Cour d'appel de Douai, 2 octobre 2008, n° 06/07346

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 2 oct. 2008, n° 06/07346
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 06/07346
Décision précédente : Cour d'appel d'Amiens, 29 septembre 2003

Texte intégral

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 02/10/2008

*

* *

N° de MINUTE : /08

N° RG : 06/07346

Jugement du tribunal de commerce d’ABBEVILLE du 25 janvier 2002

Arrêt (N° 02/01008) rendu le 30 Septembre 2003 par la Cour d’Appel d’AMIENS

Arrêt de la Cour de cassation du 19 septembre 2006

REF : VNDM-TF/CP Renvoi après cassation

APPELANTS

Monsieur B Z

né le XXX à XXX

XXX

Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assisté de Me Benoît MONIN, avocat au barreau de VERSAILLES

S.A.R.L. TONER SERVICES BDR prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège XXX

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Me Benoît MONIN, avocat au barreau de VERSAILLES

S.A.R.L. TONER SERVICES FR prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège XXX

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Me Benoît MONIN, avocat au barreau de VERSAILLES

S.A.R.L. TONER SERVICES NORD prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social L’Inqueterie XXX

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Me Benoît MONIN, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMÉS

SARL FRANCE TONER prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son XXX

XXX

Représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour

Assistée de Me Gérard FIRMIN, avocat au barreau D’ABBEVILLE

Monsieur D Y

Assigné à personne le 24/05/07

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour

Assisté de Me Gérard FIRMIN, avocat au barreau D’ABBEVILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Monsieur FOSSIER, Président de chambre

Madame F G, Conseiller

Monsieur CAGNARD, Conseiller


GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame X

DÉBATS à l’audience publique du 22 Mai 2008, après rapport oral de l’affaire par Madame F G

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2008, après prorogation du délibéré du 16 Septembre 2008 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président, et Madame X, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 mai 2008

*****

En janvier 1990, Monsieur B Z a créé une entreprise individuelle de reconditionnement de cartouches laser pour imprimantes sous le nom de « TONER SERVICES ». Le 8 mars 1995, il a créé une SARL TONER SERVICES FRANCE, qui a finalement englobé toutes les activités commerciales exercées en région parisienne par l’entreprise initiale. En 1998, il a créé une SARL TONER SERVICES NORD ayant la même activité que cette dernière, mais pour la région du Nord de la France sauf le Pas-de-Calais. Enfin, la partie « production » de l’activité a été donnée en location-gérance à une SARL TONER SERVICES BDR en octobre 1999.

Le 1er septembre 1997, Monsieur B Z a embauché le fils d’un ami Monsieur D Y en qualité de technico-commercial. Le contrat de travail de cette personne a été transféré à la SARL TONER SERVICES NORD en 1998 ou 1999 (deux dates étant successivement citées dans les conclusions des appelants pour ce transfert). Les relations entre la SARL TONER SERVICES NORD et Monsieur D Y se sont détériorées, jusqu’à aboutir, le 24 mars 2000, au licenciement de ce dernier pour faute lourde. Très peu de temps après, cependant, le 6 avril 2000, la SARL TONER SERVICES NORD et Monsieur D Y ont signé un protocole d’accord transactionnel aux termes duquel la SARL TONER SERVICES NORD devait verser à Monsieur D Y une indemnité de 80 000 F couvrant l’indemnité de licenciement et « les dommages-intérêts auxquels Monsieur D Y pense pouvoir prétendre du fait de la rupture de son contrat de travail » (sic). En contrepartie, Monsieur D Y s’engageait à ne pas vendre de cartouches, durant un an, aux « clients de la région parisienne et aux clients dont la liste » était jointe en annexe du protocole. En cas de violation de ce dernier engagement, il était prévu que l’une quelconque des sociétés du Groupe TONER SERVICES pourrait agir en justice pour obtenir réparation de son préjudice, l’indemnité à verser étant fixée à un an du chiffre d’affaires réalisé directement ou indirectement par Monsieur D Y avec le client concerné. A cet acte était annexée une liste de clients de neuf pages.

Le 13 avril 2000 soit très peu de temps après la signature du protocole, Monsieur D Y a créé une SARL FRANCE TONER DISTRIBUTION dont l’objet social est la distribution de matériels et consommables informatiques.

Par jugement du 25 janvier 2002, le Tribunal de Commerce d’ABBEVILLE a, sur l’action de Monsieur B Z et de sociétés du Groupe « TONER SERVICES » fondée sur la violation de la clause de la transaction relative à la clientèle d’une part, sur la concurrence déloyale d’autre part, prononcé la nullité des exploits introductifs d’instance pour imprécision sur la dénomination de la personne au bénéfice de qui les dommages-intérêts étaient sollicités, et alloué aux défendeurs une indemnité sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par arrêt du 30 septembre 2003, la Cour d’Appel d’AMIENS a infirmé ce jugement, et déclaré recevables mais non fondées les demandes de Monsieur B Z et des sociétés TONER SERVICE NORD, BDR, et FRANCE aux moyens, notamment :

— sur la clause du protocole, que les appelants ne produisent pas de liste précise de clients compris dans la liste concernée par le protocole et objets d’un contact effectif par Monsieur D Y, que par ailleurs, les témoignages et attestations produits ne constitueraient pas la preuve de la violation des obligations contractuelles,

— sur la concurrence déloyale, qu’il n’est pas rapporté la preuve de manoeuvres révélant une volonté de tromper la clientèle, et que, s’agissant d’entreprises dont l’objet social est identique, la présence d’éventuelles « ressemblances dans la présentation des prestations proposées ne pourrait être que la résultante de nécessités fonctionnelles commandées par la nature et l’objet même de l’activité concernée ».

Par arrêt du 19 septembre 2006, la Cour de Cassation a cassé et annulé cet arrêt en toutes ses dispositions, et renvoyé l’affaire devant la Cour d’Appel de DOUAI. La Cour suprême a retenu, comme moyens de cassation, que :

— sur la violation de la transaction, les sociétés appelantes avaient, dans leurs conclusions, énoncés les clients concernés par un démarchage de la société FRANCE TONER,

— sur la concurrence déloyale, la Cour n’avait pas recherché si des ressemblances dans les présentations publicitaires critiquées étaient de nature à créer une confusion entre les sociétés en cause, et que, par ailleurs, l’action en concurrence déloyale suppose seulement l’existence d’une faute sans nécessiter d’élément intentionnel.

La SARL TONER SERVICES BDR, la SARL TONER SERVICES FRANCE, la SARL TONER SERVICES NORD et Monsieur B Z ont saisi la présente Cour du renvoi de l’affaire le 22 décembre 2006. Dans leurs dernières conclusions déposées le 25 janvier 2008, ils demandent la réformation du jugement et la condamnation solidaire de la SARL FRANCE TONER DISTRIBUTION et de Monsieur D Y à payer :

— à Monsieur B Z et à la SARL TONER SERVICES NORD la somme de 200 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation des obligations contractuelles issues de la transaction,

— à la SARL TONER SERVICES BDR, la SARL TONER SERVICES FRANCE, la SARL TONER SERVICES NORD et Monsieur B Z :

* la somme de 340 429,65 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de la concurrence déloyale,

* la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les sociétés appelantes invoquent, à l’appui de leur action fondée sur la concurrence déloyale :

— des publicités et propositions de la SARL FRANCE TONER DISTRIBUTION « ressemblant étrangement » à celles des sociétés TONER SERVICES NORD, BDR et NORD « en particulier de celle TONER SERVICES » (sic) ; je relève, sur ce point, une nouvelle imprécision dans l’identité de la personne dénommée « TONER SERVICES » ; par ailleurs, il est allégué une ressemblance dans la présentation de la publicité (même présentation, même mise en page, même produits, même couleur)-sic- ; or les pièces présentées dans le dossier sur ce point (n° 50 à 53 et 58) ne révèlent aucune ressemblance ; il conviendrait donc qu’à l’audience, l’avocat des appelants présente à la Cour les pièces qu’il estime significatives sur ce point, si elles figurent à son dossier,

— une confusion dans l’esprit de la clientèle ; sur ce point il apparaît que certains clients ont confondu les deux sociétés (par exemple dans un envoi postal : mention du nom de l’enseigne « FRANCE TONER » avec adresse postale du siège social de la SARL TONER SERVICES FRANCE -pièce n° 58- ; chèques libellés à l’ordre de « FRANCE TONER » et adressés à TONER SERVICES) ; à quoi est-ce dû ' ;

— un détournement de la clientèle ; il est allégué sur ce point de l’imitation de publicité (rappel : cela reste à montrer …) ; sur ce point, il est fait état et justifié d’actes de démarchages, c’est-à-dire de contacts, propositions, à des clients, de produits identiques pour des prix plus faibles,

— un rapport de concurrence très étroits, les sociétés en litige prospectant la même clientèle et proposant les mêmes produits,

— l’existence d’un préjudice consistant dans la perte d’un chiffre d’affaires pour les sociétés TONER SERVICES BDR et NORD, une diminution des prix pour s’aligner sur leur concurrent, les frais résultant du traitement des appels consécutifs à la confusion, enfin une atteinte à leur image de marque (à cause de problèmes de qualité sur les produits et le service après-vente de « FRANCE TONER » stigmatisé par des « blogueurs »).

La SARL FRANCE TONER et Monsieur D Y, dans leurs dernières conclusions déposées le 25 avril 2008, demandent la confirmation du jugement déféré et demandent que « l’intervention devant la Cour » de Monsieur B Z et des sociétés TONER SERVICES NORD TONER SERVICES BDR ET TONER SERVICES FR soit déclarée irrecevable et mal fondée. Ils soutiennent encore que les dispositions de l’article 56 du Nouveau Code de Procédure Civile n’ont pas été respectées. Ils demandent qu’il soit dit et jugé qu’aucune violation du protocole d’accord par Monsieur D Y n’a été établi par les pièces communiquées et, sur la concurrence déloyale, se contentent de procéder à un commentaire des pièces produites les unes après les autres.

Ils soutiennent encore que l’action revêt un caractère gravement abusif, relève d’une atteinte à la liberté du commerce, et cause à Monsieur D Y un préjudice commercial occasionné par « un harcèlement permanent constituant un sérieux handicap dans l’exercice de ses activités » ; ils demandent en conséquence condamnation de « la société TONER SERVICES » (sic) et de Monsieur B Z à payer à Monsieur D Y la somme de 76 224,51 € à titre de dommages-intérêts et celle de 4 573,47 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Selon ce qu’autorise l’article 455 du Code de Procédure Civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

SUR QUOI LA COUR,

— Au principal

Attendu que selon le protocole intervenu entre les parties, Monsieur Y devait recevoir une indemnité de rupture forfaitaire et définitive de quatre vingt mille francs ; qu’il était autorisé à exercer une activité de vente de cartouches d’imprimantes, sauf, pendant une année, à ne pas prospecter les clients de la région parisienne ni les clients visés dans une annexe au protocole ;

Attendu que Monsieur Z, pour TS Nord, TS B.D.R. et TS FR, a réglé la somme susdite ; que pourtant, Monsieur Y pour sa société TS France a, selon les pièces versées aux débats, prospecté, par télécopies notamment, plusieurs clients de la région parisienne ou visés en annexe, et qui relevaient donc de la sphère réservée à TS Nord ou à TS B.D.R. ou FR. ;

Attendu que la sanction de l’inexécution du protocole était, selon les termes de ce dernier, d’une année de chiffre d’affaires réalisé par Monsieur Y et TS France ;

Que cette stipulation fait la loi des parties et celle de la Cour ;

Qu’en 2001, première année entière d’exercice de Monsieur Y et de TS France, et dernière année d’exercice avant la naissance du litige, ce chiffre d’affaires a atteint la somme de 197.258 euros, au paiement de laquelle M. Z et ses trois sociétés peuvent prétendre ;

Que cette pénalité forfaitaire présente les caractéristiques d’une clause pénale et appelle dès lors l’exercice du pouvoir modérateur de la Cour, dans les termes du dispositif ci-après ;

Attendu que vainement, et au rebours des énonciations de la Cour de cassation, Monsieur Y et TS France font plaider que les clients démarchés ne sont pas nettement identifiés par l’adversaire dans ses écritures ou dans ses pièces ; ou encore, que les ressemblances dans la présentation publicitaire des produits étaient dictées par la nécessité ou n’induisaient pas de confusion auprès de la clientèle ; ou enfin, que ses démarchages n’avaient pas les caractéristiques de manoeuvres ;

Que par conséquent, l’action en concurrence déloyale apparaît fondée et qu’il faut faire droit ;

Que le préjudice subi par Monsieur Z et ses trois sociétés ne se confond pas avec celui que sanctionne le protocole transactionnel susvisé au titre de la responsabilité contractuelle ; qu’il s’agit ici non plus de stigmatiser l’attitude d’une ancien cocontractant, mais de réparer la désorganisation des trois sociétés de Monsieur Z, induite par les confusions avérées des clients, par le dumping sur les prix opéré par Monsieur Y et par l’atteinte à la réputation des trois sociétés de Monsieur Z ; que la Cour dispose des éléments suffisants pour évaluer ce préjudice dans les termes du dispositif ci-après, au visa du rapport d’expertise comptable (pièce n° 16) fourni aux débats mais très largement pessimiste ;

— Accessoires

Attendu que Monsieur Y et sa société TS France supporteront les dépens de première instance et d’appel ;

Qu’au titre des frais exposés pour le présent appel et non compris dans les dépens, la partie condamnée aux dépens paiera à l’autre par application de l’article 700 du Code de Procédure Civile la somme de 5000 euros ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu à Abbeville le 25 janvier 2002 ;

Statuant à nouveau,

Déclare valable l’acte introductif d’instance du 14 octobre 2000 ;

Condamne Monsieur D Y et la SARL France Toner solidairement à payer:

— à Monsieur B Z et la société TS Nord ensemble, la somme de cinquante mille (50.000) euros pour violation du protocole transactionnel établi entre eux ;

— à Monsieur B Z et les sociétés TS B.D.R., TS FR., TS NORD, la somme de cinquante mille euros pour concurrence déloyale ;

Condamne Monsieur D Y et la SARL France Toner à payer à Monsieur Z et aux société TS Nord, TS B.D.R. et TF FR. ensemble, la somme de six mille euros pour frais irrépétibles de procédure, et les dépens de première instance et d’appel ;

Accorde aux avoués constitués, le bénéfice de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

C. X T. Fossier

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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