Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 3 novembre 2011, n° 10/01767

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, 2e ch., 3 nov. 2011, n° 10/01767
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 10/01767
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Annecy, 13 avril 2010, N° 07/01896

Texte intégral

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

2e Chambre

Arrêt du Jeudi 03 Novembre 2011

RG : 10/01767

XXX

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d’ANNECY en date du 14 Avril 2010, RG 07/1896

Appelants

M. F AG-AH X

né le XXX à SAINT-ETIENNE (42),

et

Mme H X AD Y

AD le XXX à XXX,

demeurant ensemble XXX

représentés par la SCP FILLARD COCHET-BARBUAT, avoués à la Cour

assistés de Me Christian BROCAS, avocat au barreau D’ANNECY

Intimés

M. J O Z

né le XXX à XXX

représenté par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avoués à la our

assisté de Me AG Pierre BOZON, avocat au barreau D’ANNECY

Mme B C

AD le XXX à XXX

représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avoués à la Cour

assistée de Me AG Pierre BOZON, avocat au barreau D’ANNECY

— =-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 27 septembre 2011 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

— Madame Elisabeth DE LA LANCE, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président

— Madame Chantal MERTZ, Conseiller, qui a procédé au rapport

— Madame Evelyne THOMASSIN, Conseiller,

— =-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSE DU LITIGE

Les consorts Z-C et les époux X-Y sont propriétaires de deux fonds voisins, sis à Saint-Felix (Haute-Savoie).

Il est apparu à l’occasion de travaux qu’il existait un puit perdu sur le fonds des consorts Z-C, dans lequel se déversaient les eaux pluviales du fonds des époux X-Y, qui y étaient amenées par des canalisations.

Le puit qui s’est effondré à la suite de l’appui d’une grue sur la dalle le recouvrant a été comblé par les consorts Z-C rendant désormais impossible le déversement des eaux pluviales des époux X-Y qui ont alors prétendu être au bénéfice d’une servitude d’écoulement des eaux par ce puit.

Par arrêt du 12 décembre 2006, la présente Cour a condamné les consorts Z-C, au possessoire, à rétablir cet écoulement.

Par acte d’huissier du 2 octobre 2007, les consorts Z-C ont fait assigner F X et H Y épouse X aux fins de voir dire que ceux-ci ne disposent pas d’une servitude d’écoulement des eaux pluviales sur leur fonds.

Par jugement du 14 avril 2010, le Tribunal de Grande Instance d’ANNECY a :

— débouté les époux X-Y de la fin de non recevoir tiré de l’autorité de la chose jugée,

— dit que le fonds des époux X-Y n’est bénéficiaire d’aucune servitude, tant existante, par destination du père de famille qu’à créer,

— dit que les époux X-Y doivent faire leur affaire personnelle de la récupération de leurs eaux pluviales sans le concours de la propriété voisine,

— pour le cas où les déversements subsisteraient, les a condamnés à faire procéder à l’enlèvement des tuyauteries permettant ce déversement jusqu’à la limite séparative des deux fonds dans les trois mois de la signification de la décision à peine d’astreinte de 50 Euros par jour de retard pendant trois mois,

— condamné les époux X-Y à payer, pour moitié chacun, la somme de 3 000 Euros aux consorts Z-C au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 26 juillet 2010, F X et H Y épouse X ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 20 octobre 2010, les appelants demandent à la Cour de déclarer la demande des consorts Z-C irrecevable compte-tenu de l’autorité de la chose jugée et au fond de les débouter de leurs demandes.

Ils soutiennent que le puit est un ouvrage apparent et que leur fonds bénéficie sur le fonds des consorts Z-C d’une servitude par destination du père de famille, qu’ils sont au bénéfice d’une servitude d’écoulement des eaux pluviales dans le puit situé sur la parcelle appartenant aux consorts Z-C également sur le fondement de l’article 640 du Code Civil. Ils demandent donc reconventionnellement à la Cour de constater l’existence de cette servitude.

Ils demandent par ailleurs :

— la condamnation des consorts Z-C à les indemniser du préjudice qu’ils subissent du fait du l’impossibilité de l’usage de la servitude, correspondant au coût des travaux nécessaires pour permettre l’écoulement des eaux et donc d’ordonner avant dire droit une expertise et de fixer une provision à valoir sur les frais d’expertise,

— la condamnation des intimés à leur payer la somme de 10 000 Euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 4 avril 2011, J Z et B C sollicitent la confirmation de la décision déférée et la condamnation des époux X à leur payer la somme de 4 000 Euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2011.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’action des consorts Z-C

Par arrêt du 12 décembre 2006, la présente Cour, statuant sur l’action possessoire des époux X-Y, a condamné les consorts Z-C à la remise en état du puits se trouvant sur leur propriété.

Une telle action ne peut permettre la reconnaissance de la constitution d’une servitude, mais seulement de sa possession.

Les consorts Z-C sont donc tout à fait recevables à engager une action pétitoire, au fond, visant à voir dire qu’aucune servitude d’écoulement des eaux pluviales, dans le puit se trouvant sur leur fonds, n’a été constituée au profit du fonds des époux X-Y.

Leur action doit être déclarée recevable.

Sur l’existence de la servitude par destination du père de famille revendiquée par les époux X-Y

Selon l’article 693 du Code Civil,'il n’y a destination du père de famille que lorsqu’il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude'.

Les parcelles A 459 et A 623 sises sur le territoire de la Commune de SAINT-FELIX (Haute-Savoie), ayant appartenu à S-T AA épouse A et à D E, ont été divisées.

A partir de la parcelle A 459 ont été créées les parcelles 937 et 936.

A partir de la parcelle A 623 ont été créées les parcelles 939 et 938.

Par acte du 21 décembre 1999, F X et H Y épouse X ont acquis les parcelles 937 et 939, ainsi que deux autres parcelles.

Par acte du 30 juin 2000, J Z et B C ont acquis les parcelles 936 et 938.

Les propriétés des parties proviennent donc de la division du même fonds.

Il n’est pas contesté que c’est l’ancien propriétaire des deux fonds qui a installé un système de récupération des eaux pluviales provenant tant du toit de la construction appartenant actuellement aux consorts Z-C que du toit du bâtiment acquis par les époux X-Y.

En revanche l’attestation de S-T A établit que ni elle, ni son époux, précédents propriétaires des fonds Z-C et X-Y, n’ont eu la volonté d’assujettir un fonds à l’autre.

L’article 694 dispose par ailleurs que 'si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude dispose de l’un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d’exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné'.

En l’espèce, si l’existence du puit se trouvant sur le fonds des consorts Z-C était connue, il n’en allait pas de même de la présence de canalisations provenant du fonds X-Y et menant à ce puit.

En effet, tant le géomètre ayant réalisé le plan de division, que le négociateur, intervenu dans la vente au bénéfice des consorts Z-C, attestent avoir ignoré ce branchement.

Il n’est au demeurant pas contesté que l’acheminement des eaux provenant du fonds X-Y se faisait par des canalisations souterraines dont rien ne venait révéler la présence en surface.

L’existence d’une dalle en béton recouvrant ce puit, dans la mesure où elle n’induit nullement l’existence d’un réseau souterrain de drainage des eaux, ne saurait davantage constituer un signe apparent de la servitude alléguée, les pièces produites aux débats ne permettent d’ailleurs même pas de dire qu’elle était clairement visible.

Dans la mesure où l’aménagement de l’écoulement des eaux pluviales du fonds X-Y ne présente pas un caractère apparent, il ne peut être constitutif d’une servitude par destination du père de famille au profit de ce fonds.

C’est donc à bon droit que le premier juge a accueilli l’action dénégatoire de servitude intentée par les consorts Z-C.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé.

Sur l’existence d’une servitude d’écoulement des eaux au profit du fonds des époux X-Y

Les époux X-Y se fondent sur les dispositions de l’article 640 du Code Civil pour prétendre diriger leurs eaux pluviales dans le puit se trouvant sur le fonds des consorts Z-C.

L’article 640 dispose que 'les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l’homme y ait contribué.

Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement.

Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur'

En application de ce texte, les consorts Z-C, leur fonds étant inférieur à celui des époux X-Y, sont effectivement tenus de laisser l’eau provenant de ce dernier s’écouler naturellement sur l’ensemble de la surface de leur parcelle, mais il ne leur impose pas de recevoir dans un puit perdu créé artificiellement des eaux drainées dans des canalisations souterraines.

Les époux X-Y seront donc également déboutés de leur demande de reconnaissance de servitude sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le point de départ de l’astreinte et les frais irrépétibles,

Statuant à nouveau,

Condamne F X et H Y épouse X, pour le cas où les déversements subsisteraient, à faire procéder à l’enlèvement des tuyauteries permettant ce déversement jusqu’à la limite séparative des deux fonds dans les trois mois de la signification du présent arrêt, à peine d’astreinte de 50 Euros par jour de retard pendant une durée de trois mois,

Y ajoutant,

Déboute F X et H Y épouse X de leur demande visant à se voir reconnaître, sur le fondement de l’article 640 du Code Civil, une servitude leur permettant de diriger leurs eaux pluviales dans le puit se trouvant sur le fonds des consorts Z-C,

Condamne F X et H Y épouse X à payer à J Z et B C la somme de 2 000 Euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamne F X et H Y épouse X aux dépens d’appel qui seront recouvrés par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, Avoués Associés, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Ainsi prononcé publiquement le 03 novembre 2011 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Elisabeth DE LA LANCE, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Sylvie DURAND, Greffier.

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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