Décision de la Commission des sanctions du 3 août 2021 à l'égard des sociétés Fidoma, Banque Sainte Olive et de M. Didier Domange

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Sur la décision

Référence :
AMF, 3 août 2021, n° SAN-2021-15
Numéro : SAN-2021-15
Identifiant AMF : SAN-2021-15

Texte intégral

La Commission des sanctions

COMMISSION DES SANCTIONS

Décision n° 14 du 3 août 2021

Procédure n° 20-04 Décision n° 14

Personnes mises en cause :

− SAS Fidoma Numéro de RCS 451 271 795 (Lyon) Dont le siège social est situé 84 rue Duguesclin – 69006 Lyon Prise en la personne de son représentant légal Ayant élu domicile au cabinet de son conseil, Me Charlotte Plantin, Solferino Associés, 22 place du Général Catroux – 75017 Paris

− M. Didier Domange Né le […] à […] Demeurant […] Ayant élu domicile au cabinet de son conseil, Me Sébastien Prat, Bredin Prat, 53 quai d’Orsay – 75007 Paris

− Banque Saint Olive Numéro de RCS 342 324 993 (Lyon) Dont le siège social est situé 84 rue Duguesclin – 69006 Lyon Prise en la personne de son représentant légal Ayant élu domicile au cabinet de son conseil, Me Jean Reinhart, Reinhart Marvil e Torre, 58 avenue Kléber
- 75116 Paris

La 1ère section de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après, l’« AMF ») :

Vu le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché, notamment ses articles 7, 8, 14 et 16 ;

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 621-14, L. 621-15 et R. 621-38 et suivants.

www.amf-france.org 17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 2 juillet 2021 :

— Mme Edwige Belliard, en son rapport ;

- Mme Virginie Adam, représentant le collège de l’AMF ;

- SAS Fidoma, représentée par M. Richard Domange, son représentant légal et assistée de son conseil, Me Charlotte Plantin, avocat du cabinet Solferino Associés ;

- M. Didier Domange, assisté de son conseil, Me Sébastien Prat, avocat du cabinet Bredin Prat ;

- Banque Saint Olive, représentée par M. Louis Saint Olive, en vertu d’un pouvoir de représentation de M. Henri Saint Olive, son représentant légal, assistée de son conseil, Me Jean Reinhart, avocat du cabinet Reinhart Marvil e Torre.

Les mis en cause ayant eu la parole en dernier. FAITS Le rapprochement de Zodiac et Safran

La société Zodiac Aerospace (ci-après, « Zodiac »), était spécialisée dans les équipements et systèmes aéronautiques, à destination des avions commerciaux, régionaux, d’affaires, ainsi que des hélicoptères et du spatial.

M. […] présidait son directoire jusqu’en juin 2017 et M. Didier Domange son conseil de surveil ance jusqu’en 2018.

Au cours des exercices 2013/2014, 2014/2015, puis 2015/2016, Zodiac a respectivement réalisé un chiffre d’affaires d’environ 4,2, 4,9 puis 5,2 milliards d’euros. Au 31 août 2017, ce chiffre était de 5,1 milliards d’euros.

La société anonyme Safran (ci-après, « Safran »), dont les titres sont admis aux négociations sur le compartiment A d’Euronext Paris, est une société spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation d’équipements et de systèmes de hautes technologies mécaniques et électroniques dans les domaines de l’aéronautique et de la défense.

Safran a réalisé un chif re d’affaires de 15,7 mil iards d’euros au 31 août 2016 et de 16,5 milliards d’euros au 31 août 2017. À cette même date, sa capitalisation boursière s’élevait à 35,8 mil iards d’euros.

Le 19 janvier 2017 avant bourse, Zodiac et Safran ont, par communiqué de presse commun, annoncé au public « être entrés en négociations exclusives pour l’acquisition de Zodiac Aerospace par Safran dans le cadre d’une OPA amicale de Safran sur Zodiac Aerospace, à 29,47 € par action Zodiac Aerospace, suivie d’une fusion sur la base de 0,485 action Safran pour 1 action Zodiac Aerospace ».

Le cours du titre Zodiac a progressé à l’ouverture de 20,9 %, passant de 23,4 euros à 28,3 euros, alors que celui de Safran a baissé de 1,17 %.

Zodiac a été retiré de la cote en mars 2018. Sa capitalisation boursière s’élevait alors à 7,1 mil iards d’euros.

Les opérations réalisées par Fidoma en novembre et décembre 2016 sur le titre Zodiac

À l’époque des faits, outre la présidence du conseil de surveil ance de Zodiac, M. Didier Domange était également président du conseil de surveil ance de la SAS Fidoma (ci-après, « Fidoma »), dont le président du directoire était M. Richard Domange, fils de M. Didier Domange. Cette société a pour objet de gérer une partie du patrimoine de la famil e Domange, par la prise de participations dans une ou plusieurs sociétés du groupe Zodiac. Le capital de Fidoma est détenu par les membres de la famil e Domange : M. Didier Domange et son épouse, leurs enfants, Richard Domange et ses deux sœurs, ainsi que leurs huit petits-enfants.

Au 31 décembre 2016, Fidoma détenait 8 % du capital de Zodiac.

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L’activité de réception-transmission d’ordre pour le compte de Fidoma était assurée par la banque Saint Olive. M. Henri Saint Olive est le président directeur général de cet établissement bancaire français spécialisé dans la gestion de fortune. Son fils, M. Louis Saint Olive, était également employé au sein de cette banque.

Le 23 novembre 2016, deux instructions ont été signées par M. Richard Domange, en sa qualité de président du directoire de Fidoma, à l’attention de la banque Saint Olive.

La banque Saint Olive devait, conformément au premier ordre, réinvestir en actions Zodiac les dividendes de Zodiac à percevoir par Fidoma, dès leur détachement, en conservant environ 2 mil ions d’euros en liquidité sur le compte de Fidoma.

La banque Saint Olive avait pour instructions, selon le second ordre, daté du même jour, de vendre les 36 000 parts d’un OPCVM monétaire, achetées le 26 juil et 2016, pour un montant d’environ 3,9 mil ions d’euros, et de réinvestir les sommes correspondantes en actions Zodiac, en conservant environ 100 000 euros en liquidité sur le compte de Fidoma.

Conformément à ce second ordre, la vente des parts de cet OPCVM monétaire a été réalisée le 24 novembre 2016, pour un montant de 3,9 mil ions d’euros. 195 000 titres Zodiac ont ensuite été acquis entre le 24 novembre et le 5 décembre 2016, pour un montant de plus de 4 mil ions d’euros. PROCÉDURE Le 21 avril 2017, le secrétaire général de l’AMF a décidé l’ouverture d’une enquête sur l’information financière et le marché des titres Zodiac Aérospace et Safran et des instruments dérivés liés, à compter du 1er janvier 2015. Le 28 mai 2019, la direction des enquêtes et des contrôles de l’AMF a adressé à Fidoma, M. Didier Domange et la banque Saint Olive, des lettres les informant de manière circonstanciée des faits susceptibles de leur être reprochés au regard des constats des enquêteurs et de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations dans le délai d’un mois. Des observations en réponse ont été présentées par la banque Saint Olive le 25 juin 2019, puis par Fidoma et M. Domange le 27 juin 2019. L’enquête a donné lieu à un rapport daté du 9 décembre 2019. Le 20 décembre 2019, la commission spécialisée n°1 du collège de l’AMF a décidé de notifier des griefs à Fidoma, M. Didier Domange et la banque Saint Olive. Les notifications de griefs leur ont été adressées par lettres du 16 avril 2020. Celles-ci retiennent qu’à partir du 17 novembre 2016 au plus tard, l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran a présenté les caractéristiques d’une information privilégiée au sens de l’article 7 du règlement (UE) n°596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (ci-après, le « règlement MAR »). Il est reproché à :

- M. Didier Domange, d’avoir manqué à son obligation d’abstention d’utilisation de l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran, en acquérant, à son initiative, en tant que président du conseil de surveil ance, 195 000 titres Zodiac Aerospace pour le compte de la société Fidoma entre le 24 novembre et 5 décembre 2016. M. Didier Domange aurait ainsi manqué aux dispositions des articles 8 et 14 du règlement MAR ;

— Fidoma, d’avoir manqué à son obligation d’abstention d’utilisation de l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran, en acquérant, à l’initiative du président de son conseil de surveillance, M. Didier Domange, 195 000 titres Zodiac Aerospace entre le 24 novembre et 5 décembre 2016. Fidoma aurait ainsi manqué aux dispositions des articles 8 et 14 du règlement MAR ;

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- la banque Saint Olive, d’avoir omis de déclarer auprès de l’AMF certaines opérations de la société Fidoma intervenues en novembre 2016, dont el e avait pourtant des raisons de suspecter qu’elles pourraient constituer des abus de marché au sens de l’article 16 du règlement MAR, et d’avoir ainsi manqué aux dispositions de cet article. Le 16 avril 2020, une copie des notifications de griefs a été transmise à la présidente de la commission des sanctions, conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier. Par décision du 2 juin 2020, la présidente de la commission des sanctions a désigné Mme Edwige Belliard en qualité de rapporteur. Par lettres du 9 juin 2020, les mis en cause ont été informés qu’ils disposaient d’un délai d’un mois, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code. Des observations en réponse à la notification de griefs ont été déposées le 24 août 2020 par M. Didier Domange, le 27 août 2020 par Fidoma et le 28 août 2020 par la banque Saint Olive. Le rapporteur a entendu Fidoma le 23 mars 2021 et M. Didier Domange le 25 mars 2021.

Dans le prolongement de ces auditions, le rapporteur a reçu des documents complémentaires de Fidoma et de M. Didier Domange respectivement les 29 et 30 mars 2021.

Le conseil de la banque Saint Olive a, dans un courriel du 24 mars 2021, sollicité que l’audition du représentant légal de cette dernière, M. Henri Saint Olive, fixée au 26 mars 2021, se déroule par visioconférence ou soit reportée du fait d’une interdiction médicale de déplacement dont il faisait l’objet. A la suite de cette demande, l’audition de la banque Saint Olive a été remplacée par l’envoi d’un questionnaire qui lui a été adressé par courrier du 26 mars 2021. La banque Saint Olive a adressé ses réponses au questionnaire par courriel du 2 avril 2021. Le rapporteur a déposé son rapport le 21 mai 2021. Par lettres du 21 mai 2021, auxquelles était joint le rapport du rapporteur, les mis en cause ont été convoqués à la séance de la commission des sanctions du 2 juil et 2021 et informés qu’ils disposaient d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse au rapport du rapporteur, conformément au II de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier. Par lettres du 4 juin 2021, les mis en cause ont été informés de la composition de la formation de la commission des sanctions appelée à délibérer lors de la séance du 2 juil et 2021 ainsi que du délai de quinze jours dont ils disposaient, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code. Des observations en réponse au rapport du rapporteur ont été déposées le 3 juin 2021 par M. Didier Domange et le 4 juin 2021 par la banque Saint Olive et par Fidoma. MOTIFS DE LA DÉCISION I. Sur le caractère privilégié de l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran 1. Sur le texte applicable 1. Les faits reprochés, qui se sont déroulés aux mois de novembre et décembre 2016, seront examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuel es dispositions moins sévères entrées en vigueur postérieurement. 2. L’article 7 du règlement MAR, entré en vigueur le 3 juil et 2016, non modifié depuis, dispose : « 1. Aux fins du présent règlement, la notion d’« information privilégiée » couvre les types d’information suivants : / a) une information à caractère précis qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui, si elle était rendue publique, serait susceptible 4

d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés […] ; / 2. Aux fins de l’application du paragraphe 1, une information est réputée à caractère précis si elle fait mention d’un ensemble de circonstances qui existe ou dont on peut raisonnablement penser qu’il existera ou d’un événement qui s’est produit ou dont on peut raisonnablement penser qu’il se produira, si elle est suffisamment précise pour qu’on puisse en tirer une conclusion quant à l’effet possible de cet ensemble de circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers […] / 4. Aux fins du paragraphe 1, on entend par information qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers […], une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme faisant partie des fondements de ses décisions d’investissement. ». 3. En application de ce texte, il convient de rechercher si l’information en cause présente les caractères précis, non public et susceptible d’avoir une influence sur le cours du titre Zodiac. 2. Sur le caractère précis de l’information 4. Selon les notifications de griefs, l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran était précise à partir du 17 novembre 2016. 5. Elles exposent d’abord que les dirigeants de Safran avaient exprimé leur souhait de reprendre les négociations, sur la base du projet tel que structuré précédemment en juil et 2016, dans le but d’aboutir à une nouvelle proposition pour la fin de l’année 2016, dans un contexte, où, du fait de la cession de ses activités d’Identité et de Sécurité, Safran al ait être en possession d’une trésorerie à investir. 6. El es ajoutent que les dirigeants de Zodiac, quant à eux, avaient conscience de la nécessité de s’adosser à Safran afin de résoudre leurs problèmes industriels et, à plus long terme, rester un acteur important de l’industrie aéronautique, secteur de plus en plus concentré. 7. El es relèvent que, le 17 novembre 2016, s’est tenue la réunion de lancement de la reprise des discussions (kick-off meeting). 8. Les notifications de griefs font valoir que le premier tour de table avait achoppé, le 6 juil et 2016, en raison notamment d’une offre de Safran jugée trop basse dans la mesure où le prix proposé était de 24 euros par action avec une parité de fusion de 0,40x. Dès lors, compte tenu de la conjoncture de concentration observée dans le secteur des équipementiers aéronautiques, l’information relative au projet de rachat de Zodiac par Safran, à l’initiative de Safran, revêtait un caractère particulièrement stratégique et ne pouvait aboutir rapidement qu’à un prix et une parité supérieurs à l’offre présentée le 6 juil et 2016. 9. Elles constatent que la proposition de Safran du mois juil et valorisait Zodiac à 9x l’Ebitda alors que son offre du 19 janvier 2017 était de 29,47 euros par action (et une parité de 0,485) valorisant Zodiac à près de 13x l’Ebitda 2018, soit à un niveau « élevé » mais correspondant à celui constaté dans le secteur lors de cette période de concentration du secteur des équipementiers aéronautiques. 10. El es en déduisent qu’au 17 novembre 2016, le projet d’acquisition, qui portait nécessairement sur une offre réévaluée, avait des chances raisonnables d’aboutir. 11. De cette information, il était donc possible, selon elles, de tirer une conclusion en l’occurrence positive sur le cours du titre Zodiac, dans la mesure où ce second tour de table des négociations avait été initié par l’acheteur Safran qui ne pouvait offrir qu’un prix par action supérieur à 24 euros au regard de l’échec du mois de juil et et du nouvel environnement stratégique. Un prix minimum de 24 euros par action offrait ainsi une prime d’au moins 12 % par rapport à la moyenne des cours entre le 7 septembre et le 17 novembre 2016. 12. Fidoma et M. Didier Domange contestent le caractère précis de l’information. 13. Ils font d’abord valoir qu’aucun projet structuré n’existait au mois de juil et 2016, ni le prix ni les autres modalités essentielles de l’opération n’ayant fait l’objet de négociations et les échanges préliminaires qui avaient eu lieu entre les deux parties n’ayant pas abouti à défaut de consensus sur une approche globale. 5

14. Ils ajoutent ensuite que l’existence d’un intérêt industriel n’est pas un gage d’aboutissement d’opérations de rapprochements, de sorte que le caractère stratégique de cette opération ne saurait constituer un élément de précision. 15. Ils exposent encore que la réunion du 17 novembre 2016 n’avait qu’un caractère très exploratoire et ne saurait en conséquence être considérée comme un jalon important des négociations. 16. Ils soulignent enfin qu’au-delà du prix, d’autres éléments essentiels devaient être débattus, tels que les accords relatifs à la gouvernance de la nouvel e société ou encore la pérennité de l’engagement collectif des familles actionnaires de Zodiac de conserver un certain nombre de titres pendant deux ans doublé d’un engagement individuel de conservation pendant 6 ans en contrepartie d’une exonération fiscale (ci-après, le « Pacte Dutreil ») et le maintien des avantages accordés aux actionnaires familiaux, qui nécessitaient l’accord de l’État. 17. Ils relèvent que les dirigeants n’ont considéré que l’opération n’était devenue plausible qu’à la mi-décembre 2016, Safran considérant que l’information n’aurait revêtu un caractère privilégié qu’à compter du 16 décembre 2016 et Zodiac qu’à compter du 14 janvier 2017. Ils soulignent par ail eurs que l’Agence des participations de l’État a cédé des titres Safran le 22 novembre 2016 alors que l’un de ses représentants avait eu connaissance des discussions en cours et qu’aucune utilisation de l’information privilégiée ne lui est reprochée. 18. La banque Saint Olive soutient que les chances de succès de l’opération ne sont apparues qu’à compter de la mi-décembre 2016 car c’est à partir de ce moment-là que les contacts entre Zodiac et Safran se sont multipliés et que des sujets essentiels tels que le prix, la parité ou la gouvernance, ont été discutés. 19. Le caractère précis d’une information sur un projet d’offre publique est établi dès que ce projet est suffisamment défini entre les parties pour avoir des chances raisonnables d’aboutir, peu important l’existence d’aléas inhérents à toute opération de cette nature quant à sa réalisation effective. 20. Il se recherche in concreto en considération des circonstances de chaque opération ou évènement analysé. 21. En l’espèce, les calendriers établis par Zodiac et Safran dans le cadre de la présente procédure distinguent quatre périodes, la première intitulée « premières discussions », du 9 décembre 2015 au 6 juil et 2016, la deuxième intitulée « reprise des discussions » du 6 septembre 2016 au 18 janvier 2017, la troisième intitulée « annonce I le 19/01 puis travaux préparatoires » du 19 janvier 2017 au 24 mai 2017 et la quatrième intitulée « annonce II le 24/05 » du 24 au 31 mai 2017. 22. Il résulte de ces documents ainsi que des auditions des dirigeants des deux parties et de leurs banquiers et conseils que Zodiac et Safran ont mandaté des avocats et des banquiers dès le début de l’année 2016 et ont conclu un accord de confidentialité le 24 avril 2016. 23. Le 2 mai 2016, s’est tenue une première réunion, désignée tant par Zodiac que par Safran dans les calendriers établis à la demande des enquêteurs comme étant une réunion de lancement (kick-off) à laquel e ont assisté les représentants de Zodiac et de Safran ainsi que leurs conseils respectifs. 24. En prévision de cette réunion, les banquiers conseils de Safran avaient rédigé une note interne qui exposait notamment les « 4 piliers d’un rapprochement » qui avaient été exprimés par le banquier conseil de Zodiac. Ces quatre piliers étaient le caractère amical du rapprochement, son caractère confidentiel, la conservation des avantages fiscaux des actionnaires de Zodiac, (ci- après, « Les Familles »), et une valorisation de Zodiac non opportuniste et basée sur le moyen terme. 25. Au cours des mois de mai et juin 2016, plusieurs réunions « d’exploration des structurations possibles » ont eu lieu, notamment le 25 juin 2016, une réunion de présentation de la direction (« management presentation ») à laquelle ont participé plusieurs représentants de Safran et de Zodiac ainsi que leurs avocats et banquiers conseils respectifs. Au cours de celle-ci, chacune des parties s’est présentée à l’autre afin que chacune comprenne les activités de l’autre par rapport aux siennes. Cette présentation s’est faite uniquement par projection sur écran, sans remise de documents écrits.

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26. Le 6 juil et 2016, s’est tenue une « réunion concernant une opération éventuelle » à laquelle ont participé des représentants de Safran, et notamment le président de son conseil d’administration et son directeur général, des représentants de Zodiac, parmi lesquels le président de son directoire et le président de son conseil de surveil ance, également représentant des Famil es, ainsi que des banquiers conseils. 27. Au cours de cette réunion, un document interne établi par le banquier conseil de Safran a été présenté sans être remis aux représentants de Zodiac. Ce document proposait plusieurs hypothèses de valorisation et indiquait : « sur la base du cours actuel de [Safran] (60,2 €/action), le prix de 24,0 €/action [Zodiac] représente une parité de 0,40x » et « à cette parité doit être ajoutée la valeur du maintien de l’avantage fiscal [des Famil es] ». 28. Les déclarations du président du directoire, du président du conseil de surveil ance et du directeur financier de Zodiac, du président du conseil d’administration, du directeur général de Safran et des banquiers des deux sociétés, concordantes, révèlent qu’il ne s’agissait pas de négociation sur le prix ou les trajectoires mais d’une approche globale. Aucune offre n’avait été formulée mais seulement un intérêt de principe exprimé et les discussions avaient été engagées par Safran sur la base d’un prix de départ de 24 euros par action, niveau de prix considéré comme très insuffisant et inacceptable par les représentants de Zodiac. Safran avait confronté les projections fournies par Zodiac à ce qu’il jugeait réalisable, ce qui a conduit à des appréciations divergentes sur la valorisation possible de l’opération. Zodiac voulait que Safran prenne en compte les hypothèses de retournement dans les deux activités où elle connaissait des difficultés et considérait que la fourchette de prix envisagée par Safran n’intégrait pas assez cet élément. 29. Pour la préparation de ce document, un autre document avait été établi par le banquier conseil de Safran envisageant la structure du rapprochement entre Zodiac et Safran. Il mentionnait l’impératif de préserver l’optimisation fiscale de même qu’une potentielle parité ainsi qu’un prix, et envisageait l’hypothèse « d’une structure offre publique pour le flottant de [Zodiac] suivie d’une fusion « réservée » aux [Familles] permet[tant] de satisfaire les objectifs des parties ». 30. Le calendrier des discussions remis aux enquêteurs par Safran indique sans autre précision : « à l’issue de cette réunion, cessation des discussions ». 31. Par ail eurs, les messages échangés par les conseils de Safran montrent que les éléments, tels que la structuration juridique et le maintien de l’avantage fiscal des Famil es constituaient des préalables à la conclusion d’un accord d’acquisition de Zodiac par Safran. 32. Si les discussions ont été interrompues, un message du 13 juil et 2016 adressé par le manager director de la banque conseil de Zodiac à un collègue l’informe « que le chairman de Rueff [nom de code de Safran] continue d’insister mais on leur répond que cela ne dépend que de lui, il connaît nos attentes. À suivre, pas exclu qu’ils reviennent à la raison ». 33. Les discussions entre Zodiac et Safran ont repris à l’initiative de Safran à partir de septembre 2016 dans un contexte ayant évolué. 34. Le 2 septembre 2016, Zodiac a publié un communiqué de presse intitulé « informations préliminaires sur l’exercice 2015/2016 » et qualifié de « profit warning », mentionnant que son résultat opérationnel courant pour cet exercice devrait être de l’ordre de 10 % inférieur au consensus. 35. Le 6 septembre 2016, le président du conseil d’administration de Safran, son directeur général, le président du directoire et le président du conseil de surveil ance de Zodiac, représentant aussi les Famil es, se sont réunis. Le président du conseil d’administration de Safran a déclaré que le management de Safran a pris l’initiative de cette reprise. Un diner a eu lieu le 6 septembre afin de déterminer si la rupture était définitive ou s’il y avait un intérêt à poursuivre les discussions. 36. Un autre diner les a réunis le 28 septembre.

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37. Le 23 octobre 2016, le rapprochement de deux acteurs importants de l’industrie aéronautique, les sociétés B/E Aerospace et Rockwell, annoncé publiquement, a marqué une phase de consolidation du secteur des équipementiers aéronautiques. À cette même époque, Safran allait bénéficier d’une trésorerie supplémentaire à la suite de la cession de ses activités « Identité et Sécurité », dont la négociation avait été annoncée au public le 29 septembre 2016. 38. Le contexte était donc plus favorable à une évolution des discussions. 39. La reprise des discussions entre Zodiac et Safran s’inscrivait dans la continuité de cel es menées jusqu’au 6 juil et 2016, ce qui ressort d’une présentation interne des banquiers conseils de Safran datée du 25 octobre 2016, ce document détail ant par ail eurs la structure principalement envisagée pour l’opération, une structure alternative ainsi que le calendrier de l’opération. 40. Par la suite, une réunion téléphonique s’est tenue le 8 novembre 2016 entre les principaux intervenants au projet et leurs conseils, suivie d’une réunion physique. 41. Le 14 novembre 2016, les banquiers conseils de Zodiac et Safran ont participé à une réunion dite de lancement ayant pour objet le « cadrage des discussions ». 42. Le 17 novembre 2016, a eu lieu une autre réunion dite de lancement, intitulée « kick-off de reprise des discussions » par Safran et « kick-off entre principaux et conseils » par Zodiac. Le préambule d’un document interne intitulé « 161117 – Monnet_script principals vSENT », préparé par les banquiers conseils de Safran et contenant une « Proposition de prochaines étapes et modus operandi (réunion du 17 novembre 2017) », précisait que « [Safran] souhaite être en mesure de faire une nouvel e proposition à [Zodiac] [d’ici la fin de l’année]. Des informations et échanges complémentaires semblent nécessaires. Progresser et travail er ensemble sur les chantiers clés de valeur, d’intégration et de structure permettrait de combler l’écart de vision entre [Zodiac et Safran] ». 43. Les dirigeants de Safran avaient donc conscience que l’écart de vision de l’opération entre les parties qui constituait un obstacle dirimant nécessitait un travail de précision pour que le projet ait des chances raisonnables d’aboutir. 44. Ce travail devait se faire, selon la déclaration du banquier conseil de Safran, sur la base des quatre piliers définis au mois de mai 2016. 45. Le directeur général de Safran a déclaré que la réunion du 8 novembre 2016 avait pour but d’obtenir des éléments nouveaux de Zodiac permettant de revoir la vision globale que Safran avait sur elle. 46. Il a précisé que le but de la réunion du 17 novembre avait été d’établir un calendrier des trois thèmes à traiter : gouvernance, hypothèses clients moyen et long terme, synergies, règlementaire et antitrust, évolution de la guidance de Safran. 47. Selon l’ancien président du directoire de Zodiac, Safran souhaitait beaucoup plus que Zodiac avancer sur la structure et chiffrer les synergies afin de pouvoir par la suite améliorer le prix et voulait que cela soit justifiable devant le conseil d’administration. 48. Ainsi, au 17 novembre 2016 des réunions avaient eu lieu, d’une part, entre des représentants de Zodiac et de Safran qui avaient exprimé un intérêt pour le rapprochement de ces deux sociétés, d’autre part, entre les conseils de ces deux parties qui avaient commencé à travail er sur la valorisation, les synergies et la structuration de l’opération. À cette même date, Safran envisageait de relever le prix jugé insuffisant en juil et 2016 tandis que Zodiac avait été conduit à revoir à la baisse ses exigences financières à la suite de la publication de ses résultats financiers. Cependant, il n’était pas encore question de prix entre les parties, faute pour Safran d’avoir des chiffres justifiant les projections faites par Zodiac. 49. Par ail eurs, les modalités essentielles du rapprochement, les conditions de gouvernance, les éléments concernant la structure de l’opération prenant en compte les exigences des Familles, et notamment le maintien de leur avantage fiscal et la recherche de l’accord de l’État, actionnaire de Safran, devaient être discutés.

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50. Le président du conseil d’administration de Safran a ainsi précisé que pour les Famil es, l’objectif patrimonial long terme était important. El es ne souhaitaient pas vendre mais échanger les actions Zodiac contre des actions Safran pour devenir actionnaires d’une structure plus grosse. El es voulaient basculer d’un actionnariat d’environ 30 % vers un ensemble plus gros où elles détiendraient 6 %. La structure de l’opération était un élément déterminant pour ses interlocuteurs car elle devait permettre aux famil es d’actionnaires de maintenir les avantages du pacte Dutreil. Pour le préserver, il était important qu’un des membres du pacte détienne un mandat social, de président, directeur général ou directeur général délégué. 51. De son côté, le responsable de l’équipe de la banque ayant conseil é Zodiac dans le projet d’offre entre Safran et Zodiac a indiqué qu’une nouvelle management presentation a eu lieu en novembre, mais sans fixation d’une fourchette de prix et qu’indépendamment du prix, il y avait la question de la structure juridique (fusion pour permettre aux actionnaires de Zodiac d’échanger les actions) et les pactes Dutreil. Selon lui l’objectif de la réunion de reprise des discussions était de fixer le cadre de travail des discussions en approfondissant les dues diligences, la valorisation, les structures, les synergies et aboutir à un accord de l’État français en tant qu’actionnaire de Safran pour que les discussions aboutissent avant la fin de l’année. 52. En définitive, au 17 novembre 2016, il ne demeurait pas seulement des aléas inhérents à toute opération d’acquisition d’une société par une autre mais bien encore des obstacles conditionnant la faisabilité du projet, tels que l’engagement des Famil es, la sollicitation de l’État, et l’avancement des discussions sur la gouvernance. Par ail eurs, les données financières de Zodiac afin de permettre une évaluation non opportuniste restaient inconnues. On ne pouvait, donc, à cette date, penser que l’acquisition de Zodiac par Safran allait se produire. 53. Le 22 novembre 2016, Zodiac a publié avant bourse les résultats de son exercice 2015-2016. 54. Le 15 décembre 2016, une réunion interne de Safran a examiné les hypothèses de valorisation de Zodiac au vu des données communiquées à la publication des comptes annuels. Le président de Safran a indiqué au conseil d’administration qui se tenait ce jour-là qu’il était possible qu’il y ait matière à évaluer une ou plusieurs options au cours des prochaines semaines. 55. Le lendemain, 16 décembre 2016, une réunion entre Zodiac, Safran et leurs conseils a réalisé un point d’étape sur le projet. Selon le banquier conseil de Zodiac, l’objectif était de faire un point sur la suite à donner aux différentes réunions de travail entre novembre et décembre « afin de savoir si nous continuions les discussions. Il restait encore pas mal d’inconnues, notamment la réaction de l’État et des Famil es. Mais il a été considéré qu’un processus de convergence pouvait être engagé ». 56. Le 16 décembre 2016, s’il demeurait des imprécisions et des aléas, les éléments fournis par Zodiac et leur analyse par Safran ainsi que les différentes hypothèses envisagées rendaient le projet d’acquisition suffisamment défini pour avoir des chances raisonnables d’aboutir. 57. L’information en cause a donc revêtu, le 16 décembre 2016 et non le 17 novembre 2016, un caractère précis.

3. Sur le caractère non public de l’information 58. Les notifications de griefs retiennent que l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran était, au 17 novembre 2016, non publique puisqu’à cette date les conditions d’un éventuel rapprochement, notamment sur les modalités de l’offre publique et de la fusion, n’avaient pas été rendues publiques par les deux sociétés, et ce jusqu’au 19 janvier 2017, date de l’annonce de l’entrée en négociations exclusives des deux sociétés. 59. M. Didier Domange et Fidoma contestent le caractère non public de l’information. Ils exposent que de nombreuses rumeurs ont été véhiculées par la presse, d’abord en avril puis à compter du 15 juin 2016, sur le projet d’acquisition de Zodiac par Safran. Ils soulignent que les articles publiés à cette époque contenaient de nombreux détails relatifs aux conditions de l’opération, à savoir une fourchette de valorisation, une structuration devant tenir compte des contraintes fiscales, l’existence d’un dividende exceptionnel de Safran et un horizon de signature à début 2017. Ils soutiennent également que plusieurs analystes financiers avaient envisagé ce rapprochement et qu’à la suite de la publication des rumeurs en juin 2016, le cours du titre Zodiac a fortement augmenté, de sorte que, selon eux, le marché avait intégré cette information et y avait réagi.

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60. Seuls doivent être pris en compte, pour évaluer la publicité de l’information en cause, les éléments postérieurs à la date à laquelle elle a acquis un caractère précis, soit le 16 décembre 2016. 61. Or, les articles sur lesquels les mis en cause se fondent, qui avaient d’ail eurs fait l’objet de démentis, sont antérieurs de plusieurs mois à la suspension des discussions intervenue le 6 juil et 2016 et a fortiori au 16 décembre 2016, de sorte qu’ils ne peuvent permettre d’apprécier le caractère public de cette information. 62. Le fait que le cours du titre Zodiac ait augmenté le jour de parution des premiers articles est indifférent à l’appréciation du caractère confidentiel de l’information en cause. Au demeurant, le cours de Zodiac a baissé dès le lendemain de la publication du second article. 63. Quant aux notes d’analyse, el es sont toutes antérieures à la date du 16 décembre 2016 et ne peuvent donc permettre d’apprécier le caractère public de l’information. Au demeurant, celle du 19 septembre 2016 qualifie l’opération de « peu probable », de sorte qu’elle ne peut avoir rendu publique l’information en cause. Celle du 24 octobre 2016 indique que ses auteurs sont « convaincus » de l’intérêt de Safran pour Zodiac ainsi que de l’intérêt stratégique de l’opération, mais elle contient qu’une simple opinion d’analyste qui n’est pas non plus de nature à lui conférer un caractère public. Enfin, celle du 5 décembre 2016 expose plusieurs hypothèses d’acquisitions par Safran, l’une d’entre el es visant Zodiac, de sorte qu’elle n’a pas pu conférer un caractère public à l’information en cause. 64. En conséquence, aucun article de presse ou note d’analyse n’avait révélé au public l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran avant sa publication le 19 janvier 2017. L’information en cause était donc, au 16 décembre 2016, non publique, et l’est demeurée jusqu’au 19 janvier 2017. 4. Sur l’influence sensible de l’information sur le cours du titre Zodiac 65. Selon les notifications de griefs, l’information était susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours du titre Zodiac, dans la mesure où la reprise des négociations aurait nécessairement abouti à un prix supérieur à 24 euros qui figurait dans l’offre présentée le 6 juillet 2016 jugée trop basse. Or, une offre de plus de 24 euros par action Zodiac représentait une prime d’au moins 12 % par rapport à la moyenne des cours entre le 7 septembre 2016 et le 17 novembre 2016, et avait dès lors de grandes chances d’être acceptée par Zodiac. En conséquence, les notifications de griefs exposent qu’un investisseur aurait pu utiliser cette information comme l’un des fondements de sa décision d’acheter des titres Zodiac. 66. Les mis en cause ne contestent pas le fait qu’une telle information aurait pu avoir une influence sensible sur le cours du titre Zodiac. 67. Compte tenu de l’importance de l’acquisition envisagée ainsi que de sa nature, l’information en cause était bien susceptible d’être utilisée par un investisseur raisonnable pour fonder sa décision d’investir dans le titre Zodiac et, ainsi, d’avoir une influence sensible sur le cours du titre de cet émetteur. 68. Il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent que l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran a présenté, à compter du 16 décembre 2016, les caractéristiques d’une information privilégiée au sens de l’article 7 du règlement MAR. II. Sur les manquements d’initiés reprochés à M. Didier Domange et Fidoma

69. Il est fait grief à M. Didier Domange d’avoir manqué à son obligation d’abstention d’utilisation de l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran en acquérant, à son initiative, en tant que président du conseil de surveil ance de Fidoma et pour le compte de cette dernière, 195 000 titres Zodiac, entre le 24 novembre et le 5 décembre 2016, alors qu’il aurait été en possession de l’information privilégiée. 70. La notification de griefs adressée à Fidoma lui reproche d’avoir manqué à son obligation d’abstention d’utilisation de cette même information, à l’occasion de l’acquisition de 195 000 titres Zodiac, réalisée entre le 24 novembre et le 5 décembre 2016, à l’initiative de M. Didier Domange.

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71. Dès lors que l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran a présenté le caractère privilégié à compter du 16 décembre 2016, et non du 17 novembre 2016, il ne peut être reproché aux mis en cause d’avoir acquis, entre le 24 novembre 2016 et le 5 décembre 2016, 195 000 titres Zodiac en violation d’une obligation d’abstention d’utilisation de cette information qui ne présentait pas encore le caractère de privilégiée. 72. Ils seront donc mis hors de cause. III. Sur le manquement à ses obligations déclaratives reproché à la banque Saint Olive

73. Il est reproché à la banque Saint Olive d’avoir « omis de déclarer auprès de l’AMF certaines opérations de la société Fidoma intervenues en novembre 2016, dont el e avait pourtant des raisons de suspecter qu’elles pourraient constituer des abus de marché au sens de l’article 16 du règlement [MAR] », et ce « au regard de l’OPA de SAFRAN annonc[é]e le 19 janvier 2017 ». 74. La notification de griefs expose que la banque Saint Olive était tenue de déclarer les opérations réalisées pour le compte de Fidoma en novembre 2016 sur le titre Zodiac dans la mesure où, bien que M. Richard Domange soit le seul donneur d’ordre de droit dans le dossier d’ouverture du compte, M. Didier Domange était donneur d’ordre de fait. El e précise que compte tenu des fonctions occupées par M. Didier Domange au sein de Zodiac, lui donnant accès aux informations privilégiées, du fait qu’il n’était pas habilité à donner des ordres pour le compte de Fidoma et de son implication dans la gestion quotidienne de cet e société, la banque Saint Olive avait des motifs raisonnables de suspecter que les opérations réalisées au mois de novembre 2016 pouvaient constituer un abus de marché, ce qu’elle n’a pourtant pas déclaré. 75. La banque Saint Olive conteste le grief, en faisant valoir que les opérations effectuées pour le compte de Fidoma depuis 2009 étaient cohérentes avec les opérations antérieures et que les ordres passés en novembre 2016 pour le compte de Fidoma étaient justifiés, au regard notamment des difficultés économiques et opérationnelles que Zodiac avait rencontrées en 2014-2015 qui ont été suivies par un regain de confiance lié aux communiqués de presse publiés entre septembre et novembre 2016 par Zodiac. El e ajoute qu’elle n’avait aucune raison de considérer que M. Didier Domange agissait en qualité de donneur d’ordres de fait de Fidoma, dans la mesure où c’est bien M. Richard Domange qui avait donné les instructions litigieuses, de sorte qu’il n’y avait aucun motif de déclencher une alerte sur un éventuel abus de marché en raison du simple « suivi de l’exécution des ordres de bourse de Fidoma » par M. Didier Domange, pas plus qu’à la suite de la réunion de présentation des comptes de Zodiac du 22 novembre 2016. 76. Si le comportement de M. Didier Domange montre peu de respect des règles du droit des sociétés, il ne peut être reproché à la banque Saint Olive de n’avoir pas déclaré comme suspectes les opérations visées par la poursuite réalisées en novembre 2016 sur le titre Zodiac par Fidoma puisqu’el es ont eu lieu avant que l’information soit privilégiée et que Fidoma pouvait ainsi les exécuter sans qu’il s’agisse d’une opération d’initié. 77. La banque Saint Olive sera donc mise hors de cause. PUBLICATION 78. Les mis en cause sol icitent l’anonymisation de la présente décision. 79. La banque Saint Olive fait valoir qu’une publication non anonymisée « serait de nature à perturber la stabilité de son système financier ». El e invoque à cet égard l’ancienneté de sa création, le fait que ses clients comptent des personnes privées, des sociétés patrimoniales ou encore de grandes institutions, enfin la circonstance qu’elle a toujours veil é au respect scrupuleux de la règlementation. 80. M. Didier Domange expose que l’anonymisation de la décision se justifie par la nécessité de préserver sa vie privée et de lui éviter, ainsi qu’aux membres de sa famil e, un préjudice grave et disproportionné eu égard à la notoriété de sa famil e dans l’industrie française. 81. Enfin, Fidoma soutient que l’anonymisation est pleinement justifiée compte tenu du lien que le marché de l’industrie fait entre Fidoma et la famil e Domange et de la diversification des activités de Fidoma depuis la modification de ses statuts du 18 avril 2018, qui lui permet d’accompagner des projets d’investissements divers. 11

82. La publication de la présente décision n’est ni susceptible de causer aux personnes mises hors de cause un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours. El e sera donc ordonnée sans anonymisation. PAR CES MOTIFS, La commission des sanctions, ainsi qu’il en a été délibéré par Mme Marie-Hélène Tric, présidente de la commission des sanctions, MM. Bernard Field et Bruno Gizard, Mmes Anne Le Lorier et Ute Meyenberg, membres de la 1ère section de la commission des sanctions, en présence de la secrétaire de séance :
- Constate que l’information relative projet d’acquisition de Zodiac par Safran est devenue privilégiée le 16 décembre 2016. En conséquence :

- Met hors de cause M. Didier Domange, la société Fidoma et la banque Saint Olive ;

- Ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers et fixe à cinq ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme.

Paris, le 3 août 2021,

La Secrétaire de séance,

La Présidente,

Martine Gresser

Marie-Hélène Tric

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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  • MOTIFS DE LA DÉCISION
  • I. Sur le caractère privilégié de l’information relative au projet d’acquisition de Zodiac par Safran
    • 1. Sur le texte applicable
    • 2. Sur le caractère précis de l’information
    • 3. Sur le caractère non public de l’information
    • 4. Sur l’influence sensible de l’information sur le cours du titre Zodiac
  • II. Sur les manquements d’initiés reprochés à M. Didier Domange et Fidoma
  • III. Sur le manquement à ses obligations déclaratives reproché à la banque Saint Olive

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Décision de la Commission des sanctions du 3 août 2021 à l'égard des sociétés Fidoma, Banque Sainte Olive et de M. Didier Domange