Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 octobre 2014, n° 14/00219

  • Livraison·
  • Retard·
  • École·
  • Suspension·
  • Construction·
  • Ascenseur·
  • Norme·
  • Caution·
  • Cause·
  • Dommages-intérêts

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

www.belovetskaya.com

CORONAVIRUS : CRISE SANITAIRE ET RESPONSABILITE DES ACTEURS DE LA CONSTRUCTION Le contexte de crise sanitaire impose aux acteurs du secteur de la construction à s'interroger quant à l'étendue de leurs obligations vis-à-vis de leurs employés et de leurs cocontractants. Au terme de l'article 4 de la loi d'urgence n°2020-290 du 23 mars 2020[1] relative à l'épidémie de covid-19, l'état d'urgence sanitaire était déclaré pour une durée de deux mois à compter de son entrée en vigueur, soit jusqu'au 24 mai 2020[2]. L'Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 et la circulaire de sa présentation du …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 23 oct. 2014, n° 14/00219
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 14/00219
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nice, 24 novembre 2004, N° 02/3109

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

3e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 23 OCTOBRE 2014

N° 2014/

Rôle N° 14/00219

B Z

C/

XXX

XXX

Grosse délivrée

le :

à :

Me Jérôme LATIL

Me Pierre-Yves IMPERATORE

Me Françoise BOULAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 25 Novembre 2004 enregistré au répertoire général sous le n° 02/3109.

APPELANT

Monsieur B Z

né le XXX à XXX

représenté par Me Jérôme LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Emmanuelle PLAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Sandrine LENCHANTIN DE GUBERNATIS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Jean-Marc COHEN, avocat au barreau de NICE

INTIMEES

XXX

assignée le 10 février 2014 à étude d’huissier à la requête de M. Z B, demeurant XXX

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Philippe DUTERTRE de la SCP FRANCK-BERLINER-DUTERTRE-LACROUTS, avocat au barreau de NICE,

XXX agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège., demeurant 10, boulevard Marie et Alexandre Oyon – XXX

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

ayant Me Me Jean-Rémy DRUJON D’ASTROS de la SCP DRUJON D’ASTROS/BALDO & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 11 Septembre 2014 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Rose Marie PLAKSINE, Conseiller a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Annie DABOSVILLE, Présidente

Madame Rose-Marie PLAKSINE, Conseiller

Monsieur Martin DELAGE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2014,

Signé par Madame Annie DABOSVILLE, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

I. FAITS. PROCEDURE.

Par acte du 15 février 1999, la SCI les Jardins d’Elisa a acheté à la commune de Beausoleil un terrain cadastré section XXX, aux fins de construire un ensemble immobilier de 4 bâtiments (avec plus de 100 logements).

L’un de ces bâtiments, le bâtiment C, présentait une hauteur de 40 m environ avec 14 niveaux, 7 niveaux sous la route et 7 niveaux au-dessus de la route. Pour soutenir la route et avant de commencer la construction des immeubles, il a été procédé à la construction d’une paroi clouée d’une longueur d’environ 110 m et pouvant atteindre certains endroits une hauteur de 17 m.

Il était par ailleurs prévu la construction d’un ascenseur public permettant de relier Beausoleil à la principauté de Monaco et d’une école communale.

La société le Mans caution a consenti une garantie extrinsèque d’achèvement à la SCI les Jardins d’Elisa par acte du 10 février 1999.

La déclaration réglementaire d’ouverture de chantier a eu lieu le 15 février 1999. Les travaux ont démarré le 21 juillet 1999.

Le 5 août 1999, Monsieur Z a fait l’acquisition de trois lots en l’état futur d’achèvement correspondant à un appartement de deux pièces, à une cave et un parking couvert; la livraison était prévue pour le 31 décembre 2000.

Se plaignant d’un manquement au devoir d’information, et du retard de livraison, il a fait assigner la SCI les Jardins d’Elisa et la société le Mans caution devant le tribunal de grande instance de Nice;

Cette juridiction a par jugement du 25 novembre 2004,

'rejeté la demande de Monsieur Z de dommages-intérêts du chef d’un manquement au devoir d’information.

' rejeté sa demande de condamnation au paiement d’une indemnité de 1600 € par jour de retard à compter du 31 décembre 2000.

' dit que la SCI est tenue de son obligation de livrer à Monsieur Z les lots vendus et que la société le Mans caution reste tenue par la garantie de financement de l’achèvement des travaux.

' dit n’y avoir lieu à condamnation sous astreinte à l’encontre de la SCI les Jardins d’Elisa.

' rejeté la demande de condamnation de la société le Mans caution à lui livrer les lots vendus en l’état futur d’achèvement.

' rejeté la demande d’indemnisation au titre de la non construction de l’école maternelle et de l’ascenseur;

Par déclaration remise le 16 mars 2005, Monsieur Z a interjeté appel du jugement précité.

Il a pris livraison des lots en mars 2007, la construction de l’école et de l’ascenseur n’étant en revanche pas effectuée.

Par arrêt du 12 avril 2007, le dossier a été retiré du rôle sur demande des parties.

Par arrêt du 28 mai 2009, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a :

— confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré opposables à SCI les Jardins d’Elisa les conditions générales de vente comportant des clauses de suspension du délai d’achèvement de l’immeuble concerné et en ce qu’il a débouté Monsieur Z de sa demande en dommages-intérêts pour non construction de l’école.

' l’a réformé pour le surplus et statuant à nouveau, a constaté que l’appartement acquis par Monsieur Y a été livré et que la demande d’achèvement et sans objet, débouté la SCI les Jardins d’Elisa et Monsieur Z de leur demande dirigée contre la société le Mans caution, et condamné la SCI les Jardins d’Elisa à payer à Monsieur Z la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour la non construction de l’ascenseur.

' avant dire droit sur la demande en dommages-intérêts pour retard de livraison, ordonné une expertise permettant de déterminer si le délai dans lequel l’immeuble a été achevé est techniquement la conséquence des vicissitudes rencontrées par la SCI les Jardins d’Elisa et évaluer le retard imputable à cette dernière.

L’expert a déposé son rapport le 27 juillet 2010.

Monsieur Z a sollicité la condamnation de la SCI les Jardins d’Elisa à lui payer la somme de 2070 euros par mois de retard à compter du 31 décembre 2000, soit la somme totale de 180'225 euros pour un retard de 270 semaines.

Par arrêt du 9 février 2012 la cour d’appel a ordonné le retrait du rôle sur la demande conjointe des parties.

Suite à la requête de SCI les Jardins d’Elisa du 4 décembre 2013, le dossier a été réinscrit au rôle.


===ooo0ooo===---

Vu les dernières conclusions de Monsieur Z du 8 juillet 2014,

Vu les dernières conclusions de la SCI les Jardins d’Elisa du 5 septembre 2014,

II.DECISION.

La cour ne reste saisie que de la seule demande d’indemnisation du retard sollicité par Monsieur Z, le surplus ayant été jugé définitivement par l’arrêt du 28 mai 2009.

— Sur la durée du retard de livraison.

Au terme d’un travail précis et consciencieux, l’expert judiciaire a pu déterminer qu’entre la déclaration réglementaire d’ouverture du chantier le 15 février 1999 et la réception des travaux le 30 janvier 2007 par la SCI, l’opération a duré 415 semaines. Monsieur Z a reçu livraison de ses biens au mois de mars 2007.

Il est constant que la livraison des biens vendus était contractuellement prévue pour le 31 décembre 2000, sauf cas de force majeure ou cause légitime de suspension du délai de livraison ; et que le document annexé aux conditions générales de vente mentionne comme causes légitimes de suspension du délai de livraison notamment les intempéries, la grêle, la faillite ou la déconfiture de l’une des entreprises effectuant les travaux, les injonctions administratives ou judiciaires de suspendre ou d’arrêter les travaux ; et que s’il survient un cas de force majeure ou une cause légitime de suspension, l’époque prévue pour l’achèvement sera différée d’un temps égal à celui pendant lequel l’événement considéré aura mis obstacle à la poursuite des travaux.

La liste ci-dessus n’est pas exhaustive, le caractère légitime de la cause pouvant toujours être apporté sans que nécessairement la SCI doive justifier qu’il s’agit d’un cas de force majeure.

La SCI les Jardins d’Elisa se prévaut d’une série d’événements qui ne lui sont pas imputables et qui constitueraient des causes légitimes de suspension du délai de livraison. Il convient de déterminer si les causes légitimes invoquées sont établies afin que soit fixée la date à laquelle Monsieur Z aurait dû recevoir livraison de ses biens.

Au préalable, la cour relève que la SCI les Jardins d’Elisa ne peut se prévaloir :

— du refus par Monsieur Z de lui revendre les lots achetés, ce dernier étant fondé à obtenir l’exécution du contrat de vente souscrit en 1999. Elle ne peut non plus lui opposer d’être le seul, ainsi que son épouse, à avoir engagé une procédure.

— d’un retard de 23 semaines occasionné par un recours de Madame X contre le permis de construire lequel a été résolu suite un protocole signé le 24 juin 1999, antérieurement à la signature de l’acte de vente de Monsieur Z.

— de la démission du bureau d’études Rofax-setor, dès lors qu’il n’est pas pas établi que celle-ci n’est pas due à l’inaction de la SCI ; en effet, le bureau d’études a indiqué le 4 avril 2000 qu’il se trouvait dans l’attente d’avenants réclamés le 23 février 2000, que seul un mémoire de 100'000 Fr. a été honoré alors qu’il a produit 2 récapitulatifs pour un montant de 132'180 Fr. HT 158'458 Fr. HT, et qu’il demandait de débattre de nouvelles conditions d’intervention.

— des conséquences de la résiliation du contrat de All ingénierie, l’expert n’ayant relevé sur ce point aucun élément notable, et les seuls éléments produits par la SCI étant les courriers émanant d’elle-même les 25 septembre et 2 octobre 2002.

En revanche, constituent des causes légitimes :

1. La procédure engagée en raison des plaintes des riverains du chemin de la noix: l’expert judiciaire a relevé que les travaux de paroi clouée ont été arrêtés le 30 septembre 1999, et ont repris le 23 décembre 1999, et que l’ensemble des conséquences résultant des désordres sur avoisinants représentent 17 semaines. Ce retard constitue une cause légitime non imputable à la SCI les Jardins d’Elisa, Monsieur Z ne pouvant reprocher à celle-ci de n’avoir pas anticipé cette difficulté.

2. L’arrêt de chantier en raison des vibrations et désordres causés aux habitations voisines : les comptes-rendus de chantier du 5 mars au 19 mai 2003 établissent l’arrêt du chantier, ayant pour origine un courrier d’alerte du bureau de contrôle Veritas du 14 février 2003 sur la capacité de trois petits immeubles avoisinants à supporter les vibrations occasionnées par les terrassements en grande masse. Cet arrêt de 10 semaines 1/2 constitue une cause légitime de suspension du délai de livraison, Monsieur Z ne pouvant reprocher à la SCI de n’avoir pas anticipé cette difficulté.

3. La défaillance de plusieurs entreprises : les éléments fournis par l’expert permettent de déterminer que la conséquence des défaillances de l’entreprise EGTM/ Delta sol/Temsol, de l’entreprise EGTM/ infra sol, de l’entreprise EGTM/BTPE et de l’entreprise DS plomberie/Cotechbat a été de générer un retard de 53 semaines. Les éléments dont se prévaut Monsieur Z (avis du bureau Veritas du 14 février 2002, compte-rendu de l’assistant du maître de l’ouvrage du 14 janvier 2002, lettre de la SCI les Jardins d’Elisa du 14 juin 2002) ne sauraient caractériser une indécision ou une gestion fautive de la SCI les Jardins d’Elisa. Ce retard constitue une cause légitime non imputable à la SCI les Jardins d’Elisa.

4. Intempéries : les éléments apportés par l’expert permettent d’en fixer la durée à 6 semaines, ces intempéries devant être considérées comme une cause légitime de suspension du délai non imputable à la SCI les Jardins d’Elisa.

5. L’ exigence imposée par la mairie de Beausoleil le 1er mars 2001 de mise en 'uvre d’une norme parasismique PS 92 alors que le permis de construire prescrivait la mise en 'uvre de la norme BS 69 et l’abandon par la commune de Beausoleil du projet d’école communale. Le 26 août 2002, le ministère de l’aménagement du territoire a considéré que la norme parasismique applicable était la norme PS 92 et le 30 octobre 2002, la SCI a commandé aux BET Turra et Sol essais la modification de la paroi et les nouveaux calculs correspondants afin de pouvoir adapter ultérieurement la paroi au règlement PS 92. Nonobstant l’abandon par la commune de Beausoleil du projet de construction de l’école, il n’est pas contesté qu’a été maintenue l’exigence de mise en 'uvre de la norme sismique PS 92. Par ailleurs, suite au rachat du volume correspondant à l’école, la SCI les Jardins d’Elisa s’est nécessairement trouvée dans l’obligation de modifier les plans et son projet, ce qui a engendré un retard supplémentaire. Il convient de retenir à ces 2 titres un retard de 20 semaines.

6. la défaillance de la grue et de la foreuse : ces dysfonctionnements ne sauraient être imputables à la SCI, et le retard de trois semaines doit être considéré comme une cause légitime de suspension du délai de livraison.

— Sur le préjudice subi.

Le retard légitime justifié par la SCI les Jardins d’Elisa est de 109,5 semaines.

Le retard illégitimement subi par Monsieur Z doit être calculé ainsi qu’il suit : à compter du 31 décembre 2000, l’écoulement de 109,5 semaines doit être fixé au 5 février 2003.

Entre le 6 février 2003 et le 31 mars 2007 (le dernier jour du mois devant être retenu car le demandeur ne précise pas le jour précis auquel la livraison a lieu), il s’est écoulé un délai de 4 ans et 7,5 semaines.

Le préjudice subi par Monsieur Z ne saurait être calculé sur une base de 2070 euros par mois alors qu’il n’établit pas que son appartement aurait été certainement loué à ce prix et pendant toute cette durée, et qu’il ne justifie en outre pas l’avoir loué depuis la livraison. Monsieur Z ne justifie donc pas d’un préjudice locatif mais d’une perte de jouissance, laquelle doit être évaluée à 15'000 euros.

Il convient en conséquence de condamner la SCI les Jardins d’Elisa à lui payer ce montant à titre de dommages et intérêts. Le surplus de la demande doit être rejeté.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts au titre du retard de livraison.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

— INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de Monsieur Z de dommages-intérêts au titre du retard de livraison ;

— ET STATUANT à nouveau,

— DIT que le retard de livraison est de quatre ans et 7,5 semaines.

— CONDAMNE la SCI les Jardins d’Elisa à payer à Monsieur Z la somme de 15'000 euros à titre de dommages-intérêts à ce titre ;

— REJETTE le surplus des demandes ;

— CONDAMNE la SCI les Jardins d’Elisa à payer à Monsieur Z la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— CONDAMNE la SCI les Jardins d’Elisa aux dépens, avec application de l’article 699 du Code de Procédure Civile au bénéfice des avocats de la cause.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

RMP

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 octobre 2014, n° 14/00219