Cour d'appel de Caen, 29 janvier 2016, n° 13/02408

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 29 janv. 2016, n° 13/02408
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 13/02408
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Lô, 17 juin 2013, N° 21000220

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 13/02408

Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT LO en date du 18 Juin 2013 – RG n° 21000220

COUR D’APPEL DE CAEN

2° Chambre sociale

ARRET DU 29 JANVIER 2016

APPELANTE :

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Cécile CURT, substitué par Me MILLET-URSIN, avocats au barreau de LYON

INTIMEE :

U.R.S.S.A.F DE BASSE-NORMANDIE (SITE DE SAINT-LO)

XXX

XXX

Représentée par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN

En l’absence de Monsieur le représentant de la D.R.A.S.S régulièrement avisé selon l’article R 142-29 du code de la sécurité sociale

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame TEZE, Présidente de chambre, rédacteur

Madame GUENIER-LEFEVRE, Conseiller,

Monsieur BRILLET, Conseiller,

DEBATS : A l’audience publique du 12 novembre 2015

GREFFIER : Madame LE GALL

ARRET prononcé publiquement le 29 janvier 2016 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, par prorogation du délibéré initialement fixé au 15 janvier 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame TEZE, président, et Mme GOULARD, greffier

Exposé du litige :

A la suite d’un contrôle portant sur l’application de la législation sociale pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 et au titre de l’assurance chômage pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, l’URSSAF de la Manche aux droits de laquelle se trouve l’URSSAF de Basse-Normandie a adressé à la SA SECAG une lettre d’observations datée du 26 novembre 2009 confirmée par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 janvier 2010, comportant en son point 3, recommandation pour l’avenir et à compter de sa notification, d’assujettissement et affiliation au régime général de la sécurité sociale de MM. Z, X et Y, anciens salariés, et pour tout collaborateur exerçant dans les mêmes conditions, l’organisme de recouvrement estimant que les conventions de prestations de services conclues entre les sociétés créées par ces derniers et la société SECAG et leur exécution conforme, caractérisaient l’existence d’un contrat de travail entre cette dernière et ses anciens salariés.

Après rejet le 20 septembre 2010 de sa réclamation par la commission de recours amiable, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Manche a par jugement en date du 18 juin 2013 :

— déclaré recevable le recours de la SA SECAG ;

— rejeté ledit recours ;

— en conséquence, confirmé la décision de la commission de recours amiable en sa séance du 20 septembre 2010, en ce qu’elle a validé les prescriptions pour l’avenir notifiées par l’URSSAF de la Manche, suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 7 janvier 2010 et a notifié à la SA SECAG que les conventions signées avec MM. Z, X et Y (et tout autre collaborateur exerçant dans les mêmes conditions qu’eux) doivent être requalifiées en contrat de travail à compter du 7 janvier 2010, les intéressés devant être assujettis au régime général de la sécurité sociale et précisant que si lors d’un prochain contrôle, il était constaté que ces recommandations n’étaient pas respectées, un redressement pourrait être notifié à la SA SECAG ;

— condamné la SA SECAG à payer à l’URSSAF de Basse Normandie, venant aux droits de l’URSSAF de la Manche, la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées le 2 novembre 2015 reprises oralement par son conseil, la SA SECAG , appelante de cette décision , demande à la cour, par voie d’infirmation, de:

— annuler la décision de rejet de la commission de recours amiable en date du 20 septembre 2010 notifié le 27 septembre ;

— annuler l’observation pour l’avenir formulé le 26 novembre 2009 confirmée le 7 janvier 2010 par l’URSSAF de la Manche aux droits de laquelle intervient l’URSSAF de Basse Normandie ;

— condamner l’URSSAF de Basse Normandie aux dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées le 6 novembre 2015 reprises oralement par son conseil, l’URSSAF de Basse Normandie a demandé au contraire de :

— confirmer le jugement ;

— condamner de plus, la SA SECAG au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions déposées pour l’exposé des moyens.

Motifs

En application de l’article L. 8221-6 du code du travail, si sont présumées ne pas être liées avec le donneur d’ordre par un contrat de travail, les personnes physiques immatriculées à l’un des registres de travailleurs indépendants, les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et leurs salariés, l’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanent à l’égard de celui-ci.

Par ailleurs, le contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée des parties ni de la dénomination de leurs conventions mais des conditions concrètes dans lesquelles la prestation de travail est exécutée.

Il résulte des pièces produites qu’anciens salariés de la SA SECAG exécutant une activité d’expertise comptable, MM. X, Z et Y ont créé chacun une société holding d’exercice professionnel dont il était le co-gérant majoritaire en conformité avec le règlement intérieur du groupe In Extenso auquel appartient la SA SECAG et s’appliquant à tous les associés, qu’ils sont par ailleurs associés de ce groupe et également de la SA SECAG dont eux-mêmes et les sociétés de holding d’exercice professionnelles qu’ils ont créées détiennent une partie du capital.

Il est pareillement établi que la SA SECAG a conclu avec chacune des sociétés de holding d’exercice dénommée le consultant, une convention des prestations de services comptables prévoyant notamment la réalisation de missions au nom de la SA SECAG et pour son propre compte auprès des clients actuels et futurs de cette dernière, le versement d’une rémunération fixe payée le dernier jour de chaque mois complétée le cas échéant enfin d’année d’un ajustement d’honoraires à convenir entre les parties en fonction des prestations effectuées, le remboursement des frais de transport, logement et repas sur présentation de justificatifs, l’adhésion à un régime de prévoyance et de retraite minimum proposé par le groupe.

Il est par ailleurs stipulé que la SA SECAG s’engageait à remettre au consultant les systèmes de gestion pour lui permettre de justifier de ses prestations auprès de ses clients, qu’elle pouvait confier à sa seule initiative, les mêmes missions au consultant au profit de l’une ou l’autre de ses propres filiales et que le consultant était tenu d’appliquer les méthodes et pratiques propres au groupe in extenso.

Par ailleurs, les conventions dont il est indiqué qu’elles sont conclues intuitu personae comportent un préambule exposant que ces contrats s’inscrivent dans le cadre de l’organisation générale du groupe In Extenso cimentée par les statuts et le règlement intérieur de sorte que le présent contrat devra, le cas échéant, être analysé à la lumière des dispositions du règlement intérieur qui s’imposent en cas de conflit de dispositions.

Alors que l’article 1-4 prévoit que le consultant est susceptible de réaliser d’autres prestations non concurrentes de celles de la SA SECAG dans les domaines administratifs et financiers, force est de relever que ces dispositions se trouvent vidées de leur substance par celles de l’article 4 prévoyant que le consultant mettra exclusivement à disposition de la SA SECAG et selon le cas M. Z, M. X ou M. Y, pour la durée du contrat et l’exécution de toutes les missions induites par l’exécution du présent contrat, que le consultant est lié par un accord d’exclusivité et qu’il ne pourra en aucune manière réaliser d’autres missions, même non concurrentes, au profit d’autres sociétés ou entreprises individuelles, que chacune des personnes en charge de mission à savoir MM. Z, X et Y représentant le consultant, devra consacrer 100 % de son activité professionnelle au service de sa mission auprès de la SA SECAG, et que le consultant ne pourra en aucun cas déléguer sa mission, ni la sous traiter même partiellement, ni engager de salariés aux fins d’exécution.

Cette exclusivité se trouve confirmée par le règlement intérieur du groupe In Extenso auquel fait référence la convention de prestation de services, prévoyant que chaque associé s’engage à consacrer son activité professionnelle audit groupe et s’interdit en conséquence d’exercer, directement ou indirectement, une autre activité même accessoire.

Si la durée du contrat est fixée à douze mois, renouvelable par tacite reconduction, l’article 6-2 dispose que la SA SECAG peut dénoncer le contrat moyennant un préavis de six mois pour cause d’exclusion du consultant, en application de la procédure prévue au règlement intérieur.

De plus, lors du contrôle, le directeur de la SA SECAG a indiqué à l’USSAF que rien n’avait changé dans les conditions de travail de ses trois ex-collaborateurs.

C’est donc par une juste appréciation des données du litige qu’aucun élément ne vient contredire en cause d’appel que les premiers juges ont estimé que les dispositions des conventions de prestations de services et leur exécution conforme démontrent que les gérants des sociétés de holding d’exercice professionnel exécutaient les prestations confiées par la SA SECAG dans un service organisé par cette dernière sans que ces derniers puissent constituer leur propre clientèle et que la SA SECAG disposait également d’un pouvoir de sanction disciplinaire à leur égard , de sorte que MM. X, Z et Y ont par l’intermédiaire de leur propre société fourni chacun à la société appelante des prestations dans des conditions le plaçant dans un lien de subordination juridique permanente identique à celle du travailleur salarié constituant son statut antérieur.

En effet, ne sont pas de nature à combattre cette analyse l’affectio societatis propre à l’associé, l’indépendance de l’expert comptable au sens de l’article 145 du code de déontologie des professionnels de l’expertise comptable, qu’il soit salarié ou non, les conditions d’exercice en interne au sein de la SA SECAG relatives au suivi de clientèle, stratégie, recrutement et pouvoir de signature, le statut d’associé ou la fonction de directeur général délégué de la SA SECAG des gérants, en ce qu’il ne sont pas incompatibles avec l’existence d’un contrat de travail.

Il en est de même de la clause n°9-3 de la convention de cession et d’apport des droits sociaux du 17 mars 2004 stipulant que les mandats de commissariat aux comptes de la SA SECAG continueront à être traités par les associés signataires dont M. X dès lors que la clientèle restait appartenir à la SA SECAG ainsi que l’établit l’acte de cession passé le 16 février 2009 par cette dernière au profit d’un tiers acquéreur.

En conséquence, la recommandation incriminée n’étant pas critiquable, les premiers juges seront approuvés en ce qu’ils ont confirmé la décision de la commission de recours amiable.

— Sur les dépenses de contentieux

En raison du principe de gratuité édicté par l’article R 144-10 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, il n’y a pas lieu de statuer sur les dépens.

En revanche, la SA SECAG qui succombe en son appel sera condamnée au paiement du droit prévu par ce même texte, alinéa 2.

Il sera alloué par ailleurs à l’URSSAF la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, celle-ci s’ajoutant à l’indemnité accordée par le tribunal au titre des frais irrépétibles de première instance.

Décision

La cour, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Dit n’y avoir à statuer sur les dépens d’appel ;

Condamne la SA SECAG au paiement d’un droit de 225 € en application de l’article R.144-10 al 2 du code de la sécurité sociale ;

Condamne la SA SECAG à payer à l’URSSAF de Basse Normandie la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD A. TEZE

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