Cour d'appel de Bordeaux, 2 juin 2016, n° 14/07201

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 2 juin 2016, n° 14/07201
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 14/07201
Décision précédente : Tribunal d'instance de Périgueux, 26 octobre 2014, N° 11-14-000652

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A


ARRÊT DU : 02 JUIN 2016

(Rédacteur : B FOURNIEL, président,)

N° de rôle : 14/07201

H A

F A

c/

Z X

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 27 octobre 2014 par le Tribunal d’Instance de PERIGUEUX (RG : 11-14-000652) suivant déclaration d’appel du 10 décembre 2014

APPELANTS :

H A

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

F A

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

représentés par Maître Alexandre ALJOUBAHI, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

Z X

XXX

non représentée, assignée à personne

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 avril 2016 en audience publique, devant la cour composée de :

B FOURNIEL, président,

Jean-Pierre FRANCO, conseiller,

B BRISSET, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

— réputé contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DES FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur et Madame A ont pris en location à usage d’habitation une maison située Le Bourg – XXX dont la propriétaire est Mme Z X.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 novembre 2013, les époux A ont signifié leur congé à Mme X, puis par acte d’huissier du 10 juillet 2014, l’ont fait assigner devant le tribunal d’instance de Périgueux en demandant de dire et juger que le bail conclu entre les parties concernait une location nue, que le logement ne revêtait pas les caractères d’un logement décent, que les époux avaient subi un trouble de jouissance et un trouble moral imputable à Mme X et en conséquence de réduire le loyer de 800 € par mois à 300 € par mois et de condamner Mme X à leur verser les sommes de 1750 € en remboursement des loyers indûment versés, 1500 € en réparation du préjudice de jouissance et 1500 € en réparation du préjudice moral.

Par jugement réputé contradictoire du 27 octobre 2014, le tribunal d’instance de Périgueux a débouté les époux A de leurs demandes , et les a condamnés aux dépens.

Par déclaration en date du 10 décembre 2014, M. et Mme A ont interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions notifiées et remises par voie électronique le 7 juillet 2015, les appelants demandent à la cour :

— de dire et juger que leur appel est recevable et bien fondé ;

— de réformer en toutes ses dispositions le jugement du 27 octobre 2014 rendu par le Tribunal d’Instance de Périgueux ;

— de dire et juger que le bail conclu entre les parties concerne une location nue, que le logement ne revêt pas les caractères d’un logement décent et que les époux A ont subi des troubles de jouissance et un préjudice moral imputables à Mme X.

— de réduire le montant du loyer de 800 € à 300 € par mois ;

— de condamner Mme X à leur payer la somme de 1750 € en remboursement des loyers indûment versés entre septembre et décembre 2013;

— de condamner Mme X à leur payer la somme de 1500 € en réparation de leurs troubles de jouissance , et celle de 1500 € en réparation de leur préjudice moral ;

— de dire et juger que les sommes réclamées seront productives d’intérêts à compter de la demande ;

— d’ordonner la capitalisation des intérêts ;

— de condamner Mme X à payer aux époux A la somme de 1800 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile , et aux entiers dépens.

Ils font essentiellement valoir que postérieurement à leur entrée dans les lieux, ils ont reçu de Mme X un contrat de bail qu’ils ont légitimement refusé de signer , le type de local loué étant abusivement qualifié de gîte , qu’ il n’a jamais été dans l’intention des parties de conclure un contrat de location saisonnière portant sur un gîte et d’une durée limitée à un an ; que la location d’un logement meublé suppose la présence d’un mobilier suffisant pour permettre une jouissance normale des locaux ; que le procès-verbal établi par Me Estrade, huissier de justice, démontre l’insuffisance des meubles garnissant la location (pas de lit, d’éléments de cuisine, de meubles de

rangement, de table, de bureau ni de commode) ; que la commune intention des parties de conclure une location meublée ne saurait être caractérisée par le contrat faisant état de la présence de meubles, contrat qu’ils ont refusé de signer ; que le loyer du logement vide, nécessairement inférieur à celui d’un logement meublé, doit être réduit à 400 € par mois ; que ce loyer doit faire l’objet d’une réduction complémentaire de 100 € au regard du caractère indécent du logement loué qui dispose d’une isolation insuffisante, d’un compteur électrique défaillant et d’un compteur eau commun à deux logements ; qu’ils ont été privés de la jouissance de la grange, la partie haute de celle-ci étant garnie d’objets mobiliers appartenant à la propriétaire ; que leur préjudice moral réside dans la volonté de Mme X de leur faire signer un contrat ne correspondant à la réalité de la situation, du caractère indécent du logement et que compte tenu des circonstances et de la résistance opposée par Mme X, ils aient dû vivre plusieurs mois dans ce logement et trouver d’urgence une autre habitation.

Mme Z X , assignée à personne , n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2016.

* * *

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA QUALIFICATION DU BAIL

Selon l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 : ' Les dispositions du présent titre sont d’ordre public . Elles s’appliquent aux locations de locaux à usage d’habitation principale ou à usage mixte professionnel et d’habitation principale ainsi qu’au garage, place de stationnement , jardins et autres locaux loués accessoirement au local principal par le même bailleur . Toutefois , elles ne s’appliquent ni aux locations à caractère saisonnier , à l’exception de l’article 3-1, ni aux logements foyers, à l’exception des deux premiers alinéas de l’article 6 et de l’article 20-1. Elles ne s’appliquent pas non plus , à l’exception de l’article 3-1, des deux premiers alinéas de l’article 6 et de l’article 20-1 aux locaux meublés , ou logements attribués ou loués en raison de l’exercice d’une fonction d’occupation d’un emploi , aux locations consenties aux travailleurs saisonniers .'

En l’espèce le contrat de bail produit versé aux débats , qui qualifie le local loué de gîte , n’est signé par aucune des parties et ne constitue donc pas un document contractuel.

Toutefois les époux A indiquent avoir pris en location à usage d’habitation une maison située XXX , appartenant à Mme Z X, avoir pris possession des lieux début septembre 2013 et avoir versé un dépôt de garantie de 800 euros , correspondant à un mois de loyer.

Ces éléments suffisent à établir l’existence d’un bail verbal , dont la validité est admise par la jurisprudence , et qui est nécessairement soumis aux dispositions d’ordre public de la loi du 6 juillet 1989.

Les époux A ont d’ailleurs écrit à Mme X le 28 novembre 2013 pour lui signaler qu’ils mettaient fin au bail de la maison du bourg suivant les dispositions des articles 12 et 15 de la loi précitée.

En conséquence la discussion instaurée par les locataires sur le point de savoir si ce logement comportait un mobilier suffisant pour justifier la qualification de logement meublé dérogatoire à la loi du 6 juillet 1989 ou s’il s’agissait d’une location nue est dépourvue d’intérêt.

Il ne peut donc y avoir matière à réduction du montant du loyer à ce titre , étant observé que les époux A ont accepté de régler le loyer convenu alors qu’ils connaissaient parfaitement la consistance du mobilier qui garnissait les lieux lorsqu’ils en ont pris possession.

SUR LE CARACTERE INDECENT DU LOGEMENT

Il résulte des dispositions de l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 que si le logement loué ne satisfait pas aux dispositions des premier et deuxième alinéas de l’article 6, le locataire peut demander au propriétaire leur mise en conformité sans qu’il soit porté atteinte à la validité du contrat en cours , que le juge saisi par l’une ou l’autre des parties détermine , le cas échéant , la nature des travaux à réaliser et le délai de leur exécution , et qu’il peut réduire le montant du loyer ou suspendre , avec ou sans consignation , son paiement et la durée du bail jusqu’à l’exécution de ces travaux.

Les époux A soutiennent pour l’essentiel que le logement était mal isolé , la température n’excédant pas 15 degrés même avec le chauffage, que le compteur électrique avait été bloqué de manière illégale par Mme X et qu’ils ont dû subir des coupures très régulières de courant , et qu’ils ont également constaté des problèmes au niveau du compteur d’eau , lequel était commun à deux logements.

Le procès verbal de constat dressé le 10 décembre 2013 par Me Estrade , huissier de justice, souligne que le logement présente des fenêtres 'très anciennes avec un simple vitrage ' et qu’il y a donc une déperdition importante de chaleur alors que les pièces ne sont chauffées que par des ' petits radiateurs électriques ordinaires '.

L’huissier indique que le compteur électrique affiche une consommation de 5503 kwatts , qu’il ne tourne pas bien qu’il y ait des ampoules allumées dans les différentes pièces de la maison.

Il note que sur l’arrière de cet appareil, entre le cadran et le socle de celui-ci, a été glissée une languette plastique , laquelle selon M. A bloque le compteur , ce qui fait que la consommation n’évolue pas.

Il a également été relevé par l’huissier que les canalisations d’alimentation en eau ne comportaient pas de compteurs , et que le compteur se trouvant dans l’appartement des époux A était commun à leur logement et à l’appartement voisin .

Les appelants produisent en outre en cause d’appel une attestation de Mme B Y , laquelle déclare avoir participé à leur déménagement , et avoir pu constater l’état déplorable du jardin.

Ce témoin mentionne par ailleurs que lorsque M. A a voulu mettre un peu de chauffage , tout a disjoncté , que la maison était très froide et humide, à son avis pas conçue pour y vivre à l’année , et que des éléments les plus rudimentaires manquaient.

Les constatations de l’huissier ne fournissent pas de données sur les températures relevées dans les différentes pièces , et les éléments relevés relatifs au compteur électrique ainsi qu’aux compteurs d’eau, tout comme le témoignage de Mme Y, imprécis et empreint de subjectivité, sont insuffisants pour rapporter la preuve du caractère indécent du logement.

Force est au demeurant de constater que les locataires ne produisent aucun document de nature à établir qu’ils auraient mis en demeure la bailleresse de procéder à des travaux , ni qu’ils ont réglé des factures d’électricité excessives.

Les demandes de réduction du loyer et de remboursement des loyers versés entre septembre et décembre 2013 ne sont pas fondées et ont été justement rejetées.

SUR LE TROUBLE DE JOUISSANCE ET LE PREJUDICE MORAL

Les époux A ne démontrent pas avoir subi un trouble de jouissance effectif du fait des éléments ci-dessus évoqués concernant l’isolation , le compteur d’électricité et le compteur d’eau.

Ils prétendent qu’ils n’ont pas pu utiliser la grange , du fait que celle-ci était garnie de divers objets mobiliers appartenant à la propriétaire.

En l’absence de signature d’un contrat de location visant la mise à la disposition du locataire de la grange , les époux A ne peuvent se plaindre d’un trouble de jouissance de ce chef.

Ils invoquent enfin un préjudice moral en soutenant que Mme X a cru pouvoir les tromper en tentant de leur faire signer un bail portant sur un gîte, qu’elle n’a jamais accédé à leur demande de faire intervenir un agent EDF sur les lieux dans la mesure où le compteur était trafiqué , et qu’ils ont vécu pendant quatre mois dans un logement ne correspondant pas aux normes les plus élémentaires.

Aucun bail n’a été signé et les appelants n’établissent pas à suffisance la volonté de tromper qu’ils imputent à la bailleresse.

Ils ne démontrent pas avoir informé celle-ci de difficultés et lui avoir demandé en vain d’intervenir , notamment auprès des services d’EDF.

Leur demande d’indemnisation d’un préjudice moral a été à bon droit rejetée.

SUR LES AUTRES DEMANDES

Les époux A étant déboutés de leurs demandes principales , leurs demandes accessoires relatives aux intérêts des sommes réclamées et à l’indemnisation des frais non compris dans les dépens ne peuvent qu’être rejetées.

SUR LES DEPENS

M. et Mme A qui succombent doivent supporter les dépens de première instance et d’appel.

* * *

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne les époux A aux dépens de la présente instance.

Le présent arrêt a été signé par Madame B FOURNIEL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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