Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 9 juin 2021, n° 20/04465

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 9 juin 2021, n° 20/04465
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 20/04465
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Bordeaux, 1er novembre 2020, N° 20/00978
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 09 JUIN 2021

(Rédacteur : Jean-François BOUGON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,)

N° RG 20/04465 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LZDC

S.A. ALLIANZ IARD

c/

D E-Y

S.A. FILIA-MAIF

Caisse CPAM DES DEUX SEVRES

MAIF

Nature de la décision : AU FOND

APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le : 09 juin 2021

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance référé rendue le 02 novembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (RG : 20/00978) suivant déclaration d’appel du 17 novembre 2020

APPELANTE :

S.A. ALLIANZ IARD LA COMPAGNIE ALLIANZ IARD, société anonyme immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 542 110 291, dont le siège social est situé […], […], […], prise en la personne de son établissement secondaire sis […], prise en la personne de son représentant légal (références sinistre : […]
- […]

Représentée par Maître Charlotte GUESPIN de la SCP GUESPIN – CASANOVA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

D E-Y

née le […] à […]

de nationalité Française, demeurant […]

Représentée par Maître Mounia BELHAIMER de la SELASU QUADRILEGE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. FILIA-MAIF agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis […]

Représentée par Maître BALESTRO Aurélie, substituant Maître Paola JOLY de la SCP BAYLE – JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES DEUX SEVRES, […]

Représentée par Maître LE CAN, substituant Maître Max BARDET de la SELARL BARDET & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTERVENANT :

Société MAIF, venant aux droits de la SA FILIA-MAIF agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis […] […]

Représenté par Maître Paola JOLY de la SCP BAYLE – JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 avril 2021 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Jean-François BOUGON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Jean-François BOUGON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Greffier lors des débats : Marie-Françoise DACIEN

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE

Le 18 décembre 2016, Mme D E-Y a chuté et s’est blessée au cours d’une séance d’escalade pratiquée en salle dans les locaux Altissimo de la Sarl Prises en Mains, assurée auprès de la société Allianz Iard. Au moment de l’accident, la progression de Mme D E-Y était contrôlée par Mme A Z, assurée auprès de la société Filia-Maif (devenue la Maif). Mme D E-Y a, pour sa part, souscrit une Garantie Accidents de la Vie (GAV) auprès de la Filia Maif. En raison de son état séquellaire, Mme D E Y, en présence de la CPAM des Deux Sèvres, sollicite une mesure d’expertise et une provision à valoir sur la réparation de ses préjudices au contradictoire de la société Allianz Iard, assureur de la salle d’escalade et de la Filia-Maif, assureur de Mme A Z. Saisi de ces demandes, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux prononce comme suit:

- déclare la Sa Filia-Maif irrecevable en son exception d’incompétence (territoriale),

- ordonne une expertise et désigne le docteur B C pour y procéder, (…/…)

- condamne la Sa Allianz Iard (assureur de la salle) à payer à Mme E-Y la somme provisionnelle de 20.000 € à valoir sur la réparation de son préjudice corporel et la somme de 1.500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

- déboute Mme E-Y de sa demande à l’encontre de la SA Filia-Macif,

- déclare la présente ordonnance commune et opposable à la CPAM des Deux Sèvres,

- condamne la Sa Allianz Iard aux dépens.

*

La Sa Allianz Iard relève appel de cette décision qui décide que son obligation à indemnisation n’est pas contestable alors que celle de la Sa Filia Macif est réservée au fond et en ce qu’elle met à sa charge une provision de 20.000 €, les frais irrépétibles et les dépens de l’instance.

A l’appui de son recours, la Sa Allianz Iard explique que, le 18 décembre 2016, Mme E-Y, qui est une grimpeuse confirmée, s’est rendue à la salle d’escalade Altisssimo en compagnie de membres de sa famille, grimpeurs confirmés également, que son entrée a été réglée sur la carte de M. X, client connu de la salle pour y être inscrit depuis 2012, qu’à leur arrivée les grimpeurs ont été interrogés sur leur niveau et qu’ils ont tous confirmé être des pratiquants, qu’ils étaient d’ailleurs en possession de leur propre matériel, que Mme D E- Y s’est équipée seule de son baudrier et que M. F X et Mme A Z lui ont rappelé les techniques pour assurer sa sécurité, que peu après 20 heures, arrivée aux trois-quarts de la voie, Mme D E Y s’est reposée sur son baudrier et a chuté, qu’il a alors été constaté que le noeud en huit qu’elle avait elle-même effectué, et que Mme A Z, sa coéquipière, était tenue de vérifier, était bloqué au niveau du relais parce que ce noeud n’avait pas été correctement réalisé.

Au terme de ses écritures, la compagnie Allianz entend faire juger que son obligation à réparation se heurte à des difficultés sérieuses à l’inverse de celle de la compagnie Filia-Maif, qui n’est pas même contestée et qui a déjà pris en charge les conséquences de l’accident. Elle entend être déchargée de toute condamnation pécuniaire (provision et frais irrépétibles) et elle sollicite la condamnation de tout succombant aux entiers dépens de l’instance.

*

La CPAM des Deux Sèvres, conclut à la confirmation de la décision déférée et sollicite la condamnation de la compagnie Allianz à lui payer 800 € pour frais irrépétibles. L’organisme social explique que la salle d’escalade, assurée auprès de la compagnie Allianz, a manqué à son obligation de sécurité en omettant de vérifier l’aptitude à l’escalade de Mme E Y à effectuer le parcours, seule et en toute sécurité.

*

La Maif intervient aux lieu et place de la Filia Maif. Elle émet toutes protestations et réserves quant à la responsabilité de son assurée, Mme Z, soulignant qu’il appartiendra, le cas échéant, au juge du fond de trancher sur les responsabilités encourues. Elle conclut à la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions. Elle poursuit la condamnation de la Sa Allianz à lui payer une somme de 2.000 € pour frais irrépétibles.

*

Mme D E-Y, intimée forme un appel incident. Elle poursuit la confirmation de la décision déférée notamment lorsqu’elle reconnaît que l’obligation de la société Allianz n’est pas sérieusement contestable. Elle voudrait que la provision à laquelle elle peut prétendre soit portée à la somme de 50.000 € et soit mise à la charge de la société Allianz et de la Maif. Elle demande que les deux compagnies d’assurances lui payent une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’obligation à réparation de l’assureur de la salle d’escalade et de l’assureur de Mme A Z n’est pas sérieusement contestables compte tenu des circonstances de l’accident.

Elle explique qu’elle n’avait aucune compétence particulière en matière d’escalade pour n’avoir pratiqué ce sport que d’une façon très occasionnelle, qu’elle faisait équipe avec Mme A Z qui, au contraire, pratiquait dans un club. Elle expose qu’il est constant qu’alors qu’elle était arrivée au trois-quarts du parcours, elle a fait une chute de 10 mètres, le noeud en huit qui aurait dû assurer sa sécurité ayant été mal exécuté.

Elle reproche au personnel de la salle de ne pas avoir vérifié son aptitude, de ne lui avoir prodigué, à aucun moment, le moindre conseil de sécurité et de ne pas avoir assuré la présence d’un moniteur au pied du mur d’escalade pour conseiller, vérifier l’aptitude des grimpeurs et contrôler le respect des règles de sécurité. Par ailleurs, elle reproche à Mme Z, coéquipière expérimentée, de ne pas avoir vérifié, comme elle aurait dû le faire, la bonne exécution du noeud en huit qui, mal réalisé, n’a pu prévenir sa chute dans le vide.

MOTIFS DE LA DECISION :

Le 18 décembre 2016, Mme D E-Y s’est rendue avec des parents et amis dans la salle d’escalade exploitée par la Sarl Prises en Main. Arrivée au deux tiers de son dernier parcours, elle se repose sur son baudrier et chute d’une dizaine de mètres. Il est alors constaté que sa chute s’explique par la mauvaise réalisation du noeud en huit qui devait assurer sa sécurité dans son baudrier.

Il sera constaté que la Maif intervient aux lieu et place de la Sa Filia Maif qui est assignée comme assureur de Mme A Z et non pas comme assureur GAV de Mme D E-Y. Or, la Maif, assureur de Mme A Z conteste fermement son obligation à réparation. Aussi, l’argumentation de la Sa Allianz, selon laquelle la Maif aurait reconnu son obligation à réparation, est-elle sans la moindre pertinence.

Au vu des recours des parties, la cour est invitée à se prononcer sur l’obligation à réparation de chacune des compagnies, Sa Allianz Iard et Maif et sur le montant de la provision qu’il convient d’allouer à Mme D E-Y.

Sur l’obligation à réparation de la Sa Allianz, assureur de la salle d’escalade.

Le fait que la victime dirige sa demande également contre l’assureur de sa coéquipière n’est pas de nature à écarter celle de la salle d’escalade qui, en contrepartie du prix d’entrée, doit vérifier le niveau de compétence de celui qui va utiliser les équipements de la salle et s’assurer du respect des règles de sécurité. Au cas d’espèce, la Sarl Prises en Main n’a pas satisfait à son obligation de sécurité, qui affirme que Mme D E-Y avait une pratique confirmée de l’escalade, sans le démontrer autrement qu’en excipant du fait que la victime a utilisé le matériel amené avec elle et qu’elle s’est elle-même équipée de son baudrier et qui se contente de confier le rappel des règles de sécurité à des panneaux disposés au pied du mur d’escalade. En conséquence la décision déférée sera confirmée en ce qu’elle dit que son obligation à réparation n’est pas sérieusement discutable.

Sur l’obligation de la Maif, assureur de Mme A Z.

Il est constant que Mme A Z a une certaine pratique de l’escalade, qu’elle faisait équipe avec Mme D E-Y et qu’en conséquence elle était chargée d’assurer cette dernière mais également de vérifier l’équipement de sécurité de sa partenaire et notamment la conformité des noeuds qui assurent cette sécurité. Au contraire de ce qu’affirme la Maif, la pratique de Mme E-Y était très élémentaire et sans doute lointaine, comme l’indique la victime, puisqu’il a fallu lui apprendre le noeud en huit , qu’elle a dû s’entraîner à la réalisation de ce noeud avant d’entreprendre sa première escalade et que c’est une mauvaise réalisation de ce noeud qui a été à l’origine de sa chute lorsqu’elle a voulu se reposer sur son baudrier. Or, il appartenait indiscutablement à sa coéquipière de vérifier, à chaque escalade, l’équipement de sécurité de sa partenaire et singulièrement la bonne réalisation de ce noeud aussi sûr qu’élémentaire. Par voie de conséquence, l’obligation à réparation de la Maif n’est pas sérieusement discutable.

Sur le montant de la provision réclamée par la victime.

Mme D E-Y , qui ne motive pas sa demande de complément de provision pour se contenter de verser aux débats les dossiers médicaux qui sont ceux déjà produits devant le premier juge, sera déboutée de cette réclamation.

Sur les demandes accessoires.

Les indemnités de l’article 700 du code de procédure civile allouées à la Cpam des Deux Sèvres et à Mme D E-Y seront arbitrées à 500 € et 1.500 €. Ils seront à la charge des assureurs in solidum.

PAR CES MOTIFS

LA COUR;

Déclare les appels recevables,

Constate que la MAIF intervient aux lieu et place de la SA FILIA MAIF assignée en qualité d’assureur d’A Z,

Dans les limites des recours,

Confirme la décision déférée qui consacre l’obligation à réparation de la SA Allianz,

Infirme la décision déférée qui déboute madame D E-Y de sa demande à l’encontre de la SA FILIA MAIF,

Statuant nouveau sur ce point,

Dit que l’obligation à réparation de la MAIF n’est pas contestable et la condamne, in solidum, avec la SA Allianz Iard à payer à madame D E-Y les 20.000 € déjà mis à la charge de l’assureur de la SARL Prises en Main,

Déboute madame D E-Y de sa demande de provision complémentaire,

Condamne, in solidum, la SA Allianz et la MAIF à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à la CPAM des Deux-Sèvres la somme de 500 € et à madame D E-Y la somme de 1.500 €,

Condamne, in solidum, la SA Allianz et la MAIF aux dépens de l’instance,

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Marie-Françoise DACIEN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Textes cités dans la décision

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Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 9 juin 2021, n° 20/04465