Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 19 octobre 2017, n° 16/01156

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bourges, 1re ch., 19 oct. 2017, n° 16/01156
Juridiction : Cour d'appel de Bourges
Numéro(s) : 16/01156
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bourges, 20 juillet 2016
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

SA/YF

[…]

[…]

SCP JACQUET, LIMONDIN

SELARL ALCIAT JURIS

LE : 19 OCTOBRE 2017

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2017

N° – Pages

Numéro d’Inscription au Répertoire Général : 16/01156

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de BOURGES en date du 21 Juillet 2016

PARTIES EN CAUSE :

I – SA DOMOFINANCE, agissant poursuites et diligences de son directeur général domicilié en cette qualité au siège social :

[…]

[…]

Représentée et plaidant par Me Gilda LIMONDIN de la SCP JACQUET LIMONDIN, avocat au barreau de BOURGES

timbre dématérialisé n° 1265 1889 3377 5937

APPELANTE suivant déclaration du 11/08/2016

II – M. A Y

né le […] à […]

[…]

[…]

-

Mme C Z

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentés et plaidant par Me Frédérique LERASLE de la SELARL ALCIAT-JURIS, avocat au barreau de BOURGES

timbre dématérialisé n° 1265 1906 6558 2994

INTIMÉS

19 OCTOBRE 2017

N° /2

III – SARL VIVRE ENERGIE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social :

[…]

Centre d’affaires Tour Rosny 2

[…]

non représentée

à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions n’ont pu être signifiées les actes d’huissier des 5 octobre 2016 et 30

novembre 2016 ayant été transformés en procès-verbal de recherches infructueuses

INTIMÉE

19 OCTOBRE 2017

N° /3

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 05 Septembre 2017 en audience publique, la Cour étant composée de :

M. FOULQUIER Président de Chambre,

entendu en son rapport

M. GUIRAUD Conseiller

M. PERINETTI Conseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme X

***************

ARRÊT : RENDU PAR DÉFAUT

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été

préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure

civile.

***************

Le 28 juillet 2012, M. A Y et Mme C Z ont signé un bon de commande avec la société

SARL Vivre Énergie prévoyant la fourniture et la pose d’une pompe à chaleur et d’un ballon

thermodynamique destinés à équiper leur domicile situé […]

un prix de 22 500 euros.

Le même jour, M. A Y et Mme C Z ont accepté une offre de crédit affecté à la

fourniture de ces biens auprès de la société Domofinance pour un montant de 22 500 euros remboursable en

144 mensualité au taux d’intérêt nominal fixe de 5,60 % l’an.

Au terme d’une expertise diligentée par leur assureur à leur demande, les consorts Y et Z ont appris

que l’installation ne présentait pas de malfaçons hormis des défauts de finition et que les moyens

commerciaux employés par le vendeur étaient discutables, au regard notamment du coût de la prestation par

rapport à la valeur de l’immeuble et à la faible économie d’énergie.

Dans ce contexte, M. A Y et Mme C Z ont fait assigner la SARL Vivre Énergie et la

société Domofinance devant le tribunal de grande instance de Bourges pour obtenir essentiellement, avec le

bénéfice de l’exécution provisoire, l’annulation du contrat de vente, l’annulation du contrat de crédit affecté et

une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts.

La SARL Vivre Energie a demandé au tribunal de grande instance de rejeter les demandes des consorts

Y et Z.

La société Domofinance a demandé au tribunal de grande instance de rejeter les demandes présentées devant

lui et, en cas d’annulation du contrat de crédit, la condamnation solidaire des demandeurs au paiement de la

somme de 25 500 euros de laquelle sera déduit le montant des échéances réglées augmenté des intérêts au taux

légal.

Par jugement en date du 21 juillet 2016, le tribunal de grande instance de Bourges a :

— prononcé l’annulation du contrat passé entre M. A Y et Mme C Z d’une part, et la

SARL Vivre Énergie d’autre part, le 28 juillet 2012 et portant sur la fourniture et la pose d’une pompe à

chaleur et d’un ballon thermodynamique,

— condamné la SARL Vivre Énergie à payer à M. A Y et Mme C Z la somme de 25

500 euros au titre du remboursement du prix de vente,

— condamné la SARL Vivre Énergie sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de deux mois à

compter de la signification de la présente décision et pour une durée de trois mois, à procéder au démontage

de l’installation et à la remise des lieux dans leur état originel,

— constaté la nullité du contrat de crédit accessoire à cette vente consenti à M. A Y et Mme

C Z selon offre acceptée le 28 juillet 2012 par la société Domofinance,

— rejeté la demande de la société Domofinance de remboursement du capital prêté,

— condamné la société Domofinance à restituer à M. A Y et Mme C Z l’ensemble des

sommes payées ou prélevées sur leur compte et toutes somme encaissées en raison du contrat de crédit annulé,

— condamné in solidum la SARL Vivre Énergie et la société Domofinance à payer à M. A Y et

Mme C Z la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le premier juge prononce la nullité du contrat de vente après avoir constaté que les modalités de livraison,

l’identité et la qualité du démarcheur ainsi que la nature et les caractéristiques du bien offert et du service

proposé n’y sont pas indiquées contrairement aux préconisations de l’article L. 121-23 du code de la

consommation. Le juge constate l’annulation du contrat de crédit affecté conformément aux dispositions de

l’article L. 311-32 du code de la consommation et retient qu’en ne vérifiant pas si les dispositions d’ordre

public dans le contrat de vente ont été respectées, la société Domofinance a commis une faute lors de la

remise des fonds, laquelle est de nature a exclure la restitution du capital prêté par l’emprunteur.

Par déclaration d’appel reçue le 11 août 2016, la société Domofinance a interjeté appel de la décision.

Dans ses dernières conclusions, la société Domofinance demande à la cour de :

— dire et juger irrecevable la demande des intimés d’annulation du bon de commande signé avec la SARL

Vivre Energie et en tous les cas les en débouter, – dire et juger en conséquence n’y avoir lieu à prononcer

l’annulation du contrat de prêt qu’elle a conclu le 28 juillet 2012,

— dire et juger que le contrat de prêt dont s’agit se trouve être résilié du fait de la déchéance du terme, et que

M. A Y et Mme C Z doivent la somme de 22 965,09 euros avec intérêts au taux

contractuel à compter du 18 octobre 2016, date de la mise en demeure jusqu’au parfait règlement, outre la

somme de 1 591 euros due au titre de l’indemnité légale de résiliation prévue à l’article L 312-39 du code de la

consommation, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2016 jusqu’au

parfait règlement,

— débouter en tous les cas M. A Y et Mme C Z de leur demande de dommages-intérêts,

Pour le cas où le contrat de crédit dont s’agit serait annulé,

— dire et juger qu’il ne pèse sur le préteur aucune obligation de vérifier la régularité du bon de commande signé

entre les emprunteurs et le prestataire de services au regard des textes applicables du Code de la

consommation et qu’elle n’a commis aucune faute en libérant les fonds au vu de la fiche de réception de

travaux signée par les emprunteurs,

— dire et juger en conséquence que le préteur ne saurait être privé de son droit à percevoir le montant du capital

prêté, peu important que les fonds aient été libérés directement entre les

mains du prestataire de service,

— condamner solidairement M. A Y et Mme C Z à lui rembourser en deniers et

quittance la somme de 25 500 euros de laquelle il sera déduit le montant des échéances réglées à la date à

laquelle le jugement sera rendu, le solde restant dû étant alors augmenté des intérêts calculés au taux légal,

— dire et juger que M. A Y et Mme C Z ne sauraient être remboursés de la somme de

25 500,00 euros par la Société Vivre Énergie à laquelle ils n’ont jamais versé aucuns fonds,

— condamner solidairement M. A Y et Mme C Z à lui payer une indemnité de 1 500

euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

S’il était prononcé l’annulation du contrat principal et du contrat de crédit ou leur résolution,

— condamner la SARL Vivre Énergie à garantir les emprunteurs du remboursement du prêt de 25 500 euros,

— condamner la SARL Vivre Énergie au paiement de la somme de 10 404,96 euros au titre des intérêts

auxquels le prêteur pouvait prétendre si le prêt s’était exécuté normalement,

— condamner la SARL Vivre Énergie à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre

par la décision à intervenir,

— condamner la SARL Vivre Énergie au paiement d’une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l’article

700 du Code de procédure civile.

Concernant la validité du contrat principal, la société Domofinance soutient, au visa de l’article 1338 du code

civil, que les conditions énoncées par l’article L.121-23 du code de la consommation sont des causes de

nullités relatives couvertes par l’exécution volontaire du contrat d’autant plus que l’identité du démarcheur était

connue et les informations sur le matériel suffisamment précises, et que le contrat affecté d’une cause de

nullité relative a été confirmé en l’espèce par la réception de l’installation sans émission de réserves ou encore

lors de la demande de paiement du prix.

Concernant l’offre de prêt, la société Domofinance fait valoir qu’elle n’a pas l’obligation de remettre une notice

aux emprunteurs récapitulant le fonctionnement du crédit amortissable souscrit avec celui du crédit

renouvelable, qu’elle a remis tous les documents nécessaires dont la fiche d’information, la FIPEN, le

bordereau justifiant l’interrogation du FICP, la notice d’assurance et la notice d’information de telle sorte

qu’elle ne peut être sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts.

La société Domofinance sollicite la condamnation des emprunteurs au paiement du solde du prêt suite à la

déchéance du terme prononcée à l’issue du premier jugement, lequel n’était pas assorti de l’exécution

provisoire. Elle fait observer que la délivrance des fonds, suite à la signature de l’attestation de fin de travaux

par l’emprunteur, n’est pas intervenue dans des circonstances constitutives d’une faute de nature à la priver de

son droit à restitution du capital prêté.

Dans leurs dernières conclusions, M. A Y et Mme C Z demandent à la cour de

débouter la société Domofinance de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions, de confirmer

l’intégralité de la décision et de condamner ladite société à leur verser la somme de 3 000 euros sur le

fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Ils expliquent que le contrat de vente signé le 28 juillet 2012 ne respecte pas les dispositions de l’article

L.121-23 du code de la consommation, lesquelles sont sanctionnées par la nullité du contrat. Ils soutiennent

que l’article 1338 du code civil ne peut s’appliquer en l’espèce dès lors que Mme C Z, co-signataire

du contrat de vente et du contrat de prêt, n’a pas signé l’attestation de livraison. Ils rappellent que le contrat de

crédit se trouve résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat principal est judiciairement résolu ou annulé.

Ils font observer que l’attestation de travaux n’exonère pas la société de crédit de son obligation de vérifier le

respect des dispositions du code de la consommation, et qu’elle ne peut se prévaloir des effets de la résolution

du prêt et donc obtenir le remboursement du capital.

Enfin, ils reprennent leurs moyens de première instance, non abordés par le jugement, tendant à la déchéance

du droit aux intérêts.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 5 septembre 2017.

SUR QUOI,

Sur la nullité du contrat principal et la nullité par voie de conséquence du contrat de crédit :

Sur les mentions du bon de commande :

Le contrat principal, dont il n’est pas contesté qu’il a été conclu le 28 juillet 2012 dans le cadre d’un

démarchage à domicile, est régi par l’article L.121-23 du

code de la consommation en sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014, lequel

dispose que 'Les opérations visées à l’article L.121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire

doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les

mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou

d’exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement : en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les

formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux

effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L.313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l’article L.121-25 ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et,

de façon apparente, le texte intégral des articles L.121-23, L.121-24, L.121-25 et L.121-26.

Les consorts Y-Z soutiennent, principalement, que le bon de commande ne mentionne pas le nom

du démarcheur à côté de sa signature (seul un nom peu visible étant inscrit en tête du document sans référence

aux fonctions de cette personne), désigne de manière particulièrement succincte les équipements objet du

contrat (aucune fiche technique n’est annexée au bon de commande), ne précise pas les modalités et délais de

livraison, ne fait pas apparaître les prix unitaires de chaque élément et ne comporte pas les informations

exigées à propos du crédit assurant le financement de l’opération (taux nominal du crédit et taux effectif

global).

L’exemplaire du bon de commande nº 001385 produit par les consorts Y-Z décrit la prestation

offerte comme suit :

[…],

[…],

— forfait installation,

— mise en service,

— extension de garantie de quinze ans pièces, main-d’oeuvre et déplacement

Montant TTC : 25 500 euros,

Ainsi que le retient à juste titre le premier juge, ce bon de commande ne comporte aucune indication sur la

puissance du système de chauffage commandé ni sur la contenance du ballon thermodynamique et ne

distingue pas le prix de chacun des matériels et celui de la pose, encore que, sur ce dernier point, l’article L.

121-23 n’exige que la mention du prix global à payer. Il n’est pas justifié que la simple indication d’une

appellation commerciale renverrait nécessairement à une certaine puissance ou à une contenance précise.

Ce bon de commande ne porte aucune indication relativement au nom du démarcheur, si ce n’est la mention

manuscrite « Sitbom Yoann » apparaissant en tête du document, sans qu’on puisse déterminer s’il s’agit ou non

de l’identité du démarcheur ayant conclu l’opération et signé le bon de commande.

Il est également constant que la mention relative à la date limite de livraison n’a pas été remplie et que les

modalités mêmes de livraison ne sont pas indiquées.

Le bon de commande fait état, au titre des conditions de règlement, d’une offre de crédit pour la totalité du

prix de 25 500 euros, sans toutefois préciser le nombre et le montant des mensualités, le taux nominal de

l’intérêt et le taux effectif global. Cependant, dans la mesure où le bon de commande mentionne la remise au

client d’une offre préalable de crédit, il est suppléé à ces lacunes par les mentions portées dans cette offre,

laquelle comporte l’ensemble des informations ci-dessus énumérées.

Quoi qu’il en soit, la nullité encourue sur le fondement de l’article L.121-23 du code de la consommation est

relative et, conformément aux dispositions de l’article 1338 ancien du Code civil, à défaut d’acte de

confirmation ou ratification, l’exécution volontaire du contrat, en connaissance des vices l’entachant de nullité,

après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée, emporte renonciation aux

exceptions de nullité. Il importe peu que ce moyen n’ait pas été invoqué en première instance puisqu’il

constitue une défense au fond et, à ce titre, échappe à la règle de l’irrecevabilité des demandes nouvelles,

posée par l’article 564 du code de procédure civile.

La cour relève, en premier lieu, que la prestation a été exécutée et que M. A Y a signé, le 10

août 2012, une fiche de réception des travaux aux termes de laquelle il déclare, après visite des travaux

exécutés, que l’installation (livraison et pose) est terminée et correspond au bon de commande nº 001385 du

28 juillet 2012, et demande à Domofinance le déblocage de la somme de 25 500 euros correspondant au

financement de l’opération.

Les consorts Y-Z objectent que ce certificat de livraison n’a pas été complété ni signé par Mme

C Z et qu’ils ont rapidement fait part de leurs interrogations sur le matériel livré.

Cependant, la fiche de livraison n’a pas d’autre objet que de prouver, dans les rapports entre le prêteur et

l’emprunteur, l’existence d’un fait juridique, à savoir la livraison effective du bien en vue de permettre le

déblocage des fonds en toute sécurité juridique. Cette fiche de livraison, signée par l’un des coemprunteurs

engagés solidairement entre eux, remplit très exactement son office et suffit à établir que le bien financé au

moyen du prêt a été livré et que les fonds pouvaient être débloqués.

Par ailleurs, les consorts Y-Z ne communiquent aucun document établissant qu’ils auraient

rapidement fait part de leurs interrogations sur le matériel livré, alors qu’au contraire, en signant le 10 août

2012 la fiche de réception des travaux permettant le déblocage des fonds, ils ont considéré que la société

Vivre Énergie avait exécuté la prestation promise. En outre, l’expertise de protection juridique montre que

l’installation ne comporte pas de désordres, mais seulement quelques défauts de finition (tuyaux d’évacuation

des condensats visibles) et surtout dénonce des pratiques commerciales douteuses pour emporter le

consentement des consorts Y-Z, tous éléments dont ces derniers ne se prévalent pas dans le cadre

de la présente instance pour solliciter la nullité ou la résolution du contrat.

En second lieu, la cour note que les consorts Y-Z ont été destinataires de la facture du vendeur

établie le 1er août 2012, qu’ils produisent eux-mêmes aux débats et qui comporte une description très précise

des caractéristiques de la prestation offerte.

Enfin, après avoir reçu, le 13 août 2012, une lettre d’information de Domofinance les informant du

prélèvement de la première échéance à la date du 5 février 2013 et leur communiquant un tableau

d’amortissement du prêt, ils ont commencé à rembourser ce dernier et se sont régulièrement acquittés des

échéances au moins jusqu’au mois d’août 2015.

Dès lors, les consorts Y-Z, qui étaient en possession d’un bon de commande comportant le rappel

des articles L.121-23 à L.121-26 du code de la consommation en leur rédaction alors applicable, ont, en toute

connaissance des causes de nullité susceptibles d’affecter leur contrat, exécuté volontairement ce dernier et

admis, notamment, que la marchandise livrée était bien conforme aux caractéristiques attendues et que les

autres éventuelles causes de nullité n’affectaient pas leur volonté de poursuivre l’exécution de la convention..

En particulier, alors que l’indication d’un délai butoir pour la livraison n’est prévue que pour permettre à la

personne démarchée de se libérer de son engagement en cas d’exécution excessivement différée de son

obligation contractuelle par l’autre partie, cette même réception des travaux à la date du 10 août 2012 signifie

que les consorts Y-E n’ont pas entendu se prévaloir de la tardiveté éventuelle de la livraison mais

ont souhaité, au contraire, poursuivre l’exécution du contrat malgré l’absence d’indication d’un délai de

livraison.

Les consorts Y-Z seront donc déboutés de leur demande d’annulation du contrat principal pour

violation des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation.

Sur la nullité du contrat de crédit par voie de conséquence :

Les consorts Y-Z soutiennent, au visa de l’article L. 311-32 du code de la consommation, en sa

rédaction alors applicable, que le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat

principal est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Ils font observer que la banque, qui a délivré des

fonds au vendeur sans vérifier que le contrat principal n’était pas affecté de causes de nullité tenant à

l’inobservation des dispositions d’ordre public de l’article L. 121-23 du code de la consommation, a commis

une faute qui la prive du droit d’obtenir le remboursement du capital prêté. Elle aurait également commis des

fautes lui interdisant de réclamer le remboursement du capital en libérant les fonds sur la seule signature de

M. A Y et sans s’enquérir de la nature de l’installation effectuée et de son fonctionnement.

Cependant, en l’absence de nullité du contrat principal pour violation du formalisme exigé en matière de

démarchage à domicile, le contrat de crédit affecté n’encourt aucune annulation par voie de conséquence.

Par suite, les éventuelles fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds sont sans incidence et

n’ont pas lieu d’être examinées.

Sur la déchéance du droit aux intérêts :

Selon l’article L 311-48 ancien du code de la consommation, en sa version alors applicable, devenu l’article L

341-4, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions

fixées par les articles (…) L311-18 (L. 312-28 nouveau) et L. 311-19 (L. 312-9 nouveau) est déchu du droit

aux intérêts.

L’article L. 311-19 (L. 312-9 nouveau) dispose que le prêteur qui propose à l’emprunteur d’adhérer à une

assurance doit lui remettre une notice comportant des extraits des conditions générales de l’assurance.

Les articles L311-18 (L. 312-28 nouveau) et R 311-5 (R 312-10 nouveau), pris pour son application, imposent

au prêteur de remettre à l’emprunteur une offre de crédit qui doit notamment préciser, dans un encadré, le

montant total du crédit et les conditions de mise à disposition des fonds ainsi que le montant total dû par

l’emprunteur.

Se fondant sur les dispositions de ces textes, les consorts Y-Z invoquent la déchéance du droit aux

intérêts aux motifs que le prêteur n’aurait pas rempli la fiche d’information patrimoniale, ni consulté le fichier

prévu à l’article L. 333-4 du code de la consommation, ni établi une proposition comportant des informations

permettant au consommateur de comparer l’offre de crédit renouvelable et la proposition de crédit

amortissable, ni remis la notice d’information relative à l’assurance, ni mentionné le numéro de commande du

contrat principal ainsi que le montant total du crédit et des sommes dues par les emprunteurs sur l’exemplaire

du contrat de prêt resté en leur possession.

Il ressort des pièces communiquées par la société Domofinance qu’elle a remis aux consorts Y-Z la

fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs et

leur a fait remplir la fiche de renseignements et d’explications relatives à leur situation professionnelle et

patrimoniale (pièce nº 2 comportant la signature des emprunteurs à la date du 28 juillet 2012). Il est également

justifié par la société de crédit qu’elle a consulté le 7 août 2012, pour chacun des emprunteurs, le fichier des

incidents de remboursement des crédits aux particuliers, lequel ne mentionnait aucun incident (pièce n° 8).

Par ailleurs, seul le prêteur qui propose un crédit renouvelable, situation étrangère au cas particulier, a

l’obligation de proposer à l’emprunteur un crédit amortissable de manière à lui fournir une information lui

permettant de comparer de façon claire les deux types de crédit.

En revanche, la seule mention, dans l’offre de contrat de crédit signé par les consorts Y-Z et

comprenant une proposition d’adhésion à l’assurance décès, invalidité et maladie, que les emprunteurs ont

déclaré avoir pris connaissance de la notice comportant des extraits des conditions générales de l’assurance et

rester en possession de ce document, n’est pas suffisante à établir que les emprunteurs ont effectivement reçu

cette notice d’assurance. En effet, la jurisprudence considère que la certitude de cette remise n’est pas

suffisamment établie par une clause-type incluse dans l’offre de crédit et ne peut résulter que d’une mention

portée sur un double de la notice elle-même remise aux emprunteurs et signé par eux.

Surtout, les consorts Y-Z produisent l’exemplaire du contrat de crédit laissé en leur possession,

établi par duplication, sur lequel ne figurent ni le montant total du crédit, ni le montant total dû par

l’emprunteur, les cases correspondant à ces mentions n’ayant pas été remplies. Il importe peu que ces mentions

figurent sur l’exemplaire demeuré en la possession du prêteur et signé par les emprunteurs, ce dernier ayant

fort bien pu être rempli après coup et, en tout état de cause, n’ayant pu, par hypothèse, assurer l’information

des emprunteurs.

En application des textes précités, la société Domofinance doit donc être déclarée déchue des intérêts, cette

déchéance produisant ses effets depuis la date de début d’amortissement du prêt jusqu’au moment de la

dernière échéance ou, le cas échéant, de la déchéance du terme suivie d’une mise en demeure faisant courir les

intérêts aux taux légal.

Sur la demande en paiement de Domofinance :

La société Domofinance sollicite la condamnation des emprunteurs à lui rembourser le solde du prêt suite à la

déchéance du terme notifiée par lettre recommandée de son conseil du 18 octobre 2016, aux termes de

laquelle il leur était rappelé qu’ils restaient redevables de la somme de 1353,85 euros correspondant à cinq

mensualités impayées à la date du 4 avril 2016 (en ce inclus la mensualité échue à cette date).

Certes, le jugement du 21 juillet 2016 n’avait pas encore été rendu au moment où les consorts Y-Z

ont interrompu leurs versements mais il l’était en revanche au moment de la notification de la déchéance du

terme, qui n’a donc pas été invoquée de bonne foi par le prêteur, même si la décision n’était pas assortie de

l’exécution provisoire.

Surtout, à la lumière du tableau d’amortissement figurant au dossier, le montant des agios compris dans les

mensualités échues au 5 novembre 2015 et intégralement payées par les emprunteurs s’élève à 4 351,85 euros,

somme largement supérieure aux cinq mensualités échues au 4 mars 2016 et même aux douze mensualités

échues à la date de l’envoi de la mise en demeure, soit 3 249,24 euros, de sorte que la déchéance n’a pu

valablement opérer.

En conséquence, le crédit doit se poursuivre jusqu’à son terme contractuellement prévu du 5 janvier 2025 sur

la base de mensualités ne comprenant que le capital, soit 177,08 euros, majoré de la prime d’assurance

s’élevant à 21,45 euros si ce contrat n’a pas été résilié.

Selon le relevé de compte établi par la société de crédit, le montant global des sommes versées par les

emprunteurs, hors assurance, s’élèvent à 8 458,55 euros (une première mensualité de 230,66 euros et

trente-trois mensualités de 249,33 euros), de sorte que le solde restant dû avant la mensualité du 5 décembre

2015 (35e échéance) est de 17 041,45 euros (25 500 – 8 458,55). Il appartiendra donc aux emprunteurs de

reprendre les paiements à partir de l’échéance du 5 décembre 2015, sauf à imputer sur les premières

mensualités impayées à compter du 5 décembre 2015 la différence entre les sommes versées et celles qu’ils

auraient dû régler puis à régulariser l’impayé résiduel.

Dans la mesure où les consorts Y-Z n’étaient pas en situation d’impayé au moment du signalement

effectué auprès du fichier FICP/Banque de France, la société Domofinance devra procéder à la radiation de

leur inscription sur ce fichier. Toutefois, en l’absence de demande en ce sens des consorts Y-Z, la

cour ne prononcera pas de condamnation à l’encontre de la société Domofinance et se limitera à ce simple

rappel.

Au regard de la solution donnée au litige, chacune des parties conservera la charge de ses dépens, ainsi que de

ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement rendu le 21 juillet 2016 par le tribunal de grande instance de Bourges,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société Domofinance est déchue du droit aux intérêts et ne peut poursuivre à l’encontre des

consorts Y-Z que le remboursement du capital prêté selon l’échéancier initialement convenu,

soit une mensualité de 177,08 euros, majoré de la prime d’assurance de 21,45 euros si ce contrat n’a pas

été résilié entre-temps,

Déboute la société Domofinance de sa demande de paiement résultant de la déchéance du terme,

Constate que les consorts Y-Z ont réglé, depuis le début du contrat, une somme de 8 458,55

euros, hors assurance, et que le solde restant dû avant la mensualité du 5 décembre 2015 (35e

échéance) est de 17 041,45 euros,

Dit que les consorts Y-Z devront reprendre les paiements à partir de l’échéance du 5

décembre 2015, sauf à imputer sur les premières mensualités impayées à compter du 5 décembre 2015

la différence entre les sommes versées et celles qu’ils auraient dû régler, puis à régulariser l’impayé

résiduel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d’appel.

L’arrêt a été signé par M. FOULQUIER, Président, et par Mme X, Greffier auquel la minute de

la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

A. X Y. FOULQUIER

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Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 19 octobre 2017, n° 16/01156