intervenir sur la première page du site Internet des sociétés LAURIGE situé à l’adresse <wwwlaurige.com>. pendant trente (30) jours,
-constater qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exercice de son droit d’agir en justice et débouler les sociétés LAURIGE de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

- condamner in solidum les sociétés LAURIGE à lui payer la somme de 1 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, en ce compris tous les frais d’huissiers de justice relatifs aux constats d "achat et aux procès-verbaux de saisie-contrefaçon communiqués en pièces 9, 10 et 18. qui pourront être recouvrés directement par le Cabinet Christophe CARON, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.

- Aux termes de dernières conclusions signifiées pur voie électronique le 14 lévrier 2013. les sociétés LAURIGE DURON et LAURIGE DISTRIBUTION demandent au Tribunal de débouler la SNCF de l’ensemble de ses demandes et de la condamnera titre reconventionnel à verser à chacune d’elles, une somme de 10.000 euros en raison du caractère abusif de la procédure initiée ainsi que celle de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l’instance. L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 février 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la compétence du Tribunal de grande instance de PARIS : La SNCF demande au Tribunal de se déclarer compétent pour statuer sur le présent litige. Cependant, lus sociétés défenderesses ne soulevant pas d’exception de compétence, au demeurant relevant de la compétence du juge de la mise en état, cette demande est sans objet. Sur l’atteinte aux marques notoires : La SNCF oppose en premier lieu dans la présente instance cinq marques verbale et semi-figuratives « SNCF » ainsi que deux marques figuratives « dégradé carmillon » qu’el le considère toutes les sept comme notoires. Il s’agit de :

- la marque internationale semi-figurative « SNCF » déposée le 23 août 2005. sous le numéro 878372. en classes 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 39, 41 et 43.

- la marque française semi-figurative « SNCF » déposée le 2 mars 2005. sous le numéro 053344303. en classes 12, 16, 18, 25, 28, 39, 41 et 43.

- la marque internationale semi-figurative « SNCF » déposée le 10 septembre 2008 sous le numéro 1001673 en classes 9, 16, 18, 24, 35, 36, 38, 39 et 42.

- la marque française semi-figurative « SNCF » déposée le 14 août 2008 sous le numéro 3594312 en classes 9, 16, 18, 24, 35, 36, 38 et 39).

ainsi représentées :

— la marque verbale « SNCF » déposée le 19 avril 2006, sous le numéro 3424107. en classes 12. 35. 37. 39. 41 et 42.

- la marque française du dégrade carmillon déposée en couleurs le 2K mars 2008. sous le numéro 0S3565649. en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43.

- la marque internationale du dégradé carmillon déposée en couleurs le 4 septembre 2008. sous le numéro 1001828, en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43 ainsi représentées :

Se fondant sur l’article 5 §2 de la directive n 89/104/CEE l’harmonisation du droit des marques et sur l’interprétation qu’en fait la Cour de justice des communautés européennes déchirant que « pour bénéficier d’une protection élargie à des produits ou à des services non similaires, une marque enregistrée doit être connue d’une partie significative du public concerné », la SNCF’ prétend que les marques qu’elle invoque sont notoires, au sens de l’article 6 bis de la Convention d’Union de Paris de 1883 qui définit la marque notoire comme étant « une marque d’usage connue d’une large fraction du public ». Elle justifie en effet d’un usage intense des marques « SNCF »', la première utilisation de la marque verbale datant de 1937 laquelle a été déclinée au fil du temps en différentes marques semi-figuratives constituées de l’association des lettres « SNCF » posées un fond de couleur carmin à gauche se dégradant progressivement vers le fushia au centre puis virant vers le vermillon à droite, ce logo figurant sur de

nombreux supports de communication ainsi que sur les trains, le mobilier et les boutiques de la SNCF. La notoriété de la marque verbale « SNCF », est en outre attestée par les résultats d’un sondage réalisé du 5 au 10 janvier 2009 qui révèle que 100 % des personnes interrogées connaissaient la marque « SNCF ». Cependant, si la notoriété des marques verbale et semi-figuratives « SNCF »" est surabondamment démontrée, laquelle n’est au demeurant nullement contestée par les sociétés défenderesses, il n’en est pas de même pour les marques figuratives française et internationale constituées d’un dégradé vermillon.

Comme le soulignent à juste titre les sociétés FAURIGE la SNCF procède par voie d’affirmation puisque aucun sondage concernant ces marques n’est versé aux débats pour établir la notoriété alléguée et ce alors qu’il lui appartient de démontrer dans quelle mesure, une large partie du public pourrait attribuer spontanément à la SNCF ce dégradé carmillon allant du violet au rouge présenté seul et sans référence à la marque verbale ou à tout autre identifiant. Fn outre, lorsqu’elle prétend que la marque serait présente dans sa communication, outre que cette circonstance ne suffit pas à elle seule à établir la notoriété, forée est de relever qu’elle n’y apparaît que liés rarement seule mais accompagnée presque systématiquement de la marque verbale « SNCF », ou quand elle est utilisée seule, apposée sur un support jouant le rôle d’un marqueur identifiant très fort tel qu’une locomotive, ou un siège passager. La notoriété des marques constituées du « dégrade carmillon » n’est donc pas démontrée. Il résulte de ces développements que seules les cinq marques verbale et semi- figuratives « SNCF » sont notoires. Se prévalant ensuite de l’article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle qui protège le titulaire d’une marque notoire contre remploi par un tiers de sa marque pour désigner des produits et services non similaires à CCUN visés à l’enregistrement et à plus fortes raisons pour des services identiques ou similaires, comme ce serait le cas en l’espèce selon elle, la SNCF prétend que les sociétés FAURIGE reproduisent de manière illicite ses marques notoires, ajoutant qu’il ne serait pas nécessaire d’établir qu’elles en fassent un usage à titre de marque dès lorsqu’il ne pourrait être contesté qu’elles en font un usage dans la vie des affaires. EIle en conclut qu’en reproduisant ses marques, les sociétés LAURIGE lui portent préjudice sans que cette exploitation des marques d’autrui ne soit justifiée. Fn réplique les sociétés LAURIGE font valoir que le grief de contrefaçon doit être écarté lorsque le signe protégé n’a pas été utilisé à litre de marque, c’est-à-dire pour désigner un produit ou service et soutiennent que le consommateur n’a pas pu un instant s’imaginer que les porte-cartes qu’elles distribuent aient pu avoir un quelconque lien avec la SNCF. Files en font observer que de nombreux sites internet

de fabricants d’étuis présentent leurs produits avec diverses bancaires ou île crédits à titre d’illustration. L’article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, modifié par l’ordonnance n° 2008-1301 du 11 décembre 2008 dispose que "la reproduction ou l’imitation d’une marque jouissant d’une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l’enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.

Les dispositions de l’alinéa précédent sont applicables à la reproduction ou l’imitation d’une marque notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle précitée« . Il résulte en l’espèce des procès-verbaux de constat dressés les 24 juin et 7 octobre 2011 par Maître L huissier de justice que les marques verbale et semi-figuratives »SNCF« sont reproduites à l’identique sur un faux »pass Navigo« ainsi que sur un faux »pass Carmillon« , ces »pass« étant insérés dans des portes-cartes vendus par les sociétés LAURIGE. Cependant, il rie peur être sérieusement soutenu que de telles reproductions puissent avoir pour effet de laisser croire au consommateur qu’il s’agirait des »pass« de la SNCF commercialisés par les sociétés LAURIGE. Si l’on peut regretter que ces dernières n’aient pas pris soin de faire figurer sur ces »pass« la mention »fac similé« dès lors qu’ils sont la reproduction de cartes à puces existant réellement dans le commerce, il n’en reste pas moins qu’ils ne sont présentés daris les porte-cartes qu’à titre d’illustration d’articles de maroquinerie et qu’il ne peuvent porter atteinte à l’image des marques de la SNCF pas plus que les banaliser dès lors qu’il est d’usage pour le commerce de porte-cartes, d’étuis, de portefeuilles ou de porte-chéquier de les présenter habillés des cartes pour lesquelles ils sont destinés. Contrairement à ce que soutient la SNCF et sans le démontrer, la présence d’un »pass Navigo« ou d’un »pass Carmillon« , lesquels sont au surplus comme elle le reconnaît à plusieurs reprises en page 25 de ses écritures »de mauvaise qualité", ne peut pas conduire le consommateur à imaginer un partenariat entre les sociétés SNCF et LAURIGE, tant il est connu dans ce domaine d’illustrer ainsi les articles et comme cela ressort notamment des copies des pages des catalogues des sociétés LAURIGE annexées aux procès-verbaux de saisies-contrefaçon, montrant une multitude de cartes du commerce, glissées dans de tels étuis. Enfin, il ne peut pas non plus être prétendu que l’utilisation des marques de la SNCF n’aurait pour but que de s’approprier la notoriété qui leur est attachée puisque si tel avait été le cas, d’autres cartes dans le commerce aussi prestigieuses que les cartes NAVIGO ou CARMILLON, en particulier dans le domaine bancaire ou dans celui du transport aérien auraient pu avoir été choisies. Enfin, comme le soulignent à juste titre les sociétés défenderesses, l’insertion d’une carte imitant le véritable « pass Navigo » ou « pass Carmillon », quand bien même la

mention « fac-similé » n’y figurerait pas, ne correspond pas à un usage injustifié de la marque d’autrui puisque précisément il s’agit de montrer une application possible du produit et d’en illustrer l’usage. La SNCF ne caractérise donc pas l’atteinte alléguée à ses marques notoires.

Les demandes présentées à ce titre seront rejetées.

Sur les autres marques invoquées : S’appuyant sur l’article L. 713-2 a) du Code de la propriété intellectuelle, la SNCF incrimine en outre la reproduction illicite des marques suivantes :

- la marque française semi-figurative « PASS Carmillon » déposée le 18 mars 2008, sous le numéro 3563469, pour désigner notamment en classe 9 les « cartes à puces » et en classe 16, les "cartes et coupons papier et/ou en matières plastiques ; cartes et coupons de circulation sur les réseaux de transport, titres de transport",
- la marque communautaire semi-figurative « carmillon » déposée le 25 avril 2008, sous le numéro 6867048,
- la marque française semi-figurative « Carmillon » déposée le 3 avril 2008, sous le numéro 3566934 et la marque internationale semi-figurative « Carmillon » déposée le 4 septembre 2008, sous le numéro 1001939, pour désigner notamment en classe 9 les « cartes à puces » et en classe 16, les « titres de transport » et les « cartes »,
- la marque française semi-figurative « T » déposée le 16 novembre 2010 sous le numéro 3782543, pour désigner notamment en classe 9 les « cartes d’abonnement à des services de transport ferroviaires (…) à puce ». En outre, comme il a été précédemment exposé, la SNCF est titulaire des marques suivantes dont il a été dit qu’elles n’étaient pas notoires :

- la marque française du dégradé Carmillon déposée en couleurs le 28 mars 2008, sous le numéro 08 3 565 649, en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43,
- la marque internationale du dégradé carmillon déposée en couleurs le 4 septembre 2008, sous le numéro 1001828, en classes 9, 12, 16, 18, 24, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 43 Ainsi qu’il résulte des procès-verbaux de constats des 24 juin et 7 octobre 2011 ainsi que du procès verbal de saisie-contrefaçon du 22 novembre 2011, les sociétés LAURIGE commercialisent des porte-cartes contenant des fac similés de cartes « pass Carmillon » et de « pass Navigo » reproduisant à l’identique les marques « PASS Carmillon », « carmillon » et « T » de la SNCF. La carte « pass Carmillon » comporte également la reproduction de la marque figurative du dégradé vermillon.

Cette reproduction n’est d’ailleurs pas contestée en défense, les sociétés LAURIGE soutenant en revanche que les marques de la SNCF n’ont pas été utilisées à titre de marque puisqu’en aucun cas les marques de la SNCF ne désignent le produit commercialisé par elles, à savoir un porte-carte en cuir. S’il est exact en effet que les marques invoquées par la SNCF visent toutes la classe 9 et/ou 16 et notamment les « cartes » en général et les « cartes à puces », force est de relever que les sociétés LAURIGE ne commercialisent pas de « caries à puce » mais des articles de maroquinerie et parmi eux, les porte- cartes comportant d’ailleurs la marque LAURIGE gravée sur la couverture extérieure et apparaissant aussi en lettres dorées sur fond noir sur une étiquette collée à l’intérieur du porte-cartes. Contrairement à ce qui est affirmé en demande, les sociétés LAURIGE ne cherchent pas à désigner des produits identiques par l’usage des marques de la SNCF. Il ne peut en effet être raisonnablement soutenu que le consommateur puisse croire un instant que ces dernières, spécialisées dans le domaine de la maroquinerie, puissent offrir à la vente des abonnements Navigo ou des pass cannillon lin reproduisant ces marques sur les fac-similés, les sociétés LAURIGE cherchent à illustrer leurs propres articles en donnant des exemples d’utilisation et ce sans induire en erreur le consommateur sur l’origine de leurs propres articles, à savoir des porte-cartes, parfaitement identifiables par la double apposition de la marque « LAURIGE ». Par conséquent, hi reproduction des marques incriminées sur tics cartes de transport de la SNCF, lesquelles ne sont d’aucune valeur ou d’utilité marchande, s’agissant d’impression sur papier, sans puce électronique et de mauvaise qualité et qui ne sont par ailleurs pas commercialisées par les sociétés LAURIGL qui ne les utilisent que pour habiller leurs produits, ne peut caractériser des actes de contrefaçon. La demande formée à ce titre sera donc rejetée. Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive : L’exercice d’une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol. Les sociétés LAURIGE, seront déboutées de leur demande à ce titre, faute pour elles de rapporter la preuve d’une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de la société demanderesse, qui a pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits et d’établir l’existence d’un préjudice autre que celui subi du tait des frais exposés pour leur défense. Sur les demandes accessoires : Les circonstances de l’espèce ne commandent pas d’assortir le jugement de l’exécution provisoire. Il y a lieu de condamner la SNCF, partie perdante, aux dépens. La SNCF qui succombe ne peut voir prospérer sa demande de remboursement de frais irrépétibles.

Elle doit cire condamnée à verser aux sociétés LAURIGE qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au litre de l’article 700 du Code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme globale de 5.000 euros.

PAR CES MOTIFS Le Tribunal statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
- DÉBOUTE la SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS de ses demandes en contrefaçon de marques :

- REJETTE la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- DEBOUTE: les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires :

- CONDAMNE la SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS à payer aux sociétés LAURIGE DURON et LAURIGE DISTRIBUTION la somme globale de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

- CONDAMNE la SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS aux dépens de l’instance :

- DIT n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 17 mai 2013, n° 11/18006