Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 avril 2015, n° 13/03626

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 10 avr. 2015, n° 13/03626
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 13/03626
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 23 janvier 2013, N° 11/6156

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 10 AVRIL 2015

N° 2015/307

Rôle N° 13/03626

XXX

C/

Y X

Grosse délivrée

le :

à :

Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Miloud CHAFI, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE – section C – en date du 24 Janvier 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 11/6156.

APPELANTE

XXX, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, demeurant Parc de Pichaury – XXX – BP 348000 – 13799 AIX-EN-PROVENCE CEDEX 03

représentée par Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur Y X, demeurant XXX – XXX XXX XXX

comparant en personne, assisté de Me Miloud CHAFI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 16 Mars 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Bernard JACOB, Président de Chambre

Madame Pascale MARTIN, Conseiller

Madame Annick CORONA, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme A B.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Avril 2015.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Avril 2015.

Signé par Monsieur Bernard JACOB, Président de Chambre et Mme A B, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Y X a été a été engagé par la société ORTEC ENVIRONNEMENT , suivant contrat de travail à durée indéterminée , en date du 20 Mars 2006 ,en qualité d’agent spécialisé environnement .

Au dernier état de la relation contractuelle ,Monsieur X percevait une rémunération mensuelle brute de 1407,50€ outre une prime d’ancienneté mensuelle de 42,24€ .

La convention collective applicable est celle de l’assainissement et de la maintenance industrielle .

Le 10 Décembre 2008 , ,Monsieur X a été victime d’un accident du travail alors qu’il était passager d’un véhicule de service et a bénéficié d’un arrêt de travail jusqu’au 27 Janvier 2009 ,date à laquelle il a repris son activité sur un poste aménagé , avant de bénéficier d’un arrêt de travail pour maladie

Au terme de la première visite médicale de reprise le 25 Mai 2009 , Monsieur X a été déclarée inapte sous réserve des résultats de la seconde visite médicale .

A l’issue de la seconde visite qui s’est déroulée le 9 Juin 2009 , le médecin du travail a conclu que Monsieur X était inapte au soulèvement de charges et manutentions ,inapte aux mouvements répétés ou forcés de l’épaule droite en élévation ,a noté une réorientation professionnelle à envisager ,et indiqué que le salarié serait apte à un poste avec travaux légers respectant les contraintes citées ,travail sédentaire ,surveillance….

Le 1er Juillet 2009 ,la société ORTEC a proposé à Monsieur X trois postes possibles de reclassement , postes qui ont été refusés par le salarié par courrier en date du 7 Juillet 2009 .

Le 8 Juillet 2009 ,la société ORTEC a convoqué Monsieur X à un entretien préalable fixé le 20 Juillet 2009 .

Par lettre recommandée en date du 28 Juillet 2009 , Monsieur X a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement .

Le 13 Novembre 2009, Monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes de Marseille ,section commerce ,aux fins de voir :

— Constater que la société ORTEC a manqué à son obligation de reclassement ,

— Dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ,

— Condamner la société ORTEC à lui verser , avec exécution provisoire et intérêts de droit à compter de la demande et capitalisation , les sommes suivantes :

*27 297,90 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à défaut sans cause réelle et sérieuse ,

*2899,48€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

*289,95 € pour les congés payés afférents ,

*809,34€ au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement ,

*603,20€ à titre de dommages et intérêts pour non-respect du DIF ,

*1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

Par jugement en date du 26 Mai 2011 , le conseil de prud’hommes a ordonné la radiation de l’affaire en raison du défaut de diligences des parties ,affaire qui a été réinscrite au rôle le 21 Décembre 2011 .

Par jugement en date du 24 Janvier 2013 ,le conseil de prud’hommes a :

— Dit que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ,

— Condamné la société ORTEC à payer à Monsieur X les sommes suivantes :

*2899,48€ au titre de l’indemnité de préavis,

*289,95€ au titre des congés payés afférents,

*809,34€ au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement ,

*8500€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*1200€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

— Débouté les parties du surplus de leur demande,

— Dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s’élève à 1407,50€ ,

— Ordonné l’exécution provisoire,

— Condamné l’employeur aux dépens .

La société ORTEC a ,le 18 Février 2013 , interjeté régulièrement appel de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions en date du 16 Mars 2015 ,oralement soutenues à l’audience , l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement déféré ,de débouter Monsieur X de l’ensemble de ses demandes et de condamner Monsieur X à lui payer la somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens .

Aux termes de ses dernières écritures en date du 16 Mars 2015 ,oralement soutenues à l’audience, Monsieur X demande à voir confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et le DIF .

Il sollicite la somme de 27 297€ à titre de dommages et intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse , celle de 603,20€ pour le non-respect du DIF et celle de 3500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

Il demande en outre à ce que les condamnations portent intérêts de droit à compter de la demande en justice outre capitalisation .

Il a indiqué à l’audience se désister de ses demandes relatives à l’indemnité de préavis et à l’indemnité spéciale de licenciement ,lesquelles lui ont été réglées .

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties .

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement et l’obligation de reclassement

Selon l’article L1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si un doute subsiste, il profite au salarié .

Il résulte de l’ article L1226-2 du code du travail que lorsque le salarié est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail ,l’employeur ne peut le licencier qu’après avoir recherché, de façon sérieuse, loyale et complète , à le reclasser au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que la mutation , la transformation de poste ou l’aménagement du temps de travail et que la sanction de la violation de cette obligation de reclassement donne lieu au versement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse .

La recherche de reclassement doit prendre en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.

L’emploi recherché doit être aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre des mesures sus-visées ,sur des postes disponibles .

Aux termes d’un courrier en date du 1er Juillet 2009 ,il était proposé à Monsieur X les postes suivants , auxquels étaient joints un descriptif précis des tâches ,de la rémunération et des conditions de travail :

— un poste d’assistant magasinier à ROUEN ,

— un poste d’adjoint agent technique à AMIENS(Société FRIEDLANDER) ,

— un poste d’ouvrier maintenance tout corps d’état à TOURS ou NANTES ,

Par courrier remis à l’employeur le 7 Juillet 2009 ,Monsieur X a indiqué qu’il ne souhaitait pas répondre favorablement à ces propositions .

Aux termes de la lettre de licenciement ,Monsieur X a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement .

Monsieur X expose que l’employeur ne démontre pas avoir effectué une recherche de reclassement efficace et sérieuse au sein de l’entreprise comme au sein du groupe ,lequel emploie 4000 salariés à travers le monde et compte 60 agences en France .

Il indique que le groupe ORTEC est positionné sur de nombreux secteurs d’activité tels que pétrole,chimie ,pétrochimie ,agro-alimentaire,énergie … administrations ,automobile ,ensembles immobiliers ….

Il soutient que les postes qui lui ont été proposés se situent à plusiers centaines de kilomètres de Marseille où il réside alors que le groupe ORTEC disposait au jour du licenciement 28 agences dans la région sud-est .

Il affirme que l’agence de Marseille, au sein de laquelle il était affecté ,disposait d’un département hygiène proposant des services de désinsectisation ,de dératisation et de nettoyage léger ,qui employait ,au jour du licenciement un intérimaire à temps plein ,qu’il était apte à réaliser les travaux relevant de ce département ,ceux-ci restant en tout état de cause aménageables au besoin .

Il ajoute qu’il lui a été donné un délai de reflexion relativement court et en tout état de cause déraisonnable pour répondre aux propositions de postes .

La société ORTEC explique qu’elle a associé le médecin du travail et les délégués du personnel à sa démarche de reclassement de Monsieur X .

Elle fait valoir qu’à l’issue de la réunion qui s’est déroulée le 25 Juin 2009 ,les délégués du personnel ont validé les offres de reclassement envisagées ,lesquels avaient été validés par le médecin du travail.

Elle affirme que les offres de reclassement correspondaient aux seuls postes disponibles au sein du groupe ,au moment du licenciement ,comme en atteste le livre d’entrée et sortie du personnel du groupe qu’elle verse au débat .

Elle explique que la recherche de postes a également été faite au sein de la société FRIEDLANDER dont la spécialité est le traitement des déchets mais dont la plupart des emplois sont des postes d’opérateurs et de terrain non compatibles avec les préconisations du médecin du travail .

Elle ajoute que la fonction d’opérateur hygiène 3D dont fait état Monsieur X est elle aussi incompatible avec les réserves émises par le médecin du travail ,que ce poste implique de solliciter physiquement les membres supérieurs .

Elle soutient que les emplois proposés au salarié correspondent à des postes sédentaires qui auraient été aménagés de façon à ce que Monsieur X ne soulève pas de charges particulières et n’effectue pas dde travaux en hauteur .

La société ORTEC ajoute que le délai de reflexion de 5 jours ouvrables laissé au salarié est tout à fait raisonnable et que Monsieur X n’a pas manifesté le souhait d’avoir un délai supplémentaire .

*****

L’examen des pièces produites par la société ORTEC révèle les éléments constants suivants :

— aucun poste correspondant aux préconisations de la médecine du travail n’apparaît disponible au vu du livre des entrées et sorties du personnel des établissements la société ORTEC situés en France sur la période de Juin à Octobre 2009 ,

— la fiche de poste de l’opérateur hygiène 3D ,emploi cité par Monsieur X comme étant susceptible de lui convenir ,décrit des tâches consistant notamment à installer et préparer les chantiers ,réaliser la désinfection aérienne , le nettoyage et le dégraissage des hottes de cuisine et des extracteurs …. ,les dits travaux s’effectuant en hauteur et avec l’usage d’échaffaudage,.

— les propositions de postes précises et sérieuses apparaissent aussi comparables que possible à l’emploi précédemment occupé par Monsieur X et ont été validées tant par le médecin du travail que par les délégués du personnel .

— le délai de reflexion laissé au salarié (6 jours ) pour répondre aux offres de poste apparaît raisonnable et suffisant .

Les pièces produites par Monsieur X et notamment les extraits de pages internet concernant les activités du groupe ORTEC et les offres d’emploi de celui-ci ,ne permettent pas de remettre en cause le caractère pertinent et sérieux des tentatives de recherche de reclassement effectuées par la société ORTEC ;

Il résulte en effet de l’étude de ces documents que chacune des sociétés du groupe propose essentiellement des emplois impliquant de la manutention ,du nettoyage et des travaux en hauteur … peu compatibles avec les avis émis par la médecine du travail .

Eu égard à l’ensemble de ces éléments ,la cour considère que les propositions de reclassement faites à Monsieur X par la société ORTEC étaient compatibles avec les préconisations du médecin , sérieuses et précises au sens des dipositions sus-visées ,de sorte que le refus opposé par le salarié constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement .

Il y a lieu en conséquence de débouter Monsieur X de ce chef de demande et d’infirmer le jugement déféré à ce titre .

Sur l’indemnité de préavis ,les congés payés afférents et l’indemnité spéciale de licenciement

Monsieur X s’étant désisté de ces demandes auxquelles avait fait droit le conseil de prud’hommes ,il n’y a pas lieu de statuer sur ces chefs de prétentions .

Sur les dommages et intérêts pour non-respect du DIF

Monsieur X fait valoir que l’employeur ne l’a pas informé ,dans la lettre de licenciement ,de ses droits acquis au titre du DIF et du droit d’en demander le bénéfice et ce en violation des dispositions de l’article L6323-1 du code du travail .

Il affirme avoir acquis 65 heures à ce titre représentant la somme de 603,20€ ;

La société ORTEC soutient que la mention concernant le droit individuel à la formation n’avait pas à figurer dans la lettre de licenciement puisque que la portabilité de ce droit a été créée postérieurement au licenciement de Monsieur X ,par la loi du 24 Novembre 2009 .

******

Il résulte de la rédaction des dispositions de l’article L6323-17 du code du travail ,en vigueur au moment du licenciement , que le droit individuel à la formation était transférable en cas de licenciement ,le montant de l’allocation de formation correspondant aux heures acquises à ce titre et n’ayant pas été utilisées étaient calculées sur la base du salaire net perçu par le salarié avant son départ .

L’article L6323-18 du code du travail en vigueur à la date du licenciement prévoyait que dans la lettre de licenciement ,l’employeur informe le salarié de ses droits en matière de droit individuel à la formation.

Il convient en conséquence de relever que la lettre de licenciement notifiée à Monsieur X ne respecte pas les dispositions légales sus-visées et de considérer que le salarié s’est vu ainsi privé de la possibilité de réaliser un bilan de compétence .

Eu égard au nombre d’heures acquises par Monsieur X ( 65 heures depuis le 20 Mars 2006 ) ,non sérieusement contestées quant à leur quantum , au taux horaire minimal garanti (9,28€ ) il ya lieu de lui allouer à ce titre la somme de 65 x 9,28€ = 603,20€ .

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef .

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens .

L’appelante et l’intimé , succombant en partie à leurs prétentions en cause d’appel, supporteront les dépens d’appel par moitié et seront déboutés de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile .

Le jugement déféré sera confirmé de ces chefs .

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant par arrêt contradictoire , prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile ;

— Infirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne les dépens et l’article 700 du code de procédure civile .

Statuant à nouveau ,

— Dit que le licenciement de Monsieur Y X repose sur une cause réelle et sérieuse ,

— Déboute Monsieur X de ses demandes formulées à ce titre ,

— Condamne la société ORTEC ENVIRONNEMENT à payer à Monsieur X la somme de 603,20€ au titre du droit individuel à la formation ,

— Déboute les parties du surplus de leur demande .

— Dit que les dépens d’appel seront partagés par moitié par les parties .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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