Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 7 novembre 2019, n° 19/02392

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-9, 7 nov. 2019, n° 19/02392
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/02392
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulon, JEX, 3 décembre 2018, N° 18/02072
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 7 NOVEMBRE 2019

N°2019/820

Rôle N° RG 19/02392 N° Portalis DBVB-V-B7D-BDYUV

Association CLESI

C/

Association FDSL FEDERATION DES SYNDICATS DENTAIRES LIBERAUX

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me SARAGA-BROSSAT

Me CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Inscription de faux incidente à l’appel du jugement du Juge de l’exécution de TOULON en date du 04 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 18/02072.

APPELANTE

Association CLESI CENTRE LIBRE ENSEIGNEMENT SUPERIEUR INTERNATIONAL

Association régie par la loi du 1er Juillet 1901, déclarée à la Préfecture du Var le 8 Octobre 2012 récépissé n° W832010033 Siret n° 789 819 067 et publiée au Journal Officiel du 27 Octobre 2012 sous l’annonce n° 995

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social […]

représentée par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Catherine GRELLIER, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

Association FDSL FEDERATION DES SYNDICATS DENTAIRES LIBERAUX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège […]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS

IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Luc-Marie AUGAGNEUR, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Septembre 2019 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale POCHIC, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller.

Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président (rédactrice)

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2019, puis prorogé au 07 Novembre 2019.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 7 Novembre 2019.

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Fédération des Syndicats Dentaires Libéraux (ci après désignée la FSDL) représentant les intérêts de chirurgiens dentistes, reproche à l’Association Centre Libre d’Enseignement Supérieur International (ci après CLESI), établissement privé d’enseignement, de former des étudiants, de délivrer des diplômes étrangers, permettant ensuite d’exercer en France, mais en contournant les règles de numérus clausus, créant ainsi une concurrence déloyale susceptible de porter atteinte à la qualité des soins, leur sécurité, en raison d’une insuffisance, à craindre, de la qualification professionnelle obtenue, ce à défaut notamment d’agrément ministériel.

La cour d’appel d’Aix en Provence, par arrêt infirmatif en date du 27 septembre 2016 a notamment :

— ordonné à l’association CLESI de cesser de dispenser dans tout autre établissement ouvert en France, des cours s’inscrivant dans le cadre d’une formation en odontologie, ce dans le délai de deux mois à compter de la signification de la décision, à peine d’une astreinte de 5 000 € par jour de retard, pendant trois mois,

— ordonné la publication sur le site internet de l’association CLESI et à ses frais, en page d’accueil, pendant deux mois, à peine d’une astreinte de 500 € par jour de retard passé le délai de dix jours à compter de la signification, d’un extrait du dispositif de l’arrêt lui faisant interdiction de dispenser les cours, outre la publication dans le journal 'l’Etudiant’ et 'Var matin’ dans les mêmes conditions,

— condamné l’association à payer une somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens de 1re instance et d’appel.

L’arrêt a été signifié le 7 octobre 2016 et l’association CLESI a formé un pourvoi, lequel a été rejeté.

Le juge de l’exécution de Toulon, le 4 décembre 2018, a entre autres dispositions, liquidé l’astreinte à la somme de 455 000 €, en condamnant l’association CLESI à payer cette somme avec intérêt au taux légal à compter de la décision, et ordonné une nouvelle astreinte provisoire de 5 000 € par jour de retard, à décompter après un délai de deux mois à compter de la notification de la décision par le greffe, sans limitation de durée.

L’association CLESI a fait appel de la décision par déclaration au greffe de la cour d’appel le 7 décembre 2018. Le dossier est audiencé ce jour, 4 septembre 2019 pour plaidoiries, sous le numéro RG 18-19359.

Cependant et parallélement, dans le présent dossier RG 19-2392, l’assocation CLESI, sur le fondement de l’article 306 du code de procédure civile, a procédé le 8 février 2019 à une inscription de faux incidente.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans ses dernières conclusions en date du 3 septembre 2019, l’assocation CLESI demande à la cour de :

— déclarer recevable et bien fondée son action incidente en inscription de faux à l’encontre de l’acte de signification du 7 octobre 2016, portant sur l’arrêt RG n°14-05102,

— dire que cet acte de signification est un faux en écriture authentique.

Il n’a pas été repris ses précédentes écritures quant au dispositif du 30 août 2019 qui comportait également la demande visant à :

— débouter le syndicat FSDL de ses demandes,

— le condamner à lui payer la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens.

L’association CLESI explique que l’huissier de justice a notifié l’arrêt l’opposant au syndicat FSDL, le 7 octobre 2016, en mentionnant le nom d’un autre syndicat l’UNION DENTAIRE, et en indiquant que l’acte avait été remis à Me Peisse, avocat, spécialement habilité pour ce faire, qui ne l’était pas du tout. L’huissier de justice sans le justifier a mentionné intervenir à la requête du syndicat UJCD, de sorte que les mentions sont matériellement et intellectuellement fausses. L’acte n’avait pas été produit devant le premier juge, volontairement dissimulé, il n’a donc pas pu être contesté et il n’a été communiqué que devant la cour d’appel le 1er février 2019. Il est manifeste qu’aucun mandat n’a été reçu par l’huissier de la part de l’Union dentaire pour cet acte.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 28 août 2019, l’association FSDL demande à la cour de :

— déclarer la demande en inscription de faux irrecevable,

— débouter le CLESI de toutes ses demandes,

En tout état de cause,

— dire que l’inscription de faux n’impacte pas les effets de la signification de l’arrêt RG14-5102,

— condamner l’association CLESI à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens.

Selon elle, l’association CLESI cherche tous les moyens pour ne pas exécuter, mais la procédure incidente en inscription de faux n’étant pas soumise à la représentation obligatoire par avocat, les moyens ne peuvent en être présentés par RPVA et il fallait recourir à un dépôt papier ce qui n’a pas été le cas, permettant en l’espèce de répondre aux critères de fiabilité fixés par la loi.

A défaut et sur le fond, l’erreur sur l’identité du requérant lors de la signification, est un vice de forme et non de fond, qui suppose la démonstration d’un grief. La CLESI aurait dû intenter une action en nullité car il apparait qu’une erreur matérielle a été faite sur l’identité du requérant, une manipulation informatique ayant inversé les éléments, tandis que l’Union Dentaire et la FSDL ont le même postulant. Mais il est trop tard pour invoquer cette difficulté car une explication sur le fond a eu lieu avant que la nullité ne soit plaidée. Quoiqu’il en soit, l’acte de signification n’est destiné qu’à prouver l’opération juridique qu’il constate et il n’y a pas absence de signification, l’arrêt a bien été porté à la connaissance de l’association CLESI, d’ailleurs sa signature figure sur l’acte. Il y a lieu d’admettre même si l’on écarte son authenticité, que l’acte vaut comme signature privée.

Le dossier a été transmis au Ministère Public, qui le 30 juillet 2019 a conclu au mal fondé de l’inscription de faux. Il considère que l’huissier a été saisi par l’Union Dentaire et que le faux n’est pas établi.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

* sur l’utilisation du support RPVA :

Le FSDL conteste en s’appuyant sur les articles 306 du code de procédure civile, 748-1 et 748-6 du même code, l’utilisation du RPVA pour le dépôt d’un acte de faux incident tel celui développé par l’association CLESI, dans la mesure où la représentation par avocat n’est pas obligatoire en la matière et que les procédés techniques utilisés doivent garantir l’intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges.

Il ne démontre cependant pas en quoi, l’acte en inscription de faux incident, tel que réalisé sur support RPVA le 8 février 2019 puis remis au greffe sur support papier, le 12 février suivant, ne présenterait pas les garanties d’intégrité, de sécurité et de confidentialité indispensables, tandis qu’il émane d’un avocat, auxiliaire de justice et non d’un particulier et qu’il résulte de l’article 748-1 du code de procédure civile, une volonté du législateur de voir généraliser ce moyen de communication et de transmission en posant le principe de la liberté d’y recourir, sous les réserves de l’article 748-6, alors que conformément à l’article 748-2 du code de procédure civile, en son dernier alinéa, vaut consentement à la réception, l’adhésion par un auxiliaire de justice à un réseau de communication électronique, tel le RPVA, ce qui est le cas en l’espèce de l’avocat de la FSDL.

* sur l’existence d’un faux en écriture authentique :

Aux termes de l’article 1371 du code civil, l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté. En cas d’inscription de faux, le juge peut suspendre l’exécution de l’acte.

En effet, compte tenu de sa qualité d’auxiliaire de justice, de son assermentation, les faits qu’un huissier de justice relate comme les ayant accomplis lui même ou s’étant passés en sa présence, ont une valeur probante renforcée, mais il n’en est pas de même des constatations matérielles qu’il a pu faire, lesquelles n’ont valeur que de simples renseignements.

L’arrêt en date du 27 septembre 2016, n°RG 14-5102, a bien été prononcé entre la Federation des Syndicats Dentaires Libéraux (FSDL) et l’association CLESI. Mais lors de sa signification par acte du 7 octobre 2016, qui en reprend les références (n°RG 14-5102), il a été indiqué qu’elle était réalisée à la requête de l’Union Dentaire (anciennement dénommée l’Union des Jeunes Chirurgiens Dentistes UJCD) dont le siège est situé […].

La FDSL ne remet pas en cause le caractère inexact de la mention portée sur l’acte de signification discuté. Elle expose que la FSDL et l’UJCD ont le même postulant et qu’une manipulation informatique a inversé les informations relatives à l’identité de la FSDL et de l’UJCD, de sorte que selon la FDSL, il y aurait lieu d’admettre non pas un faux, mais une erreur matérielle entrainant un risque de nullité pour vice de forme, à charge de démontrer un grief, mais nullité irrecevable car invoquée trop tardivement après des conclusions au fond de l’affaire de la part de l’association CLESI.

La FDSL produit effectivement une décision du même jour, devant la même chambre de la cour d’appel, dans un second dossier opposant cette fois, l’association CLESI à l’UJCD, mais domiciliée […] à […], sous le numéro RG 14-18370.

Il est justifié par les pièces communiquées aux débats, que ces procédures semblables ont été menées de manière paralèlle, toutes deux notifiées par RPVA entre avocats le 29 septembre 2016, et qu’une inversion des dénominations mais non des adresses a été commise, dans le dossier n°RG 14-5102, lors de la création des documents à notifier, étant relevé que l’adresse de l’Union Dentaire sur la notification qui la concerne, en date du 7 octobre 2016 (RG 14-18370) n’est pas altérée, elle mentionne bien, […] à Paris.

Il résulte de ce qui précéde que concernant les diligences qu’il dit avoir personnellement exercées, l’auxiliaire de justice, n’a pas porté de mentions inexactes au sens de l’article 1371 du code civil, l’interversion provenant manifestement d’une erreur de saisie lors de la création de l’acte à notifier, provoquée par la concomittance et la similarité de deux procédures distinctes.

Le faux n’étant pas admis, il n’y a pas lieu ici d’envisager son impact sur la signification de l’arrêt prononcé le 27 septembre 2016 (n°RG 14-5102), étant souligné que la nullité de l’acte est abordée dans la procédure principale également soumise à la cour (RG 18-19359).

* sur les autres demandes :

Il est inéquitable de laisser à la charge de la FSDL les frais irrépétibles engagés dans l’instance, une somme de 3 000 € lui sera accordée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La partie perdante supporte les dépens, ils seront donc à la charge de l’association CLESI.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant publiquement,

DIT recevable l’association CLESI en sa demande en inscription de faux,

LA DEBOUTE de ses prétentions,

LA CONDAMNE à payer la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la FSDL,

LA CONDAMNE aux entiers dépens de procédure.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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