Cour d'appel d'Amiens, 5ème chambre cabinet a, 26 octobre 2010, n° 10/00306

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Thierry Vallat · 13 mai 2016

L'ONG Oxfam vient de rendre publique une étude sur "Les refus de pause WC dans l'industrie de la volaille". Il ressort de ce rapport édifiant que dans plusieurs usines de volailles aux Etats-Unis, où règne l'obsession de la productivité, prendre une pause pipi est devenu tellement compliqué que les ouvriers en viennent à porter des couches-culottes durant leurs heures de travail, pour éviter de perdre leur travail ! La grande majorité des 250.000 ouvriers du secteur avicole américain déplore ne pas bénéficier de pauses-toilettes adéquates et de ne même pas pouvoir demander la permission, …

 

Thierry Vallat · 24 mars 2016

La société Teleperformance vient de mettre en place le 23 mars 2016 à Blagnac sur la ZAC Andromède un logiciel "CAV" qui impose aux salariés de demander leur pause-pipi par mail (http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/chez-teleperformance-un-mail-pour-demander-la-pause-pipi_1776217.html). Les syndicats dénoncent "une atteinte à la dignité de la personne humaine" avec cette autorisation écrite pour prendre une pause" et appellent à un débrayage vendredi prochain. La société leader des centres d'appel, et aux méthodes sociales controversées …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 5e ch. cab. a, 26 oct. 2010, n° 10/00306
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 10/00306
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Amiens, 16 décembre 2009, N° F08/00567
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

B

AU

F

C

T

N

E

R

Z

AD

BW

J

C/

XXX

JPA/PC

COUR D’APPEL D’AMIENS

5e chambre sociale cabinet A

PRUD’HOMMES

ARRET DU 26 OCTOBRE 2010

************************************************************

RG : 10/00306

JUGEMENT du Conseil de prud’hommes d’AMIENS (REFERENCE DOSSIER N° RG F08/00567) en date du 17 décembre 2009

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur AV B

3 Cavée du Quesnoy 80510 LONGPRE-LES-CORPS-SAINTS

COMPARANT

Monsieur AT AU

XXX

COMPARANT

Monsieur V F

XXX

COMPARANT

Monsieur G C

XXX

COMPARANT

Monsieur S T

XXX

XXX

Monsieur M N

XXX

COMPARANT

Monsieur AC E

XXX

XXX

XXX

Monsieur Q R

XXX

COMPARANT

Monsieur K Z

XXX

COMPARANT

Monsieur AE AD

XXX

COMPARANT

Monsieur BU-BV BW

86 rue AC Brossolette 80470 AILLY SUR SOMME

COMPARANT

Monsieur I J

XXX

COMPARANT

ASSISTES ET REPRESENTES concluant et plaidant par Me Patrick DANNAY, avocat au barreau D’AMIENS

ET :

INTIMEE

XXX

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domicilié en cette qualité audit siège :

XXX

COMPARANTE par M. X muni d’un pouvoir en date du 18.06.2010

assistée concluant et plaidant par Me HIAULT substituant la SCP MONTIGNY DOYEN, avocats au barreau D’AMIENS

DEBATS :

A l’audience publique du 22 Juin 2010, devant Mme D, Conseiller , siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

— Mme D en son rapport,

— les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives .

Mme D a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 26 Octobre 2010 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Y

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme D en a rendu compte à la formation de la 5e chambre sociale, cabinet A de la Cour composée en outre de :

M. AARON, Conseiller faisant fonctions de Président de Chambre

Mme LECLERC-GARRET, Conseiller

qui en a délibéré conformément à la Loi.

ARRET : CONTRADICTOIRE

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 26 Octobre 2010, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. AARON, Conseiller faisant fonctions de Président de Chambre, désigné par ordonnance de M. le Premier Président en date du 28 juin 2010 et Mme Y, Greffier

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 17 décembre 2009 par lequel le conseil de prud’hommes d’Amiens, statuant dans le litige opposant treize salariés à la SA Groupe Bigard, a annulé les blâmes infligés à MM AV B et K Z, confirmé les sanctions disciplinaires infligées aux onze autres salariés et débouté l’ensemble des demandeurs de leurs prétentions indemnitaires pour harcèlement moral et comportement discriminatoire, la société employeur étant pareillement déboutée de sa demande reconventionnelle ;

Vu l’appel interjeté le 18 janvier 2010 par MM. B AV, AU BC, F V, T S, N M, AB AC, R Q, Z K, AD AE, BW BU-BV et J I à l’encontre de cette décision qui leur a été notifiée les 7 et 8 janvier précédents ;

Vu les conclusions et observations orales des parties à l’audience des débats du 22 juin 2010 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel ;

Vu les conclusions enregistrées le 13 avril 2010, régulièrement communiquées et soutenues oralement à l’audience, aux termes desquelles les salariés appelants, faisant valoir qu’ils ne pouvaient être sanctionnés, sans qu’il soit porté atteinte à leurs libertés et droits fondamentaux, pour s’être rendus aux toilettes afin de satisfaire des besoins physiologiques, que le contrôle et le minutage des temps passés aux toilettes constituent une forme de harcèlement moral, qu’il n’est justifié d’aucun abus des salariés dans l’exercice de leur droit de se rendre aux toilettes en dehors des temps de pause réglementaires, sollicite la confirmation du jugement déféré en ce que celui-ci a annulé les sanctions prononcées à l’encontre de MM AV B et K Z, sauf allouer à ceux-ci des dommages et intérêts pour avertissement abusif et une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, le réformer pour le surplus et statuant à nouveau, annuler les avertissements notifiés aux autres salariés les 11 et 12 juin 2008 et condamner la société Groupe Bigard à payer à chacun des intéressés des dommages et intérêts pour harcèlement moral, outre une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

Vu les conclusions en date du 21 mai 2010, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, par lesquelles la société Groupe Bigard, invoquant l’irrecevabilité de l’appel formé par douze des salariés pour défaut de communication de pièces et l’irrecevabilité des demandes présentées en cause d’appel par M. BF BG qui n’a pas interjeté appel du jugement dans les délais impartis, réfutant les moyens et arguments développés au fond quant à l’existence de sanctions disciplinaires prétendument injustifiées et à l’allégation de harcèlement moral, demande à titre principal à la cour de déclarer l’appel de M. BG et celui des autres salariés irrecevables, tout en sollicitant subsidiairement la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et la condamnation de chacun des salariés appelants à lui payer une indemnité par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

SUR CE, LA COUR

Attendu que faisant état d’abus de la part de certains salariés dans la prise de temps de pause en dehors des pauses réglementaires prévues au sein de l’entreprise, la Sa Groupe Bigard a notifié à 13 salariés, après entretiens préalables, différentes sanctions (blâmes ou avertissements), par courriers en date des 11 et 12 août 2008, que contestant la légitimité de ces sanctions et estimant que le comportement et la surveillance mise en place par l’employeur était constitutif d’une forme de harcèlement moral, les salariés sanctionnés ont saisi le conseil de prud’hommes d’Amiens aux fins d’annulation des sanctions et paiement de dommages et intérêts ; que statuant par jugement du 17 décembre 2009, le conseil de prud’hommes s’est prononcé comme rappelé précédemment ;

Attendu concernant les demandes présentées par M. BF BG que celles-ci doivent être déclarées irrecevables dès lors que l’intéressé n’a pas interjeté appel dans les délais impartis du jugement de débouté du conseil de prud’hommes d’Amiens qui lui a été régulièrement notifié le 7 janvier 2010, lequel le jugement est donc devenu définitif à son égard ;

Attendu en revanche que le défaut de communication de pièces allégué par la société Groupe Bigard n’est pas de nature à affecter la recevabilité de l’appel régulièrement régularisé par les autres salariés suivant déclaration faite au greffe de la cour le 18 janvier 2010 ; qu’au demeurant l’ensemble des pièces et documents produits ont été contradictoirement débattus, quant à leur valeur et leur portée, au cours du débat probatoire, lors de l’audience du 22 juin 2010 ;

Attendu au fond que le jugement déféré n’est pas contesté en ce qu’il a annulé les sanctions infligées à M. AV B et K Z au vu des justificatifs médicaux produits par les intéressés; qu’il apparaît toutefois que les sanctions ont été notifiées par l’employeur en toute connaissance de l’état de santé des deux salariés , ainsi qu’il résulte des termes mêmes des lettres de notification de sanctions qui leur ont été adressées, faisant état pour l’un de la nécessité d’une hydratation suffisante et de mictions régulières, pour l’autre d’une pathologie des voies urinaires ; que ces circonstances sont de nature à conférer un caractère abusif aux sanctions infligées aux deux salariés pour absences trop fréquentes au poste de travail en dehors des temps de pause; que cet abus de l’employeur dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire sera sanctionné par l’allocution à chacun des intéressés de dommages et intérêts à hauteur des sommes qui seront précisées au dispositif de l’arrêt ;

Attendu concernant les autres salariés qu’il entre dans les prérogatives de l’employeur de réglementer les temps de pause dans le respect des dispositions légales, réglementaire ou conventionnelles ; qu’il lui appartient également de s’assurer du respect de ces temps de pause et d’user de son pouvoir disciplinaire en cas de dépassement ; que ce pouvoir de réglementation ne saurait toutefois aller jusqu’à interdire aux salariés de s’absenter en dehors de leur temps de pause pour satisfaire dans des conditions normales à des besoins physiologiques, l’employeur conservant cependant l’usage de son pouvoir disciplinaire en cas d’abus ;

Attendu qu’il ressort en l’espèce des pièces et documents du dossier que les salariés dont les horaires de travail étaient de 13h 00 à 20h30 disposaient de deux pauses de 15h 30 à 15 h 45 et de 17 h 45 à 18 h00, dont il n’est ni justifié ni d’ailleurs allégué qu’elles ne répondaient pas aux prescriptions légales, réglementaires ou conventionnelles ; qu’en dehors de ces temps de pause réglementaires, les salariés disposaient par ailleurs de la possibilité de se rendre aux toilettes pour satisfaire dans des conditions normales à leurs besoins naturels ; qu’il est toutefois établi que sur deux journées de travail (21 et 22 juillet 2008), Messieurs AE AO, Q R, AT AU, Q G, Éric T, Q N, I J, V F, AC E, BU-BV BW se sont absentés de leurs postes de travail à des fréquences diverses, en dehors des temps de pause quotidiens et sans aucune justification liée à leur état de santé, pour des durées allant au total d’un minimum de 30 minutes à plus d’une heure, soit à des fréquences et pour des durées anormalement longues pour prétendre répondre à des nécessités physiologiques normales; qu’informé de ces dépassements abusifs perdurant malgré de précédentes mises en garde hiérarchiques, l’employeur a pu légitimement mettre en place un dispositif de contrôle et de comptabilisation des durées d’ absence au poste de travail en dehors des temps de pause réglementaires et user de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner les abus commis par les intéressés, sans que cette manière de faire puisse laisser supposer, à défaut de tout autre élément, l’existence d’un harcèlement moral ou une atteinte aux libertés et droits fondamentaux des intéressés ;

Attendu qu’à la faveur de ces motifs et de ceux non contraires des premiers juges le jugement déféré sur confirmé en ce qu’il a débouté les salariés (à l’exception de M. AV B et K Z) de leur demande tendant à l’annulation des sanctions disciplinaires qui leur ont été infligées et l’ensemble des salariés de leurs demandes indemnitaires pour harcèlement moral et discrimination ;

Attendu qu’à l’exception de Messieurs B et Z, les salariés demandeurs seront pareillement déboutés de leur demandes indemnitaires sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

Attendu que la disparité des situations économiques respectives des parties commande également de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de la société employeur;

PAR CES MOTIFS

Rejette le moyen d’irrecevabilité d’appel soulevé par la société Groupe Bigard

Déclare irrecevables les demandes présentées par M. BF BG;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Condamne la société Groupe Bigard à payer à MM AV B et K Z, à chacun, les sommes suivantes :

—  1000 € à titre d’indemnité pour avertissement abusif,

—  500 € à titre d’indemnité par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt;

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

Condamne MM AE AO, Q R, AT AU, Q G, Éric T, Q N, I J, V F, AC E, BU-BV BW aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT.

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Textes cités dans la décision

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