Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 29 novembre 2019, n° 17/06065

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-3, 29 nov. 2019, n° 17/06065
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/06065
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 1er mars 2017, N° 14/02097
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2019

N° 2019/ 316

RG 17/06065

N° Portalis DBVB-V-B7B-BAI4J

Y X

C/

Etablissement Public REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE D’ALGERIE représentée par […]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

-Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

- Me Lionel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de MARSEILLE en date du 02 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02097.

APPELANTE

Madame Y X, née le […] à TLEMCEN, demeurant […]

représentée par Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Philippe CAPPANI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Etablissement Public REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE D’ALGERIE représentée par […], demeurant […]

représentée par Me Lionel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Océane HORN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Erika BROCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2019.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2019

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 13 septembre 2011, Mme X a signé avec la Ministère de l’Education Nationale de l’Etat Algérien, un contrat de travail en qualité d’enseignant vacataire dispensant des cours de langue nationale et a été rémunérée mensuellement par les services de l’ELCO selon les heures d’enseignement dispensés au sein des établissements scolaires publics français.

Il a été mis fin à son contrat de vacation à la date du 29 février 2012 aux motifs « de nombreuses absences non justifiées, couvrant une vingtaine d’heures sur une période de dix jours (10 jours), courant les mois de décembre 2011 et janvier 2012 ».

Deux ans plus tard, le 6 février 2014, le conseil de Madame X a adressé un courrier au Consulat Général d’Algérie afin de solliciter la réintégration de sa cliente.

Puis, la salariée a saisi le Conseil de Prud’homme de Marseille le 18 juillet 2014 afin de former les demandes suivantes :

1. Dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail : 50.000 € ;

2. Condamnation au titre du non-paiement de décembre 2011 à mars 2012 : 4.800 €;

3. Indemnité de préavis : 1.200 € ;

4. Incidence des congés payés sur préavis : 120 €;

5. Congés payés : 1.200 € ;

6. Article 700 CPC : 1.500 € ;

7. Condamnation de l’employeur aux entiers dépens.

Par jugement de départage en date du 2 mars 2017, le conseil de prud’hommes de Marseille a prononcé la nullité de l’assignation délivrée au consulat d’Algérie aux motifs que :

«Aux termes de l’article 684 du code de procédure civile, tout acte adressé à un État étranger ou à un agent diplomatique étranger en France ou à tout autre bénéficiaire de l’immunité de juridiction est porté à la connaissance de ce dernier par voie diplomatique.

En l’espèce, le 05 août 20141e Ministère de la justice français a transmis la convocation, en date du 22 juillet 2014, du Consulat Général d’Algérie à Marseille devant le bureau de conci1iation, au Ministère des affaires étrangères français qui l’a notifiée par la suite à l’Ambassade de l’Etat d’Algérie à Paris.

Or, le Consulat Général d’Algérie à Marseille, émanation de l’État algérien, n’a pas de personnalité juridique et n’est pas habilité à recevoir directement des actes de procédure.

L’acte d’assignation ne peut pas être notifié au Consulat Général d’Algérie ou à l’Ambassade de l’État algérien en France.

C’est à l’État algérien que l’acte d’assignation doit être notifié.

La notification d’un acte de procédure à un État étranger doit être faite par la voie diplomatique, laquelle n’a pas été respectée en l’espèce.

Dès lors, c’est à bon droit que la nullité de l’assignation a été soulevée par la République algérienne démocratique et populaire.

Surabondamment, il convient de rappeler que la demande de condamnation est dirigée à l’encontre du Consulat Général d’Algérie, lequel n’a pas la personnalité morale et ne peut donc être l’objet d’une condamnation ».

La salariée a interjeté appel le 29 mars 2017.

Dans ses dernières conclusions en date du 30 mai 2017, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, Madame X demande à la cour de :

— recevoir Mme X en son appel et l’y dire bien fondée ;

— réformer le jugement de départage du 2 mars 2017 du Conseil de Prud’hommes de MARSEILLE en toute ses dispositions ;

— constater l’intervention spontanée et volontaire de la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France en première instance en lieu et place du consulat d’Alégrie ;

— débouter la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

— constater la rupture abusie du contrat de travail imputable à l’employeur ;

— requalifier la suspension du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence, à défaut de la réintégration régulière de la salariée,

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France à payer à Mme X la somme de 50.000 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France à payer à Mme X la somme de 1.200 € au titre d’indemnité de préavis ;

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France à payer à Mme X la somme de 120 € au titre des congés payés y afférents ;

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France à payer à Mme X la somme de 4.800 € au titre du non-paiement de décembre 2011 à mars 2012 ;

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France au paiement de la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 CPC

— condamner la RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE représentée par l’Ambassade d’Algérie en France aux entiers dépens ;

Dans ses dernières conclusions en date du 28 juin 2017, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, l’Etablissement Public RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE D’ALGÉRIE représentée par l’ambassade d’Algérie en France demande à la cour de :

Vu le code de procédure civile et notamment les articles 117, 118, 121, 684, 693 et 700,

Vu la circulaire du 1er février 2006 du ministère des affaires étrangères,

Vu les jurisprudences citées,

Vu les pièces versées aux débats,

— Dire et juger que le consulat général d’Algérie est dépourvu de la personnalité juridique

— Dire et juger que la procédure de notification par voie diplomatique de la convocation devant le conseil de prud’hommes est irrégulière

En conséquence,

— Dire et juger que par application des articles 117 et 684 du code de procédure civile la convocation du 22 juillet 2014 devant le conseil de prud’hommes est irrégulière rendant nulle et de nul effet toute la procédure

— Débouter Madame X de l’ensemble de ses demandes

En tout état de cause :

— Condamner Madame X à payer à l’Etat Algérien la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamner Madame X aux entiers dépens.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 octobre 2019 et l’audience de plaidoirie fixée au 22 octobre 2019.

SUR CE

- Sur la régularité de la procédure

Madame X soutient qu’il ne s’agit pas en l’espèce d’attraire en justice un état étranger seul sans son représentant en France et qu’en l’espèce, elle n’a pas esté en justice contre l’ambassadeur mais contre l’établissement public qui est l’ambassade d’Algérie .

Donc il n’était pas nécessaire de respecter les dispositions de l’article 684 du code de procédure civile.

Elle expose que le conseil de prud’homme était compétent pour statuer s’agissant d’un litige, son licenciement qui constitue un acte de gestion, l’opposant au consulat d’Algérie qui ne bénéficie pas de l’immunité de juridiction.

Elle prétend enfin que la république algérienne démocratique et populaire, représentée par l’ambassade d’Algérie, est intervenue spontanément et volontairement aux débats, bien que la demande ait été faite à l’encontre du consulat général d’Algérie.

La République Algérienne démocratique et populaire représentée par l’ambassade d’Algérie en France expose que le consulat d’Algérie n’a pas la personnalité morale, ce qui constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’assignation en application de l’article 117 du CPC et que la procédure de notification par voie diplomatique prévue par l’article 684 du même code, l’acte étant destiné à un Etat étranger, n’a pas été respectée.

Elle soutient qu’elle n’est pas intervenue spontanément en lieu et place du consulat général d’Algérie à Marseille mais que, comme le consulat n’avait pas la personnalité morale et donc la capacité à agir et ester en justice, l’Etat a agi pour faire valoir les exceptions de nullité de procédure.

Cependant, force est de constater que Madame X a conclu un contrat de travail avec le Ministère de l’Education Nationale de l’Etat Algérien et non avec l’ambassade d’Algérie et encore moins avec le Consulat d’Algérie.

Or elle a saisi le conseil de prud’hommes de Marseille de demandes formées à l’encontre du Consulat d’Algérie, lequel n’a pas la personnalité morale, ce que la salariée ne conteste pas.

En aucun cas, la République Algérienne Démocratique n’est intervenue spontanément aux débats en lieu et place du consulat mais bien pour faire valoir les exceptions de nullité de procédure, en l’absence de personnalité morale du dit consulat.

Il s’en suit que, comme l’a constaté justement le premier juge dont la cour adopte expressément les motifs, la procédure de notification par voie diplomatique de la convocation devant le conseil de prud’hommes était irrégulière en application de l’article 684 du code de procédure civile et par ailleurs également irrégulière pour être destinée au consulat d’Algérie , dépourvu de personnalité

morale , en application de l’article 117 du même code.

Il en résulte que la nullité de la procédure est encourue et que le jugement déféré doit être confirmé dans toutes ses dispositions .

Madame X qui succombe sera condamnée aux entiers dépens ainsi qu’à payer à l’intimé la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Y ajoutant,

Condamne Madame X à payer à la République Algérienne Démocratique et Populaire représentée par l’Ambassade d’Algérie en France la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamne aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

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