Cour d'appel de Caen, 12 novembre 2013, n° 11/03186

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 12 nov. 2013, n° 11/03186
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 11/03186
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Argentan, 7 septembre 2011

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 11/03186

Code Aff. :

ARRÊT N°

XXX

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance d’ARGENTAN en date du 08 Septembre 2011 – RG n°

COUR D’APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2013

APPELANT :

Monsieur G Z 'S T Z'

XXX

XXX

représenté et assisté de Me Jean TESNIERE, avocat au barreau de CAEN

INTIMES :

Monsieur E B

XXX

XXX

Monsieur Y B

XXX

XXX

Madame K B O A épouse A

XXX

WASSENAAR (Pays-Bas)

représentés par la SCP MOSQUET MIALON D OLIVEIRA LECONTE, avocat au barreau de CAEN

assistés de la SCP DESDOITS-MARCHAND, avocat au barreau d’ARGENTAN,

DÉBATS : A l’audience publique du 12 Septembre 2013, sans opposition du ou des avocats, Madame MAUSSION, Président de chambre, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme X

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame MAUSSION, président de chambre, rédacteur

Monsieur JAILLET, conseiller,

Madame SERRIN, conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Novembre 2013 et signé par Madame MAUSSION, Président, et Madame GALAND, Greffier

Monsieur E B et ses deux enfants Y et K B (ci-après les consorts B) sont propriétaires indivis de la parcelle cadastrée section XXX, d’une superficie de XXX, sise commune de CHAMPSECRET.

Ayant appris que Monsieur Z avait acquis la propriété voisine, Monsieur E B a contacté ce dernier par téléphone pour lui proposer l’acquisition de ladite parcelle et a, par mail du 18 juillet 2008 faisant suite à l’entretien téléphonique, proposé à Monsieur Z d’acquérir la parcelle au prix de 1 350 € frais de notaire, droits et taxes en sus.

Après plusieurs échanges de mails, Monsieur Z a, par mail du 14 janvier 2010, informé Monsieur B de ce qu’il était d’accord pour acquérir la parcelle mais au prix de 1 200 € net vendeur.

Le jour même, Monsieur E B acceptait la proposition, par mail adressé à Monsieur Z 'S T Z'.

Monsieur Z ayant finalement refusé de régulariser la vente, les consorts B l’ont, par exploit en date du 31 mai 2010, fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance d’Argentan aux fins de le voir condamner à régulariser l’acte de cession de la parcelle et à défaut de voir dire que le jugement à intervenir vaudra vente.

Par jugement en date du 8 septembre 2011 le Tribunal de Grande Instance d’Argentan a :

— Condamné Monsieur Z à régulariser l’acte de cession de la parcelle XXX, pour un montant de 1 200 € net vendeur, en l’étude de Maître D et ce dans le mois de la signification du jugement,

— A défaut S que le jugement vaudra vente de la parcelle,

— Condamné en tant que de besoin Monsieur Z à payer aux consorts B la somme de 1 200 €,

— Condamné Monsieur Z aux dépens et à payer aux consorts B la somme de 1 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Monsieur Z a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 11 octobre 2011.

Les prétentions et moyens des parties revêtent la forme, conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de Procédure Civile, du visa des dernières écritures déposées :

le 10/09/2013 pour Monsieur Z

le 5/09/2013 pour les consorts B

SUR QUOI LA COUR

Sur l’existence d’un accord

Monsieur Z reproche au tribunal d’avoir accueilli les prétentions des consorts B en se fondant sur des échanges de courriers électroniques dont il conteste être l’auteur, ajoutant que ces courriers électroniques ne comportent pas de signature électronique au sens des exigences de l’article 1316-4 du code civil.

Il résulte des dispositions de l’article 1583 du Code Civil que 'la vente est parfaite entre les parties, et la propriété acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé'.

Il est de jurisprudence constante que le consentement des parties n’est soumis à aucune condition de forme.

Il est donc inopérant pour Monsieur Z de faire état des dispositions de l’article 1316-4 du Code Civil, concernant la signature électronique.

Il convient, comme l’a fait le premier juge, de vérifier d’une part si les courriers électroniques peuvent bien être rattachés à Monsieur Z et dans l’affirmative si ces courriers permettent de déterminer l’accord des parties sur la chose et sur le prix.

L’article 1316-1 du Code Civil dispose que 'l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité'.

En l’espèce, il est produit aux débats les échanges de courriers électroniques intervenus entre la boîte mail de Monsieur E B 'michtouchard@orange.fr’ et l’adresse mail suivante 'T@leyogi.com’ dont il n’est pas contesté qu’elle est bien l’adresse de la boîte électronique de Monsieur Z 'S T Z’ adresse qui figure d’ailleurs sur les documents publicitaires que ce dernier produit aux débats.

Les consort B ont également, le 15 février 2012, fait constater par huissier de justice l’existence des mails échangés avec Monsieur Z tels qu’ils apparaissent dans la messagerie de l’ordinateur de Monsieur E B ainsi que l’existence et l’ordre de ces mails tels qu’ils apparaissent dans la mémoire de l’ordinateur.

L’examen chronologique des différents mails échangés entre Monsieur E B et Monsieur Z met en évidence les échanges suivants:

18/07/2008 de E B à Monsieur Z le T :

'bonjour Monsieur

faisant suite à notre entretien, voici les renseignements concernant la parcelle en cause:

XXX

prix de la parcelle 1 350 € frais de notaire, droits et taxes en sus

après nouvel examen il apparaît que les frais pourraient être réduits à 700 € ce qui conduirait finalement à un prix total pour vous de 2 050 €…

Merci de bien vouloir me faire part de votre opinion'

Le 5/05/2009 de E B à leyogi.com

'je me permets de revenir sur notre échange par téléphone et e-mail de juillet 2008… cela me conduit à revenir vers vous pour savoir à quel niveau de prix maximum vous pourriez être intéressé'.

Le 16/12/2009 de leyogi.com à B

'bonjour Monsieur B pourriez-vous me téléphoner svp Bien à vous. Le T'

Le 23/12/2009 de leyogi à B

'Bonjour, je souhaite vous entretenir sur votre parcelle de terrain, merci de me téléphoner. Mr Z'.

Le 26/12/2009 de leyogi à B

'Monsieur, j’ai pris connaissance de votre message un peu tard et de plus je n’étais pas disponible à cette période. Je vous ai adressé à deux reprises des e-mails restés sans réponse. Ce qui me laisse à penser que soit vous avez vendu votre terrain ou que vous êtes en déplacement. Ce qui m’intéresse c’est de connaître le prix au m² ce que vous avez omis de stipuler dans votre message afin que je puisse prendre une décision définitive.

Bien à vous. Mr Z'.

Le 6/01/2010 de B à leyogi

'Faisant suite à notre entretien voici les renseignements concernant cette parcelle: cadastre XXX (terre agricole) superficie 58a18ca prix offert 1350 € frais de notaire, droits et taxes en sus, soit 0,2281 € le m² ou bien 2 050 € frais inclus, soit 0,3464 € le m²'

Le 14/01/2010 de le T à B

'suite à votre proposition je suis OK mais pour le prix de 1 200 € net pour vous, je transmet la copie à mon notaire Maître C D pour la signature si bien sur cela vous convient'

Le 14/01/2010 de B à leyogi

'comme suite à votre message de ce midi rappelé ci-dessous, j’accepte votre proposition d’achat au prix final de 1 200 € net pour moi, ce qui signifie que tous les frais, en particulier de notaire, droits et taxes restent à votre charge.

C’est donc une affaire conclue et nous pouvons maintenant signer le compromis de vente….'

Enfin un dernier message est adressé par leyogi à B le 19/01/2010 dans les termes suivants :

'suite à notre entretien et à notre correspondance, je tiens à vous informer que je suis toujours d’accord pour acquérir votre terrain. Je suis cependant un peu embarrassé car je vous ai fait une proposition sans m’informer auparavant. .. La proposition que je vous ai faite me semble trop chère, je vous demande donc de faire un effort de votre côté afin que nous puissions conclure cette affaire, sans cela je m’en désintéresserais. Je joins une copie de cette correspondance à mon notaire, maître C D: C.D@notaires.fr afin que vous puissiez vous mettre en rapport avec lui si vous le souhaitez…'

Devant la Cour Monsieur Z a abandonné l’argument selon lequel les mails constitueraient en réalité des 'spams’ mais prétend contre toute vraisemblance ne pas avoir, en connaissance de cause, consenti personnellement à cette vente et ce dans la mesure où sa boîte mail est utilisée par l’ensemble de sa famille.

Monsieur Z n’hésite pas à produire un mail émanant de sa petite fille Maily, âgée de 13 à 14 ans au moment des échanges litigieux et rédigé en ces termes (orthographe d’origine)' Maman ma aussi S que le monsieur du terrain a qui j’avais écrit te fait un procès je suis désolé d’avoir fait sa en me fessant passer pour toi, je ne savais pas que cette loi existé et je ne comprend toujours pas qu’ont peut forcer quelqu’un a acheter un terrain dont il n’a pas envie. Je m’excuse encor une fois…'

Monsieur Z ne peut sérieusement, au moyen de ce témoignage de complaisance rédigé manifestement pour les besoins de la cause, faire croire à la Cour que sa petite fille serait à l’origine des mails échangés lesquels ne constitueraient en somme qu’une bonne farce d’une adolescente.

Outre le fait que l’orthographe de Maily s’oppose à ce que son témoignage puisse être considéré comme crédible, (les mails étant eux rédigés avec une orthographe correcte) les renseignements fournis dans les mails envoyés de la boîte du T et notamment les coordonnées du notaire et les demandes de renseignement sur le prix au m² du terrain vendu peuvent difficilement émaner d’une jeune fille âgée de moins de 15 ans à l’époque des échanges!

C’est donc avec une parfaite mauvaise foi et en se moquant de la Cour que Monsieur Z produit ce témoignage pour tenter de rapporter la preuve de ce qu’un autre que lui aurait échangé ces correspondances.

Comme l’a pertinemment relevé le premier juge il est bien certain que les courriels personnalisés qui proviennent bien de l’adresse électronique de Monsieur Z ont été écrits dans le cadre d’une négociation immobilière à laquelle il était seul intéressé.

Sur les vices du consentement

Le jugement sera également confirmé par adoption de motifs en ce qu’il a considéré que Monsieur Z ne pouvait valablement soutenir avoir commis une erreur sur les qualités substantielles du terrain.

Si Monsieur Z produit de nombreuses attestations faisant état de l’humidité de la parcelle force est de constater que les négociations ayant débuté dès juillet 2008 et l’accord sur le prix n’étant intervenu qu’en janvier 2010, Monsieur Z avait tout loisir, demeurant à proximité immédiate de ce terrain, d’en vérifier la consistance et d’apprécier les qualités et défauts de la parcelle, étant au surplus précisé que le prix qu’il en a offert était tout à fait modique et correspondait au marché.

Si comme Monsieur Z l’a mentionné dans son courriel en date du 19/01/2010 il a fait une proposition de prix sans s’informer auparavant de la qualité du terrain, cette situation ne peut être reprochée aux vendeurs et relève de sa seule responsabilité. Force est d’ailleurs de constater que Monsieur Z a, au cours des négociations, fait baisser le prix du terrain qui à l’origine était offert au prix de 1 350 € net vendeur (mail B du 18/07/2008).

Il ne saurait en conséquence prétendre avoir fait une erreur sur les qualités substantielles de la chose et ce alors même qu’il n’a pas informé ses vendeurs de la destination qu’il entendait donner au bien.

Il est en outre défaillant à rapporter la preuve de manoeuvres dolosives émanant des vendeurs et à soutenir que son consentement aurait été vicié. Le seul fait qu’il ait pu, après avoir donné son accord, considérer que le prix offert était trop élevé (à ses yeux) ne saurait pour autant constituer un vice du consentement permettant d’annuler la vente.

C’est en conséquence à juste titre que le premier juge après avoir considéré que les courriers électroniques échangés démontraient un accord exprès des parties sur la chose et sur le prix et que Monsieur Z ne rapportait nullement la preuve d’avoir commis une erreur sur la substance même de la chose vendue, a condamné ce dernier a régularisé la vente et à défaut S que son jugement vaudrait vente.

Il convient de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages et intérêts des consorts B pour préjudice moral

Monsieur E B fait état d’une communication téléphonique émanant de Monsieur Z et reçue par lui le 5 octobre 2010, aux termes de laquelle ce dernier l’aurait menacé de sorcellerie à son encontre et à l’encontre de sa famille.

Toutefois, la réalité des propos tenus n’a été rapportée que par Monsieur B à son conseil et aucun élément extérieur ne permet de les valider.

Les consorts B ne sauraient en conséquence obtenir de dommages et intérêts de ce seul chef.

Si la mauvaise foi de Monsieur Z leur a occasionné un préjudice, ce préjudice sera indemnisé par les intérêts mis à la charge de Monsieur Z sur le prix de vente.

Il n’y a pas lieu en conséquence de faire droit à leur demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Monsieur Z qui succombe sera condamné aux dépens et à payer aux consorts B la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,

— Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 septembre 2011 par le Tribunal de Grande Instance d’Argentan, sauf à dire que la régularisation de la vente devra intervenir dans le mois de la signification de la présente décision,

Y ajoutant

— S que le prix de 1 200 € sera assorti des intérêts au taux légal à compter de l’assignation en date du 31 mai 2010,

— Déboute Monsieur Z de sa demande de nullité de la vente de la parcelle XXX ,

— Déboute les consorts B de leur demande de dommages et intérêts,

— Condamne Monsieur G Z à payer aux consorts B, unis d’intérêt, la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— Le condamne aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

C. GALAND E. MAUSSION

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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