Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 20 janvier 2022, n° 21/01013

  • Sociétés·
  • Enseigne·
  • Abus de minorité·
  • Fonds de commerce·
  • Objet social·
  • Assemblée générale·
  • Résolution·
  • Modification·
  • Statut·
  • Commerce

Chronologie de l’affaire

Commentaires4

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Lettre des Réseaux · 19 avril 2024

La franchise participative : Actualité et perspectives La franchise participative consiste pour le franchiseur à prendre une participation minoritaire dans le capital des sociétés franchisées. L'indépendance du franchisé est essentielle dans le contrat de franchise ; la participation du franchiseur au capital de la société franchisée ne doit pas compromettre cette indépendance (CA Paris, 21 mai 2015, n° 14/08934). La franchise participative offre une assise financière au franchisé et la pérennité des points de vente au sein du réseau. L'objet social de la société franchisée est …

 

Par elsa Guégan, Agrégée Des Facultés De Droit - Professeur À L’université De Poitiers, Institut Jean Carbonnier Et Yann Heyraud, Avocat - Docteur En Droit, Centre De Droit Des Affaires (université De Rennes) · Dalloz · 5 avril 2024

Gouache Avocats · 15 avril 2022

Une participation minoritaire d'un réseau dans le capital d'un franchisé ne permet pas de ne voter que dans son seul intérêt. La franchise participative, ou franchise capitalistique, consiste pour un réseau à prendre une participation au sein du capital de ses franchisés. Cela peut notamment permettre au réseau d'apporter un complément financier nécessaire au franchisé pour boucler le financement des investissements requis. Toutefois, il convient de prendre garde à ce que cette participation ne soit pas utilisée de manière abusive. C'est ce qu'illustre cet arrêt de la cour d'appel de …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Caen, 2e ch. civ., 20 janv. 2022, n° 21/01013
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 21/01013
Décision précédente : Tribunal de commerce de Caen, 6 avril 2021, N° 2020004038
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 21/01013 – ARRÊT N° JB.

N° Portalis DBVC-V-B7F-GXH5

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de CAEN en date du 07 Avril 2021

RG n° 2020004038

COUR D’APPEL DE CAEN DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 JANVIER 2022

APPELANTE :

S.A.S. SOCIETE D’EXPLOITATION B


N° SIRET : 411 495 369

[…]

[…]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Sabrina JOUTET, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Léa MARION, avocat au barreau de PARIS et de Me Diego DE LAMMERVILLE, avocat au barreau de PARIS,

INTIMES :

Madame Y-F Z épouse X

née le […] à […]

[…]


Bretteville l’Orgueilleuse

[…]

Monsieur E X

né le […] à […]

[…]


Bretteville l’Orgueilleuse S.A.R.L. HOUDEC


N° SIRET : 494 458 342

[…]

[…]

prise en la personne de son représentant légal


Tous représentés et assistés de Me Franck THILL, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l’audience publique du 28 octobre 2021, sans opposition du ou des avocats, Mme DELAHAYE,


Président de Chambre et Mme COURTADE, Conseillère, ont entendu les plaidoiries et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme DELAHAYE, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

Mme VIAUD, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 20 janvier 2022 à 14h00 par prorogation du délibéré initialement fixé au 6 janvier 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *


Le 15 février 2007, M. E X et Mme Y-F X née Z

créent la SARL Houdec dans le but d’exploiter en location-gérance un fonds de commerce sous l’enseigne


Shopi appartenant au groupe Carrefour, situé à Breteville l’Orgueilleuse.


La majorité du capital social de la SARL Houdec à hauteur de 74% est détenue par M. X et Mme


X, associés co-gérants, et une minorité de blocage, à hauteur de 26% est détenue par la société


B, filiale à 100% de la société Profidis, détenue elle-même à 100% par la société Carrefour Proximité


France (l’objet social de la société B étant la gestion de portefeuille de valeurs mobilières des sociétés non cotées et en général, toutes opérations commerciales, industrielles, mobilières, immobilières ou financières se rattachant directement ou indirectement à cette gestion).


Les statuts de la SARL Houdec nouvellement créée pour développer cette activité, limitent son objet social à

'l’exploitation d’un fonds de commerce de type Supermarché sis à Breteville l’Orgueilleuse (14740), […], à l’enseigne Shopi ou toute autre enseigne appartenant au Groupe Carrefour, à l’exclusion de tout autre' (article 2), la modification de l’enseigne étant subordonnée à l’accord des associés représentant les trois quarts des parts sociales (article 15).


Dans le cadre de son activité, la société Houdec a conclu un contrat de location-gérance avec la société


DNPTA (aux droits de laquelle se trouve la société Carrefour Proximité France) le 1er mars 2007 portant sur le fonds de commerce exploité sous l’enseigne 'Shopi', l’obligeant à exploiter le fonds sous cette enseigne ou tout autre enseigne du groupe Carrefour, à l’exclusion de tout autre, un contrat de franchise avec Carrefour


Proximité France et un contrat d’approvisionnement non-exclusif avec la société CSF France.


En 2013, souhaitant exploiter leur propre fonds de commerce, M. X et Mme X créent la société SCI Croix Herault, qu’ils détiennent à 100%, afin d’acquérir un terrain de 200m2 pour la construction

d’un nouveau supermarché, à Bretteville L’Orgueilleuse, route de la Délivrande.


Compte tenu de la clause de non-concurrence prévue par la contrat de location-gérance, un protocole d’accord est intervenu le 24 février 2014 entre les sociétés Carrefour Proximité France (CPF), CSF France, B,

d’une part, et les sociétés Croix Hérault, Houdec et les époux X, d’autre part. Le but de ce protocole

d’accord était de décider le sort du fonds de commerce précédemment exploité sous l’enseigne Shopi et

d’aménager les modalités d’exploitation du nouveau fonds de commerce créé par les époux X, exploité sous l’enseigne Carrefour Contact.


Le protocole a prévu le passage sous l’enseigne Proxi Service du fonds de commerce exploité actuellement sous l’enseigne Shopi (le fonds devant être fermé au plus tard le 31 juillet 2015), la construction d’un ensemble immobilier propre à abriter un fonds de commerce de supermarché à Breteville L’Orgueilleuse et la création

d’un nouveau fonds de commerce de supermarché et de son exploitation sous l’enseigne Carrefour Contact ;


Ce protocole a également prévu :

1) S’agissant des statuts de la société Houdec :


- modification de l’objet social (article 2 des statuts)


- augmentation du capital social


- limitation des pouvoirs des gérants de la société Houdec, l’article 15 exigeant une majorité de 3/4 pour toute décision significative

2) un pacte d’associés signé par M. et Mme X et la société B, prévoyant un droit de préemption au profit de l’associé minoritaire en cas de cession des parts sociales détenues, ainsi qu’une obligation de non-concurrence d’une durée de 7 ans sur un rayon de 15 km.

3) S’agissant des conventions d’exploitation conclues avec des filiales du groupe Carrefour dans le cadre de

l’exploitation du nouveau fonds de commerce développé par M. et Mme X sous l’enseigne


Carrefour Contact :


- un contrat d’approvisionnement avec la société CSF France, d’une durée de 7 ans renouvelable par tacite reconduction, par lequel 'le client s’engage à s’approvisionner de façon prioritaire auprès du fournisseur ou auprès des fournisseurs que le fournisseur a spécialement agréés’ ;


- un contrat de franchise Carrefour Contact signé avec la société Carrefour proximité France (CPF) d’une durée de 7 ans renouvelable par tacite reconduction.


Se fondant sur un déficit de compétitivité et une rentabilité 'anormalement faible', dus selon les conclusions

d’un rapport dressé par le cabinet d’audit et d’expertise comptable Finexsi à la politique tarifaire du groupe


Carrefour, la société Houdec convoque une assemblée générale extraordinaire le 20 décembre 2019 afin de :


- modifier l’objet social exclusif prévu dans les statuts, en supprimant la référence à une exploitation sous enseigne Carrefour


- réaménager les pouvoirs des gérants, afin de leur permettre l’adoption des décisions relatives au changement

d’enseigne et aux conditions d’approvisionnement sans l’accord de la majorité de 3/4 des associés
- modifier les règles d’attribution préférentielle du fonds de commerce en cas de liquidation de la société en faveur des associés majoritaires.


Selon procès verbal d’assemblée générale extraordinaire du 20 décembre 2019, les résolutions proposées ont été rejetées, la société B ayant voté défavorablement à celles-ci ;


Par actes d’huissier du 12 février 2020, la société Houdec a notifié à la société Carrefour Proximité France la dénonciation de son contrat de franchise 'Carrefour Contact’ du 24 février 2014 et à la société CSF de son contrat et d’approvisionnement, et pour les deux contrats de tous les contrats accessoires à ceux-ci


Le 27 février 2020, la société Houdec a convoqué une assemblée générale extraordinaire selon le même ordre du jour, y compris l’autorisation de souscrire un emprunt de 200 000 € en vue de la réalisation de travaux

d’investissement ;


Selon procès verbal d’assemblée générale extraordinaire du 13 mars 2020, la société B s’est à nouveau opposé aux projets de résolutions, mais a accepté partiellement par un courrier ultérieur l’emprunt sollicité ;


Le 27 mai 2020, la société Houdec a convoqué une assemblée générale extraordinaire selon le même ordre du jour, y compris l’autorisation de souscrire un emprunt en vue de la réalisation de travaux d’investissement ainsi qu’une assemblée générale ordinaire aux fins notamment d’examen et d’approbation des comptes et rémunération de la gérance;


Selon procès-verbal d’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020, la société B s’est opposé aux projets de résolutions, mais a accepté un emprunt à hauteur de 65 000 € ;


Selon procès-verbal d’assemblée générale ordinaire du 12 juin 2020, les résolutions relatives aux comptes et à la rémunération des gérants ont été acceptées à l’unanimité ;


Estimant être victimes d’un abus de minorité commis par la société B, la Sarl Houdec et M. et Mme


X ont, par acte d’huissier du 1er juillet 2020, fait assigner la Sas B devant le tribunal de commerce de Caen, lequel, par jugement du 7 avril 2021, a :


- constaté l’abus de minorité de la SAS B ;


- débouté la SAS B de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;


- désigne la SELARL Trajectoire, prise en la personne de Me Y-Claude Ellert, en qualité d’administrateur ad hoc ayant pour mission de :

*se faire communiquer par la société Houdec et ses associés, les éléments d’information utiles à l’exécution de sa mission

*de convoquer, conformément aux statuts et à la loi, les associés de la société Houdec en assemblée générale à effet de se prononcer sur les résolutions suivantes :


Première résolution

(Autorisation de souscrire un emprunt-pouvoirs)


Deuxième résolution

(Modification de l’objet social)


Troisième résolution (modifications des limitations de pouvoirs de la gérance)
Quatrième résolution

(Modification de l’article 'Décision ordinaires')


Cinquième résolution

(Modification de l’article 32 Liquidation)


- dit que les frais et honoraires de l’administrateur ad-hoc seront supportés par la société Houdec ;


- ordonné l’exécution provisoire ;


- condamné la SAS B à payer à la SARL Houdec, Mme X, et M. X la somme de

1.000 euros, à chacun, au titre de l’article 700 du code de procédure civile


- condamné la SA B aux entiers dépens, y compris les frais de greffe s’élevant à la somme de 108,17 euros, dont TVA 18,03 euros.


Par déclaration au greffe du 8 avril 2021, la société B a formé appel de cette décision, critiquant

l’ensemble de ses dispositions ;


Sur requête des intimés, ces derniers ont été autorisés par ordonnance du 10 mai 2021 a assigner pour le jeudi

8 juillet 2021 la société B, l’affaire ayant été renvoyée au 28 octobre 2021 ;


Par conclusions n°3 enregistrées au greffe le 25 octobre 2021 et auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel, l’appelante demande à la cour de :


- Juger que les demandeurs ne prouvent pas avoir communiqué une information suffisante en temps utile à


B aux fins de voter les modifications statutaires soumises à l’assemblé générale extraordinaire du 12 juin

2020 ;


- Juger que les demandeurs ne démontrent pas que modifications statutaires envisagés constituaient une opération essentielle à la survie de la société Houdec ;


- Juger que les demandeurs ne démontrent pas que le refus de B de voter les modifications statutaires proposées a été réalisé dans l’unique dessein de favoriser ses intérêts, au détriment de l’intérêt de l’ensemble des autres associés ;


- Juger que les demandeurs ne démontrent pas que le refus de B de voter les modifications statutaires proposées est contraire à l’intérêt de la société Houdec, lequel s’apprécie dans le cadre de l’objet social de la société commune franchisée co-contrôlée par B ;


Juger en conséquence, qu’en s’abstenant de voter à la première résolution et en s’opposant de voter aux deuxième, troisième, quatrième et cinquième résolutions soumises au vote par la gérance, lors de l’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020, la société B n’a pas commis d’abus de minorité ;


En conséquence :


- Infirmer et annuler le jugement en ce qu’il a constaté un abus de minorité de la part

de la société B et désigné un mandataire ad hoc ;


Et, statuant à nouveau :
- Débouter la société Houdec, Mme X et M. X de l’ensemble de leurs demandes.


En tout état de cause :


- Condamner solidairement Mme X et M. X à verser une somme de 10.000 euros à la société B au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés pour sa défense et non compris dans les dépens.


- Condamner solidairement Mme X et M. X aux entiers dépens.


Par conclusions enregistrées au greffe le 15 octobre 2021 et auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel, la Sarl Houdec et M. et Mme X demandent à la cour de :


- Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a jugé que la société B a commis un abus de minorité au préjudice de la société Houdec ;


- La rectifier, et/ou la réformer pour le surplus et au constat que :

* la société B en s’abstenant à l’adoption de la première résolution (autorisation de souscrire un emprunt), soumise au vote des associés à l’occasion de l’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020 a abusé de son droit de vote en s’opposant à une opération essentielle à l’intérêt général de la société Houdec, et a ainsi commis un abus de minorité dans l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts, et ceux du groupe


Carrefour tiers extérieur à la société, au détriment de l’intérêt général de la société et de son intérêt social;

* la société B en s’opposant à l’adoption de la deuxième résolution (modification de l’objet social), soumise au vote des associés à l’occasion de l’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020 a abusé de son droit de vote en s’opposant à une opération essentielle à l’intérêt général de la société Houdec, et a ainsi commis un abus de minorité dans l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts, et ceux du groupe


Carrefour tiers extérieur à la société, au détriment de l’intérêt général de la société et de son intérêt social ;

* la Société B en s’opposant à l’adoption de la troisième résolution (modification des limitations des pouvoirs des gérants) soumise au vote des associés à l’occasion de l’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020 a abusé de son droit de vote en s’opposant à une opération essentielle à l’intérêt général de la société


Houdec, et a ainsi commis un abus de minorité dans l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts, et ceux du groupe Carrefour tiers extérieur à la société, au détriment de l’intérêt général de la société et de son intérêt social ;


- Dire que le mandataire ad hoc judiciairement désigné, aura pour mission :

* De se faire communiquer par la société Houdec et ses associés, les éléments d’informations utiles à

l’exécution de sa mission ;

* De représenter la Société B et de voter dans l’intérêt social en son nom à l’occasion d’une nouvelle assemblée générale extraordinaire qui sera convoquée par la gérance de la société Houdec et dont l’ordre du jour sera semblable à celui de l’assemblée du 12 juin 2020, et à l’effet donc de se prononcer sur les résolutions suivantes :


- […]

(Autorisation de souscrire un emprunt – pouvoirs)


L’assemblée générale, après en avoir délibéré, décide d’autoriser la conclusion d’un emprunt d’un montant maximum de 200.000 euros sur cinq années, destiné à financer la réalisation de travaux d’entretien et d’amélioration du magasin.


L’assemblée générale, conformément à l’article 15 des statuts, autorise Mme Y-F X et/ou

M. E X, pouvant agir ensemble ou séparément, à rechercher auprès de différents établissement financiers un ou plusieurs emprunts d’un montant maximum de deux cent mille (200 000) euros sur cinq années, à négocier au meilleur taux du marché, à percevoir toutes sommes, à accorder les garanties sollicitées par le prêteur et généralement de faire tout ce qui sera nécessaire.

DEUXIÈME RÉSOLUTION

(Modification de l’objet social)

1.1. L’article 2 des statuts intitulé 'Objet’ stipule que : La société a pour objet :

« La création et l’exploitation d’un fonds de commerce de type Supermarché sis à BRETEVILLE

L'[…], à l’enseigne CARREFOUR CONTACT ou toute autre enseigne appartenant au Groupe CARREFOUR, à l’exclusion de toute autre. Et plus généralement toutes opérations, de quelque nature qu’elles soient, juridiques, économiques et financières, civiles et commerciales, se rattachant à l’objet sus-indiqué. »


L’assemblée générale après en avoir délibéré décide de modifier l’article 2 des Statuts de la manière suivante :

« La création et l’exploitation d’un fonds de commerce de type Supermarché sis à BRETEVILLE

L'[…].

Et plus généralement toutes opérations, de quelque nature qu’elles soient, juridiques, économiques et financières, civiles et commerciales, se rattachant à l’objet sus-indiqué.»

TROISIÈME RÉSOLUTION (Modification des limitations de pouvoirs de la gérance)

1.2. L’article 15 alinéa 3 des Statuts intitulé 'Pouvoirs des gérants’ stipule que ''Toutefois, à titre de règlement intérieur, il est convenu que la gérance ne pourra sans y être autorisée par une décision des associés représentant plus des ¾ des parts sociales, contracter des emprunts autres que les crédits bancaires de trésorerie (facilités de caisse, découverts), effectuer des achats, échanges et ventes d’immeuble ou de fonds de commerce, autoriser la location-gérance en tout ou partie du fonds de commerce, notamment celui de

[…], exploité par la présente Société, modifier

l’enseigne de ce fonds modifier les conditions du ou des baux des locaux d’exploitation, donner ou accepter congé, résilier le ou les baux des locaux d’exploitation, accepter ou transiger une indemnité d’éviction, renouveler, prendre à bail, constituer des hypothèques ou des nantissements, participer à la fondation de

Société et effectuer tous apports à des sociétés constituées ou à constituer ou prendre des intérêts dans des

Sociétés ayant ou non le même objet social'


L’assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de supprimer la modification de l’enseigne du fonds des limitations de pouvoirs de la gérance. Le troisième paragraphe de l’article 15 des statuts est dorénavant rédigé comme suit :

« 'Toutefois, à titre de règlement intérieur, il est convenu que la gérance ne pourra sans y être autorisée par une décision des associés représentant plus des ¾ des parts sociales, contracter des emprunts autres que les crédits bancaires de trésorerie (facilités de caisse, découverts), effectuer des achats, échanges et ventes

d’immeuble ou de fonds de commerce, autoriser la location-gérance en tout ou partie du fonds de commerce, notamment celui de […], exploité par la présente

Société, modifier les conditions du ou des baux des locaux d’exploitation, donner ou accepter congé, résilier le ou les baux des locaux d’exploitation, accepter ou transiger une indemnité d’éviction, renouveler, prendre à bail, constituer des hypothèques ou des nantissements, participer à la fondation de Société et effectuer tous apports à des sociétés constituées ou à constituer ou prendre des intérêts dans des Sociétés ayant ou non le même objet social. »

QUATRIÈME RÉSOLUTION (Modification de l’article Décisions Ordinaires)

1.3. L’article 20- III des statuts intitulé « Décisions ordinaires » stipule que « 'Par exception au paragraphe ci-dessus, les décisions relatives à la nomination du gérant et celles visées à l’article 15 § 3 ci-dessus, sont toujours prises tant en première qu’en seconde consultation à la majorité représentant plus des 3/4 des parts sociales. »


L’assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de supprimer purement et simplement le paragraphe Il de l 'article 20-III des statuts.

CINQUIÈME RÉSOLUTION (Modification de l’article 32 ' LIQUIDATION)

1.4. L’article 32-II alinéa 3 des Statuts intitulé « Désignation du ou des liquidateurs » stipule que :« ' Le liquidateur représente la Société et il est investi des pouvoirs les plus étendus. Tout l’actif social est réalisé à

l’exception du fonds de commerce exploité par la présente société, qui fera l’objet d’une attribution préférentielle au profit de B, à charge de soulte pour cette dernière. A défaut d’accord entre les parties la valorisation du fonds de commerce attribué sera déterminée par voie d’expertise dans les conditions prévues à l’article 1592 du Code Civil. »


L’assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de supprimer l’attribution préférentielle au profit de la société B pour l’attribuer aux associés majoritaires. Le paragraphe II – DÉSIGNATION DU OU DES


LIQUIDATEURS de l’article 32 des statuts est dorénavant rédigé comme suit :

« 'Le liquidateur représente la Société et il est investi des pouvoirs les plus étendus. Tout l’actif social est réalisé à l’exception du fonds de commerce exploité par la présente société, qui fera l’objet d’une attribution préférentielle aux associés majoritaires, à charge de soulte pour ces derniers. A défaut d’accord entre les parties la valorisation du fonds de commerce attribué sera déterminée par voie d’expertise dans les conditions prévues à l’article 1592 du Code Civil. »


- Condamner la société B à régler les frais et honoraires du mandataire ad hoc ;


Reconventionnellement :


- Condamner la société B à payer à la société Houdec et à M. et Mme X, et à chacun, une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en sanction de l’abus du droit de vote ;


- Condamner la société B à payer à la Société Houdec et à M. et Mme X, et à chacun, une indemnité de 20.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;


- Condamner la société B aux entiers dépens de première instance et d’appel.

MOTIFS


I – Sur l’abus de minorité


La société B fait valoir que :


- son opposition au vote des résolutions n°2 à 5 tendant à la modification des statuts n’est pas constitutif d’un abus de minorité puisqu’elle ne s’est pas opposée à une opération économique essentielle pour la survie de la société. Elle précise que la société Houdec n’a jamais avant l’assemblée générale fait état de difficultés financières ou de rentabilité, les pièces comptables révèlent une évolution du chiffre d’affaires et du résultat d’exploitation satisfaisant, la rupture de tendance constatée en 2019 ne permet pas de conclure à un péril imminent ou une fragilité dans la pérennité de l’exploitation . Elle rappelle que l’intérêt doit s’apprécier dans le cadre de son objet social lequel consiste à exploiter un fonds de commerce sous enseigne de Carrefour contact. Elle ajoute que le conseil de la concurrence, dans son avis du 27 septembre 2011, a souligné que le propre de la franchise participative est de créer une société d’exploitation conjointement contrôlée par ses associés dont l’objectif est d’assurer le respect d’un objet social exclusif. Elle rappelle par ailleurs que l’objet social tel que défini dans les statuts permet à la société Houdec de fonctionner normalement puisqu’elle n’est nullement tenue de s’approvisionner en exclusivité auprès de la société CSF ;


Elle indique également que l’illicéité invoquée de certaines clauses statutaires est sans objet, le tribunal de commerce de Rennes étant saisi aux fins de statuer sur leur validité;


Elle estime également n’avoir pu obtenir l’information insuffisante pour se prononcer puisqu’elle n’a reçu le rapport Finexsi 15 jours avant l’assemblée générale du 20 décembre 2019 et que les annexes de ce rapport

n’ont été transmis que partiellement lors de la convocation du 12 juin 2020, ne lui permettant de les étudier utilement ;


- son opposition au vote de la résolution n°1 est justifiée puisqu’il n’est pas démontré que ces travaux soient indispensables, les gérants ayant reconnu n’avoir pas reçu tous les devis et que l’ensemble des travaux n’étaient pas oligatoires, ajoutant que les gérants avaient en tout état de cause contracté cet emprunt en juillet 2020 au mépris des décisions de l’assemblée générale ;


La société Houdec et M. et Mme X font valoir que compte tenu de la dénonciation des contrats

d’enseigne, d’approvisionnement et de franchise, antérieurement à l’assemblée générale et sans contestation des sociétés concernées, la société Houdec ne peut plus, sans modification de l’objet social exclusif, continuer son exploitation d’un supermarché sous l’enseigne qu’elle choisira.


Ils soutiennent que :


- la situation financière de la société est déficitaire, et sa rentabilité apparente ne tient qu’à la bonne gestion de son rayon carburant, la vente des marchandises étant structurellement déficitaire ;


- les rapports du cabinet Finexsi démontrent le déficit de rentabilité de l’exploitation sous l’enseigne de proximité Carrefour ;


- que l’intérêt social de la société ne se confond pas avec son objet social


- que la dénonciation des contrats de franchise et d’approvisionnement, non contestés par les sociétés


Carrefour proximité france et CSF, dicte la modification de l’objet social exclusif, puisque la société Houdec ne peut rechercher un approvisionnement indispensable à la continuité de son exploitation (trouver un approvsionnement extérieur nécessitant une modification de l’objet social exclusif), rappelant que cette dénonciation relève des pouvoirs de la gérance et ne sont pas contraires à l’article 15 des statuts ;


- que l’opposition de la société B est dictée par les intérêts du Groupe Carrefour dont elle est la filiale et non par l’intérêt social de la société Houdec ;


Ils soutiennent par ailleurs que la société B a reçu toutes les informations nécessaires pour se prononcer, laquelle dispose au demeurant des comptes sociaux de la société et qui a obtenu tous les documents nécessaires ;

******


L’article 1833 du code civil dispose que 'toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt commun des associés. La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité’ ;


L’abus de minorité suppose démontrer deux éléments cumulatifs, le premier que l’attitude de l’associé ayant usé de sa minorité de blocage doit être contraire à l’intérêt général de la société en interdisant la réalisation

d’une opération essentielle pour celle-ci, le second que cette attitude est fondée sur l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts au détriment de l’ensemble des autres associés ;

- Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième résolutions ;

1) sur la situation financière déficitaire de la société Houdec


L’analyse des comptes annuels clos le 31 janvier 2020 de la société Houdec démontre depuis 2015 un chiffre

d’affaires en progression, de 5 277 943 € HT en 2015 à 6 452 273 € HT en 2018, et de 6 374 478 € HT en

2019. Le taux de marge commercial est stable (11.95% en 2017, 11.99% en 2018 et 12.19% en 2019). Le résultat net est respectivement de 12 177 €, 16 385€, 25 312€, 13 809 € et 2657 €.


L’expert comptable, par un courriel du 14 avril 2020, explique les chiffres de 2019 de la manière suivante : 'un


CA en baisse de 77k par rapport à l’année dernière (magasin et station) mais une marge qui augmente légèrement en taux (+ 1.2 pt sur la station et -0.6 pt sur le magasin) donc la masse est quasiment identique à

l’année dernière. La baisse du chiffre a donc moins d’impact sur la marge. Pour les charges, 'l’enveloppe globale est proche de celle de l’année dernière mais quelques variations sont à noter : les frais généraux ont

20k de plus que l’année dernière (edf, loyer, entretien et sponsoring notamment), mais les primes des gérants ont été diminuées de 20k également, ce qui équilibre’ ;


Pour considérer que ce faible résultat par rapport au chiffre d’affaire n’est que la conséquence des coûts

d’approvisionnement des marchandises imposés par le contrat signé avec la société CSF, les intimés produisent aux débats le rapport Finexsi, expert et conseil financier, qui conclut de la manière suivante :


- Sur la base de notre étude comparative sur la période de juin 2019, il apparaît que l’enseigne Carrefour


Contact offre à la société Houdec des conditions tarifaires dont la compétitivité est inférieure à celle de

l’enseigne U.


- Notre étude, qui repose sur un échantillon représentatif de référence de marque nationale montre que le taux de marge commercial moyen aurait été supérieur de 11.57 points si la société Houdec avait été adhérente au réseau système U et pour 4.46 points en moyenne pondérée. Les prix d’achat du magasin auraient été inférieurs en moyenne de plus de 15%, alors que les prix de vente auraient connu une variation de moins de

2% sur la base de notre échantillon marque nationale ;


- sur la base de ces constats, le déficit de compétitivité de l’enseigne Carrefour Contact par rapport à des concurrents présents sur la même zone de chalandise a pu affecter significativement l’activité et les performances financières de la société Houdec’ ;


Les intimés ont également produits aux débats plusieurs autres rapports de Finexsi qui ont également établi une étude comparative dans les mêmes termes avec d’autres magasins exerçant sous l’enseigne Carrefour City et qui conclut, avec des résultats chiffrés différents, à un déficit de compétitivité ;


Le rapport du 3 juin 2021 du Cabinet d’experts comptables Albergel, critique les échantillons de produits analysés limités puisque sont exclus les marques distributeurs ainsi que les produits des rayons traditionnels

(boucherie, poissonnerie, fruits et légumes) qui sont les produits à plus forte marge, et l’analyse comparative des prix sur une très courte période, un seul mois pour l’étude comparative avec la société Houdec ;


S’il est vrai que l’analyse du taux de marge commercial est pertinente pour les maques nationales et non pour les marques distributeurs (qui sont par définition spécifiques à chaque enseigne), l’analyse n’est cependant pas suffisament probante en termes du nombre de marques retenues qui excluent des produits de rayons traditionnels qui sont des produits de grande consommation et en terme de période, la période choisie (un mois) étant trop courte. En outre, cette analyse devrait nécessairement être affinée en fonction des conditions contractuelles particulières qui seront conclus entre le distributeur Super U et la société Houdec.


Dès lors, au vu des éléments financiers de la société Houdec au moment où les décisions ont été soumises à

l’assemblée générale, du caractère conjoncturel des résultats de l’année 2019, des bons résultats pour l’année

2020 puisque le chiffre d’affaire a été de 6 799 348 € et un résultat net de 39 108 € selon le dossier de gestion du cabinet Talenz, expert-comptable, les résolutions proposées, motivées par une volonté d’améliorer la rentabilité de la société, ne répondaient pas à une opération essentielle pour la société et nécessaire à sa survie, correspondant à la première condition de l’abus de minorité ;

2) Sur la continuité d’exploitation de la société Houdec


Le protocole signé le 24 février 2014 entre d’une part la société Croix Herault, la société Houdec, M. et Mme


X, d’autre part la société Carrefour Proximité France, la société CSF France et la société B prévoit en son article 4 intitulé 'la création d’un fonds de commerce Carrefour Contact', une augmentation de capital de la société Houdec, la signature d’un pacte d’associés entre les associés de la société Houdec,

l’adoption de l’enseigne Carrefour Contact impliquant les contrats nécessaires à l’exploitation du fonds de commerce sous l’enseigne Carrefour Contact, soit notamment un contrat de franchise Carrefour Contact et un contrat d’approvisionnement’ ;


Ces deux contrats signés le 24 février 2014 comportent tous deux une clause du durée de 7 années, renouvelables par tacite reconduction à défaut de dénonciation un an avant l’expiration de la période en cours.


Les dénonciations de ces contrats par la société Houdec au terme de la durée contractuelle de 7 ans, avec un préavis d’un an, n’ont fait l’objet d’aucune contestation par les sociétés CSF et Carrefour Proximité France.


Elles ont été contestées par la société B qui a saisi le juge des référés par acte d’huissier du 19 janvier

2021 sur le fondement du trouble manifestement illicite, estimant que cette contestation est contraire aux statuts. Le juge des référés a, par ordonnance du 18 mars 2021, sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal saisi au fond sur l’abus de minorité.


Or, la dénonciation des contrats d’approvisionnement et de franchise, conformément aux conditions contractuelles telles que rappelées ci-avant, conduit à la nécessité pour la société Houdec de modifier son objet social.


En effet, selon l’article 2 de ses statuts, la société Houdec a pour objet la création et l’exploitation d’un fonds de commerce de type supermarché, sis à […], à l’enseigne Carrefour


Contact ou tout autre enseigne appartenant au Groupe Carrefour, à l’exclusion de tout autre’ ;


Le contrat de franchise dénoncé autorisait la société Houdec notamment à un droit d’usage de l’enseigne, le magasin concerné ne pouvant être désigné autrement. C’est d’ailleurs en exécution du protocole d’accord des parties pour exploiter le fonds de commerce de supermarché sous l’enseigne Carrefour Contact que les statuts de la société Houdec ont été modifiés (notamment son objet social) et que les contrats de franchise et

d’approvisionnement ont été conclus ;


Compte tenu de la dénonciation de ces contrats, l’objet social de la société Houdec en ce qu’il l’oblige à exploiter un fonds de commerce de supermarché sous une enseigne appartenant au Groupe Carrefour à

l’exclusion de toute autre n’est plus en conformité avec son activité, et l’empêche de continuer à exploiter son fonds de commerce de supermarché, y compris avec un autre distributeur. La modification de l’article 2 des statuts est donc une opération essentielle pour la société, et pour sa survie, l’impossibilité d’exercer son activité étant contraire à l’intérêt social.


C’est en vain que la société B soutient que les associés majoritaires se prévaudraient de leur propre turpitude en dénonçant ces contrats en violation des statuts. En effet, d’une part les contrats ont été dénoncés conformément à la clause de dénonciation qu’ils contiennent, d’autre part le protocole d’accord organisant l’exploitation par la société Houdec d’un fonds de commerce de supermarché sous l’enseigne Carrefour ne contient aucune disposition interdisant à la première de dénonçer les contrats de franchise et

d’approvisionnement à l’issue de leur durée contractuelle de 7 ans, et enfin ces contrats ne sont pas visés par

l’article 15 des statuts comme nécessitant un vote à une majorité des 3/4 ;


La société B a été informée de la dénonciation des contrats le 12 février 2020 ainsi qu’il résulte de son courrier du 9 mars 2020 adressé à la société Houdec, et cette dernière a répondu aux motifs d’opposition formulés par la société B par courrier du 13 mars suivant. Les motifs des propositions de résolution ont à chaque fois été expliquées par des rapports de la gérance joints aux convocations à l’assemblée générale extraordinaire, notamment à celle du 12 juin 2020 ;


Pour s’opposer à la modification de l’objet social, la société B se fonde sur la défense de la 'franchise participative’ et estime que l’organisation statutaire de la société Houdec a pour objectif de garantir

l’engagement de M. et Mme C de conserver le fonds de commerce cédé par Carrefour à Houdec au sein du réseau Carrefour.


Or, comme il l’a été rappelé plus haut, le système de franchise participative organisé en l’espèce par le protocole d’accord de 2014 ne fait pas obstacle à une dénonciation du contrat de franchise et

d’approvisionnement dans les délais prévus par ces derniers. L’avis du Conseil de la concurrence, rendu le 27 septembre 2021, invoqué par la société B n’y fait pas davantage obstacle. En effet, cet avis purement consultatif s’est prononcé sur la conformité à l’article L420-1 du code de commerce (relatif aux pratiques anti-concurrentielles), des clauses statutaires de la société exploitante (identiques à celles du présent litige) et

a conclu que de telles clauses ne relèvent pas du champ d’application du droit des pratiques anticoncurrentielles mais doivent s’analyser sous l’angle des dispositions relatives au contrôle des concentrations. Dès lors, ces conclusions sont sans incidence juridique sur l’existence d’un abus de minorité fondé sur le refus de modifier les statuts.


Ainsi, le refus de vote de la modification statutaire par la société B, filiale à 100% de la société Profidis, détenue elle-même à 100% par la société Carrefour Proximité France, ne s’explique que par sa volonté de préserver le système de franchise participative, pourtant régulièrement dénoncé, et ne répond qu’à la défense de ses intérêts personnels, lesquels se confondent avec ceux de la société Carrefour Proximité France.


L’abus de minorité est donc constitué.


La modification de l’objet social indispensable pour assurer la continuité de l’exploitation nécessite la modification de l’article 2 et de l’article 15 alinéa 3 des statuts. En revanche, la modification de l’article 20-III des statuts par sa généralité est sans lien avec la modification de l’objet social. Si ce texte contient une référence aux décisions relevant de l’article 15 par. 3, celles ci ne sont toutefois pas listées et pourront donc

s’interpréter en référence à l’article 15 par. 3 après modification. De même la modification de l’article 32 des statuts relatif à la liquidation de la société, en ce qu’il prévoit que le fonds de commerce fait l’objet d’une attribution préférentielle au profit de B, est sans lien avec la modification de l’objet social fondé sur la continuité de l’exploitation.


En conséquence, il convient de dire, par infirmation partielle du jugement, que le mandataire ad hoc aura pour mission de représenter la société B et de voter en son nom dans l’intérêt social à l’occasion d’une assemblée générale, à effet de se prononcer sur la seconde et troisième résolution ;


- Sur la première résolution (autorisation de recourir à un emprunt de 200 000 € pour financer des travaux) ;


Les rapports de gérance adressés avant chaque assemblée générale extraordinaire et notamment celui du 12 juin 2020 liste les travaux nécessaires suivants :


- mise aux normes PCI à la station essence
- nouveau rayon fruits et légumes


- peinture et signalisation du parking


- rajout d’une caméra de videosurveillance


- nettoyage et contrôle étanchéité toiture et bardage


- mise en place d’un local poubelle sécurisé


- remplacement chauffe-eau et ajout d’un adoucisseur en partie boucherie


- réparation des enrobés partie livraison


- électrification du totem CFR


- travaux divers ;


La nécessité de ces travaux ne résulte d’aucune pièce, sauf quelques photographies non datées concernant le bardage.


Il est produit un procès verbal de la commission de sécurité de la préfecture du Calavados du 20 décembre

2005 pour 'une supérette Shopi à Bretteville L’Orgeuilleuse’ qui au vu de sa date concerne nécessairement le premier supermarché fermé depuis 2015. Il en est de même des courriels et lettres échangés entre M. et Mme


C et M. D (représentant la société Carrefour) entre 2007 et 2010 sur la nécessité de certains travaux. Il en est encore de même de la demande de réalisation de travaux sous peine d’un arrêté de fermeture adressé par la mairie de Bretteville L’orgueilleuse à la société DNPTA le 9 décembre 2010.


Par ailleurs, il n’est pas davantage produit de devis relatifs aux travaux pouvant justifier le montant de

l’emprunt dont l’autorisation est sollicitée ;


Lors de l’assemblée générale du 13 mars 2020, le gérant avait indiqué ne pas avoir reçu tous les devis et avait produit un listing chiffré des travaux annexé au procès verbal pour 194 969.88 € ;


La société B dans un courrier du 27 avril 2020 a indiqué donné son accord à hauteur de 65 000 € en listant notamment les travaux suivants : achat d’un extincteur, remplacement tuyau et pistolet de la station essence, mise aux normes PCI à la station essence ;


Le procès verbal d’assemblée générale extraordinaire du 12 juin 2020 ne révèle pas que de nouveaux documents ou devis sur les travaux demandés aient été fournis par les gérants à la société B.


Dès lors, c’est à juste titre que celle-ci s’est estimé insuffisament informée, et qu’en outre, faute d’éléments ou pièces de nature à établir la nécessité des travaux et leur coût, il ne peut être reproché à la société B, en refusant de voter cette résolution, d’avoir commis un abus de minorité.


Le jugement, qui n’a pas motivé sa décision sur cette résolution relative à l’autorisation d’emprunt, sera infirmé

;


En définitive, le mandataire ad hoc désigné par le premier juge devra, après s’être fait communiquer les documents utiles à sa mission, convoquer l’assemblée générale extraordinaire à l’effet de se prononcer sur les projets de résolutions n°2 et 3 du dispositif des conclusions des intimés, et qui deviendront les projets de résolutions n°1 et 2.


Il convient par ailleurs de compléter le jugement en ce qu’il a omis de donner mission au mandataire ad hoc de voter sur ces projets au nom de la société B et dans l’intérêt social ;


- Sur les autres demandes


Les intimés sollicitent une indemnité de 50 000 € chacun à titre de dommages et intérêts en sanction de l’abus du droit de vote ;


Si l’abus de minorité de la société B a été effectivement constaté, les intimés ne produisent toutefois aucun élément ou pièce pouvant justifier le préjudice en résultant;


Leur demande sera rejetée ;


Les intimés seront également déboutés de leur demande tendant à voir condamner la société B à prendre en charge les frais et honoraires du mandataire ad hoc, le jugement étant confirmé en ce qu’il a mis ces derniers à leur charge ;


Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux indemnités de procédure seront confirmées ;


En cause d’appel, la société B qui pour l’essentiel perd le procès sera condamnée aux dépens d’appel et déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile. En équité, elle réglera, sur ce même fondement, une somme de 8 000 € à chacun des intimés ;

PAR CES MOTIFS

La Cour


Statuant publiquement et par arrêt contradictoire


Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Caen le 7 avril 2021 sauf sur les projets de résolution qui devront être soumises à l’assemblée générale extraordinaire et sauf à compléter la mission de

l’administrateur ad hoc en ce qu’il devra voter sur les projets de résolution dans l’intérêt social ;


Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant


Dit que le mandataire ad hoc judiciairement désigné par le premier juge, aura pour mission :

* De se faire communiquer par la société Houdec et ses associés, les éléments d’informations utiles à

l’exécution de sa mission ;

* De représenter la Société B et de voter dans l’intérêt social en son nom à l’occasion d’une nouvelle assemblée générale extraordinaire qui sera convoquée par la gérance de la société Houdec à l’effet de se prononcer sur les résolutions suivantes :

[…]

(Modification de l’objet social)

1.1. L’article 2 des statuts intitulé 'Objet’ stipule que : La société a pour objet :

« La création et l’exploitation d’un fonds de commerce de type Supermarché sis à BRETEVILLE

L'[…], à l’enseigne CARREFOUR CONTACT ou toute autre enseigne appartenant au Groupe CARREFOUR, à l’exclusion de toute autre. Et plus généralement toutes opérations, de quelque nature qu’elles soient, juridiques, économiques et financières, civiles et commerciales, se rattachant à l’objet sus-indiqué. »
L’assemblée générale après en avoir délibéré décide de modifier l’article 2 des Statuts de la manière suivante :

« La création et l’exploitation d’un fonds de commerce de type Supermarché sis à BRETEVILLE

L'[…].

Et plus généralement toutes opérations, de quelque nature qu’elles soient, juridiques, économiques et financières, civiles et commerciales, se rattachant à l’objet sus-indiqué.»

DEUXIEME RÉSOLUTION (Modification des limitations de pouvoirs de la gérance)

1.2. L’article 15 alinéa 3 des Statuts intitulé 'Pouvoirs des gérants’ stipule que ''Toutefois, à titre de règlement intérieur, il est convenu que la gérance ne pourra sans y être autorisée par une décision des associés représentant plus des ¾ des parts sociales, contracter des emprunts autres que les crédits bancaires de trésorerie (facilités de caisse, découverts), effectuer des achats, échanges et ventes d’immeuble ou de fonds de commerce, autoriser la location-gérance en tout ou partie du fonds de commerce, notamment celui de

[…], exploité par la présente Société, modifier

l’enseigne de ce fonds modifier les conditions du ou des baux des locaux d’exploitation, donner ou accepter congé, résilier le ou les baux des locaux d’exploitation, accepter ou transiger une indemnité d’éviction, renouveler, prendre à bail, constituer des hypothèques ou des nantissements, participer à la fondation de

Société et effectuer tous apports à des sociétés constituées ou à constituer ou prendre des intérêts dans des

Sociétés ayant ou non le même objet social'


L’assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de supprimer la modification de l’enseigne du fonds des limitations de pouvoirs de la gérance. Le troisième paragraphe de l’article 15 des statuts est dorénavant rédigé comme suit :

« 'Toutefois, à titre de règlement intérieur, il est convenu que la gérance ne pourra sans y être autorisée par une décision des associés représentant plus des ¾ des parts sociales, contracter des emprunts autres que les crédits bancaires de trésorerie (facilités de caisse, découverts), effectuer des achats, échanges et ventes

d’immeuble ou de fonds de commerce, autoriser la location-gérance en tout ou partie du fonds de commerce, notamment celui de […], exploité par la présente

Société, modifier les conditions du ou des baux des locaux d’exploitation, donner ou accepter congé, résilier le ou les baux des locaux d’exploitation, accepter ou transiger une indemnité d’éviction, renouveler, prendre à bail, constituer des hypothèques ou des nantissements, participer à la fondation de Société et effectuer tous apports à des sociétés constituées ou à constituer ou prendre des intérêts dans des Sociétés ayant ou non le même objet social. »


Déboute la société Houdec, M. et Mme X de leur demande de dommages et intérêts ;


Condamne la société B à payer à la société Houdec, M. et Mme X, chacun, la somme de 8000

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;


La déboute de sa demande formée sur le même fondement ;


Condamne la société B aux dépens d’appel ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL L. DELAHAYE 1. H I J K

[…]
Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 20 janvier 2022, n° 21/01013