Cour d'appel de Chambéry, Chambre sociale, 15 décembre 2011, n° 11/01196

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, ch. soc., 15 déc. 2011, n° 11/01196
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 11/01196
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Annemasse, 18 avril 2011, N° 10/00199

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2011

RG : 11/01196 AR/MFM

Y X C/ XXX

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANNEMASSE en date du 19 Avril 2011, RG F 10/199

DEMANDEUR AU CONTREDIT :

Monsieur Y X

XXX

XXX

Comparant en personne assisté de Maître TOUAHRIA, avocat, substituant Maître COTTET, de la SCP FINET CONDEMINE COTTET BRETONNIER, avocat au barreau de LYON

DEFENDERESSE AU CONTREDIT :

XXX

XXX

XXX

Représentée par Maître Jean Marc SCHALLER, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Novembre 2011 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame ROBERT, Président de Chambre, qui s’est chargée du rapport

Madame CAULLIREAU-FOREL, Conseiller

Madame IMBERTON, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame ALESSANDRINI,

********

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La SARL O.V.B. Conseils en Patrimoine FRANCE était liée à Y X, par un contrat de mandat intitulé 'contrat d’indicateur d’assurance’ conclu le 1er janvier 2004, auquel s’est substitué le 4 janvier 2005 un contrat de mandat de mêmes nature et objet mais intitulé 'contrat de mandataire libre’ par lequel la SARL O.V.B. FRANCE, qui déclare exercer une activité de courtage d’assurance, lui donne mandat de la mettre en relation avec des clients d’assurance potentiels, moyennant une rétribution à la commission.

Selon convention signée le 29 février 2008 en présence d’un huissier de justice, les parties ont convenu de mettre fin à ce contrat de mandat et en ont réglé les conséquences.

Contestant la portée de cette convention de résiliation et sa qualité de travailleur indépendant qu’il estime fictive, pour revendiquer, en raison du lien de subordination qui le liait à la SARL O.V.B. FRANCE, Y X a saisi le Conseil de Prud’hommes d’Annemasse, le 6 février 2009, d’une demande tendant à la requalification de son contrat de mandat en un contrat de travail, statut V.R.P., et la condamnation de celle-ci à se soumettre aux obligations en découlant en termes de :

— remise de bulletins de paye,

— remise d’un certificat de travail,

— remise d’un solde de tout compte,

— remise d’une attestation ASSEDIC,

— rappel et remboursement de commissions,

— rappels de salaires sur les années 2004, 2005, 2006, 2007 et 2008 et congés payés afférents,

— versement d’une indemnité de préavis, et congés payés afférents,

— versement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— dommages et intérêts liés à la perte des droits à allocations chômage, à la perte de droits à la retraite,

— versement de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et travail dissimulé,

— versement de dommages et intérêts pour résistance abusive,

— remboursement des loyers du bail commercial souscrit pour le compte de la SARL O.V.B. entre 2004 et 2008,

— remboursement de leurs frais de fonctionnement divers pendant la même période,

— paiement d’une indemnité compensatrice de la perte du D.I.F.

La SARL O.V.B. FRANCE, contestant la qualité de salarié du demandeur, a soulevé in limine litis une exception d’incompétence ratione materiae au profit du Tribunal de Grande Instance de Strasbourg où est implanté son siège social, et subsidiairement une fin de non recevoir tirée de l’autorité de chose jugée de la convention de résiliation du contrat de mandat qui, fruit de longues négociations, s’analyse en un protocole transactionnel comportant des concessions réciproques.

Par jugement en date du 19 avril 2011, le conseil a fait droit à l’exception d’incompétence soulevée en défense en retenant que suite à la signature du contrat de mandat avec la SARL O.V.B., Y X s’était inscrit au registre du commerce, qu’il avait exercé son activité librement et en toute indépendance, qu’il avait supporté la charge de ses frais professionnels, qu’il n’avait pas été assujetti au paiement des cotisations ASSEDIC, qu’il avait reconnu avoir eu la possibilité d’exercer une activité complémentaire libre, et que l’URSSAF, après contrôle, n’avait pas remis en cause son statut de travailleur indépendant.

Par déclaration enregistrée le 4 mai 2011, Y X a saisi la Cour d’un contredit de compétence pour se voir reconnaître la qualité de salarié et se voir adjuger le bénéfice des demandes en découlant.

La SARL O.V.B. FRANCE a déposé le 13 juillet 2011 des conclusions aux termes desquelles elle demande à la Cour :

— au principal, de faire droit à la fin de non recevoir tirée de l’autorité de chose jugée de l’accord transactionnel aux termes duquel les parties ont mis fin au contrat de mandat et réglé les conséquences de cette résiliation,

— subsidiairement, de déclarer le contredit recevable mais mal fondé et en conséquence de confirmer la décision d’incompétence prononcée par le Conseil de Prud’hommes et de renvoyer les parties devant le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg;

— très subsidiairement, d’enjoindre au requérant de produire les récapitulatifs chiffrés année par année des frais de fonctionnement et charges dont il réclame le remboursement ainsi que ses déclarations fiscales 2035 au titre des années 2004 à 2008, et de réduire ses prétentions à de plus justes proportions.

Sur l’interrogation de la Cour quant à l’incidence, sur l’exception d’incompétence matérielle, de la fin de non recevoir soulevée liminairement en appel par la société intimée, le conseil de celle-ci a déclaré renoncer à la soulever avant l’exception d’incompétence et ne la présenter qu’à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour conviendrait d’évoquer au fond.

SUR QUOI, LA COUR

Attendu qu’à l’appui du contredit qu’il a formé pour se voir reconnaître le statut de salarié lié à la SARL O.V.B. FRANCE par un contrat de travail, Y X, qui ne conteste pas :

— avoir signé avec celle-ci un contrat de mandat dont les clauses répondent aux règles du mandat,

— s’être fait immatriculer en tant que travailleur indépendant tant à l’I.N.S.E.E. qu’à l’O.R.I.A.S. (Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance),

— avoir cotisé à l’U.R.S.S.A.F. en qualité de travailleur indépendant,

— avoir adhéré aux régimes d’assurance maladie et de retraite des professions indépendantes,

— avoir acquitté la taxe professionnelle…

autant de manifestations de volonté d’exercer son activité professionnelle en sa qualité de travailleur indépendant, réitérées pendant toute la durée d’exécution du contrat, prétend, une fois celui-ci rompu, que les modalités d’exercice de son mandat d’intermédiaire d’assurance, le plaçait dans un état de dépendance et de subordination vis à vis du mandant qui doit conduire à écarter la présomption de travailleur indépendant posée par l’article L. 8221-6-1 du code du travail, et à requalifier son contrat de mandataire libre en un contrat de travail ;

Mais attendu que le moyen qu’il tire de la formation que la SARL O.V.B. lui a dispensée n’est pas pertinent dès lors qu’elle s’inscrit dans le cadre des dispositions des articles L. 512-5 et R. 512-8 et suivant du code des assurances qui imposent au mandant d’assurer la formation des partenaires qu’il recrute jusqu’à l’obtention par eux de la carte professionnelle, mais à laquelle ceux-ci sont libres de renoncer ;

Que de même, destinées à uniformiser les pratiques entre l’ensemble des mandataires, à les informer sur ses orientations commerciales et les produits à placer, ainsi qu’à optimiser leur travail dans l’intérêt commun des deux partenaires, les directives et instructions d’ordre général que lui a transmises la société O.V.B. en qualité de mandant, sous les intitulés suivants : Guide du Mandataire Libre et de l’Indicateur d’Assurances de la SARL O.V.B. Conseils en Patrimoine France, Procédures Juridiques, Commissions, Procédure Informations Commerciales, Procédure Versement Commissions Conseillers, Procédures de Commandes de matériels et accessoires…, ou lors de réunions de travail régulières, ne suffisent pas à créer un lien de subordination hiérarchique ou même une immixtion du mandant dans l’organisation de son activité, dans la mesure où, dépourvues de pouvoir contraignant, ces mesures procédaient de la nécessité d’élaborer un cadre général d’exercice du mandat qui soit commun à tous les partenaires O.V.B. et différencié de celui des autres prestataires concurrents ;

Que les autres pièces que produit le contredisant pour caractériser l’état de dépendance et de subordination dans lequel il prétend avoir accompli son mandat (e-mails, planification hebdomadaire des activités, tableaux de production…) sont radicalement inopérantes dès lors qu’elles se rapportent aux prestations qu’il effectuait concurremment pour le compte de la SARL O.V.B. Suisse dans le cadre d’une relation qualifiée effectivement de contrat de travail ;

Qu’il résulte d’ailleurs du rapport de contrôle effectué à l’U.R.S.S.A.F. relativement à l’assujettissement éventuel de la SARL O.V.B. France en tant qu’employeur, que les investigations menées auprès des mandataires eux-même démontraient qu’ils ne recevaient pas d’instructions, ne rendaient pas compte de leur activité, n’avaient pas à respecter de délais d’exécution, avaient toute latitude dans le choix de la clientèle, exerçaient leur activité dans des locaux qui leur étaient propres et assumaient les frais exposés pour l’exercice de leur mandat, de sorte que l’organisme en a déduit que le seul fait qu’ils aient exercé leur activité pour le compte de la SARL O.V.B. France dans un cadre défini par elle et avec son support dans la matérialisation des souscriptions des contrats n’était pas suffisant pour établir un lien de subordination ;

Que d’ailleurs, M. X ne conteste pas avoir agi parallèlement pour le compte d’autres mandants, ainsi que lui en offraient la possibilité les stipulations du contrat passé avec la SARL O.V.B. France, ce que confirment d’ailleurs les clauses du protocole transactionnel de résiliation qu’il a conclu avec celle-ci le 29 février 2008, aux termes duquel il a été convenu qu’il conservait une partie de la clientèle prospectée par lui pour le compte d’O.V.B. France (130 dossiers clients en l’occurrence) ;

Que c’est donc par de justes motifs que les premiers juges ont fait droit à l’exception d’incompétence matérielle soulevée par la SARL O.V.B. France au profit de la juridiction civile de droit commun territorialement compétente ;

Que le jugement sera donc confirmé ;

Que l’équité commande que Y X qui succombe indemnise la SARL O.V.B. Conseils en Patrimoine France des frais qu’elle a dû exposer pour assurer la défense de ses intérêts par avocat ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare Y X mal fondé en son contredit,

En conséquence, confirme le jugement du Conseil de Prud’hommes d’ANNEMASSE du 19 avril 2011,

Y ajoutant,

Dit que le litige relève de la compétence du Tribunal de Grande Instance de Strasbourg,

Condamne Y X à verser à la SARL O.V.B. Conseils en Patrimoine France une indemnité de 2 000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Y X aux dépens du contredit.

Ainsi prononcé publiquement le 15 Décembre 2011 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame ROBERT, Président de Chambre, et Madame ALESSANDRINI, Greffier.

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