Cour d'appel de Dijon, 15 octobre 2015, n° 14/00370

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, 15 oct. 2015, n° 14/00370
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 14/00370
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Dijon, 26 mars 2013, N° 12/00351

Texte intégral

XXX

B Y

C/

CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE DE J-K

Z BANQUE

D X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2015

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 14/00370

Décision déférée à la Cour : AU FOND du 27 MARS 2013, rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE DIJON

RG 1re instance : 12/00351

APPELANT :

B Y

XXX

XXX

représenté par Maître Cécile ISIDORE-ROCARD, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉES :

CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE DE J-K

XXX

XXX

XXX

représentée par Maître Catherine DAVICO HOARAU de la SCP COBLENCE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substituée par Maître Claire-Marie CAULIER, avocat au barreau de PARIS

Z BANQUE

Agence Z D X

XXX

XXX

D X

XXX

71100 CHALON-SUR-SAONE

représentés par Maître Chantal DOUMERG-BERGERET de la SCP RICHELET ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Septembre 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Roland VIGNES, Président de chambre, Président,

Gérard LAUNOY, Conseiller,

Karine HERBO, Conseiller,

qui en ont délibéré,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Catherine BORONT,

ARRÊT rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Roland VIGNES, Président de chambre, et par Josette ARIENTA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat à durée indéterminée du 1er juillet 2000, M. B Y a été engagé par la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel de J K en qualité d’attaché commercial. Selon avenant du 7 avril 2006, contenant une clause de non-concurrence, il était promu au poste de chargé de clientèle professionnelle classe 2 niveau analyste animateur à l’agence de Beaune Saint Nicolas, avec effet rétroactif au 1er avril 2006.

M. Y a démissionné le 4 juillet 2011.

La caisse régionale de Crédit Agricole ayant appris l’embauche de M. Y par Z assurance, agence de Chagny (71) a saisi le conseil de prud’hommes de Dijon le 2 avril 2012, après rejet de sa demande en référé.

Par jugement du 27 mars 2013, le conseil de prud’hommes a :

— dit que M. Y n’a pas satisfait à sa clause de non-concurrence,

— ordonné à M. Y de cesser son activité concurrentielle, sous astreinte provisoire de 30 euros par jour à compter du huitième jour après la publication du jugement, astreinte que le conseil se réserve le droit de liquider,

— condamné M. Y à payer à la caisse régionale de Crédit Agricole la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit le jugement opposable à Z banque,

— condamné M. Y et Z banque aux dépens.

M. Y a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions contradictoirement échangées, visées par le greffier, et soutenues oralement à l’audience,

' M. Y demande à la cour d’infirmer le jugement déféré et de :

— constater que la demande initiale de la caisse régionale de Crédit Agricole est irrecevable à ce jour,

— débouter la caisse régionale de Crédit Agricole de sa demande de dommages et intérêts aux motifs que :

* l’obligation contractuelle est inexistante,

* la caisse régionale de Crédit Agricole ne justifie d’aucun préjudice,

— condamner la caisse régionale de Crédit Agricole au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

' la caisse régionale de Crédit Agricole demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il avait ordonné à M. Y de cesser son activité concurrentielle au sein de la société Z et de condamner ce dernier à lui payer les sommes de :

—  38 400 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l’inexécution de l’obligation de non-concurrence,

—  3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

' M. D X, agent d’assurance Z banque, demande à la cour d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamné aux dépens, de prononcer sa mise hors de cause et de condamner la caisse régionale de Crédit Agricole aux dépens d’instance et d’appel.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, auxdites conclusions.

DISCUSSION

Attendu que M. Y a signé un avenant à son contrat de travail, le 7 avril 2006, comportant une clause de non-concurrence libellée dans les termes suivants :

« Compte tenu de vos fonctions de chargé de clientèle professionnels, des informations que vous détenez sur nos procédures et produits commerciaux et de vos liens privilégiés avec la clientèle, votre promotion s’accompagne de votre part d’un engagement de non-concurrence au terme duquel vous vous interdisez, en cas de cessation de votre contrat de travail d’entrer au service de sociétés, de particuliers, d’établissements, d’organismes ou d’entreprises effectuant des opérations de banque, de crédit, de prêt, d’escompte, de placement de titres, d’assurance ou de capitalisation.

Il est expressément convenu :

* que l’exécution de la présente clause de non-concurrence est limitée à une période de deux ans à compter de la date de départ effectif de l’entreprise et que, passé ce délai, vous pourrez exercer librement toute activité de votre choix,

* que l’exécution de la présente clause de non-concurrence est limitée au département du dernier lieu d’affectation géographique et aux départements limitrophes,

* que l’exécution de la présente clause de non-concurrence s’appliquera quelle que soit la nature et le motif de la rupture du contrat de travail. Néanmoins, conformément à l’article 4-II de la convention collective nationale du Crédit Agricole, elle ne s’appliquera pas en cas de licenciement prononcé pour un motif autre qu’une sanction disciplinaire résultant de l’application de l’article 12 de la convention collective nationale du Crédit Agricole.

* que pendant toute la durée de l’interdiction, il vous sera versé chaque mois une somme égale à 1/24e de votre salaire annuel brut de l’année civile précédant votre départ. En cas d’exercice d’une activité concurrentielle pendant la durée de l’interdiction, la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel de J-K sera, dans ce cas, libérée de son engagement de versement de la contrepartie financière.

* que le paiement de cette indemnité forfaitaire ne pas atteinte aux droits que la caisse régionale se réserve expressément de vous poursuivre en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle.

* que la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel de J-K se réserve toutefois la faculté de vous libérer à tout moment, et au plus tard dans les quinze jours qui suivent la notification de la rupture de votre contrat de travail, quel qu’en soit l’auteur, de votre engagement de non-concurrence. Dans cette dernière situation, la caisse régionale vous préviendra par lettre recommandée.

* que vous acceptez sans réserve que l’existence de la présente clause de non-concurrence soit rappelée par écrit sur le certificat de travail qui vous sera délivré au moment de votre départ de l’entreprise » ;

Attendu que la caisse régionale de Crédit Agricole ne conteste pas que sa demande initiale de cessation de l’activité concurrentielle de M. Y au sein d’Z banque est sans objet, la clause de non-concurrence étant limité à deux ans à compter du départ du salarié et M. Y ayant quitté l’entreprise le 4 septembre 2011 ; qu’elle sollicite dès lors l’octroi d’une somme de 38.400 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence ;

Attendu que pour s’opposer à la demande, M. Y fait valoir que la caisse régionale de Crédit Agricole avait renoncé à cette clause de non-concurrence ;

Mais attendu que si la renonciation de la caisse régionale de Crédit Agricole pouvait être notifiée à M. Y au plus tard dans les quinze jours qui suivaient la notification de la rupture du contrat de travail, celle-ci devait intervenir par lettre recommandée ; que par ailleurs, cette renonciation doit être expresse et non équivoque ;

que le courrier du 11 juillet 2011 par lequel la caisse régionale de Crédit Agricole a pris note de la démission de M. Y et a indiqué « vous serez libre de tout engagement vis-à-vis de la caisse régionale le 4 septembre 2011 au soir » , qui n’a pas été envoyé en recommandé, précise se référer à l’article 14 de la convention collective ; que cette disposition a trait à la durée du préavis ;

qu’en outre, la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d’actes manifestant, de façon claire et non équivoque, la volonté de renoncer ; que la mention « libre de tout engagement » a pour seul but de signifier que les obligations imposées au salarié en cours de contrat prennent fin et n’implique en elle-même aucune volonté de l’employeur de renoncer à la clause de non-concurrence ;

que cette volonté claire et non équivoque ne peut pas plus être déduite de l’absence de mention de la clause de non-concurrence sur le certificat de travail de M. Y, étant souligné que l’article D.1234-6 du code du travail énonce les mentions devant exclusivement figurer sur le certificat de travail au titre desquelles ne figure pas la clause de non-concurrence, quand bien même le salarié aurait contractuellement accepté qu’elle y figure ;

qu’enfin, la caisse régionale de Crédit Agricole a versé à M. Y la contrepartie financière de cette clause de non-concurrence dès septembre 2011 ; que le versement a également été effectué en octobre 2011, sommes qui n’ont été remboursées par M. Y que le 16 mai 2012 lors de l’audience de conciliation du conseil de prud’hommes ; qu’elle a écrit, en octobre et novembre 2011, à M. Y et à M. X afin de rappeler cette clause de non-concurrence ;

Attendu que M. Y fait valoir, à titre subsidiaire, qu’aucune violation de la clause de non-concurrence n’est établie par le Crédit Agricole ;

Mais attendu que M. Y ne conteste pas avoir, dès le 5 septembre 2011, été embauché par M. X, agent d’assurance Z banque ayant une activité concurrente de celle de la caisse régionale de Crédit Agricole, à Chagny en Saône et Loire soit dans un département limitrophe de sa dernière affectation située à Beaune ; que son activité est de développer la marché grand public toutes branches et la nouvelle activité bancaire, sa rémunération étant composé d’un fixe et d’une commission d’apport de 40 % calculée sur les affaires nouvelles apportées personnellement à l’agence ;

Attendu que M. Y expose que la clause de non-concurrence de la caisse régionale de Crédit Agricole n’est pas valable aux motifs :

* elle impose une obligation dans un département non couvert par son activité et dépasse donc largement la protection de ses intérêts légitimes,

* elle lui interdisait, de par son très large contenu, d’exercer une activité conforme à sa formation, ses connaissances et son expérience,

* elle comportait un facteur imprécis susceptible de varier en cours d’exécution du contrat de la seule volonté de l’employeur puisqu’elle dépend du dernier lieu d’affectation ;

Mais attendu que, même si la caisse régionale de Crédit Agricole n’exerce pas ses activités en Saône et Loire, le nouvel emploi de M. Y se situe à quinze kilomètres de son ancienne activité, dans le même bassin économique ; que les attestations des anciens clients de M. Y, lorsqu’il exerçait au sein du Crédit Agricole, démontrent d’ailleurs qu’ils ont sollicité ce dernier afin d’obtenir des contrats chez Z banque ;

que le grief tiré de l’imprécision de la clause quant à l’étendue de son espace ne saurait être retenu alors que la clause vise uniquement le dernier lieu d’affectation et non l’ensemble des affectations au cours de la relation de travail ;

que compte tenu de son espace limité aux départements limitrophes de sa dernière affectation, la Côte d’Or, M. Y ne démontre pas que la clause de non-concurrence lui interdisait d’exercer une activité conforme à sa formation, ses connaissances et son expérience ;

que la clause de non-concurrence, limitée dans le temps et l’espace, comportant une contrepartie financière et étant indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’employeur, doit donc être déclarée valide ;

Attendu que M. Y fait valoir que la caisse régionale de Crédit Agricole ne rapporte pas la preuve d’un quelconque préjudice au soutien de sa demande de dommages et intérêts ;

Mais attendu que s’agissant d’une demande de dommages et intérêts fondée sur le non-respect d’une obligation contractuelle, la seule violation de cette obligation impose d’indemniser l’employeur sans que celui-ci ait à justifier d’un préjudice quelconque ;

que l’ensemble de ces éléments conduit à condamner M. Y à verser à la caisse régionale de Crédit Agricole la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts ;

Attendu qu’en l’absence de toute demande à l’encontre de M. X, il convient d’ordonner sa mise hors de cause ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne M. Y à verser à la caisse régionale de Crédit Agricole la somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence,

Ordonne la mise hors de cause de M. X,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. Y aux dépens d’instance et d’appel.

Le greffier Le président

Josette ARIENTA Roland VIGNES

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Cour d'appel de Dijon, 15 octobre 2015, n° 14/00370