Tribunal Judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi fond, 2 janvier 2024, n° 23/06115

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, pcp jtj proxi fond, 2 janv. 2024, n° 23/06115
Numéro(s) : 23/06115
Importance : Inédit
Dispositif : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur
Date de dernière mise à jour : 15 janvier 2024
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée

le :

à :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 23/06115 – N° Portalis 352J-W-B7H-C26XL

N° MINUTE : 5/2024

JUGEMENT

rendu le mardi 02 janvier 2024

DEMANDEURS

Monsieur [S] [G], demeurant [Adresse 1], Madame [K] [G], demeurant [Adresse 1] , Monsieur [V] [G], demeurant [Adresse 1], représentés par Me MARRE Jean-Baptiste, avocat au barreau de Paris, 65 Rue de Prony 75017 Paris, Toque K 188

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. IPSSI (Institut Privé Supérieur des Systèmes

d’ Information),[Adresse 2], représentée pa r M. [J] [C]

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Pascal CHASLONS, statuant en juge unique

assisté de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 13 octobre 2023

JUGEMENT

contradictoire, en dernier ressort, prononcé le 02 janvier 2024 par Pascal CHASLONS, Vice-président assisté de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 02 janvier 2024

PCP JTJ proxi fond – N° RG 23/06115 – N° Portalis 352J-W-B7H-C26XL

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 27/04/2023, Monsieur [S] [G], Madame [K] [G] et Monsieur [V] [G] ( demandeurs qui seront dénommés par commodité consorts [G]) ont assigné la société IPSSI devant le tribunal judiciaire de PARIS (pôle civil de proximité) aux fins de la voir condamnée à payer à Madame [K] [G] et à Monsieur [G] :

— la somme de 1900 € au titre du remboursement de la somme versée à titre d’avance sur les frais de la scolarité de [S] [G] à l’IPPSI ;

— la somme de 3000 € au titre de leur préjudice moral ;

— la somme de 22,35 € au titre de leur préjudice matériel.

Les consorts [G] ont demandé en outre le paiement à Madame [K] [G] et à Monsieur [V] [G] de la somme de 2400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Les consorts [G] ont expliqué les éléments suivants :

— Monsieur [S] [G], fils de Monsieur [V] et de Madame [K] [G], avait recherché à la fin de l’année 2021 un établissement de formation en vue d’études supérieures après le baccalauréat qu’il devait passer en juin 2022.

— Dans ce cadre, il s’était rendu à la journée portes ouvertes de l’Institut Privé Supérieur des Systèmes d’Information (IPSSI) et à la suite, il avait présenté sa candidature en envoyant un dossier, candidature acceptée pour le programme Bachelor informatique, développement 1ère et 2ème année.

— L’inscription ne pouvait prospérer, suivant la convention d’inscription, qu’à condition du versement d’un acompte sur frais de scolarité d’un montant de 1900 €. La convention d’inscription pour l’année scolaire 2022-2023 avait donc été signée le 03/03/2022 par Monsieur [S] [G] et la somme de 1900 € avait été réglée par ses parents.

— S’agissant de l’acompte, il était entendu que celui-ci serait remboursé en cas d’échec au baccalauréat ou dans l’hypothèse du choix d’une autre orientation, la seule condition de remboursement énoncée étant alors le respect d’un délai de deux mois avant le début de la formation fixée au 24/10/2022.

— En définitive, [S] [G] avait renoncé à son inscription en raison de l’évolution de son choix d’orientation et l’avait signifié à l’IPSSI par lettre recommandée, sollicitant le remboursement de la somme versée.

— Un refus avait été opposé, la société IPSSI s’étant prévalue d’une clause de la convention qui avait prévu un délai de 14 jours à compter de la signature de l’inscription pour obtenir le remboursement de l’acompte.

— Pour les époux [G], cette clause qui ne correspondait pas aux informations orales transmises ne pouvait être opposée, car imprimée en caractères illisibles.

— Saisi, le conciliateur de justice avait invité l’IPPSI à la renonciation à la clause qui lui paraissait manifestement abusive. Aucune réponse favorable n’intervenait, malgré une mise en demeure d’avocat du 28/02/2023.

S’agissant de la clause litigieuse, Les consorts [G] estimaient que manquant de clarté et n’étant pas compréhensible, elle devait être considérée comme abusive en application des articles L211-1 et L241-1 du code de la consommation et donc réputée non écrite. Ils ont rappelé également que les contrats établis entre les établissements privés d’enseignement supérieur et des particuliers devaient être considérés comme des contrats d’adhésion pour lesquels une obligation d’information et de conseil devait être respectée.

En l’espèce, selon les demandeurs, la clause litigieuse était abusive et [S] [G] devait être rétabli dans la situation dans laquelle il se serait trouvé en l’absence de cette clause. En conséquence, il y avait lieu au remboursement de la somme de 1900 €.

Les consorts [G] ont rappelé toutes les diligences qu’ils avaient accomplies pour trouver une solution au litige, sans la moindre incidence sur l’établissement.

Régulièrement citée, la société IPSSI s’est présentée à l’instance, représentée par Monsieur [C] [J].

Monsieur [J], considérant que la société IPSSI n’était redevable d’aucune somme, a développé les éléments suivants :

— L’ensemble des règles tenant à une rétractation avait été précisément évoqué lors de la journée portes ouvertes.

— Le procédé de signature de la convention d’inscription était celui d’une signature électronique et le texte du contrat pouvait facilement être agrandi.

— Les candidats avaient été largement informés qu’il leur revenait de consulter l’ensemble du texte du contrat et toutes informations complémentaires auraient pu si besoin être apportées puisque non seulement un entretien avait eu lieu avec le jeune garçon mais également ses parents.

— L’ensemble des pages du contrat avaient été paraphées et le paragraphe relatif aux dispositions financières était normalement intégré dans le texte.

MOTIVATIONS

Tout d’abord, il n’est pas contestable qu’un contrat passé entre un établissement d’enseignement privé supérieur et un particulier soit un contrat soumis aux dispositions du code de la consommation. Il s’agit d’ailleurs d’un contrat d’adhésion pour lequel le devoir d’information et d’avertissement sur son contenu est essentiel, y compris concernant des dispositions financières concernant des montants d’acompte importants.

Par ailleurs, il n’est pas contesté que Monsieur [S] [G] a renoncé à son inscription à l’établissement IPSSI par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 20/06/2022 et ce, en raison d’une évolution de son choix d’orientation, cette renonciation ayant été prise en compte immédiatement. La seule question en suspens était celle du remboursement de l’acompte de 1900 € que l’étudiant n’avait pas manqué de réclamer dans son courrier.

Force est de relever qu’à la réception du courrier de Monsieur [S] [G], l’organisation de la scolarité en fonction des groupes constitués par les étudiants retenus ne pouvait ni être encore finalisée, ni même être préparée puisque de tels groupes dépendaient de la réussite des intéressés au baccalauréat.

Rien ne démontre en conséquence que la dénonciation de la convention d’inscription par Monsieur [S] [G] ait été source du moindre préjudice pour l’établissement. La société IPPSI n’apporte d’ailleurs à l’instance aucun élément à ce sujet.

Au delà, l’article 4 du contrat correspond au paragraphe concernant la rupture, la résiliation de la convention avec l’école. Dans ce paragraphe, l’article 4-1 prévoit qu’une rupture peut intervenir à l’initiative de l’apprenant. Toutefois, l’article 4-2, se rapportant dans cette hypothèse au solde de scolarité, a précisé que les sommes versées n’étaient remboursées intégralement que dans un délai de 14 jours après la date de signature du contrat, aucun des frais n’étant remboursé au-delà.

Il sera relevé tout d’abord que le document signé électroniquement par Monsieur [S] [G] le 03/03/2022 était qualifié de convention d’inscription année scolaire 2021-2022 (cette dernière mention ne manquant pas d’étonner pour un document valant contrat de scolarité débutant en octobre 2022 et non simple réservation…).

Sur la forme, toutes les dispositions du contrat concernant les modalités de scolarité et plus précisément les dispositions financières apparaissent en caractères inutilement minuscules, dissuadant toute lecture. Les paragraphes sont disposés de façon indigeste, sans véritable espacement et sans mise en valeur des dispositions essentielles.

Il sera remarqué d’une part que la taille des caractères varie selon les éléments de la convention, seule la description des modalités pédagogiques et financières de la scolarité apparaissant en caractères minuscules. D’autre part, il n’apparaît pas que la signature de l’étudiant ait été précédée d’une mention rappelant le caractère essentiel de toutes les dispositions du contrat et l’invitant à une lecture complète avant tout engagement.

Au delà, aucun paragraphe spécifique ne concerne le sort de l’acompte lorsque la rupture intervient bien avant le début de la scolarité, les modalités fixées par l’article 4 étant des modalités générales applicables à toute rupture, intervenant à quelque moment que ce soit.

À cet égard, il peut être interrogé la possible confusion entre ce qui est appelé convention d’inscription, dont la signature a été ouverte 7 mois avant le début de la scolarité, et ce qui pourrait apparaître à l’étudiant comme un contrat de réservation, susceptible de précéder le véritable contrat de scolarité. Au delà des dispositions écrites du contrat, qui devaient être sans équivoque, l’établissement devait garantir une information exhaustive s’agissant des engagements de l’étudiant qui risqueraient, notamment au vu des conséquences financières, de s’avérer prématurés.

Accessoirement, il sera relevé que l’article 4-2 a évoqué d’abord l’hypothèse d’une rupture de la « convention d’inscription » pour mentionner par la suite un délai de 14 jours après la signature du « contrat ».

Enfin, il est peu cohérent que les modalités de conservation de l’acompte soient mentionnées dans un sous-paragraphe distinct (appelé seulement solde de scolarité) plutôt que dans le paragraphe 5 visant les « dispositions financières ».

Selon l’article L211-1 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels au consommateur doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. Par ailleurs, les clauses abusives sont réputées non écrites.

Il est manifeste, au vu des éléments sur la taille et la disposition des termes de la clause invoquée par la société IPSSI que cette clause n’est pas présentée ni rédigée de façon claire et compréhensible, facilement accessible à l’étudiant et ne lui permettant aucune confusion sur le sort de l’acompte réglé des mois avant le début de sa scolarité et avant même le passage de son baccalauréat.

La signature électronique du document, loin de dédouaner l’établissement, qui ne peut dans un contact direct et concret avec l’étudiant expliquer l’ensemble des clauses essentielles du contrat, accentue les failles décrites précédemment. La possibilité d’élargir le texte, pas plus que celle d’utiliser une loupe pour les documents écrits, ne peut avoir d’incidence sur l’opposabilité de la clause. Au demeurant, le contrat étant dématérialisé, rien ne nécessitait que son apparence soit manifestement illisible, sinon l’absence véritable de volonté de l’établissement d’informer l’étudiant.

La clarté de cette clause, toutefois, aurait pu être retenue si l’information apportée par la société IPSSI sur la conservation de l’acompte versé en avance avait été complète et sans équivoque. Tout d’abord, la société IPPSI ne produit aucun document décrivant l’offre de scolarité, qui en détaillerait les modalités financières dès réservation d’une place.

Par ailleurs, les dires des consorts [G] sur ce qui leur a été expliqué lors de la journée porte ouvertes mais aussi l’échange de mails entre Monsieur [V] [G] et Monsieur [J] de fin août 2022 font ressortir les ambiguïtés initiales.

En effet, Monsieur [G] indiquait dans son mail que Monsieur [J] les aurait rassurés sur les possibilités de rétractation lors de la journée portes ouvertes. Selon lui, loin d’évoquer le délai de 14 jours après la signature, il leur aurait été spécifié qu’une renonciation pouvait se faire dans un délai d’environ deux mois avant la rentrée.

Force est de constater que la réponse du 01/09/2022 de Monsieur [J] n’affirme pas que l’information sur le délai de rétractation de 14 jours avait été donnée. Monsieur [J] explique avec une certaine ambivalence qu’il aurait rappelé aux consorts [G] qu’ils avaient la possibilité de réfléchir à la signature de la convention d’inscription jusqu’à deux mois avant la rentrée. Une telle affirmation est plutôt étonnante au vu des tensions existantes quant à l’accès des bacheliers aux études supérieures.

Au surplus, à l’audience, Monsieur [J] n’a pas disconvenu qu’un échec au baccalauréat était susceptible de permettre le remboursement de l’acompte, ce qui est cohérent puisque le contraire aurait abouti un enrichissement sans cause abusif pour la société IPSSI.

Or, les dispositions très générales de l’article 4-2 n’ont en rien prévu une telle hypothèse, si bien qu’en lisant l’article, l’étudiant ne pouvait pas avoir la certitude qu’il s’appliquait aux sommes versées dans le cadre d’une réservation 7 mois avant le début de la scolarité. En définitive, le remboursement de l’acompte n’était pas défini de façon satisfaisante par le contrat mais relevait plutôt de l’arbitraire du directeur de l’établissement.

Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, la clause de l’article 4-2 du contrat sera déclarée non écrite. De ce fait, l’acompte versé ne saurait être conservé par la société IPSSI que si la renonciation intervenue a été préjudiciable à l’établissement. Or tel n’est pas le cas en l’espèce.

En conséquence, la société IPSSI sera condamnée à payer à Monsieur [V] et à Madame [K] [G] (qui ont réglé effectivement l’acompte pour leur fils) la somme de 1900 €.

Les consorts [G] ne justifient pas d’un préjudice distinct de celui d’engager une procédure. Ils seront donc déboutés de leur demande de dommages-intérêts.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [V] et de Madame [K] [G] (qui ont recherché préalablement toute concertation) les frais irrépétibles de l’instance. S’agissant des frais d’envoi de lettres recommandées, ils seront compris dans l’indemnisation des frais irrépétibles.

Au vu de la date de l’assignation, le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de plein droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort

Condamne la société IPSSI à payer à Monsieur [V] [G] et à Madame [K] [G], pris conjointement, la somme de 1900 € en remboursement de l’acompte sur frais de scolarité.

Condamne la société IPSSI à payer à Monsieur [V] [G] et à Madame [K] [G], pris conjointement, la somme de 1600 € en l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties du surplus de leur demande.

Condamne la société IPSSI aux dépens.

Rappelle que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de plein droit.

Le GreffierLe Juge

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