Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 1re section, 22 mars 2016, n° 14/05841

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 4e ch. 1re sect., 22 mars 2016, n° 14/05841
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/05841

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

4e chambre 1re section

N° RG :

14/05841

N° MINUTE :

Assignation du :

07 Avril 2014

JUGEMENT

rendu le 22 Mars 2016

DEMANDEUR

Monsieur A Y

[…]

[…]

représenté par Me Rodolphe BOSSELUT, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #D0719

DÉFENDEUR

Monsieur B Z

[…]

[…]

représenté par Me Bruno LANDON, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0595

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame ALBOU DUPOTY, Vice-Présidente

Madame LAGARDE, Vice-Présidente

Madame X, Juge

assistées de Marion PUAUX, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 09 Février 2016 tenue en audience publique devant Madame ALBOU DUPOTY, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition par le greffe,

Contradictoire

En premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Y a, jusqu’au 1er décembre 2005, occupé des fonctions de salarié à la Division des actifs dépréciés du CREDIT AGRICOLE.

Il a été embauché le 1er décembre 2005, par la société EFFICAP dont Monsieur Z est Président.

Dans le cadre de ses fonctions, il a participé au redressement de la société C D Interactive. La société EFFICAP s’est retirée du projet et a été remplacée par la société COMPAGNIE MI29, dont Monsieur Z est également Président.

La société BBI s’est redressée entre 2006 et 2008.

En février 2007, alors que Monsieur Y était directeur général délégué de la société C D Interactive et salarié de la société EFFICAP , son contrat de travail a été transféré à la société COMPAGNIE MI 29 avec reprise de son ancienneté.

Monsieur Y a été licencié par la société COMPAGNIE MI29 par courrier du 9 septembre 2009.

A la suite de son licenciement par la société COMPAGNIE MI 29, Monsieur Y a saisi le Conseil de Prud’hommes pour faire valoir ses droits s’agissant du caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement et d’un intéressement de 20% qu’il n’aurait pas perçu.

Par jugement en date du 28 avril 2011, le Conseil de Prud’hommes de Paris a dit le licenciement de Monsieur Y sans cause réelle et sérieuse, a condamné la société COMPAGNIE MI 29 à lui payer la somme de 200.000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive mais a débouté ce dernier de sa demande d’intéressement de 20% relatif à l’affaire BBI considérant que le Conseil des prud’hommes n’était pas compétent pour statuer sur la question.

Sur contredit régularisé par Monsieur Y, la Cour d’appel de Paris a, par arrêt du 23 février 2012 , reconnu la compétence du Conseil de Prud’hommes pour connaître du litige opposant Monsieur Y à la société COMPAGNIE MI 29 sur l’intéressement réclamé et a renvoyé à une audience ultérieure pour évoquer le dossier au fond.

La Cour d’appel de Paris a, par arrêt du 15 novembre 2012, débouté Monsieur Y de sa demande de versement de l’intéressement d’un montant de 8 054 129,14 euros, car les conditions de son versement n’étaient pas démontrées.

La chambre sociale de la Cour de Cassation a, par arrêt du 2 avril 2014, rejeté le pourvoi formé par Monsieur Y à l’encontre de cette décision.

Par acte en date du 7 avril 2014, Monsieur Y a assigné Monsieur Z devant le tribunal de céans pour le voir condamner à lui verser la somme de 8 554 129 euros à titre de dommages intérêts du préjudice subi.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 mai 2015, auxquelles il est expressément référé, Monsieur Y demande au tribunal sur le fondement de l’article 1120 du code civil et sous le bénéfice de l’exécution provisoire de:

— eu égard à la promesse de porte-fort souscrite par Monsieur Z,

— condamner Monsieur Z à lui payer la somme de 8.554.129 € à titre de dommages et intérêts compensatoires du préjudice subi ;

— condamner Monsieur Z à la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 février 2015 auxquelles il est expressément référé, Monsieur Z demande au tribunal de:

— débouter Monsieur Y de ses demandes,

— condamner Monsieur Y à lui payer les sommes de 10.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, 7.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 3 novembre 2015.

SUR CE

Sur la promesse de porte fort

L’article 1120 du code civil dispose que l'"on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci".

Il convient, en premier lieu, de souligner que Monsieur Y a déjà saisi les juridictions prud’hommales d’une action tendant à voir condamner la société COMPAGNIE MI 29 à lui payer une somme de plus de 8 millions d’euros au titre d’intéressement sur l’opération C D.

Il sollicitait alors un accord entre la société COMPAGNIE MI 29 et lui-même et non entre lui-même et Monsieur Z à titre personnel, distinct de celui de la compagnie MI29 comme il le soutient devant le tribunal.

La Cour a ainsi considéré que A Y :

« soutient qu’en dépit du silence de son contrat de travail avec la SA COMPAGNIE MI 29, celle-ci a donné son accord à cette participation aux bénéfices de cet investissement sous forme d’intéressement en tant que salarié de cette entreprise, d’abord par convention orale puis dans le cadre d’une réunion de son conseil d’administration tenue le 1 er décembre 2006…"

Que selon lui, cet accord a été confirmé après son embauche par la SA COMPAGNIE MI 29 par ce qu’il considère être un premier versement.. ainsi que par différents échanges entre les parties."

« Considérant que A Y soutient que la société MI 29 n’a pas exécuté cet accord d’intéressement dès lors acquis…"

« Que le principe même de l’engagement pris par Monsieur Z, le 1 er décembre 2006 précité, a été repris et renouvelé par le conseil d’administration de la société COMPAGNIE MI 29 dans sa réunion du 13 novembre 2007…"

« mais considérant que, quand bien même le principe d’un intéressement doit être considéré dès lors comme acquis, force est de constater que A Y ne démontre pas pour autant que son montant avait été définitivement déterminé par la SA COMPAGNIE MI 29 avant la rupture de son contrat de travail, ni depuis ni qu’il remplit les conditions mises à son versement."

il se déduit de ces constatations que A Y ne démontre pas que les conditions d’un versement de l’intéressement litigieux soient remplies."

La cour d’appel a ensuite retenu que toute augmentation des rémunérations et primes des dirigeants de la SA Compagnie Ml 29 devait faire l’objet d une autorisation du conseil d’ administration et surtout, elle a relevé que le montant dudit intéressement n’était pas déterminé de sorte qu’elle a débouté Monsieur Y de ses demandes comme ne démontrant pas que les conditions d’un versement d’un intéressement étaient remplies.

Si cette décision ne bénéficie pas de l’autorité de chose jugée, les faits sont néanmoins constants.

Monsieur Y soutient que Monsieur Z a pris un engagement personnel à son endroit. Pour revendiquer une promesse de porte fort de Monsieur Z, il se prévaut :

— d’un e-mail de Monsieur Z du 3 octobre 2006 aux termes duquel celui-ci indiquait :“ je suis d’accord sur les principes pouvez vous me faire des propositions et une réunion sur le sujet.”en réponse à un mail de Monsieur Y évoquant des questions diverses,

— d’un projet de convention entre la Compagnie Ml 29 et la société 2H+ qu’il représentait d’où résulterait l’accord des parties sur un intéressement de Monsieur Y.

Cependant et quelque soit la teneur de la convention, celle-ci n’a pas été a été établie entre les deux parties au litige, ni signée entr’elles et ne peut en aucun cas matérialiser un engagement quelconque de Monsieur Z à l’égard de Monsieur Y, seules les sociétés qu’ils représentaient étant partie à la convention,

— d’un mail du 8 avril 2009 aux termes duquel Monsieur Z demande à l’un des avocats de la société MI 29 de piloter la vente à Monsieur Y de 400.000 titres de C D, en précisant “la vente sera considérée comme un revenu net reçu de MI 29 au titre d’un bonus 2008 ou d’un intéressement”,

— d’un e- mail de E Z du 12 juillet 2007 mentionnant un extrait d’une délibération du conseil d’administration de la société MI 29 du 1er décembre 2006 selon lequel "Le Président indique également que Monsieur A Y, le collaborateur du Groupe en charge du dossier C D, bénéficie d’un intéressement au résultat de cet investissement sous forme d’une participation de 20% à la plus-value éventuelle qui serait dégagée. " Il ressort de cet extrait que les propos sont tenus par Monsieur Z en sa qualité de Président du Conseil et non à titre personnel.

Dans ses conclusions devant la cour d’appel, Monsieur Y exposait qu’ “il a toujours été convenu avec Monsieur Z que A Y bénéficierait du carried – interest mais cet accord n’a jamais été formalisé par écrit.”

Cependant, une promesse de porte fort ne peut résulter que d’actes manifestant l’intention certaine du promettant de s’engager pour un tiers.

Or, aucun des éléments versés aux débats ne permet de caractériser l’engagement personnel de Monsieur Z de se porter fort pour une société du groupe à ce que Monsieur Y bénéficie d’un intéressement concernant le dossier BBI, quelque soit le groupe qui aurait vocation à le régler.

Il ne ressort d’aucun document versé aux débats que Monsieur Z ait souscrit un engagement personnel qui soit détaché de son mandat de Président de la société MI 29 vis à vis de Monsieur Y.

En toute hypothèse, aucune modalité de calcul n’était fixée pour le versement d’un éventuel intéressement et la situation à cet égard est identique à celle qui a été soumise à la cour d’appel.

Il appartenait à Monsieur Y, habitué du monde des affaires, de formaliser les accords sur les intéressements auxquels il aurait pu prétendre, par écrit.

Monsieur Y ne peut, dès lors, qu’être débouté de ses demandes.

Monsieur Z n’établit pas la légèreté de Monsieur Y équipollente au dol et sera débouté de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive.

Sur les frais et dépens

Monsieur Y, qui succombe, supportera les dépens.

Il sera condamné à payer à Monsieur Z la somme de 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles qu’il a exposés.

Au regard de la nature de la décision, il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort et par mise à disposition par le greffe,

Déboute Monsieur Y de ses demandes,

Condamne Monsieur Y à payer à Monsieur Z la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne Monsieur Y aux dépens

Fait et jugé à Paris le 22 Mars 2016

Le Greffier Le Président

FOOTNOTES

1:

Expéditions

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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