Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 17 octobre 2017, n° 16/02790

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, chbre soc. prud'hommes, 17 oct. 2017, n° 16/02790
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 16/02790
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Annecy, 14 décembre 2016, N° 16/00063
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2017

RG : 16/02790 – FS / LV

A B

C/ SAS SOCIETE D’EXPLOITATION PROVENCIA

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANNECY en date du 15 Décembre 2016, RG 16/00063

APPELANTE :

Madame A B

[…]

[…]

Représentée par Me Thierry BILLET de la SELARL BJA – BILLET JORAND ET ASSOCIES, avocat au barreau d’ANNECY

assistée de Me Thierry BILLET de la SELARL BJA – BILLET JORAND ET ASSOCIES, avocat au barreau d’ANNECY (substitué à l’audience par Me FERMEAUX)

INTIMEE :

SAS SOCIETE D’EXPLOITATION PROVENCIA

dont le […]

[…]

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

Représentée à l’audience par M. J-K L, en qualité de Directeur des Ressources Humaines, dûment muni d’un pouvoir

R e p r é s e n t é e p a r M e V é r o n i q u e D E L M O T T E – C L A U S S E , a v o c a t a u b a r r e a u d e THONON-LES-BAINS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue en audience publique le 14 Septembre 2017, devant Madame Françoise SIMOND, Conseiller désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président, qui s’est chargée du rapport, les parties ne s’y étant pas opposées, avec l’assistance de Madame Laurence VIOLET, Greffier, et lors du délibéré :

Madame Claudine FOURCADE, Président,

Madame Françoise SIMOND, Conseiller qui a rendu compte des plaidoiries,

Madame Anne DE REGO, Conseiller

********

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme A B a été engagée par la société d’exploitation Provencia le 29 juin 1992 dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée en qualité de gestionnaire de paie. Au dernier état de la relation contractuelle, elle occupait le poste d’agent administratif, niveau III pour un salaire brut de 2 066,17 euros.

Le 17 juillet 2015, elle était sanctionnée par une mise à pied disciplinaire de deux jours pour avoir refusé d’appliquer les nouvelles procédures mises en place par la direction.

Le 9 décembre 2015, elle était licenciée pour faute pour refus réitéré de suivre les instructions et d’exécuter certaines tâches.

Contestant son licenciement, Mme A B a saisi le conseil de prud’hommes d’Annecy qui par jugement en date du 15 décembre 2016 a :

— dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme A B est justifié,

— débouté Mme A B de l’ensemble de ses demandes,

— débouté la société d’exploitation Provencia de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ,

— condamné Mme A B aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 29 décembre 2016, Mme A B a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusion n°2 notifiées le 22 mai 2017 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, Mme A B demande à la cour de :

— réformer le jugement entrepris,

— dire et juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamner la société d’exploitation Provencia à lui payer la somme de 47 521,91 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre intérêts au taux légal à compter du jour de la demande et celle de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

— débouter la société d’exploitation Provencia de l’intégralité de ses demandes.

Elle expose que pendant vingt trois ans, elle a donné entièrement satisfaction à ses différents responsables de paie (quatre différents) comme ils en attestent (M. X, M. D) et elle sera récompensée par une augmentation de salaire au mois de janvier 2014 et de primes en mai et début juillet 2014.

L’arrivée au cours de l’été de Mme E F en qualité de responsable de paie, et de son adjointe Mme Y vont marquer un tournant dans la relation de travail, et ayant le tort de ne pas plaire à Mme E F qui formait un binôme très soudé avec son adjointe, tout va être fait pour entraver le déroulement des relations de travail.

Une mise à pied va lui être délivrée en juillet 2015 qu’elle va immédiatement contester.

Elle explique qu’en période de paie, quant aux tâches à réaliser, sa charge de travail est forte (2 800 fiches de paie du groupe Provencia à réaliser). Le calendrier établi sur une semaine est passé à 15 jours lors de l’arrivée de Mme E F ce qui a compliqué sa tâche, puisque qu’il falait tenir compte sur une plus longue période des variables d’ajustement.

L’erreur reprochée concerne un seul et unique dysfonctionnement informatique dont elle ne peut être tenue pour responsable, et cette erreur corrigée a été sans conséquence au final. Pour se prévaloir d’un refus d’appliquer les directives, il faut au préalable prouver que ces directives ont été détaillées de manière claire et précise à destination des salariés concernés. Elle conteste fermement avoir refusé d’appliquer les directives de travail. Elle recevait des consignes orales ou des emails de sa supérieure et elle a toujours réalisé le travail demandé.

Dans ses conclusions récapitulatives et en réponse notifiées le 2 juin 2017 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la société d’exploitation Provencia demande à la cour de confirmer le jugement et condamner Mme A B à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que lorsque Mme E F a pris ses fonctions de responsable paie en 2014, elle a constaté qu’il y avait un défaut d’harmonisation des procédures mise en oeuvre par le service paie et les ADM et une insuffisance des points de contrôle de paie, cycle de paie court, ce qui l’a contrainte à mettre en place une nouvelle procédure et Mme A B qui avait l’habitude de travailler comme elle le voulait, a refusé de suivre les instructions hiérarchiques qu’elle lui donnait en considérant que cela était inutile.

La nouvelle procédure mise en place, loin de complexifier le travail de Mme A B, lui permettait de disposer de plus de temps pour vérifier et contrôler les bulletins de salaire.

Le licenciement de Mme A B n’est pas fondé sur une insuffisance professionnelle mais sur les fautes commises en 2015 qui ont fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire, puis d’un licenciement pour faute pour ne pas avoir effectué pendant trois mois le contrôle visuel des bulletins de salaire alors qu’il s’agissait d’une de ses missions essentielles.

SUR QUOI

Il n’est pas contesté que Mme A B était très investie et impliquée dans son travail, qu’elle n’avait jamais fait preuve de remontrances jusqu’en 2015, comme en attestent deux de ses supérieurs hiérarchiques M. D, responsable de paie adjoint entre 2009 et 2014 et M. X, responsable de paie du 01/12/2009 au 02/20/2013, le fait que ce dernier ait été licencié le 2 juillet 2013, licenciement sans cause réelle et sérieuse, n’enlève rien à la pertinence de son analyse.

En juillet 2014, Mme E F est arrivée comme responsable du service paie, assistée de Mme Y, et suite à un audit de prise de poste, constatant notamment des insuffisances des points de contrôle de paie, elle a mis en place de nouvelles procédures dont l’objectif était de sécuriser la paie et notamment réduire les risques encourus, garantir la qualité des informations liées à la paie.

De ce fait un contrôle qualitatif des bulletins de salaire était subordonné à un allongement du cycle de contrôle (au minimum cinq jours ouvrés).

Cet allongement changeait les habitudes de Mme A B mais n’entraînait pas une surcharge de travail et lui permettait un contrôle plus approfondi.

La mise à pied disciplinaire notifiée le 17 juillet 2015 reprochait à Mme A B d’avoir volontairement refusé d’appliquer les procédures mies en place au sein du service, allant même jusqu’à dénigrer les exigences de sa responsable hiérarchique.

Mme A B s’est contentée dans un courrier du 21 août 2009 de contester en tous points les griefs qui lui étaient faits mais sans solliciter l’annulation de cet avertissement.

La lettre de licenciement notifiée le 9 décembre 2015 est motivée, non pas par une insuffisance professionnelle de Mme A B mais par une faute s’assimilant à de l’insubordination et est ainsi libellée :

'En faisant les charges trimestrielles courant octobre 2015, Madame G Y, adjointe au service paie, s’est aperçue que vous n’aviez pas remarqué que les charges de prévoyance, pour les salariés de statut « Employés » de la société PROCARED, n’avaient été que partiellement prélevées lors des paies des mois de juillet, août, septembre et octobre 2015.

Pourtant, vous aviez eu en charge les contrôles des bulletins de paie de ce site.

Ceci a eu pour conséquence des régularisations sur les paies du mois de novembre pour les salariés, diminuant ainsi leur salaire net payé sur ce mois de 0,28 € à 44, 54 €.

S’apercevant de ce grave manquement, votre responsable, Madame E F, vous a interrogé afin de savoir si vous aviez effectué les contrôles de paie requis les mois concernés.

Vous avez alors rétorqué que vous ne voyiez pas l’intérêt d’un tel contrôle en

affirmant : « ça ne sert à rien », et en ajoutant que ces contrôles étaient d’autant plus

inutiles que des contrôles de masse pouvaient toujours être effectués et permettre

ainsi une régularisation en fin d’année.

Votre responsable vous a alors rappelé, comme cela avait déjà été fait à plusieurs reprises, que le contrôle de paie faisait partie intégrante de votre fonction, et qu’il incluait tant la vérification du brut que des charges et qu’il devait toujours être réalisé bulletin par bulletin.

Ces faits sont d’autant plus graves que vous aviez déjà fait l’objet d’une sanction le

17 juillet 2015 pour avoir volontairement refusé d’appliquer les procédures mises en

place au sein du service, en allant même jusqu’à dénigrer les exigences de votre

responsable hiérarchique.

Un tel comportement et votre refus réitéré de suivre les instructions et d’exécuter certaines de vos tâches sont graves et constitutifs d’insubordination, ce que nous ne pouvons tolérer'.

L’erreur reprochée portait sur 4 lignes de cotisations manquantes (Prev.rente éducation, Prev .longue maladie, Prev.invalidité, Perv.inaptitude) sur le bulletin de salaire de juillet 2015 par rapport à juin 2015, erreur qui s’est poursuivie pendant trois mois pour 62 salariés de statut employé de la société Porcared. Le statut employé est visé dans la lettre de licenciement et les exemples des salariés (Velon, Perret, Lamarche ) pour lesquels Mme A B n’a pas commis d’erreur concernent des agents de maîtrises non visés dans la lettre de licenciement.

Cette erreur conséquente établit que Mme A B n’a pas procédé à un contrôle visuel des bulletins de salaire pendant plusieurs mois, peu important qu’elle soit due à un dysfonctionnement du logiciel ou qu’elle n’est pas eu de conséquences graves.

Mme A B indique qu’elle n’a jamais reçu de directives claires et précises sur les procédures de contrôle, aucun écrit précis et détaillé n’étant fourni, et que dès lors, il ne peut lui être reproché un refus d’appliquer ces directives.

Mme A B était largement informée des nouvelles procédures de sécurisation des bulletins de salaire mises en place par Mme E F dont l’objectif était la sécurisation des bulletins de salaire, et qui passait par un contrôle visuel de ceux-ci. Mme E F atteste qu’elle a impliqué toute son équipe dans ces changements mais que Mme A B adoptait une attitude critique, arguant que les tâches demandées n’étaient pas de son ressort.

Mme A B a assisté à la réunion de formation du 2 juin 2015 qui certes avait pour objectif de 'rendre autonome les secrétaires et responsables administratifs', avec plusieurs formatrices dont Mme E F et dont le but était également, comme le rappelle Mme Z, une salariée qui assistait à la réunion, un rappel des obligations légales en terme de RH et paie afin d’harmoniser les procédures.

Mme Z a confirmé que pendant toute la réunion, Mme A B avait critiqué les méthodes mises en place qui ne servaient à rien, ce qui a valu à Mme A B une mise à pied disciplinaire.

L’insubordination de Mme A B est caractérisée et constitue une faute justifiant son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé.

Succombant, Mme A B sera condamnée aux dépens. Sa situation économique commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement ;

Déboute la société d’exploitation Provencia de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme A B aux dépens.

Ainsi prononcé le 17 Octobre 2017 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Claudine FOURCADE, Présidente, et Madame Laurence VIOLET, Greffier.

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Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 17 octobre 2017, n° 16/02790