Cour d'appel de Caen, n° 12/02026

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, n° 12/02026
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 12/02026

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 12/02026

Code Aff. :

ARRET N°

XXX

ORIGINE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BERNAY en date du 09 Décembre 2004 -

RG n° 03/00537

Arrêt de la Cour d’Appel de ROUEN en date du 9 Décembre 2010 RG n° 07/1468

Arrêt de la Cour de Cassation en date du 20 Mars 2012

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

RENVOI DE CASSATION

ARRET DU 20 JUIN 2013

APPELANT :

Monsieur B J-K L X

né le XXX à XXX

'XXX'

XXX

représenté par Me Jacques MIALON, avocat au barreau de CAEN

assisté de Me K-Paul EKEU, avocat au barreau de CAEN,

INTIMES :

Monsieur E F

né le XXX à XXX

XXX

XXX

représenté par la SELARL SALMON & ASSOCIÉS, avocats au barreau de CAEN,

assisté de la SCP LECUYER MITTON SPAGNOL CAMPANARO, avocats au barreau d’EVREUX

L’EARL DE LA SEBIRERIE

XXX

XXX

prise en la personne de son représentant légal

représentée par la SELARL SALMON & ASSOCIÉS, avocats au barreau de CAEN,

assistée de la SCP LECUYER MITTON SPAGNOL CAMPANARO, avocats au barreau d’EVREUX

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur CHRISTIEN, Président,

Madame BEUVE, Conseiller,

Madame BOISSEL DOMBREVAL, Conseiller, rédacteur,

DEBATS : A l’audience publique du 06 Mai 2013

GREFFIER : Madame GALAND, Greffier

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2013 et signé par Monsieur CHRISTIEN, Président, et Mme LE GALL, Greffier

B X et E Y, agriculteurs ont constitué en 1989 un groupement agricole d’exploitation en commun, dénommé GAEC de la Sébirerie.

En 1999, M. X a souhaité se retirer du groupement.

Deux assemblées générales en date du 25 janvier et du 1er mars 1999 et un acte signé par les associés le 27 mai 1999 ont fixé les conditions de ce départ.

Il était notamment prévu que M. X cédait au GAEC, transformé en EARL, ses 7000 parts au prix unitaire de 21 F, et que son compte courant débiteur, après déduction du prix de rachat de ses parts, s’élevait à la somme de 168.576 F. (25.699,35 €).

Il était également prévu que M. X reprenait le passif correspondant aux emprunts souscrits auprès du crédit agricole de l’Eure pour l’achat d’un tracteur et d’une remorque.

Il s’engageait par ailleurs à faire effectuer par l’EARL de la Sébirerie les travaux de battage et de pressage pour ses six récoltes à venir.

Par ordonnance en date du 29 juin 2000, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Bernay a condamné M. X à payer à l’EARL de la Sébirerie, à titre provisionnel, la somme de 168.576,71 F au titre du solde débiteur de son compte courant, et, sur la demande reconventionnelle de M. X, a ordonné une expertise.

Le rapport a été déposé le 13 juin 2001.

Arguant que son consentement a été vicié par violence sociale et économique, M. X a, par acte en date du 13 mai 2003, fait assigner M. E Y, et l’EARL de la Sébirerie aux fins de voir prononcer la nullité des trois engagements qu’il a pris à savoir :

— la cession des parts sociales du GAEC au prix de 21 F la part.

— la reprise à sa charge des emprunts consentis par le crédit agricole.

— le règlement de la somme de 168.576,71 F injustement honorée.

à titre subsidiaire, il a conclu à la nullité des dits engagements pour défaut de cause.

Il a en conséquence sollicité le remboursement des échéances des emprunts et ainsi que la somme de 168.576,71 F.

L’EARL de la Sébirerie a conclu à la prescription de l’action sur le fondement de l’article 1844-14 du code civil, et subsidiairement au débouté.

Elle a formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 21.416,50 € à titre de dommages intérêts correspondant aux travaux de battage non confiés à l’EARL de la Sébirerie.

Par jugement du 9 décembre 2004, le Tribunal de grande instance de Bernay a :

— rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription.

— débouté M. X de ses demandes en nullité des engagements souscrits les 25 janvier 1999 et 27 mai 1999.

— débouté M. X de sa demande de remboursement de la somme de 168.576,71 F et des échéances d’emprunt payées depuis le 6 mars 1999.

— condamné M. X à payer à l’EARL de la Sébirerie la somme de 21.416 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Sur appel de M. X, la Cour d’appel de Rouen par arrêt en date du 9 décembre 2010, a :

— infirmé le jugement au titre de la fin de non recevoir soulevée par E Y et l’EARL de la Sébirerie.

— dit que l’action de B X en nullité des assemblées générales des 25 janvier et 1er mars 1999 du GAEC de la Sébirerie, et de l’acte du 27 mai 1999, et des engagements pris alors, est prescrite.

— infirmé le jugement sur la demande reconventionnelle de l’EARL de la Sébirerie et condamné M. X de ce chef au paiement de la somme de 15.000 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Pour déclarer l’action initiée par M. X prescrite, la Cour de Rouen a retenu que ce sont les deux assemblées générales qui ont fixé les conditions de la rupture, et que l’acte du 27 mai 1999 qui ne fait que reprendre ces conditions, fait corps avec ces deux assemblées, et ne peut être considéré isolement.

Elle a en conséquence fait application des dispositions de l’article 1844-14 du code civil aux termes desquelles les actions en nullité de la société ou d’actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue.

Sur pourvoi de M. X, la Cour de cassation, a, par arrêt en date du 20 mars 2012, cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il a déclaré prescrite la demande d’annulation de l’acte du 27 mai 1999, l’arrêt rendu le 9 décembre 2010 entre les parties, et a renvoyé en conséquence sur ce point la cause et les parties devant cette Cour.

La cassation a été prononcée au motif que la demande d’annulation de l’acte de rachat de parts était fondée, non sur une irrégularité préexistante de la délibération ayant autorisé sa conclusion, mais sur un vice qui affectait l’acte lui-même.

Par conclusions du 29 avril 2013, M. X demande à la Cour de réformer le jugement déféré.

— de dire que son consentement a été vicié lors de la signature des accords passés le 27 mai 1999, ainsi que son accord sur la reprise et la charge des emprunts et délégations de créances d’un montant de 263.964 F, 229.503 F et 24.430 F.

— de constater que la condamnation au paiement de la somme de 168.576 F est injustifiée.

— de prononcer la nullité de l’acte du 27 mai 1999 et de l’ensemble des emprunts et délégations de créances mises à sa charge.

A titre subsidiaire, il sollicite la condamnation solidaire des défendeurs à lui payer la somme de 100.000 € à valoir sur son préjudice et demande l’instauration d’une mesure d’expertise.

En toute hypothèse, il conclut à la condamnation des défendeurs à lui payer la somme de 185.700 €, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires avec intérêts à compter du 28 février 1999 date de sortie du GAEC, ou subsidiairement à compter du 13 mai 2003, date de l’assignation.

Il demande également la somme de 25.000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, et celle de 30.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sollicite enfin le débouté des demandes des intimés et notamment de leur demande en paiement de la somme de 21.416,50 €.

Par conclusions du 12 avril 2013, L’EARL de la Sébirerie et M. E Y demandent à la Cour de :

— confirmer le jugement déféré

— débouter M. X de ses demandes

SUR CE,

M. X soutient que le principe de son retrait du GAEC pour le 28 février 1999 a été approuvé lors de l’assemblée générale extraordinaire du 25 janvier 1999, que lors de cette assemblée on ignorait le coût de la cession et la valeur de l’actif net repris, que le bilan et les documents comptables présentés le 28 février 1999 pour forcer son accord sont faux en ce qu’ils comportent un report à nouveau de 118.457 F, en ce qu’ils font état d’un résultat déficitaire pour 1998-1999 (perte de 31.012 F) alors que le résultat était bénéficiaire de 187.637 F, en ce que la balance établie à l’issue de l’exercice 1998-1999 ne correspond pas au bilan présenté, et en ce que le résultat social de l’exercice 1998-1999 acquis aux deux associés présents au 28 février 2009, soit 187.637 F n’a été affecté que lors de l’assemblée générale ordinaire du 30 juin 1999 soit après son départ.

Il prétend que c’est au vu de ces documents erronés que le processus de cession de ses parts sociales s’est poursuivi ; alors qu’il était incapable d’une apprécier les éléments, que c’est sur cette base que le prix de cession a été évalué à 21 F la part, lors de l’assemblée générale extraordinaire du 1er mars 1999, et qu’il a été constaté qu’il restait débiteur d’une somme de 315.576 F au titre de son compte courant d’associé, somme de laquelle il a été déduit la somme de 147.000 F correspondant au rachat de ses parts sociales, de sorte qu’il restait redevable d’une somme de 168.576 F.

Il souligne que le rachat de ses parts sociales à un montant très inférieur non seulement à leur valeur réelle, mais à leur valeur nominale, a conduit le GAEC à inscrire à l’exercice en cours un profit exceptionnel de 553.000 F et à annuler les 7 000 parts rachetées.

Il ajoute que c’est au vu des bilans catastrophiques au 28 février 1999 qu’il a accepté de prendre en charge les emprunts du Crédit Agricole d’un montant de 263.964 F et 229.503 F.

Il rappelle qu’il a démissionné de ses fonctions à l’issue de l’assemblée générale du 1er mars 1999 et que le GAEC a été transformé en EARL par les époux Y.

Il expose que le prix fixé dans l’acte du 27 mai 1999 l’a été sur la base des données figurant au bilan du 28 février 1999, et qu’il n’y aurait jamais eu retrait ni acte de cession, si son consentement n’avait pas été vicié.

Il invoque la violence morale sociale et économique et, à titre subsidiaire, l’erreur.

L’EARL de la Sébirerie et M. E Y font valoir que s’agissant d’une vente de parts sociales, il n’y a pas de rescision pour lésion, que M. X doit démontrer, pour obtenir l’annulation de ses engagements, que son consentement a été vicié par une erreur sur les qualités substantielles des parts et non sur leur valeur, par un dol ou par la violence qu’il aurait subie.

Il font observer que M. X cherche à démontrer que la valeur de la part aurait été sous estimée, pour en déduire que cette sous estimation démontrerait à elle seule un vice du consentement.

Ils soutiennent que les éléments sur lesquels l’appelant se fonde pour prétendre à un déséquilibre ne sont nullement fondés puisque, depuis l’origine, la séparation des deux associés était susceptible d’entraîner leur ruine à tous les deux ; de sorte que l’objectif poursuivi était de permettre à chacun de retrouver son exploitation individuelle, tout en réglant le passif qui avait été créé par un GAEC qui disparaissait.

Ils font valoir que le déséquilibre ou la sujétion dans laquelle se serait trouvé M. X par rapport à son associé sont une pure imagination de celui-ci, que le vice de violence invoqué n’est étayé par aucune pièce et que les conclusions de l’appelant ne contiennent qu’une suite d’allégations infondées.

Ils soulignent que les négociations de retrait se sont déroulées du mois d’août 1998 jusqu’à la signature du dernier acte sous seing privé du 27 mai 1999 dans des conditions normales, et que se sont les études du Centre d’Economie Rurale qui ont amené à la prise de conscience par les parties de la situation catastrophique dans laquelle elles se trouvaient.

Ils soutiennent qu’il a fallu trouver des équilibres financiers permettant aux deux associés de conserver chacun une partie de l’exploitation, tout en assurant le paiement du passif, que c’est cet équilibre financier qui a été recherché, et que dans ces conditions la valorisation de la part ne pouvait être la même que s’il avait été question pour M. X de céder ses parts à un tiers.

Si les intimés consacrent un paragraphe de leurs dernières conclusions à la prescription de l’action initiée par M. X, il y a lieu de relever que le dispositif de ces conclusions ne reprend pas ce moyen et qu’il est conclu à la confirmation du jugement, lequel a déclaré l’action recevable.

En application de l’article 954 du code de procédure civile, la Cour ne statue que sur les prétentions qui sont énoncées au dispositif.

La recevabilité de l’action de M. X n’est donc plus contestée en ce qu’elle porte sur l’acte du 27 mai 1999.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire du GAEC de la Sébirerie en date du 25 janvier 1999, les associés ont approuvé le projet de retrait de M. X selon les modalités suivantes :

— date du retrait 28 février 1999

— arrêt des mises à disposition par M. B X des terres, baux et bâtiments.

— reprise du quota laitier : 28 février 1999

Il a été également approuvé la reprise des actifs et du passif comportant pour M. X des prêts d’un montant de 263.964 F et 229.758 F relatifs à des installations implantées chez M. Y.

Il a été précisé que l’actif repris par M. X correspondrait à la valeur de son compte courant arrêté au 28 février 1999 et au remboursement de ses droits sociaux, et qu’aucune soulte ou autre somme ne resterait due par les associés.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire du 1er mars 1999, la société a proposé de racheter à M. X les parts sociales qu’il souhaitait céder conformément aux modalités suivantes : 7000 parts d’une valeur nominale de 100 F, au prix de 21 F, soit pour un montant total de 147.000 F.

Le 27 mai 1999, les parties ont régularisé la cession des 7000 parts appartenant à M. X au GAEC de la Sébirerie au prix de 21 F la part. Il a été précisé que le remboursement des parts cédées aurait lieu au moyen de biens sociaux et plus particulièrement par compensation avec des sommes dont M. X se trouvait débiteur envers le GAEC et qui étaient inscrites au débit de son compte courant d’associé.

Il a été constaté en conséquence que M. X restait débiteur d’une somme de 315.576,71 F inscrite à son compte courant, et que déduction faite de la valeur des parts, il restait redevable de la somme de 168.576,71 F, dont le paiement devait intervenir le 30 avril 2000 au plus tard.

M. X soutient qu’il n’a été amené à donner son accord sur cette cession que parce qu’il croyait que les données comptables qui lui ont été alors présentées, sur la base des études réalisées par le CER, correspondaient à la situation réelle du GAEC.

Il ressort du rapport de M. Z, expert judiciaire désigné par ordonnance en date du 24 juillet 2000, que la valeur réelle des parts sociales, de M. X, déterminées selon les méthodes couramment utilisées en prenant les chiffres du bilan et les comptes de résultats du GAEC, se situait dans une fourchette comprise entre 129 € et 234 € pour l’exercice 1998-1999.

Cette analyse est confirmée par l’étude réalisée le 19 mai 2005 par M. D, expert agricole et foncier, qui a souligné, sans être utilement contredit, que le calcul qui a abouti à la fixation de la part sociale à 21 F ne correspondait à aucune démarche comptable et ne se référait nullement aux méthodes habituellement retenues en matière de valeurs de parts sociales.

Il a également noté que le calcul effectué par le CER semblait avoir été réalisé de manière à annuler le compte courant de M. X, et qu’il ne comprenait pas comment la valeur de la part de M. X a été fixée à 21 F tandis que celles de M. et Mme Y dans l’EARL sont de 15 €.

Il s’est dit parfaitement en accord avec les méthodes de calcul exposées par l’expert judiciaire, en indiquant sa préférence pour celle préconisée par les experts du Nord de la France faisant ressortir une valeur de 148 F.

Il a conclu son étude par le constat d’un réel déséquilibre dans la liquidation de GAEC au préjudice de M. X.

Le rapport établi par le cabinet Bertaux, expert comptable, qui a été régulièrement soumis à la discussion contradictoire des parties et n’est pas contredit, met en évidence que le bilan au 28 février 1999 tel qu’il a été établi par le CER n’a pas permis à M. X d’avoir une appréhension de la situation réelle du GAEC au moment de la cession de ses parts.

Il a relevé que les comptes établis à cette date anticipaient la comptabilisation de l’attribution des biens de l’actif social et des transferts d’emprunts au profit de M. X, alors que des transferts d’emprunt par délégation de créances n’ont été acceptés par le crédit agricole que le 27 mars 1999 et que l’assemblée générale n’a statué sur le retrait que le 1er mars 1999.

Cette anticipation des écritures comptables a eu pour conséquence que le bilan présenté au 28 février 1999 ne reflétait plus la situation comptable réelle active et passive du groupement.

Et dès lors que ce bilan devait servir de référence à la fixation de la valeur des parts sociales, cette présentation erronée a eu pour conséquence l’établissement d’une valorisation très inférieure à la valeur réelle de celles-ci, fixée par le Cabinet Bertaux à 131 F la part.

Le Cabinet Bertaux a pu relever les anomalies dont sont affectés les documents établis par le CER qui sont les suivants :

— le résultat social de l’exercice 1998-1999 s’établissait à 187.637,26 F alors qu’il a été comptabilisé une perte de 31.012 F.

— la balance des comptes établie à l’issue de l’exercice 1998-1999 ne correspond pas au bilan et donne effectivement un bénéfice de 187.637 F.

— le résultat social de l’exercice 1998-1999 acquis aux deux associés présents au 28 février 1999 n’a été affecté que lors de l’assemblée générale ordinaire du 30 juin 1999, après le retrait de M. X, le GAEC est donc redevable à M. X de la somme de 93.618,63 F représentant 50 % du résultat.

— le compte de report à nouveau est fantaisiste

le montant de l’actif a été amputé d’un montant de 1.503.500 F,

Pour rétablir le montant réel de la part, le Cabinet Bertaux a repris les évaluations des matériels et des installations arrêtées au 4 décembre 1998 et a ajusté les autres éléments du bilan en réintégrant les opérations de retrait comptabilisés par anticipation. Il a ainsi établi la valeur réelle de la part à 131 F, somme qui se trouve dans la fourchette établie par les autres experts.

L’EARL de la Sébirerie qui se borne à expliquer que les dispositions adoptées visaient à préserver les équilibres financiers des deux exploitations n’explique pas en quoi elles pouvaient y parvenir alors qu’il apparaît qu’au contraire, elles aboutissaient à un profond déséquilibre.

Au vu de la présentation erronée des documents comptables qui lui ont été soumis, M. X, qui ne disposait d’aucun autre élément d’appréciation, a été induit en erreur sur les données objectives du contrat de cession de ses parts sociales.

L’erreur sur la valorisation de ses parts n’est que la conséquence de cette méprise.

Il s’agit donc d’une erreur sur les qualités substantielles du contrat.

Il est évident que si M. X qui n’est pas comptable, avait disposé des données correspondant à la situation réelle du GAEC, il n’aurait pas donné son consentement à la cession de ses 7000 parts au prix de 21 F.

Cette erreur qui a donc été déterminante de son consentement doit conduire au rétablissement de l’équilibre rompu par l’erreur.

Dans ces conditions, au vu des calculs justement opérés par le Cabinet Bertaux, L’EARL de la Sébirerie sera condamnée à payer à M. X la somme de 863.818,63 F soit 131.688,30 €, qui représente l’insuffisance du remboursement des parts à hauteur de 770.000 F, et la part du résultat de 1998-1999 à hauteur de 50 % soit 93.818,63 F, cette somme intégrant le remboursement de la somme de 168.576,71 F au paiement de laquelle M. X avait été condamné par ordonnance de référé du 29 juin 2000, sur la base de comptes dont il est aujourd’hui démontré qu’ils étaient erronés.

Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 13 mai 2003.

Les autres postes de préjudices invoqués par M. X ne sont pas étayés en preuve. Il sera souligné à cet égard que M. Z, expert judiciaire, a considéré que les évaluations des matériels repris étaient pour la plupart correctes.

S’agissant de la condamnation de M. X au paiement de la somme de 21.416 € en exécution d’un accord passé entre les parties et qui obligeait M. X à recourir à l’intervention de l’EARL de la Sébirerie pour ses travaux agricoles, la Cour d’appel de Rouen a dans sa décision du 9 décembre 2010, par une disposition qui n’a pas été cassée par l’arrêt du 20 mars 2012, infirmé cette condamnation, et condamné M. X à payer à l’EARL la somme de 15.000 € avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement. Cette condamnation est donc définitive et ne peut être remise en cause.

Si au regard du déséquilibre existant dans la liquidation du GAEC, l’EARL de la Sébirerie n’a pu sans mauvaise foi, soutenir au cours de cette longue procédure, que les équilibres financiers avaient été respectés, M. X ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui qui est réparé par l’allocation des intérêts de retard et de celui ressortant de l’obligation dans laquelle il s’est trouvé d’exposer des frais non compris dans les dépens, il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts et il sera fait droit à sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de 6.000 €.

Il sera souligné qu’en application de l’article 639 du code de procédure civile, les condamnations aux dépens et pour frais irrépétibles prononcées au bénéfice de M. E Y et de l’EARL de la Sébirerie par la Cour d’appel de Rouen sont implicitement cassées.

Les dépens exposés devant le Tribunal de grande instance de Bernay, ceux exposés devant la Cour d’appel de Rouen ainsi que ceux exposés devant cette Cour, seront en application de ce texte, mis à la charge de l’EARL de la Sébirerie qui succombe.

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision déférée sauf en ce qu’elle a rejeté la fin de non recevoir relative à la prescription de l’action initiée par M. X.

Et statuant à nouveau

Condamne l’EARL de la Sébirerie à payer à M. X la somme de 131.688,30 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 13 mai 2003.

Constate que la condamnation de M. X au paiement de la somme de 15.000 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement prononcé par la Cour d’appel de Rouen est définitivement jugée.

Condamne l’EARL de la Sébirerie à payer à M. X la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute M. X du surplus de ses demandes.

Condamne l’EARL de la Sébirerie aux dépens qui comprendront les frais d’expertise judiciaire et seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

N. LE GALL J. CHRISTIEN

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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