Cour d'appel de Douai, 27 novembre 2009, n° 08/02984

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 27 nov. 2009, n° 08/02984
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 08/02984
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lille, 1er mai 2007

Sur les parties

Texte intégral

ARRET DU

27 Novembre 2009

N° 1998-09

RG 08/02984

ARM/AL

AJT

JUGT

Conseil de Prud’hommes de LILLE

EN DATE DU

02 Mai 2007

— Prud’Hommes -

APPELANT :

SA LEBUL

INTERMARCHE

XXX

XXX

Représentée par Me Mourad BOURAHLI (avocat au barreau de LILLE)

INTIME :

M. I J

XXX

Premier étage – 2e porte

XXX

Représenté par Me Stéphane DUCROCQ (avocat au barreau de LILLE)

Substitué par Me N DURIEZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2007/009570 du 09/10/2007 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DOUAI)

DEBATS : à l’audience publique du 09 Octobre 2009

Tenue par N O-P

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Marie-Agnès PERUS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

Maurice H

: PRESIDENT DE CHAMBRE

K L

: CONSEILLER

N O-P

: CONSEILLER

ARRET : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2009,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Maurice H, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. I J a été embauché le 26 novembre 2001 par la société Lebul (enseigne intermarché) en qualité d’employé commercial, pour une durée de 30 heures hebdomadaires. Suivant avenant du 3 septembre 2002 son horaire de travail est passé à 34 heures.

Le 7 septembre 2004 M. I J s’est vu notifier un avertissement pour des produits périmés trouvés dans son rayon.

Par lettre du 4 décembre 2004 il a été licencié pour faute grave, après un entretien préalable qui s’est déroulé le 29 novembre.

Contestant cette mesure, il a saisi le 20 janvier 2005 le conseil de prud’hommes de Lille qui, dans un jugement du 2 mai 2007, a :

— dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse

— condamné la société Lebul à payer au salarié les sommes de :

' 6 048 euros à titre de dommages et intérêts

' 2 016 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents

' 353 euros à titre d’indemnité de licenciement

' 700 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991

ces sommes avec intérêts légaux

— débouté les parties de leurs autres demandes

— condamné la société Lebul aux dépens.

La société Lebul a relevé appel de cette décision et demande à la cour, dans ses conclusions soutenues à l’audience du 9 octobre 2009, de dire le licenciement justifié pour faute grave, débouter M. I J de ses demandes et le condamner au paiement d’une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. I J demande à la cour de porter à 15 000 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à 2 200 euros l’indemnité compensatrice de préavis et 220 euros les congés payés afférents. Il demande en outre une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et conclut à la confirmation pour l’indemnité de licenciement.

SUR CE LA COUR :

Sur la demande relative aux pièces :

M. I J demande à la cour d’écarter les pièces de la partie adverse numérotées de 11 à 14 pour défaut de communication. La société Lebul soutient que ces pièces ont été communiquées et s’oppose à la demande.

Ces pièces figurent au bordereau de pièces joint aux conclusions établies par la société Lebul le 5 octobre pour l’audience du 9 octobre. Elles concernent une attestation du 21 avril 2006 sur la durée de l’archivage du cahier de traçabilité, des documents relatifs à deux autres salariés, MM X et Y et un modèle vierge de cahier de traçabilité.

Si les conclusions de premières instance visées par le conseil de prud’hommes ne comportent pas de bordereau de communication de pièces, ces écritures mentionnent toutefois les éléments contenus dans les pièces litigieuses.

Ainsi, il n’y a pas lieu d’écarter les pièces 11 à 14 qui ne sont pas nouvelles.

Sur le licenciement :

la lettre de licenciement est rédigée comme suit : 'De nombreux produits se trouvaient périmés depuis le 7 novembre 2004 dans votre rayon….Vous êtes parti en congé le samedi 13 novembre 2004, le dimanche matin, Mme Z, responsable du magasin a repris en charge votre rayon et ainsi que le frigo où sont stocker vos produits de charcuterie LS et là une grande quantité de produits périmés étaient stockés dans le frigo et en linéaire de nombreux produits étaient restés avec des dates limites de vente largement dépassée, un constat d’huissier a d’ailleurs été dressé. Des produits périmés depuis le 7/11/04, 8/11/04, 10/11/04, 13/11/04 et enfin le 15/11/04…'.

La société Lebul expose qu’à la demande de Maître A, huissier de justice, contacté dès le lendemain de la découverte des produits périmés, ceux-ci ont été placés, après enregistrement de la démarque sur le MSI, dans un caddie recouvert d’un film plastique avec la mention 'pour constat d’huissier’ et placé dans le frigo du magasin ; que l’huissier est venu faire son constat le mercredi 17 novembre. Elle indique qu’elle ne peut produire le cahier de traçabilité concernant M. I J dès lors que les documents ne sont archivés que pendant six mois, ainsi qu’en atteste la société Aqua, organisme de certification qualité. Elle soutient par ailleurs que les congés payés de M. I J ont été décidés d’un commun accord. Elle conteste vivement les accusations du salarié quant à la façon qui serait la sienne de traiter son personnel.

M. I J émet l’hypothèse que ses difficultés sont directement liées à un arrêt maladie et à une attitude récurrente de l’employeur de licencier quiconque adopte un comportement qui ne lui convient plus, évoquant 25 licenciements au cours des dernières années. Il affirme par ailleurs qu’il a été mis en congés forcés à compter du 15 novembre au soir et soutient qu’il est habituel dans la grande distribution d’attendre l’absence du salarié pour réaliser des constats non contradictoires aux termes desquels il est répertorié des produits périmés. Il estime qu’il est facile de placer des périmés dans le rayon du salarié absent avant de le faire constater. Il indique encore que l’habitude au magasin est d’entreposer les périmés dans des caddies situés dans la réserve et soutient que c’est ce qu’il a fait avant son départ en congés, ignorant ce qu’il a pu advenir après de ces marchandises. Il accuse ainsi l’employeur d’avoir pris le caddie et de l’avoir entreposé dans le frigo. Il soutient enfin que c’est son responsable qui remplissait le cahier de traçabilité et que lui-même ne connaît pas ce document.

Mme B, responsable boulangerie, atteste que chaque jour sont notées sur un cahier de traçabilité les pertes du rayon et que les périmés sont stockés dans des caddies prévus à cet effet dans la réserve jusqu’au contrôle des quantités par la directrice, qui se charge ensuite de la destruction des marchandises.

M. C confirme qu’il note tous les jours les pertes dans le cahier de traçabilité et les met ensuite en réserve pour qu’elles soient jetées tous les jours par M. D. M. E déclare également utiliser le cahier de traçabilité pour les produits périmés.

Mme F, responsable frais LS, atteste avoir expliqué à M. I J le fonctionnement de la démarque et du cahier de traçabilité et qu’il fallait mettre les périmés dans un caddie. Elle ajoute que les périmés retrouvés étaient en rayon et dans le frigo de la réserve.

M. D déclare que dès la vérification des pertes terminée, il les jette immédiatement dans le compacteur et qu’il effectue cette vérification tous les matins.

Mme Z atteste qu’à plusieurs reprises la société a convoqué M. I J pour qu’il corrige son travail surtout dans le contrôle des périmés, avant de lui envoyer un avertissement. Elle déclare également que le dimanche matin, elle était en permanence accueil quand une cliente l’a alertée de la présence de denrées périmées dans le rayon charcuterie libre service ; qu’elle a enlevé lesdits produits.

Maître A mentionne dans son constat du 17 novembre que Mme Z lui a exposé avoir découvert un carton de denrées alimentaires dans la réserve frigorifique du magasin alors qu’il aurait dû être en rayon ou enlevé de la réserve en cas de dépassement des dates de péremption et qu’elle a ensuite vérifié les denrées dans le rayon. Elle atteste par ailleurs que ne pouvant se déplacer le jour de l’appel téléphonique elle a conseillé à Mme Z de retirer les produits périmés du rayon et les entreposer dans une réserve en attendant son passage deux jours plus tard.

L’huissier a constaté que le caddie qui avait été filmé contenait des produits périmés depuis le 7 novembre jusqu’au 15 et que ces articles correspondaient bien à la liste dressée le 16 novembre enregistrée dans MSI.

En premier lieu, l’absence du salarié lors de l’opération n’enlève pas toute valeur probante aux constatations de l’huissier, même mandaté par l’employeur.

En second lieu, il ressort de ces éléments qu’il est incontestable que l’huissier a été appelé dès le lundi 15 novembre et que les périmés ont été mis dans un caddie à sa demande. Il est également incontestable que ces produits ont été enregistré dans MSI le 16 novembre, soit après le départ en congés de M. I J.

Ainsi, si ces produits avaient été retirés par M. I J lui-même pour être mis dans la réserve en vue de leur vérification et de leur destruction, ils auraient été enregistrés avant le 16 novembre dans MSI, ce qui n’est pas soutenu, ni a fortiori établi. Au surplus, dans cette hypothèse, cela démontrerait, en tout état de cause, un manquement du salarié qui n’aurait pas retiré avant le 13 novembre des produits périmés depuis les 7, 8 et 10 novembre, alors que le contrôle est quotidien. De même il n’est pas établi que l’employeur aurait conservé des produits périmés en vue de piéger M. I J pendant ses congés. En effet il ressort d’une part des attestations de Mme F et de M. D que les périmés litigieux proviennent bien du rayon et du frigo de la réserve et que les marchandises périmées sont détruites tous les jours. D’autre part, le témoignage de M. Y suivant lequel quand l’employeur veut se séparer d’un salarié, il fait tout pour y arriver (avertissements injustifiés, changement des horaires pour jouer sur le moral des employés…), ce qui l’a amené à démissionner, est sujet à caution dès lors qu’il a écrit à la société Lebul, lorsqu’il a interrompu son contrat de qualification, que son intégration dans l’équipe lui avait permis d’améliorer son expérience professionnelle, sans évoquer le moindre problème et alors qu’il n’avait pas fait l’objet d’une bonne évaluation par l’organisme de formation. De même le témoignage de la femme de ménage qui indique que l’employeur met des marchandises périmées dans le rayon pour licencier ses salariés ne repose sur aucun fait constaté par le témoin. Enfin les témoignages de salariés ou de clients indiquant que M. I J faisait correctement son travail ne permettent pas d’établir qu’il n’oubliait aucun produit périmé dans son rayon, étant observé qu’il n’a pas contesté son avertissement du 7 septembre 2004, portant sur le même manquement.

Les faits reprochés sont donc établis et le licenciement de M. I J était justifié. L’existence d’une précédente sanction deux mois avant pour la même faute justifiait une rupture immédiate du contrat de travail.

M. I J sera donc débouté de ses demandes.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

M. I J qui succombe à l’instance sera condamné aux dépens. L’affaire commande de ne pas allouer de sommes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ou de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS :

Rejette la demande visant à écarter des pièces

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Lebul de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau :

Dit le licenciement pour faute grave de M. I J fondé

Le déboute de ses demandes

Déboute la société Lebul de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel

Condamne la société Lebul aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

N. BERLY M. H

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Cour d'appel de Douai, 27 novembre 2009, n° 08/02984