ADLC, Décision 12-D-20 du 12 octobre 2012 relative à des pratiques relevées dans le secteur de l’optique-lunetterie de détail à La Réunion

  • Opticien·
  • Optique·
  • La réunion·
  • Mutuelle·
  • Tiers payant·
  • Marches·
  • Réseau·
  • Santé·
  • Offre·
  • Magasin

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
Aut. conc., déc. n° 12-D-20 du 15 oct. 2012
Numéro(s) : 12-D-20
Textes appliqués :
442-2, L. 420-1, L. 420-2, L. 420-5, L. 462-8
Identifiant ADLC : 12-D-20
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Décision n° 12-D-20 du 12 octobre 2012 relative à des pratiques relevées dans le secteur de l’optique-lunetterie de détail à La Réunion L’Autorité de la concurrence (section V), Vu la lettre enregistrée le 5 août 2010 sous les numéros 10/0089 F et 10/0090 M, par laquelle le Syndicat des Opticiens de La Réunion (ci-après le SOR) a saisi l’Autorité de la concurrence, de pratiques relevées dans le secteur de l’optique lunetterie de détail à la Réunion, et a sollicité le prononcé de mesures conservatoires ; Vu la décision n° 11-C-01 du 20 janvier 2011 par laquelle le président de l’Autorité a donné acte à la partie saisissante du désistement de sa demande de mesures conservatoires ; Vu la décision n° 11-SO-04 du 29 mars 2011 enregistrée sous le numéro 11/0025 F, par laquelle l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office de pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’optique-lunetterie de détail à La Réunion ; Vu la décision du 4 avril 2011 par laquelle la rapporteure générale adjointe a procédé à la jonction de l’instruction de ces affaires ; Vu le livre IV du code de commerce ; Vu les décisions de secret des affaires 10-DSA-288 (Mutualité de La Réunion), 10-DSA- 289 (SOR), 10-DSA-290 (Optique de Bourbon), 10-DSA-291 (Optic AFV), 11-DSA-362 du 5 décembre 2011 (CRC), 11-DSA-363 du 5 décembre 2011 (SOR), et 12-DSA-19 du 9 janvier 2012 (Mutualité Réunion) ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu les observations présentées par le commissaire du gouvernement et par le SOR ; La rapporteure, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du gouvernement et les représentants du Syndicat des Opticiens de La Réunion (SOR) et de la Mutualité de la Réunion entendus lors de la séance du 11 septembre 2012 ;

Adopte la décision suivante :

I. CONSTATATIONS ………………………………………………………………………………………….. 3 A. La saisine ……………………………………………………………………………………………. 3 1. Saisine initiale du SOR …………………………………………………………………………. 3 2. Jonction avec une saisine d’office …………………………………………………………. 3 B. Le secteur de l’optique à la réunion ……………………………………………………… 3 1. Secteur de l’optique médicale (généralités et particularités à La Réunion) .. 3 2. Les secteurs connexes …………………………………………………………………………… 5 C. Les entreprises concernées …………………………………………………………………… 8 1. Les opérateurs sur le marché réunionnais de l’optique ……………………………. 8 2. Les opérateurs sur le marché réunionnais de la complémentaire santé …… 10 D. Les pratiques dénoncées …………………………………………………………………….. 14 1. L’offre « TRIANGLE » des opticiens mutualistes de La Réunion …………… 14 2. Les autres pratiques dénoncées par le SOR…………………………………………… 15 3. Les indices concernant le SOR ou certains de ses membres ……………………. 17 II. DISCUSSION …………………………………………………………………………………………………. 20 A. Incompétence de l’Autorité de la concurrence sur les pratiques de revente à perte ……………………………………………………………………………………………………… 20 B. …………………………………………………………………………………………………………….. 20 B. Les observations des parties en réponse àla proposition de non lieu …….. 20 C. L’analyse du marché pertinent et de l’éventuelle position dominante des parties mises en cause ……………………………………………………………………………….. 20 D. Sur la qualification juridique des pratiques ……………………………………….. 22 1. Sur la pratique tarifaire principale (offre « TRIANGLE ») ……………………. 22 2. Les autres faits reprochés aux opticiens mutualistes par le SOR …………….. 24 3. Les autres pratiques jointes au dossier …………………………………………………. 24 DÉCISION ……………………………………………………………………………………………………………………………… 26

2

I. CONSTATATIONS A. LA SAISINE 1. SAISINE INITIALE DU SOR 1. Le syndicat des opticiens de La Réunion (le SOR) dénonce par une saisine en date du du 29 septembre 2010 enregistrée sous le n° 10/0089 F des pratiques mises en œuvre par la Mutualité de La Réunion (ci après MR), par ses opticiens mutualistes, exerçant sous l’enseigne « Optique Mutualiste », et par ses mutuelles membres, pratiques qu’il estime contraires aux articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-5 du code de commerce. 2. La saisine du SOR était assortie d’une demande de mesures conservatoires, enregistrée sous le numéro 10/0090 M, dont le saisissant s’est désisté le 14 janvier 2011. L’instruction s’est poursuivie au fond. 2. JONCTION AVEC UNE SAISINE D’OFFICE 3. Par ailleurs, l’Autorité a décidé de se saisir d’office de pratiques relevées sur le marché de l’optique-lunetterie à La Réunion. Cette saisine, enregistrée sous le numéro 11/0025 F, a été jointe au dossier 10/0089 F. 4. La poursuite de l’instruction a donné lieu à une proposition de non-lieu adressée aux parties le 24 avril 2012. B. LE SECTEUR DE L’OPTIQUE À LA RÉUNION 5. Le secteur concerné par le présent dossier est celui de l’optique de détail à La Réunion (1). Toutefois, il est interdépendant de secteurs connexes (2). 1. SECTEUR DE L’OPTIQUE MÉDICALE (GÉNÉRALITÉS ET PARTICULARITÉS À LA RÉUNION) 6. Les produits d’optique oculaire, c’est-à-dire verres, montures, et lentilles de contact sont des dispositifs médicaux régis par le code de la santé publique, délivrés sur prescription médicale. La délivrance de ces produits d’optique oculaire est réservée à des professions de santé ou paramédicales réglementées, au premier chef les opticiens (articles L. 4362-1 et suivants du code de la santé publique et notamment l’article L. 4363-2). La réglementation applicable à la profession d’opticien s’étend aux modalités d’exercice du commerce de produits d’optique-lunetterie (article L. 4362-9). 7. Au niveau national, les produits d’optique prescrits sur ordonnance représentent en moyenne 77 à 80 % du chiffre d’affaires total d’un opticien. Un équipement s’entend comme une monture équipée de ses verres correcteurs. L’assurance maladie rembourse en

3

moyenne 5 % de ce type de dépenses, le reste étant financé par l’assurance

complémentaire santé ou autofinancé. La consommation nationale de produits d’optique a progressé de plus de 20 % entre 2006 et 2010, avec un niveau de 5,1 milliards d’euros en 2010. 8. À La Réunion, qui compte une population de 800 000 à 830 000 personnes1, le marché de la lunetterie représenterait, en volumes, de 90 000 à 100 000, voire 110 000 équipements selon la saisine, mais moins de 75 000 de source DRESS. Il ressort des débats tenus lors de la séance qu’en réalité, la DRESS fournit un nombre de prescriptions médicales, et les opticiens un nombre d’équipements vendus. Or, une prescription médicale donne souvent lieu à deux ventes, de sorte que le chiffrage en volumes du marché reste imprécis. 9. Le marché en valeur est évalué à 51,4 M€ en 2010, contre 48,7 M€ en 2009 (tous produits d’optique confondus, y compris solaires et lentilles non remboursés). Cela situe la part de l’optique médicale proprement dite à environ 40 M€ (75 à 80 % du total). Entre 2007 et 2010, une progression (en valeur) des dépenses d’optique pour La Réunion de l’ordre de 20,9 % a été constatée. 10. Dans ce même département, la vente au détail est assurée par des opticiens indépendants, adhérents du SOR auteur de la saisine, par des opticiens dits mutualistes et par quelques opticiens sans appartenance. Entre 2007 et mi-2010, et en termes de chiffre d’affaires, la part de marché de l’ensemble des indépendants du SOR s’est érodée (passant de 91 à 83 %), celle des mutualistes a progressé (9 à 15 %), et de nouveaux entrants sont apparus (2 %). 11. Les dépenses d’optique médicale bénéficient d’une avance de frais sur la partie relevant de la prise en charge obligatoire par la sécurité sociale, conformément aux termes de la Convention Nationale du 14 octobre 2003 passée entre les trois Caisses Nationales d’Assurance Maladie (CNAM des travailleurs salariés, Caisse Centrale de Mutualité Sociale Agricole et CNAM des Professions indépendantes) et les opticiens (à savoir FNOF, Fédération Nationale des Opticiens de France et UNOM, Union Nationale de l’Optique Mutualiste). La sanction d’un manquement à cette convention peut être le déconventionnement de l’opticien. 12. À La Réunion, cette part obligatoire de remboursement des dépenses peut être gérée par la CGSS2 (équivalent local de la CPAM), par la SLI (pour certains fonctionnaires – devenue depuis la MFP Services, voir 17 § ), par la MGEN (mutuelle générale de l’éducation nationale, section locale) ou par le RSI. Jusqu’en 2010, tout nouvel opticien s’installant à La Réunion, pour bénéficier du remboursement via la SLI (qui gère parts obligatoire et complémentaire des mutuelles de la fonction publique, excepté la MGEN) était conduit à devoir préalablement adhérer au SOR (voir ci-après).

1 Problèmes de santé et organisation des soins à la Réunion, ARH La Réunion Mayotte, in Schéma régional d’organisation sanitaire de la Réunion 2005-2010, publication de 21 décembre 2005. 2 CGSS : Caisse Générale de Sécurité Sociale de La Réunion, SLI : section locale inter ministérielle, RSI : Régime Social des Indépendants.

4

13. Selon l’ARH, 50 % de la population3 de l’île est bénéficiaire de la CMU, ce qui constitue un taux très supérieur à celui de la métropole et des autres DOM4. Or, un indicateur pertinent de l’activité d’un opticien est celui du ratio des ventes d’équipements faites à des bénéficiaires de la CMU, rapportées aux ventes totales, les ventes au profit des bénéficiaires de la CMU étant réputées générer une marge moindre que la clientèle classique. 14. La part des mutuelles réunionnaises dans la gestion du tiers-payant est significative et un grand nombre d’entre elles sont des mutuelles de fonctionnaires, gérant donc également la partie « Sécurité sociale » (RO : régime obligatoire) en même temps que la part complémentaire (RC : régime complémentaire). Certains opérateurs ayant des appellations assez voisines, il convient de distinguer les différentes structures : 15. La Mutualité de la Fonction Publique (MFP) est une union de mutuelles relevant du code de la mutualité, qui regroupe 17 mutuelles des trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière) et adhère par ailleurs à la Mutualité Française. Elle est à l’origine notamment d’un projet de « conventionnement Optique » adopté en 2010 au niveau national. 16. La Mutualité Française, ou FNMF (Fédération Nationale de la Mutualité Française), regroupe quant à elle toutes les mutuelles ou unions de mutuelles relevant du code de la mutualité (dont celles de la fonction publique regroupée autour de la MFP, mais aussi celles du secteur privé). C’est un organe national, « décliné » au niveau régional, à la Réunion, par la « Mutualité de la Réunion » (MR, voir § 57). 17. La MFP Services ou MFPS, entité juridique distincte de la MFP, regroupe les mêmes mutuelles que la MFP, à l’exception notable de la MGEN, qui dispose de ses propres centres de gestion et de remboursements, y compris à la Réunion. La MFPS gère le tiers payant des agents de la fonction publique (hors MGEN) à la fois pour le RO et le RC, via des centres de gestion5 répartis sur tout le territoire. 2. LES SECTEURS CONNEXES 18. Les griefs du SOR à l’encontre des opticiens mutualistes s’analysent en tenant compte des secteurs connexes à l’optique médicale de détail. L’activité des opticiens intéresse en effet le secteur de l’assurance complémentaire santé, ainsi que celui de l’accès au réseau de soins d’optique.

3 Le rapport ARH indique que 50 % de la population réunionnaise serait bénéficiaire de la CMU, ce qui porte cette population « CMU » à environ 400 000 personnes. Il convient de rappeler que généralement la CMU est octroyée aux personnes ne pouvant bénéficier d’une couverture sociale (RO), et que la CMU-C est un dispositif supplémentaire distinct, qui permet l’octroi d’une complémentaire santé (RC), sous certaines conditions, aux personnes ne pouvant pas bénéficier d’une complémentaire santé ; la population des bénéficiaires des CMU et CMU-C est donc bien spécifique, avec un faible pouvoir d’achat. La plupart (mais pas tous) des OCAM contribuent au Fonds CMU (sur ce point voir « Rapport sur la situation financière des organismes complémentaires assurant une couverture santé » Octobre 2010, DRESS.) 4 Source : http://www.ors-reunion.org , et ce contre en moyenne 3 à 13 % en métropole selon le département concerné, les autres DOM pouvant présenter un taux de 34 %.(Source : http://irdes.fr/EspaceEnseignement/ChiffresGraphiques/Cadrage/CMU/CMU.htm) . 5 Sections locales interministérielles (SLI) devenues centres MFPS.

5

a) Le secteur des organismes complémentaires d’assurance maladie (ci-après OCAM) à La Réunion 19. La gestion des remboursements RO ou RC dépend, outre de la Convention nationale précitée, d’une convention locale spécifique : le 26 mars 1987, une « Association professionnelle des Opticiens de la Réunion » passait avec la Fédération Nationale des Mutuelles de fonctionnaires et Agents de l’État, une convention par laquelle les opticiens s’engageaient à délivrer aux assurés mutualistes relevant de la FNMFAE6 tout produit d’optique, dans des conditions administratives précises. 20. Des discussions sont en cours entre la MFP et le SOR, pour l’adoption à La Réunion d’un conventionnement « Optique » MFP-Services7 qui a vu le jour au niveau national courant 2010. L’adoption de cette convention à La Réunion entraînerait la caducité de celle de 1987. 21. A l’heure actuelle, la convention de 1987 demeure toujours en vigueur. La création du SOR qui a « de facto » pris le relais de l’Association des opticiens remonte à 2004. Le SOR estime que, par cette convention, la SLI a entendu déléguer partie de ses tâches administratives de vérifications au SOR (vérification de l’inscription de l’opticien à la CGSS, de l’obtention de son diplôme, etc.), en préalable à une inscription auprès de la SLI pour l’opticien, à la suite de laquelle celui-ci bénéficiait de l’accès au tiers payant. C’est ainsi que la SLI (MFP Services) a pu effectivement « renvoyer » tout nouvel opticien (sauf mutualiste) au SOR préalablement à son inscription à la SLI. Le SOR considère que la convention de 1987 a fonctionné longtemps comme un support ayant justifié la conviction erronée qu’il fallait adhérer au SOR pour pouvoir accéder à MFP (voir § 97). Les parts de marché des OCAM de La Réunion 22. D’après les réponses à un questionnaire adressé aux OCAM identifiés à La Réunion, et qui totalisent plus de 235 000 contrats de complémentaire santé, la seule MGSR détient 20 % à 22 % des contrats d’assurance santé et l’ensemble des mutuelles affiliées à la Mutualité de La Réunion 65 %. 23. La MGSR représente 33 % de l’effectif des mutuelles affiliées à la MR étant rappelé qu’elle est gérée en direct par la MR, tout comme Interiale, la Mutuelle des Caisses d’Épargne et des salariés de la CPAM. Au total, la MR gère en direct, pour le compte de ces opérateurs, 23,6 % de l’activité (en nombre de contrats de complémentaire santé). 24. Si l’on se réfère à une estimation en valeur (cotisations), les mutuelles de la Mutualité participant à l’offre « TRIANGLE » représentent 31 % du marché, et parmi elles, la seule MGSR 25 %. 25. Le fait marquant du marché de la complémentaire santé à La Réunion tient à la nette progression de la seule MGSR depuis 2007 (progression de + 26,84 % en 4 ans en nombre de contrats, et de + 14,85 % entre 2009 et 2010 en termes de cotisations), ce dynamisme pouvant coïncider avec la mise en place de l’offre TRIANGLE (début 2008), parallèlement à la progression d’activité de la MUTASS (dont il est établi que l’activité est essentiellement celle de la lunetterie de détail). Cette progression sur ce marché s’effectue surtout au détriment d’autres mutuelles adhérentes de la Mutualité.

6 FNMFAE : Fédération nationale des Mutuelles de fonctionnaires et agents de l’État, structure juridique de l’époque (1987) en charge de la SLI (elle-même sans personnalité juridique), « ancêtre » de la MFP Services. 7 « Convention de délégation de paiement en optique médicale », en pièces jointes à l’audition de la MFP du 23 septembre 2011, MFP expliquant qu’il s’agit d’un conventionnement « ouvert » pour lequel il n’a pu être recueilli aucune candidature à la Réunion.

6

26. Un autre secteur, distinct de celui de l’optique de détail, lui est directement connexe, celui de l’accès aux réseaux de soins et, dans le présent dossier, aux réseaux d’optique. b) Le secteur de l’accès au professionnel de santé (l’opticien) L’accès aux réseaux de soins (généralités) 27. L’Autorité de la concurrence a eu l’occasion de donner son avis sur les effets, sur la concurrence, du développement de réseaux de soins agréés8. Ce partenariat entre un OCAM (ou un groupe d’OCAM) et le professionnel de santé se concrétise par une convention, par laquelle le professionnel s’engage sur une certaine qualité de services et une certaine modération tarifaire, en contrepartie de quoi l’OCAM lui octroie l’accès au tiers payant (part complémentaire) et l’orientation de l’assuré par l’OCAM vers le professionnel agréé. 28. L’avis précité distingue réseaux « ouverts » et « réseaux fermés ». Schématiquement, les premiers accueillent tout professionnel satisfaisant à certains critères prédéterminés (type réseau « Carte blanche »), les seconds organisent une sorte de numerus clausus de professionnels, également sur base de certains critères, mais les candidats en surnombre doivent rester en liste d’attente (type réseau MGEN). Le secteur de l’accès au réseau d’optique (au niveau national) 29. Le secteur de l’accès aux réseaux de soins, et en particulier aux réseaux d’optique, est difficilement chiffrable. Les principaux réseaux identifiés9 peuvent chacun couvrir 400 à 2 000 opticiens et 800 000 à plusieurs millions de cotisants. Mais le nombre d’opticiens par réseau n’est pas décisif, ceux-ci pouvant normalement adhérer à plusieurs réseaux à la fois. En revanche, un assuré n’a en général qu’un OCAM. Ces réseaux, de création assez récente, intéressent toutes formes d’OCAM (assureurs, institutions de prévoyance ou IP, mutuelles) ou de contrats (contrats de prévoyance individuels ou collectifs). L’accès aux réseaux d’optique à La Réunion 30. Traditionnellement, les opticiens indépendants, pour la plupart membres du SOR, n’étaient pas candidats à l’adhésion à un réseau de soins, en partenariat avec un ou plusieurs OCAM. Les contraintes tarifaires liées à une telle adhésion ne leur convenaient pas. Toutefois, cette situation est en cours d’évolution. Les réseaux existants à La Réunion 31. Le réseau MGEN réunit à ce jour trois opticiens indépendants ainsi que la plupart des magasins mutualistes de la Mutualité (sauf un). C’est un réseau « fermé » qui pratique les remboursements différenciés en fonction du professionnel consulté (à cet égard, voir ci-après § 87). 32. Le réseau Kalivia et le réseau Carte blanche, qui sont pourtant des réseaux « ouverts » n’ont pas trouvé de candidat opticien à La Réunion.

8 Avis de l’Autorité de la concurrence n° 09-A-46 du 9 septembre 2009. 9 Que sont Santeclair (piloté par AGF, MAAF, MMA), Kalivia (Malakoff Mederic), MGEN (MGEN), Itelis (AXA), GIE Seveane (Groupama, GAN, PRO BTB), Carte blanche (Swiss Life et GMC), Union Harmonies (mutuelles diverses), les « Opticiens Mutualistes » (Mutualité Française). D’autres formes d’accords peuvent exister : c’est le cas de la Mutuelle générale (qui assure les salariés de six entreprises, parmi lesquelles France Telecom et La Poste, au travers de contrats collectifs) qui concerne plusieurs millions d’assurés, et 1 200 opticiens d’Optic 2000.

7

33. Sur le succès mitigé des réseaux de soins à La Réunion, le SOR avance que certains organismes, tels Santeclair ou Carte blanche, correspondent à des mutuelles métropolitaines faiblement implantées localement, qui ne sont pas en mesure de garantir un certain chiffre d’affaires à l’opticien, et que d’autres ne proposent pas de cadre tarifaire suffisamment incitatif. 34. Quant aux opticiens mutualistes de La Réunion, leur organisation peut être considérée comme l’intégration verticale à la fois d’une activité d’optique de détail et de complémentaire santé, comme dans le cadre d’un réseau agréé de type « fermé ». L’offre « TRIANGLE » propose des garanties en matière d’optique qualifiables de remboursements différenciés. C. LES ENTREPRISES CONCERNÉES 1. LES OPÉRATEURS SUR LE MARCHÉ RÉUNIONNAIS DE L’OPTIQUE a) Les opticiens membres du syndicat (SOR), partie saisissante 35. Les opticiens membres du SOR représentent 72 magasins. L’activité globale (en chiffre d’affaires) des membres du SOR a décliné de 8 % entre 2009 et 2010, certains accusant des baisses mais d’autres des progressions (sur ce point, le SOR ne disconvient pas du fait que certains indépendants peuvent avoir pris des parts de marché à d’autres indépendants). 36. L’examen des résultats financiers des trois principales entreprises membres du SOR en chiffre d’affaires permet de constater que leur taux de rentabilité brute d’exploitation (RBE), très variable d’une entreprise à une autre, est comparable au RBE des opticiens mutualistes (dans les comptes de la MUTASS). 37. Le chiffre d’affaires d’ODB (douze magasins) a décliné de 6 % en 2010, avec une rentabilité opérationnelle qui s’est dégradée. Cette entreprise consacre 4,4 % de ses ventes aux frais de publicité et présente un taux de clients bénéficiaires de la CMU (stable sur 3,5 ans) de l’ordre de 32 %. 38. En 2010, le chiffre d’affaires de Chevillard (neuf magasins) s’est maintenu à l’identique, avec une rentabilité opérationnelle satisfaisante. Il présente un taux de clients bénéficiaires de la CMU stable de 5 à 6 %. 39. L’opticien ATOL (Run Vision, huit magasins) a présenté, en 2010, un chiffre d’affaires en progression de 8 % avec un RBE positif. Son taux de bénéficiaires de la CMU est stable sur trois ans, de l’ordre de 20 à 21 %. 40. En conclusion, l’examen des liasses fiscales de trois principaux opticiens indépendants, membres du SOR, sur la période examinée (2008 à 2010) fait ressortir des évolutions d’activité variées (régression pour ODB, maintien pour Chevillard, progression pour ATOL), et des rentabilités opérationnelles inégales. Le taux d’équipement de la clientèle bénéficiaire de la CMU chez les opticiens indépendants 41. L’indicateur du ratio des ventes d’équipements faites à des bénéficiaires de la CMU, rapportées aux ventes totales, indiqué ci-dessus pour les trois premiers opticiens du SOR établit que, alors que l’offre « TRIANGLE » des mutualistes, dénoncée dans la saisine, a

8

débuté en janvier 2008, les taux « CMU » des opticiens indépendants sont demeurés stables jusqu’à la fin 2010 (ODB 32 %, Optique Chevillard 5 à 6 %, Atol 20 à 21 %). b) Les opticiens mutualistes10 visés par la saisine 42. Les opticiens mutualistes visés par la saisine représentent sept magasins opérant sous cette marque. Ne disposant pas de personnalité juridique distincte, ils sont gérés par la MUTASS (union de mutuelles, voir en infra). Évolution de l’activité et de la rentabilité brute des opticiens mutualistes 43. Les comptes des opticiens mutualistes sont intégrés à ceux de la MUTASS (voir ci-après § 61), qui tient une comptabilité analytique et a pu fournir des éléments pour chacun des magasins (de 2007 à mi-2010). 44. Il en ressort qu’en termes d’activité, de 2008 à 2009 la progression annuelle globale a été de + 42 % et de + 19 %, la progression la plus spectaculaire concernant le magasin « Est Saint André » (+ 45 % et + 104 %). Le RBE global cumulé des huit magasins est ressorti à 28 % (des ventes) en 2007, 13 % en 2008 et moins de 7 % en 2009. Toutefois, les comptes de la MUTASS s’inscrivent en net rétablissement pour 2010 (voir infra). 45. Les centres d’optique de la MUTASS ont vu leur fréquentation augmenter en nombre de dossiers entre 2006 et 2007 de près de 28 %, avec 11 934 dossiers en 2007. En nombre de factures de la MUTASS, la progression est de l’ordre de 88 % entre 2007 et 2008. Cette progression s’est poursuivie (+ 16 % entre 2009 et 2010), 60 % des dossiers en 2009 concernant des clients MGSR (55 % en 2010). 46. Les opticiens mutualistes appliquent le tiers payant intégral (RO et RC) à l’ensemble des mutuelles affiliées à la MUTASS et aux bénéficiaires de la CMU. MNT, Interiale, MAS et MGSR ont agréé les opticiens mutualistes dans le cadre de l’offre « TRIANGLE ». La MUTASS précise qu’ « aucun autre OCAM (Assurance, mutuelle d’assurance, mutuelle non affiliée à l’Union, Institut de prévoyance …) n’a passé d’accord de tiers payant avec les opticiens mutualistes ». 47. Les opticiens mutualistes n’ayant pas de personnalité juridique propre, c’est bien avec la MUTASS (union de mutuelles relevant du livre III du code de la mutualité, voir § 61) que notamment la MGSR, Mutuelle locale opérée par la Mutualité de La Réunion (fédération de mutuelles relevant du livre II du code de la mutualité, voir infra § 68), a passé un accord de tiers payant de la part complémentaire, tout comme avec les autres mutuelles membres de la MUTASS. 48. Concernant la clientèle des opticiens mutualistes, il s’agit essentiellement d’adhérents mutualistes. 49. Si la part de marché des opticiens mutualistes réunionnais de 9 % en 2007 (en chiffre d’affaires) était comparable avec la moyenne nationale (de 9,3 % selon un rapport XERFI), sa progression depuis lors (pour s’établir en 2009/2010 à un niveau de 15 %) apparaît en décalage avec la métropole.

10 Les « opticiens mutualistes » dans le présent dossier concernent uniquement ceux de l’île de La Réunion. Il s’agit également d’une marque déposée et de l’appellation d’un contrat d’enseigne « Les Opticiens Mutualistes » au niveau national, piloté par COOPTIMUT, et au-delà par une société VISAUDIO.

9

Évolution de l’effectif des opticiens mutualistes (19 en 2007, 38 en 2010) 50. C’est la Mutualité de La Réunion (MR), et non la MUTASS, qui emploie juridiquement l’ensemble des personnels mutualistes11, soit environ 120 collaborateurs, pour une masse salariale globale de 5,5 M€. Sur ce montant, environ 2 M€ sont refacturés à la MUTASS. Cette organisation particulière explique la majeure partie de la dette de la MUTASS envers la Mutualité de La Réunion (MR) à son compte de bilan. 51. L’effectif « optique » de la MUTASS est au total de 38 personnes (soit le tiers de l’effectif total rémunéré par la MR) a connu une progression (en nombre de salariés) de + 60 % en 3 ans12 . Ces chiffres établissent une nette progression de la masse salariale, corroborant le dynamisme de l’activité « optique » des mutualistes. Taux d’équipement « CMU » des Opticiens Mutualistes (4 %) 52. Le ratio d’équipement de la clientèle bénéficiaire de la CMU des mutualistes se situent très en deçà de ceux des opticiens indépendants évoqués plus haut, dont les trois premiers ont des taux de 17 à 33 % (du total de factures). Ce taux de l’ordre de 4 % chez les opticiens mutualistes, lui aussi, est resté stable sur 3 ans. c) Les opticiens indépendants, nouveaux entrants 53. Il s’agit de nouveaux entrants depuis 2009, qui sont : Sarl Territoire prédéterminé, à l’enseigne « 10Strict Optique », avec trois magasins, Sarl Optique Bank à l’enseigne “Centre Optique”, avec quatre magasins, Optique la Rivière, Optical Discount, et Morel Optique. 54. Les chiffres d’affaires de ces opérateurs d’arrivée récente ne sont pas tous connus. En 2009, 10strict Optique a effectué un premier exercice avec 385 K€ de chiffre d’affaires, et la même année, le chiffre d’affaires de Centre Optique a atteint 724 K€ (pour un premier magasin). Certains d’entre eux viennent de rejoindre récemment le SOR, notamment Centre Optique. 2. LES OPÉRATEURS SUR LE MARCHÉ RÉUNIONNAIS DE LA COMPLÉMENTAIRE SANTÉ 55. Les opérateurs visés par la présente saisine sont des unions de mutuelles fédérées autour de la Mutualité de La Réunion (MR). 56. Depuis la réglementation européenne de 200313, la Mutualité de La Réunion (MR) a conservé ses activités d’assurance (automobile, habitation, obsèques…), mais celles relatives à ses activités sanitaires et sociales ont été logées sur la MUTASS (Mutualité de La Réunion actions sanitaires et sociales). En outre, la MR gère en direct en qualité de « mutuelle substituante » la mutuelle consacrée à la couverture complémentaire santé, la MGSR (« mutuelle substituée »).

11 À l’exception de ceux de PFM, ou de ceux de Voyages Mutualistes. Cette organisation est approuvée par les Commissaires aux Comptes et par l’ACP. 12 Ce chiffre se situe dans la lignée des moyennes du SOR, qui compte en moyenne 5 salariés par magasin. 13 « Les mutations de la protection sociale complémentaire sous l’influence des directives européennes : le cas des institutions de prévoyance et des mutuelles » de Gaël Coron et Laurence Poinsart (Février 2006), afs.org/IMG/doc.

10

a) La Mutualité de La Réunion (MR) 57. La Mutualité de La Réunion est une Union de Mutuelles, régie par le code de la Mutualité (Livre II), comptant trente-deux mutuelles santé membres et vingt mutuelles obsèques. En 2009, les principales mutuelles de la Mutualité de La Réunion (MR), parmi les trente-deux adhérentes, étaient la MGSR (32 % des cotisations versées à la MR), la MGEN (18 %), la SMAM (17 %) et la MNT (9 %). 58. Son compte de résultat « Non Vie » 2010 a affiché un niveau de cotisations de 43,3 M€14, et un niveau de charges de prestations de 33,3 M€ (contre 30,4 en 2009, soit une progression de moins de 10 %), avec un résultat technique de 1,5 M€ (contre 379 K€ l’année précédente). Autrement dit, ses recettes ont progressé plus vite que ses charges brutes. 59. Entre 2009 et 2010, les frais d’administration sont passés de 4,5 M€ à 7,9 M€ (+ 75 %). La MR explique cette évolution par « une modification de la répartition des charges par destination, et par un basculement de certains frais d’acquisition en frais d’administration en 2010 ». Ces frais comportent des dépenses de communication de 235 K€, plus 127 K€ pour le compte de la MUTASS qu’elle lui refacture. Les autres dépenses en 2010 sont en baisse de 24 % pour la MR et de 3 % pour la MUTASS. 60. Au total, après prise en compte de l’activité « Vie », le compte de résultat 2010 de la MR a fait ressortir un bénéfice de 2,4 M€ (contre 740 K€ l’année précédente), en progression sensible. b) La MUTASS (Mutualité de La Réunion – actions sanitaires et sociales) 61. La MUTASS est une autre Union de Mutuelles de La Réunion, spécifiquement dédiée à la promotion de la santé, aux activités optique et audioprothèse, et à la gestion d’une « université solidaire » (code de la Mutualité, Livre III). Les (trente-deux) mutuelles membres de la MUTASS sont les mêmes que celles composant la MR. Il convient de bien la distinguer des deux autres structures, « Mutualité de la Réunion » (MR) et MGSR, tout en constatant leur imbrication. 62. Certains locaux de la MR répartis sur l’île abritent diverses activités, à savoir des activités de vente au détail de produits d’optique (concernées par le présent dossier et opérées juridiquement par la MUTASS), ou encore des services bancaires, ainsi que des opérations assurées par la MR, soit pour son propre compte (assurance en général : automobile, habitation…), soit pour compte et sous enseigne de la MGSR (activités d’assurances- obsèques, assurance de complémentaire santé…). 63. Une confusion est possible du fait de l’organisation centralisée du paiement de certaines charges, payées par « l’Union de tête », savoir la MR, et répercutées ensuite au prorata de chaque activité, en l’occurrence l’activité optique en faveur de la MUTASS – ces charges couvrant loyers, intégralité des salaires15, frais de siège et notamment frais de publicité et de communication.

14 Contre 37,7 M€ en 2009, donc en progression de près de + 15 %. 15Les salariés travaillant à la MUTASS, dans les magasins d’optique, sont en réalité payés par la MR, qui refacture ensuite leurs salaires à la MUTASS.

11

Activité et rentabilité brute de la MUTASS (2009/2010) 64. L’activité et la rentabilité de la MUTASS, dont les comptes reflètent à hauteur d’au moins 95 % l’activité de ses huit magasins d’opticiens mutualistes, progressent comme ces derniers. Son RBE décline sur trois ans tout en restant positif (18,8 % des ventes, 4 % puis 2 %) pour se redresser en 2010 (6,6 %). 65. L’essentiel du chiffre d’affaires de la MUTASS provient donc de l’activité des opticiens mutualistes. Le dynamisme de l’activité ne se dément pas en 2010, avec des produits d’exploitation en hausse de plus de 20 %. Cette activité (de la MUTASS) ressort sous un code NAF (APE) «Assurances » et non pas « activité d’optique »16. Le tableau ci-dessous présente l’évolution du compte de résultat de la MUTASS sur 3 ans à partir de l’exploitation de ses liasses fiscales :

En K€ 2007 2008 2009 2010 Produits d’exploitation 4 005 5 713 6 519 7 882 Charges d’exploitation 3 270 5 521 6 386 7 358 Rentabilité brute17 18,8 % 4 % 2 % 6,6 % Résultat net 172 (4 %) 306 (5%) 346 (5 %) 585 (7,4 %) Structure financière et équilibre bilanciel de la MUTASS (2006/2010) 66. Le bilan de la MUTASS se caractérise par un crédit massif de la MR (2010 : 2,8 M€ sur un total de bilan de 5,3 M€) et présente les proportions suivantes : MUTASS COMPTE d’ACTIF (en K€) 2006 2007 2008 2009 2010 Actif net immobilisé 653 775 1 799 772 1 075 Stocks – matières premières 347 450 618 917 955 Stocks -produits intermédiaires 0 0 186 0 0 Stocks -Marchandises 98 139 0 176 271 Avances acomptes 1 6 302 7 20 Créances – Clients 444 216 446 802 977 Placements & disponibilités 881 1 315 870 2 045 1 965 Charges constatées d’avances 0 2 14 15 19 Total bilan 2 424 2 903 4 235 4 734 5 282 MUTASS COMPTE de PASSIF 2006 2007 2008 2009 2 010 Fonds propres 413 585 891 1 237 1 822 provisions risques & charges 0 465 433 155 21 dette bancaire & financière 0 0 0 0 0 avance & acomptes commandes en cours 9 55 52 24 6 dette fournisseurs** 172 314 1 045 692 522 dette fiscale & sociale 18 8 134 133 155 Autres dettes 1 811 1 475 1 678 2 492 2 755 Total bilan 2 423 2 902 4 233 4 733 5 282 ** dont Fournisseurs OPTIQUE (%) nc 275 989 501 ou en % du poste Fournisseur total 88% 95% 72%

16 Relativisant ainsi les statistiques du XERFI, fondées sur les seuls codes NAF « optique ». 17 Résultat d’exploitation divisé par les produits d’exploitation.

12

Le contrat d’enseigne « Opticiens Mutualistes » avec COOPTIMUT OPTIQUE (devenu depuis lors VISAUDIO) 67. Un contrat d’enseigne autorise les opticiens mutualistes de La Réunion (comprendre : les opticiens mutualistes de la MUTASS) à utiliser la marque nationale des « Opticiens Mutualistes ». Leur adhésion est subordonnée à leur adhésion à la FNMF ou leur qualité d’associés de COOPTIMUT SA. Elle entraîne l’interdiction d’arborer une enseigne autre que celle des « Opticiens Mutualistes ». Le réseau des « Opticiens Mutualistes » et la marque homonyme sont aujourd’hui le fait et la propriété de la société VISAUDIO18. c) La MGSR (mutuelle générale solidarité de La Réunion) 68. La MGSR (mutuelle substituée) dédiée à la complémentaire santé (mais également à la garantie obsèques) ne comporte aucun salarié et se trouve opérée par la Mutualité de La Réunion (MR, mutuelle substituante), avec un siège social à la même adresse. L’UDCCRF de La Réunion confirme que « la MGSR ne compte aucun salarié. Elle est gérée au quotidien par la Mutualité de La Réunion qui est son prestataire, et lui facture ses services ». 69. Au compte de bilan, le poste « liquidités » représente environ 70 % du total de l’actif (800 K€ en 2010), et les fonds propres 80 à 95 % du passif. 70. Au compte de résultat « Non vie », la MGSR a affiché en 2010 un résultat technique positif. Son activité a progressé de + 8,8 % en volumes, et de près de 15 % en chiffre d’affaires entre 2009 et 2010. 71. La MGSR pratique le tiers payant intégral (RO + RC) avec l’ensemble des professionnels de santé acceptant le paiement différé de leur prestation. La Mutualité précise que depuis 15 ans, aucun opticien du SOR n’a fait de nouvelle demande d’adhésion à la MGSR, et qu’elle a proposé aux adhérents du SOR, en septembre 2009, conseil pris auprès de l’UDCCRF de La Réunion, de devenir des opticiens agréés « MUTA », sur la base de critères objectifs, transparents et non discriminatoires, les opticiens du SOR ayant tous refusé. 72. De son côté, lors de son audition, le SOR a reproché à la MGSR son refus d’octroi du tiers payant (fin 2008) aux opticiens du SOR, ainsi que ses pratiques de remboursements différenciés. Le SOR admet avoir été approché par la Mutualité fin 2009 pour se voir proposer cet agrément MGSR (accord « MUTA » incluant le tiers payant de la part de la MGSR, des engagements divers de qualité de la part des opticiens indépendants, et surtout des engagements tarifaires « intenables » selon eux par rapport à leurs prix de revient, ce dernier point cristallisant l’essentiel du désaccord). d) Mutuelles adhérentes de la Mutualité (MR) et de la MUTASS 73. MGSR et MNT représentent 41 % des cotisations perçues par la Mutualité de La Réunion19, signe de leur importance en termes de nombre d’assurés. La MGSR est historiquement la première mutuelle adhérente de la MR à s’être lancée dans l’offre

18 VISAUDIO, société commerciale, faisait 15 M€ de chiffre d’affaires et 1,2 M€ de résultat net en 2008. VISAUDIO est l’entité ayant remplacé COOPTIMUT OPTIQUE (à l’origine partie prenante dans les contrats d’enseigne « Opticiens mutualistes » déjà évoqué). La FNMF a pris en 2008 une participation au capital de VISAUDIO. 19 Étant rappelé que parmi les membres prépondérants de la Mutualité de La Réunion, la MGEN et la SMAM ne participent pas à l’offre « TRIANGLE » via la MUTASS.

13

« TRIANGLE » en janvier 2008. Les autres mutuelles adhérant à l’offre « TRIANGLE » ont été mentionnées ci-dessus. e) Autres mutuelles ou OCAM n’étant pas membres de la Mutualité de La Réunion 74. Il existe d’autres organismes offreurs d’assurances complémentaires santé importants, non membres de la Mutualité de La Réunion, comme la CRP (Caisse Réunionnaise de Prévoyance), l’UMS (Union Mutualité Solidarité), Prudence Créole (Généralli), Groupama, AXA, la SMAM, et l’ADEP. 75. Les pratiques liées à l’offre « TRIANGLE » sur le secteur de l’optique intéressent par ricochet celui des OCAM, puisque cette offre peut être subordonnée à l’adhésion préalable à une mutuelle participante et être l’occasion d’inciter un client (cotisant à une mutuelle non participante à l’offre « TRIANGLE ») de changer de mutuelle pour pouvoir bénéficier de l’offre. 76. La MGSR seule détient (en terme de nombre de contrats) environ 23 % du marché (ou 25 % si l’on englobe les autres structures gérées en direct par la MR), la MGEN (membre de la Mutualité Française mais non participante à l’offre « TRIANGLE ») plus de 14 %, la CRP 14 %, et Prudence Créole plus de 5 %. D. LES PRATIQUES DÉNONCÉES 1. L’OFFRE « TRIANGLE » DES OPTICIENS MUTUALISTES DE LA RÉUNION 77. Le principe de l’offre « TRIANGLE » consiste à offrir les lunettes de vue avec zéro reste à charge aux adhérents des Mutuelles participant à l’opération. La saisine reproche aux opticiens mutualistes de pratiquer des prix anormalement bas, ou encore des reventes à perte, compte tenu des prix d’achat que le SOR connaît des divers fournisseurs de ses adhérents (centrales d’achats diverses), en concluant que ces opérations ne sont pas économiquement tenables. Cette offre « TRIANGLE » peut également porter sur des montures de marque. 78. Le SOR a fourni de nombreux éléments établissant que certains de ses adhérents ont perdu nombre de clients mutualistes en raison de cette offre « TRIANGLE ». 79. La MUTASS fait valoir que la démonstration du SOR ne porte que sur des verres et non sur des produits complets (c’est-à-dire montures + verres), et que les verres concernés par l’offre « TRIANGLE » sont exclusivement des verres progressifs, par définition les plus chers. Elle reprend les exemples du SOR figurant dans la saisine, facture par facture, en produisant recette et prix d’achat respectifs de chaque équipement, et indique bénéficier de prix d’achat tels que, globalement, les ventes sont effectuées à marge brute légèrement positive. Ces éléments sont compatibles avec les données de ses comptes sociaux rappelées ci-dessus. 80. La MUTASS explique en outre bénéficier, dans le cadre de l’enseigne « Opticiens Mutualistes », d’accords exclusifs avec son fournisseur principal de verres, ESSILOR, qui lui permet de s’approvisionner à des tarifs très avantageux, pour des verres identiques à ceux fournis à la concurrence dans une gamme dite « Partenaire » créée exclusivement pour les « Opticiens mutualistes » au niveau national. Elle conteste les affirmations des

14

membres du SOR selon lesquelles les mutualistes ne pourraient pas bénéficier de meilleures conditions d’approvisionnement qu’eux-mêmes. 81. La Mutualité évoque enfin les pratiques des membres du SOR, consistant le plus souvent à offrir au consommateur la seconde paire de lunette de vue « à 1 € », pratiques qu’elle considère équivalentes à la sienne. 2. LES AUTRES PRATIQUES DÉNONCÉES PAR LE SOR a) Les méthodes de publicité et de communication de la Mutualité 82. La plateforme téléphonique de la Mutualité est identique pour les activités voyages, assurance, décès, et optique lunetterie. 83. Le SOR considère cette situation comme contraire aux termes de la Convention précitée de 2003 passée entre les opticiens et la Sécurité Sociale (prohibant la publicité des produits faisant l’objet d’un remboursement). 84. La Mutualité soutient que les mutuelles sont en droit de communiquer sur leurs divers produits. La Mutualité précise que le « budget communication est stable sur les trois dernières années. C’est la MGSR qui communique sur son offre de garantie complémentaire santé, l’offre TRIANGLE. Le budget correspondant est compris dans le budget global (1 M€) ». Ces campagnes de publicité interviennent annuellement, avec une relative saisonnalité au dernier trimestre civil, qui coïncide avec l’époque la plus propice pour résilier une mutuelle. b) Les pratiques de remboursement différencié de la MGSR en matière d’optique 85. Le SOR reproche aux mutualistes, en réalité à la MGSR (opérée par la MR) de pratiquer des remboursements différenciés. La Mutualité a indiqué dans son audition que ces pratiques n’avaient plus cours, la question ayant été régularisée début 2010. Elle ne conteste pas qu’elles aient existé. Le SOR, à nouveau interrogé sur cet aspect de sa plainte, l’a maintenue intégralement. 86. La Mutualité a communiqué copie des nouvelles garanties santé de la MGSR pour justifier de ce qu’elle considère comme une régularisation de la situation : cette garantie prévoit, en matière de frais d’optique, un « zéro reste à charge » pour les verres et montures achetés chez les opticiens mutualistes ou chez les opticiens agréés « MUTA », ou encore 40 à 80 € de remboursement (selon les options choisies) pour des appareils achetés dans d’autres centres d’optique. 87. Un arrêt20 du 18 mars 2011 de la Cour de cassation a condamné ces remboursements différenciés au vu du code de la mutualité, qui interdit à une mutuelle de rembourser différemment ses adhérents en fonction du professionnel de santé consulté. Une tentative d’alignement par la voie législative21 sur le régime des compagnies d’assurances et

20 2e chambre Civile, du 18 mars 2011, qui décide au vu de l’article L. 112-1 du code de la mutualité, que l’application d’un protocole d’accord fixant des tarifs de remboursement distincts pour un même acte, et dont il résulte une différence dans le niveau des prestations, qui n’est fonction ni des cotisations payées ni de la situation de famille des adhérents, est contraire à la loi –les assureurs et les IP n’étant pas concernés par cette jurisprudence puisque pour leur part dépendants du code des assurances ou de celui de la Sécurité Sociale. 21 Article 22 du projet de loi dite « Fourcade », courant juin 2011 : adopté en 1re lecture par les députés, celui-ci vise à modifier le code de la mutualité pour autoriser les mutuelles à pratiquer les remboursements

15

instituts de prévoyance, a été censurée par le Conseil constitutionnel pour irrégularité de procédure22. c) Les ventes liées ou les prestations subordonnées 88. Ces pratiques seraient établies, selon un rapport de « client mystère » commandé en décembre 2010 par le SOR. Ce rapport précise que « dès que le client s’est dit intéressé par une offre pour l’achat d’une monture de vue et a présenté son ordonnance, le vendeur l’a invité à aller voir sa collègue dans le bureau d’en face, puis à revenir ensuite », le « bureau d’en face » étant celui du secteur d’adhésion à la Mutualité (MGSR). MR et MUTASS contestent toute pratique de vente liée ou de prestation subordonnée. 89. Outre le rapport précité figurant au dossier à l’initiative du SOR, il est constant que MGSR et MUTASS opèrent le plus souvent dans des locaux commerciaux mitoyens, que le numéro téléphonique d’appel de la MR pour l’ensemble des activités mutualistes (optique, santé, banque, obsèques …) est le même, l’ensemble de ces activités faisant l’objet d’une communication publicitaire sous le même « emblème » (marque « MUTA », logos « Mutualité » ou « opticiens mutualistes », diversement déclinés). d) L’accès rendu difficile au tiers payant (part complémentaire) 90. Les opticiens du SOR ont évoqué des difficultés rencontrées pour s’équiper en lecteurs de cartes « MUTA-SANTE », ou « carte Première Muta-Santé » (qui permet de gérer le tiers payant du régime obligatoire et complémentaire de la MGSR, ainsi que ceux des autres mutuelles adhérentes de la Mutualité). La Mutualité a, quant à elle, communiqué la liste intégrale des opticiens actuellement équipés gratuitement de lecteurs de carte : y figurent effectivement la quasi intégralité des membres du SOR. Celui-ci, interrogé à nouveau aux fins d’éclaircissements sur ce grief, l’a maintenu. 91. Le SOR a également mentionné le retrait du tiers payant optique par la MGPAT au magasin Optique de Bourbon en février 2008. La MGPAT a en effet conclu un nouveau partenariat avec la Mutualité de La Réunion – ce partenariat ne l’autorisant dorénavant à pratiquer le tiers payant qu’avec les centres optiques mutualistes. 92. La Mutualité a contesté le fait que l’octroi du tiers payant soit strictement subordonné à l’agrément du professionnel de santé. Elle fait observer qu’à sa connaissance elle n’a reçu (pour la MGSR) aucune demande récente en ce sens (depuis la demande d’AFFLELOU en 2007 déjà mentionnée au § 71, restée sans suite). e) La captation de la clientèle « rentable » par les opticiens mutualistes grâce à leur offre « TRIANGLE » 93. Une critique récurrente des membres du SOR est de reprocher aux opticiens mutualistes de les priver progressivement de leur clientèle la plus « rentable » : par ordre de rentabilité croissante, il existerait la clientèle bénéficiaire de la CMU avec « zéro reste à charge », la clientèle dite « CMU » avec un certain reste à charge (en baisse constante, semble-t-il), et la clientèle non CMU (le plus souvent titulaire d’une assurance complémentaire santé, et souvent d’une complémentaire de la fonction publique), la plus « intéressante ».

différenciés dans le cadre des réseaux (séance publique du 30 Juin 2011). 4 000 professionnels de santé, opticiens notamment, avaient signé (Juin 2011) une pétition protestant contre cette réforme. 22 Décision n° 2011-640 DC du 4 août 2011 du Conseil constitutionnel.

16

94. Il a été constaté (voir § 41 et § 52) que les taux de clientèle « CMU » (« non rentables ») sont assez disparates d’un opticien à l’autre, mais constants dans le temps. f) Les difficultés financières de certains membres du SOR 95. De nombreux membres du SOR ont fait état d’une diminution importante et régulière de leur clientèle, de leurs recettes et de leur rentabilité, en produisant des éléments chiffrés à l’appui de leurs affirmations et en imputant cette situation aux pratiques dénoncées. Les observations du SOR appuient ces constatations, en l’imputant à l’existence de l’offre TRIANGLE. 3. LES INDICES CONCERNANT LE SOR OU CERTAINS DE SES MEMBRES 96. Des indices, relatifs à des pratiques discriminatoires dans les conditions d’adhésion au SOR (a), à des pratiques de police des prix de la part du SOR sous couvert de contrôle de « clients-mystères (b)» et à des pratiques de boycott figurent au dossier (c). a) Les difficultés d’accès au SOR faites à 10strict Optique et à Centre Optique 97. Le SOR se serait opposé à l’adhésion de deux nouveaux entrants au motif qu’ils étaient « trop bon marché », privant ces derniers du recours au tiers payant (part obligatoire ou complémentaire) géré par MFP Services pour l’ensemble des mutuelles de la fonction publique (MGEN exceptée). Les déclarations de Centre Optique 98. Centre Optique est un nouvel opérateur sur le marché de la lunetterie de détail réunionnais depuis fin 2009. Il déclare que « au moment de l’ouverture du premier magasin en 2009, j’ai cru comprendre (information verbale) que faute d’adhérer au SOR (syndicat des opticiens de La Réunion) il me serait impossible d’obtenir l’agrément SLI/MFP ». Il n’a pas demandé son adhésion au SOR dans un premier temps, conscient que son concept commercial (« la seconde paire de lunette de marque à 1 € – ou moins 40 % sur une paire unique ») allait contrarier les membres « historiques » du SOR. C’est le SOR qui l’a démarché courant 2010 pour lui offrir d’adhérer, ce qu’il a finalement accepté. En revanche, Centre Optique n’a toujours pas demandé son affiliation à MFP Services, dont il juge les services trop complexes et trop longs, et préfère pour cette partie de la clientèle, patienter avec un chèque « de caution » du client, jusqu’à ce que ce dernier soit remboursé par sa mutuelle de la fonction publique. 99. Ces déclarations établissent par conséquent que le tiers payant à MFP-Services pour cet opticien n’a pas été subordonné à une adhésion préalable au SOR. Les déclarations de 10strict Optique 100. 10strict Optique est le second nouvel entrant sur le marché en 2009. Son dirigeant est un ancien salarié d’ODB (étant rappelé que le président du SOR est dirigeant d’ODB). Il ne souhaitait pas adhérer au SOR, malgré plusieurs invitations en ce sens par le SOR courant 2010. En revanche, il est positionné sur des offres milieu de gamme, avec une part significative de clients « CMU » ou mutualistes, et il a besoin de recourir au tiers payant de MFP Services.

17

101. Sa déclaration est la suivante : « je tiens à vous relater l’historique exact : j’ai donc ouvert en 2009 et souhaité bénéficier du tiers payant de MFP Services, que j’ai approché. Il m’a été répondu qu’il fallait au préalable m’inscrire au SOR (cette réponse a été verbale, je n’ai pas de document en attestant). J’ai donc contacté le SOR, qui m’a parlé de cette vieille convention de 1987, paraissant m’obliger à adhérer au SOR pour accéder à la SLI. Or il se trouve que je ne partage pas certains points de vue du SOR, et que je n’avais aucune envie d’y adhérer mais que je souhaitais quand même avoir accès au tiers payant de la MFP services. J’ai donc contacté la presse et fait des courriers à MFP Services. En fin de compte, en février ou mars 2010, la MFP Services m’a enfin appelé pour m’annoncer qu’en fait je pouvais bénéficier du tiers payant sans pour autant être obligé d’être adhérent du SOR » . 102. Dans la même déclaration il est précisé plus loin que « à la suite de cela (printemps 2010) j’ai eu un appel téléphonique de M. X…, de la Mutualité de la Réunion, qui pour une raison inexplicable avait l’air content d’avoir pu « m’aider à accéder à la MFP » – alors que j’ignorais qu’il avait un rôle dans cette affaire». 103. Ces déclarations établissent que pour 10strict Optique, l’adhésion préalable au SOR a été temporairement un pré requis à l’octroi du tiers payant de la MFP services. Les explications du SOR et de MFP (et MFP-Services) sur le tiers payant (RO) 104. De son côté, le SOR indique que « 10strict Optique a dit à un moment (y compris à la presse) qu’on l’avait empêché d’entrer au SOR, et par voie de conséquence de rentrer à MFP-Services, ce qui l’aurait privé de l’accès au tiers payant de la fonction publique. J’ignore si à ce jour 10strict Optique a pu avoir accès au tiers payant de MFP-Services. Cette convention de 1987 a fonctionné comme le support qui a justifié la conviction erronée qu’il fallait adhérer au SOR pour accéder à la MFP Services. En conclusion, rien n’empêche un opticien d’obtenir le tiers payant de MFP Services sans pour autant et nécessairement adhérer au SOR ». 105. La position de MFP Services a été recueillie auprès de la MFP (Paris) et de son directeur régional. La MFP indique que « la Convention de 1987 est toujours en vigueur. Elle concerne à la fois la part prise en charge par le régime obligatoire (R.O) et celle prise en charge par le régime complémentaire (R.C). A ma connaissance pour un opticien, il n’est pas nécessaire d’adhérer au SOR pour obtenir le tiers-payant. Aucune consigne en ce sens n’a été donnée ». Son directeur régional admet, quant à lui, que « en 2009 nous avions un mauvais fonctionnement : on demandait aux nouveaux opticiens de passer par le SOR. C’était une erreur, il aurait fallu reconnaître directement le professionnel. De mémoire c’était un cas unique. Donc dorénavant, la convention (de 1987) est appliquée à tout opticien demandeur, sans nécessairement passer par le SOR. L’opticien adresse un dossier de demande (pour identification, coordonnées CGSS correspondant à la convention de 2003, RIB …), et nous l’enregistrons dans nos bases. Dans la procédure antérieure, c’était le SOR qui nous adressait régulièrement les mises à jour de ses listes d’adhérents avec ce type d’informations ». b) La pratique des « clients-mystères » 106. Des déclarations publiques du SOR dans la presse quant à ses propres pratiques de « clients-mystère » figurent au dossier ainsi que les doléances des opticiens concernés (la « visite » représentant pour eux une perte de temps) et les suites éventuellement

18

contentieuses (nouvelle plainte du SOR auprès de l’UDCCRF de La Réunion en 2010 contre les pratiques tarifaires de « Centre Optique » jugées « abusivement basses »). 107. Le SOR ne conteste pas avoir ce type de pratiques, au nom de son devoir de contrôle des pratiques de ses adhérents par rapport à leur charte de déontologie. Ses propos sont les suivants : « nous avons un règlement (…), selon lequel un de nos adhérents peut nous signaler une pratique d’un autre opticien dont les pratiques prêtent à discussion. Pour sortir de la rumeur, le SOR tâche de vérifier l’information. Il le fait avec un « client- mystère » : cette personne est mandatée pour vérifier sur place ». 108. En avril 2010, 10Strict Optique s’était plaint de ce genre de contrôle dans les termes suivants : «  Un article est donc paru le 6 avril 2010. Monsieur Z…, président de la fédération Nationale des Opticiens de France, à laquelle est rattaché le SOR (syndicat des opticiens de la Réunion) nous a contactés et s’est montré outré par les pratiques du SOR. En effet, nous avons reçu le 25 février 2010 un courrier électronique de M. Y… nous menaçant de poursuite judiciaire. Il nous explique avoir envoyé un client mystère, alors que nous ne sommes pas adhérents du SOR. On nous reproche surtout les prix que nous pratiquons, inférieurs à ceux de la concurrence et la qualité de verres proposée aux clients, même pour la deuxième monture. Il se justifie en disant vérifier l’application d’une charte dite des «3O» (opticiens, orthoptistes, ophtalmologistes), dont nous n’avons aucune connaissance du contenu. À ce jour, M. Y… a fait du dénigrement sur le magasin mais aussi sur nos personnes, nous traitant de voyous devant d’autres opticiens ». 109. La charte de déontologie en question est un document élaboré par le SOR, ainsi que par un syndicat professionnel d’orthoptistes et d’ophtalmologistes. Le SOR s’est expliqué sur le respect de cette charte, ajoutant que « ce genre de contrôle nous paraît tout à fait légitime pour faire respecter les règles de notre profession ». 110. Cette charte énonce que seul un ophtalmologiste peut effectuer un examen complet de vision, que l’opticien peut être amené, sur demande, à effectuer un contrôle de vision dans le respect du code de la santé publique, ou à solliciter un complément d’examen visuel auprès de l’ophtalmologiste, auquel cas l’ophtalmologiste s’engage à recevoir le patient, qu’il convient généralement de prescrire des équipements adaptés et de qualité, que l’opticien s’engage à ne pas vendre de lentilles sans prescription médicale, et enfin que le patient est libre de choisir son ophtalmologiste, son orthoptiste et son opticien. Cette charte, dite des « trois O », rappelle donc une série de principes, ceux-là mêmes que le SOR entend voir respectés par sa profession au moyen de sa pratique

des « clients-mystères ». c) Les suspicions de boycott des fournisseurs des opticiens non membres du SOR 111. Les contrôles du SOR, effectués sous couvert du respect de la charte de déontologie précédemment évoquée, pourraient recouvrir en réalité une forme de police des prix, visant à faire respecter des niveaux minimum par les détaillants, à l’initiative de leurs fournisseurs de montures « de marque » pour faire boycotter éventuellement les opticiens pratiquant des prix « trop bas ».

19

II. DISCUSSION A. INCOMPÉTENCE DE L’AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE SUR LES PRATIQUES DE REVENTE À PERTE 112. Il est reproché aux opticiens mutualistes par la saisine du SOR des faits de revente à perte. Toutefois, il ne relève pas de la compétence de l’Autorité de la concurrence d’apprécier la licéité de faits au regard de l’article L. 442-2 du code de commerce23, réprimés par des sanctions pénales qui ne peuvent être infligées que par un tribunal correctionnel.La saisine est donc irrecevable sur ce point.

B. LES OBSERVATIONS DES PARTIES EN RÉPONSE À LA PROPOSITION DE NON LIEU 113. Le SOR reproche aux services de l’Autorité d’avoir privilégié une approche du marché en valeur, estimant que seuls les volumes (à savoir le nombre de dossiers traités avec prescription médicale, donc en nombre de factures) permettraient un calcul fidèle des parts de marché. Le SOR estime à ce jour le marché à 110 000 équipements par an (donc autant de factures) avec un chiffre d’affaires supérieur à 50 M€. Il évaluait pour 2009 la part de marché des opticiens mutualistes à 22 %, qu’il actualise dans ses observations à 27 % pour 2010 puis 30 % pour 2011. Le SOR estime que la part de marché des opticiens mutualistes, en volume et non pas en valeur, devrait en outre tenir compte des deux marchés en cause, qui devraient être « corrélés ». 114. Le SOR s’étonne des « évaluations » des dépenses de publicité d’ATOL et de Chevillard. Il estime les conclusions du rapporteur contradictoires, en ce qu’elles considèrent MR, MUTASS et MGSR comme des entités distinctes, puis comme une entité économique unique, auquel cas le rapporteur aurait dû « corréler le marché de l’optique médicale avec celui de la complémentaire santé ». 115. Le SOR revient sur les pratiques supposées de ventes liées, de rupture brutale de relations commerciales, de remboursements différenciés, de publicité mensongère ou trompeuse et autres pratiques commerciales agressives ou de reventes à perte, tout en contestant que la notion de revente en l’état soit applicable. Il maintient que l’ensemble des opticiens indépendants, s’ils devaient s’aligner sur les pratiques tarifaires des mutualistes, devraient consentir des rabais de 70 %, ce qui leur est impraticable. C. L’ANALYSE DU MARCHÉ PERTINENT ET DE L’ÉVENTUELLE POSITION DOMINANTE DES PARTIES MISES EN CAUSE 116. La pratique décisionnelle de l’Autorité rappelle qu’il n’est pas exclu24 de considérer que les marchés de détail de la téléphonie mobile à La Réunion et à Mayotte puissent constituer deux marchés distincts eu égard à certains éléments d’hétérogénéité. Ainsi, les territoires

23 Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes Nº 1 – Vendredi 26 janvier 2007, page 302 – Décision nº 06-D-10 du 12 mai 2006. Décision précitée nº 04-D-67 du Conseil de la Concurrence. 24 Rapport annuel 2011 ADLC, page 121.

20

de La Réunion et de Mayotte constituent deux marchés géographiques distincts25 . Dans la même décision, l’Autorité a relevé que la définition d’un marché géographique propre aux départements d’outre-mer pour les services de communication fixe est pertinente. 117. Cette définition du marché géographique propre aux départements d’outre-mer (DOM) a également été retenue pour le secteur de la télévision payante26. De la même façon, s’agissant des marchés amont de l’approvisionnement des grandes surfaces alimentaires27, le caractère très spécifique des circuits d’approvisionnement des DOM et ses effets sur l’équilibre concurrentiel des marchés concernés a été rappelé.28Une partie importante de l’approvisionnement des enseignes de distribution de détail à dominante alimentaire provient en effet de producteurs et de grossistes locaux, afin notamment de satisfaire aux goûts et habitudes alimentaires de la région, mais aussi de limiter les coûts d’importation dont celui du fret maritime et de l’octroi de mer. 118. À l’occasion d’opérations intervenant dans les DOM, la pratique décisionnelle nationale a donc envisagé que les marchés géographiques pertinents en matière d’approvisionnement puissent être limités à chaque DOM d’une part, et à la zone Antilles-Guyane d’autre part. 119. Dans le présent dossier, le marché géographique pertinent est donc celui de La Réunion. 120. Le SOR procède à l’amalgame de deux marchés distincts (celui de l’optique et celui de l’assurance complémentaire santé) pour aboutir, à partir d’une comparaison des parts de marché en valeur et en volume des mutuelles adhérant à l’offre TRIANGLE, sur le marché des OCAM, à une conclusion concernant le marché de l’optique. En réalité, si la part de marché en volumes des mutualistes (MUTASS), sur le marché de l’optique, est supérieure à celle en valeur, c’est le signe qu’ils vendent des lunettes moins chères que leurs concurrents ; si leur part en volume sur le marché de la complémentaire santé est inférieure à leur part en valeur, c’est que globalement la Mutualité de La Réunion (MGSR) vend une complémentaire santé plus chère que ses concurrents. 121. S’agissant des parts de marché, le SOR estime que les mutualistes ont atteint un seuil « critique » de 30 % en volume sur le marché de l’optique, en se fondant sur ses propres chiffres pour 2011/2012, l’Autorité ayant pour sa part examiné les années 2007 à 2010, et l’offre TRIANGLE étant apparue début 2008. 122. Quand bien même une approche en volumes du marché apparaitrait utile dans le cas d’espèce, seules les sources comptables constituent des éléments objectifs et fiables pour la détermination des parts de marché, qui ne peuvent donc que faire l’objet d’une approche en valeur. 123. Le marché pertinent est celui du marché de détail de l’optique à La Réunion, les chiffres examinés ayant porté sur les années 2007 à 2010. L’examen de trois à quatre exercices comptables paraît suffisant pour juger de l’impact éventuel d’une pratique apparue début 2008. 124. La part de marché des opticiens mutualistes est évaluée à 15 % en valeur et environ 22 % en volume (marché de l’optique) pour 2009/2010, et celles des mutuelles participant à l’offre TRIANGLE (marché de l’assurance complémentaire santé) à au moins 20 % en

25 Décision n° 11-D-05. 26 Décision n° 11-D-12. 27 Avis n° 09-A-45 relatif aux mécanismes d’importation et de distribution des produits de grande consommation dans les DOM. 28 Décision n° 11-DCC-134

21

volumes (nombre de contrats) et environ 30 % en valeur, avec une incertitude sur ce dernier ratio. 125. Compte tenu de l’interdépendance de ce marché avec celui de l’assurance complémentaire santé, et de la jurisprudence admettant qu’une pratique mise en œuvre par une entreprise en position dominante sur un marché ayant des effets sur un marché connexe non dominé puisse entrer dans le champ d’application de l’article L. 420-2 du code de commerce, il convient d’examiner le marché de l’assurance complémentaire santé et de vérifier l’existence éventuelle d’une position dominante des mutualistes, ou des mutuelles participant à l’offre TRIANGLE, sur ce marché connexe. 126. S’il est observé une progression remarquable de la MGSR sur le marché de l’assurance complémentaire santé en nombre de contrats sur trois ans, une éventuelle position dominante n’apparaît pas établie. Sur le marché retenu pertinent de l’optique de détail, les opticiens mutualistes (MUTASS) ne sont pas, avec 15 % de parts de marché en valeur, (et environ 22 % en volumes) en position dominante. 127. Dans le présent dossier, il n’existe donc aucun indice matériel qui permette d’établir un quelconque pouvoir de marché des mutualistes. De surcroît, les barrières à l’entrée sur le marché de l’optique paraissent faibles. 128. Dans ces conditions, il ne peut pas être avancé que les opticiens mutualistes soient en position dominante sur le marché de détail de l’optique à La Réunion. D. SUR LA QUALIFICATION JURIDIQUE DES PRATIQUES 1. SUR LA PRATIQUE TARIFAIRE PRINCIPALE (OFFRE « TRIANGLE ») 129. Cette pratique peut être appréhendée sous diverses qualifications : a) entente, b) abus de position dominante ou c) pratique de prix abusivement bas. a) Sur le fondement de l’article L. 420-1 du code de commerce (entente) 130. Il convient de rappeler qu’une entente suppose un concours de volonté entre plusieurs entités économiques indépendantes. 131. Il ressort du présent dossier que les entreprises visées par la saisine, à savoir la Mutualité de La Réunion (MR) et sa Mutuelle adhérente, la MGSR, ainsi que les divers opticiens mutualistes opérés par la MUTASS, constituent en réalité un opérateur économique unique : d’une part, les magasins mutualistes n’ont aucune personnalité juridique, et la saisine qui les met en cause vise en réalité la MUTASS, union de mutuelles dont l’essentiel de l’activité économique est en fait une activité de lunetterie de détail. D’autre part, la MGSR, même disposant de la personnalité juridique, n’a aucun salarié, est installée au même siège social et a les mêmes dirigeants que la MR. Son activité de complémentaire santé est intégralement déléguée à celle-ci. Son résultat technique bénéficiaire est également géré par la MR. 132. Ces entités paraissent indissociables économiquement et, par conséquent, il ne saurait exister d’entente ou de concertation entre elles. 133. Par ailleurs, si la MR et la MUTASS ont bien une personnalité et un objet social juridiquement distincts, force est de souligner leur similitude de dirigeants, leur similitude

22

de mutuelles membres, leur identité de siège social, et leur étroite imbrication financière : plus de la moitié du passif de la MUTASS correspond à un prêt à long terme de la MR, la MR octroie à la MUTASS des facilités de trésorerie avec la refacturation des loyers des magasins, celle des frais de communication et de publicité et des charges salariales, l’ensemble du personnel de la MUTASS étant en réalité juridiquement employé par la MR. 134. Une telle imbrication des structures, de l’organisation, des locaux, des personnels et des comptes ne permet pas de considérer la MUTASS comme réellement indépendante de la MR, ni la MGSR de la MR. Une entente au sens de l’article L. 420-1 du code de commerce ne saurait se concevoir sans établir l’autonomie économique des divers protagonistes, qui n’est pas démontrée dans le cas d’espèce. 135. La seule entente concevable pourrait concerner l’entité MR/MGSR/MUTASS d’une part, et les autres mutuelles participant à l’offre TRIANGLE, d’autre part, c’est-à-dire Interiale Mutuelle, MGP, MGAS, MNT et Muta Cite. 136. L’objet de l’offre TRIANGLE consiste en une baisse du prix des lunettes pour le consommateur final, donc en faveur de ce dernier. Cette offre émanant d’un groupement de mutuelles de complémentaire santé, avec son principe de fonctionnement (le renvoi de l’assuré à des magasins mutualistes vendeurs de lunettes), est une organisation en tous points comparable, dans une version « intégrée », à celle d’un réseau de soins, de type Santeclair ou MGEN, qui comporte également un OCAM (ou un regroupement d’OCAM) d’un côté, avec le renvoi de l’assuré à des magasins d’optique agréés de l’autre. Dans sa pratique décisionnelle, l’Autorité a indiqué29 que « (tant) la constitution de réseaux de soins (…) doi(ven)t a priori être favorablement accueillies au regard de la politique de concurrence et des intérêts des consommateurs. » 137. En conclusion, l’offre TRIANGLE ne peut être qualifiée d’entente au regard de l’article L. 420-1 du code de commerce. b) Sur le fondement de l’article L. 420-2 du code de commerce (abus de position dominante) 138. La qualification d’un éventuel abus suppose la démonstration préalable de l’existence d’une position dominante. Cette condition préalable faisant défaut, tant sur le marché de l’assurance complémentaire santé que sur celui de l’optique de détail, il n’y a pas lieu d’examiner si les pratiques observées sur le marché de l’optique de détail sont ou non abusives. c) Sur le fondement de prix abusivement bas (article L. 420-5 du code de commerce) 139. L’article L. 420-5 du code de commerce dispose que « sont prohibées les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation , dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’éliminer d’un marché ou d’empêcher d’accéder à un marché une entreprise ou l’un de ses produits ». 140. L’activité en cause représente plus de 95 % du chiffre d’affaires de la MUTASS, ce qui rend à tout le moins assez improbable une pratique de revente en dessous des coûts des

29 Avis n° 09-A-46 du 9 septembre 2009, relatif aux effets sur la concurrence du développement de réseaux de soins agréés, cotes 1456 à 1480 (saisine n° 10/0090 M).

23

produits d’optique. Il a été relevé les principaux indicateurs financiers et leur progression dans le temps des seuls magasins d’optique de la MUTASS. 141. Par ailleurs, la Mutualité fait valoir que les 5 % d’activité de la MUTASS en question correspondent à des activités sociales par définition déficitaires. 142. Le Conseil de la concurrence a indiqué30 qu’« il ne suffit pas de constater que les entreprises d’assurance directe proposent des tarifs sensiblement inférieurs aux prix habituellement pratiqués par les assureurs traditionnels sur le marché de l’assurance automobile pour établir l’existence d’un prix abusivement bas au sens de l’article L. 420-5 du code de commerce, cette différence pouvant s’expliquer par des disparités de coût, de profitabilité ou une plus forte sélection des risques (…) » et donc que « les pertes comptables enregistrées par les entreprises en cause ne suffisent pas à démontrer que leurs prix sont inférieurs aux coûts totaux ». Il en est a fortiori ainsi dans le présent dossier, où l’existence de pertes n’est pas établie. 143. L’existence d’une pratique de prix inférieurs aux coûts « de production, de transformation et de commercialisation » n’est pas établie. La pratique tarifaire de l’offre « TRIANGLE ». ne peut donc être qualifiée au sens de l’article L. 420-5 du code de commerce. 2. LES AUTRES FAITS REPROCHÉS AUX OPTICIENS MUTUALISTES PAR LE SOR 144. Les autres faits reprochés par le SOR pourraient, ensemble ou séparément, être appréhendés sous l’angle du droit de la concurrence pour autant qu’une position dominante ait été établie, sur l’un ou l’autre marché, ce qui n’est pas le cas (voir ci-dessus § 82 à § 95 ). 3. LES AUTRES PRATIQUES JOINTES AU DOSSIER a) Les pratiques de la MFP et du SOR en matière d’octroi du tiers payant 145. La convention de 1987 régissant localement les rapports entre les opticiens indépendants et MFP Services est toujours en vigueur, dans l’attente de l’adoption éventuelle du nouveau conventionnement « optique » proposé par la MFP. 146. Ce texte a été interprété et appliqué pendant des décennies comme impliquant, pour tout nouvel opérateur de l’optique de détail à La Réunion, de s’inscrire au préalable au SOR, pour bénéficier de l’octroi du tiers payant des mutuelles de la fonction publique (part obligatoire – sauf MGEN). Dans les faits, la SLI se déchargeait de la sorte de diverses obligations administratives sur le SOR (vérifications de l’obtention du diplôme de l’opticien, de son agrément auprès de la sécurité sociale…). 147. Les intéressés ont admis que cette convention avait pu fonctionner en autorisant cette croyance erronée et la MFP a reconnu avoir commis une erreur en 2009 avec 10strict Optique, avec lequel l’incident a été, depuis, régularisé. Ainsi, à ce jour, 10strict Optique dispose-t-il d’un accès au tiers payant de MFP services, sans pour autant avoir adhéré au SOR.

30 Décision n° 02-D-66, du 6 novembre 2002 relative à des pratiques mises en œuvre par les sociétés d’assurance directe.

24

148. Inversement, le cas de Centre Optique (second nouvel opérateur en 2009) est le contre- exemple qu’une adhésion au SOR peut ne pas être motivée par la seule volonté de bénéficier du tiers payant de la MFPS (puisque Centre Optique a fait le choix délibéré de ne pas le demander). Le cas de 10strict Optique apparaît donc comme un cas isolé, qui a été depuis régularisé, MFP Services admettant une erreur, et le SOR n’ayant jamais formellement opposé de refus d’adhésion à ces deux opérateurs. Au surplus, le dossier n’établit pas de refus positif du SOR à une quelconque demande d’adhésion de quiconque. b) La pratique des « clients-mystères » assurée par le SOR 149. La matérialité des contrôles en vue de l’application de la charte de déontologie n’est pas contestée, mais eu égard au contenu de cette charte qui rappelle pour l’essentiel les conditions de délivrance légales et réglementaires des produits d’optique médicale, ces éléments demeurent insuffisants en l’état pour caractériser une pratique prohibée par l’article L. 420-1 du code de commerce. c) Les pratiques alléguées de police de prix et de boycott des fournisseurs des opticiens non membres du SOR 150. Les indices relatifs à ces suspicions n’ayant pas été traités dans la proposition de non lieu, ils doivent faire l’objet d’un renvoi à l’instruction.

25

DÉCISION Article 1er : La saisine est déclarée irrecevable en tant qu’elle porte sur la dénonciation de pratiques de revente à perte ne relevant pas de la compétence de l’Autorité de la concurrence. Article 2 : La partie de la saisine concernant les pratiques alléguées de police des prix et de boycott est renvoyée à l’instruction. Article 3 : Pour le surplus des pratiques dénoncées, il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure.

Délibéré sur le rapport oral de Mme Monique Rouzaud, rapporteure et l’intervention de Mme Carole Champalaune, rapporteure générale adjointe, par M. Patrick Spilliaert, vice-président, président de séance, Mmes Reine-Claude Mader-Saussaye et Pierrette Pinot ainsi que MM. Emmanuel Combe et Thierry Tuot, membres.

La secrétaire de séance, Le vice-président, Caroline Orsel-Sébès Patrick Spilliaert

 Autorité de la concurrence

26

Document Outline

  • Décision n° 12-D-20 du 12 octobre 2012relative à des pratiques relevées dans le secteur de l’optique-lunetterie de détail à La Réunion
    • I. CONSTATATIONS
      • A. LA SAISINE
        • 1. Saisine initiale du SOR
        • 2. Jonction avec une saisine d’office
        • B. LE SECTEUR DE L’OPTIQUE À LA RÉUNION
          • 1. Secteur de l’optique médicale (généralités et particularités à la Réunion)
          • 2. Les secteurs connexes
            • a) Le secteur des organismes complémentaires d’assurance maladie (ci-après OCAM) à La Réunion
              • Les parts de marché des OCAM de La Réunion
            • b) Le secteur de l’accès au professionnel de santé (l’opticien)
              • L’accès aux réseaux de soins (généralités)
              • Le secteur de l’accès au réseau d’optique (au niveau national)
              • L’accès aux réseaux d’optique à La Réunion
              • Les réseaux existants à La Réunion
        • C. LES ENTREPRISES CONCERNÉES
          • 1. Les opérateurs sur le marché réunionnais de l’optique
            • a) Les opticiens membres du syndicat (SOR), partie saisissante
              • Le taux d’équipement de la clientèle bénéficiaire de la CMU chez les opticiens indépendants
            • b) Les opticiens mutualistes visés par la saisine
              • Évolution de l’activité et de la rentabilité brute des opticiens mutualistes
              • Évolution de l’effectif des opticiens mutualistes (19 en 2007, 38 en 2010)
              • Taux d’équipement « CMU » des Opticiens Mutualistes (4 %)
            • c) Les opticiens indépendants, nouveaux entrants
          • 2. Les opérateurs sur le marché réunionnais de la complémentaire santé
            • a) La Mutualité de La Réunion (MR)
            • b) La MUTASS (Mutualité de La Réunion – actions sanitaires et sociales)
              • Activité et rentabilité brute de la MUTASS (2009/2010)
              • Structure financière et équilibre bilanciel de la MUTASS (2006/2010)
              • Le contrat d’enseigne « Opticiens Mutualistes » avec COOPTIMUT OPTIQUE (devenu depuis lors VISAUDIO)
            • c) La MGSR (mutuelle générale solidarité de La Réunion)
            • d) Mutuelles adhérentes de la Mutualité (MR) et de la MUTASS
            • e) Autres mutuelles ou OCAM n’étant pas membres de la Mutualité de La Réunion
        • D. LES PRATIQUES DÉNONCÉES
          • 1. L’offre « triangle » des opticiens mutualistes de la réunion
          • 2. Les autres pratiques dénoncées par le SOR
            • a) Les méthodes de publicité et de communication de la Mutualité
            • b) Les pratiques de remboursement différencié de la MGSR en matière d’optique
            • c) Les ventes liées ou les prestations subordonnées
            • d) L’accès rendu difficile au tiers payant (part complémentaire)
            • e) La captation de la clientèle « rentable » par les opticiens mutualistes grâce à leur offre « TRIANGLE »
            • f) Les difficultés financières de certains membres du SOR
          • 3. Les indices concernant le SOR ou certains de ses membres
            • a) Les difficultés d’accès au SOR faites à 10strict Optique et à Centre Optique
              • Les déclarations de Centre Optique
              • Les déclarations de 10strict Optique
              • Les explications du SOR et de MFP (et MFP-Services) sur le tiers payant (RO)
            • b) La pratique des « clients-mystères »
            • c) Les suspicions de boycott des fournisseurs des opticiens non membres du SOR
      • II. DISCUSSION
        • A. INCOMPÉTENCE DE L’AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE SUR LES PRATIQUES DE REVENTE À PERTE
        • B. LES OBSERVATIONS DES PARTIES EN RÉPONSE À LA PROPOSITION DE NON LIEU
        • C. L’ANALYSE DU MARCHÉ PERTINENT ET DE L’ÉVENTUELLE POSITION DOMINANTE DES PARTIES MISES EN CAUSE
        • D. SUR LA QUALIFICATION JURIDIQUE DES PRATIQUES
          • 1. Sur la pratique tarifaire principale (offre « TRIANGLE »)
            • a) Sur le fondement de l’article L. 420-1 du code de commerce (entente)
            • b) Sur le fondement de l’article L. 420-2 du code de commerce (abus de position dominante)
            • c) Sur le fondement de prix abusivement bas (article L. 420-5 du code de commerce)
          • 2. Les autres faits reprochés aux opticiens mutualistes par le SOR
          • 3. Les autres pratiques jointes au dossier
            • a) Les pratiques de la MFP et du SOR en matière d’octroi du tiers payant
            • b) La pratique des « clients-mystères » assurée par le SOR
            • c) Les pratiques alléguées de police de prix et de boycott des fournisseurs des opticiens non membres du SOR
    • DÉCISION

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
ADLC, Décision 12-D-20 du 12 octobre 2012 relative à des pratiques relevées dans le secteur de l’optique-lunetterie de détail à La Réunion