Cour d'appel de Douai, 4ème chambre, 15 septembre 2010

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 4e ch., 15 sept. 2010
Juridiction : Cour d'appel de Douai

Sur les parties

Texte intégral

DOSSIER N°09/03572

ARRÊT DU 15 septembre 2010

4e CHAMBRE

VM

COUR D’APPEL DE DOUAI

4e Chambre – N°

Prononcé publiquement le 15 septembre 2010, par la 4e Chambre des Appels Correctionnels,

Sur appel d’un jugement du T. CORRECT. DE LILLE – CHAMBRE JIRS du 10 JUILLET 2009

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

XXX

Né le XXX à XXX

XXX

De nationalité turque, séparé

Sans profession

Détenu à la maison d’arrêt de XXX

Prévenu, appelant, détenu, comparant

Assisté de Maître REGLEY Florian, Avocat au barreau de LILLE, substituant Maître BENMOUFFOK Chérifa, Avocat au barreau de LILLE

LE MINISTÈRE PUBLIC : Le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de LILLE

appelant,

COMPOSITION DE LA COUR :

Président : Alain A, Conseiller faisant fonction de Président.

Conseillers : Fabrice PETIT,

F G.

GREFFIER : Odette MILAS aux débats et R S au prononcé de l’arrêt.

MINISTÈRE PUBLIC : Claude LAFONT, Avocat Général.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l’audience publique du 23 juin 2010, le Président a constaté l’identité du prévenu.

Ont été entendus :

Monsieur A en son rapport ;

XXX en ses interrogatoires et moyens de défense ;

Le Ministère Public, en ses réquisitions :

Les parties en cause ont eu la parole dans l’ordre prévu par les dispositions des articles 513 et 460 du code de procédure pénale.

Le prévenu et son Conseil ont eu la parole en dernier.

Le Président a ensuite déclaré que l’arrêt serait prononcé le 15 septembre 2010.

Et ledit jour, la Cour ne pouvant se constituer de la même façon, le Président, usant de la faculté résultant des dispositions de l’article 485 du code de procédure pénale, a rendu l’arrêt dont la teneur suit, en audience publique, et en présence du Ministère Public et du greffier d’audience.

DÉCISION :

XXX,

LA COUR, APRES EN AVOIR DÉLIBÉRÉ CONFORMÉMENT A LA LOI, A RENDU L’ARRÊT SUIVANT :

Devant le Tribunal Correctionnel de Lille Omer DANIS était prévenu :

' d’avoir notamment à EPERNAY, en tout cas sur le territoire national, et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, de manière illicite, importé notamment des Pays Bas des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et de l’héroïne,

faits prévus par C.222-36 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77, C.R.5132-78 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990 et réprimés par C.222-36 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY, en tout cas sur le territoire national, et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, de manière illicite, tenté d’importer notamment de Bolivie et d’Espagne des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et du cannabis, lesdites tentatives étant caractérisées par un commencement d’exécution, en l’espèce des déplacements en Bolivie et en Espagne et de multiples contacts avec des trafiquants locaux et n’ayant manqué leurs effets que par suite de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur, en l’espèce la saisie de la marchandise en Bolivie, l’impossibilité d’assurer le transport de la drogue ou d’autres circonstances inconnues,

faits prévus par C.222-36 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77, C.R.5132-78 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990, C. 121-4, 121-5 du Code Pénal et réprimés par C.222-36 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY, en tout cas sur le territoire national, et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, transporté des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et de l’héroïne,

faits prévus par C.222-37 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990 et réprimés par C.222-37 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY, en tout cas sur le territoire national et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, détenu des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et de l’héroïne,

faits prévus par C.222-37 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990 et réprimés par C.222-37 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY en tout cas sur le territoire national et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, acquis des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et de l’héroïne,

faits prévus par C.222-37 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990 et réprimés par C.222-37 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY en tout cas sur le territoire national et en Bolivie de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, offert ou cédé des produits stupéfiants, en l’espèce et notamment de la cocaïne et de l’héroïne,

faits prévus par C.222-37 AL.1, C.222-41 C. PÉNAL, C.L.5132-7, C.L.5132-8 AL.1, C.R.5132-74, C. R.5132-77 C. SANTÉ PUB, C.1 ARR. MINIST. du 22/02/1990 et réprimés par C.222-37 AL.1, C.222-44, C.222-45, C.222-47, C.222-48, C.222-49, C.222-50, C.222-51 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY en tout cas sur le territoire national et en Bolivie, de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, participé à un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels d’un ou plusieurs crimes et délits punis d’au moins 10 ans d’emprisonnement, en l’espèce des délits d’importation et trafic de produits stupéfiants et de contrebande de marchandises prohibées dangereuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publique,

faits prévus par C. 450-1 AL. 1, AL. 2 C. PÉNAL et réprimés par C. 450-1 AL. 2, C. 450-3, C. 450-5 C. PÉNAL.

' d’avoir notamment à EPERNAY en tout cas sur le territoire national et en Bolivie, de courant 1998 au XXX, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, importé et tenté d’importer sans déclaration préalable des marchandises prohibées et fait de la contrebande de marchandises prohibées, avec cette circonstance que les faits ont porté sur des marchandises dangereuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publique,

faits prévus par C. 414, C. 423, C. 424, C. 425, C. 426, C. 427, C. 428, C. 38 C. X, C. 1 ARR. MINIST du 29 juillet 2003 et réprimés par C. 414 AL. 2, C. 437 AL. 1, C. 438, C. 432 BIS 1°, C. 369 C. X.

Par jugement contradictoire en date du 10 juillet 2009, le tribunal a déclaré la culpabilité du prévenu établie et l’a condamné à la peine de 9 ans d’emprisonnement à titre de peine principale, une amende délictuelle de 50.000¿, à titre de peine complémentaire, et a prononcé son maintien en détention ;

Le Tribunal a par ailleurs ordonné la confiscation des scellés.

Appel a été interjeté du jugement par le prévenu le 20 juillet 2009 sur les dispositions pénales, civiles, fiscales et douanières suivi le 24 juillet 2009 de Monsieur le Procureur de la République ;

Omer DANIS comparaît devant la cour, assisté de son conseil ; l’arrêt sera contradictoire à son égard ;

Des pièces du dossier soumis à la juridiction du premier degré il résulte les éléments suivants :

Le 21 février 2006 un renseignement anonyme parvient à la Police Judiciaire de Reims au sujet d’un certain 'Mehmet’ qui, sur Epernay, se fait approvisionner par des convoyeurs tous les 15jours en héroïne et cocaïne depuis les Pays-Bas et revend ensuite les produits stupéfiants dans les environs : les enquêteurs apprennent ainsi que le 'Mehmet’ en question a échappé à leurs investigations courant octobre 2005 qui les avaient conduits à l’arrestation de deux de ses clients Muylut BUYUKBEL et AA AB ;

Ceux-ci sont alors entendus et confirment qu’Omer DANIS est leur commanditaire ;

Une information est alors ouverte en mai 2006 à Châlons en Champagne qui débouche le 16 février 2007 sur la saisine de la JIRS de Lille vue l’ampleur et la complexité du trafic en cause ;

Sont mises à jour entre autres les activités multiples et souvent à la limite de la légalité du prévenu : revente illégale de parfums, de collants, de bouteilles de champagne, de stylos de luxe ou de téléphones portables, de voitures.

Les écoutes téléphoniques et l’examen de ses factures révèlent l’usage d’une multitude de puces, d’un réseau de très nombreux consommateurs de stupéfiants avec lesquels des rendez-vous étaient pris en recourant à des formules codées ; des surveillances physiques confirment des contacts entre Omer DANIS et des consommateurs avérés qui confirmaient se fournir auprès de lui, certains depuis au moins 2001 ;

Omer DANIS est interpellé le XXX alors qu’il revient d’Espagne avec Jugurtha M.

Là, il explique le sens de son voyage avec son ami : ils avaient le projet d’acheter un bar à tapas ;

Interrogé ensuite sur les importations de stupéfiants depuis la Bolivie à partir de l’enquête en ayant mis à jour les différents éléments, il met d’emblée en cause D E comme en étant 'l’organisateur', lui-même se décrivant comme ayant seulement apporté de l’argent à ce dernier qui devait le lui rendre en triplant la mise : 15000¿ de mise de fond pour toucher à la fin 45000¿ ;

Au terme de l’instruction sur l’ensemble des opérations sur lesquelles il était mis en cause, mais aussi des débats devant les premiers juges – dont cent dix pages de notes du greffier rendent compte dans le détail des dépositions des 13 autres prévenus – les positions du prévenu ont été fluctuantes en fonction du moment où il est interrogé, de son interlocuteur, et de la présence ou non des autres mis en cause lorsqu’il répond aux questions qui lui sont posées. Il ressort de la lecture de ces notes que les cinq journées d’audience consacrés à ce dossier ont été l’occasion pour de nombreux mis en cause, non appelants, de contester la présentation faite par Omer DANIS de son propre rôle dans les opérations dans lesquelles il était impliqué ;

C’est ainsi que s’agissant de :

1- l’importation notamment des Pays-Bas de la cocaïne et de l’héroïne de courant 1998 au XXX :

Omer DANIS est dénoncé comme fournisseur de plusieurs consommateurs et convoyeurs mis en examen et condamnés définitivement par le jugement déféré à la suite de débats au cours desquels ils ont réitérés leurs multiples dépositions ;

La réalité des multiples voyages aux Pays-Bas est reconnue dans son principe par Omer DANIS qui, contrairement aux dépositions de certains de ses fournisseurs-consommateurs, s’emploie tout au long de la procédure à contester s’y être lui-même rendu ;

Sur ce volet du dossier, le prévenu a toujours soutenu n’être que consommateur et n’avoir distribué une partie des stupéfiants à certains mis en cause dans cette procédure que 'pour les dépanner', ce que ceux-ci ont contesté en décrivant les conditions dans lesquelles ils avaient été 'appâtés’ puis 'accrochés’ par le prévenu ;

2- la tentative d’avril 2006 en Bolivie :

Elle s’est traduite par un voyage du prévenu avec son partenaire D E du 7 au 19 avril 2006 en Bolivie qui a débouché, après que des chiens aient aidé à identifier la cocaïne prête à partir en Europe, sur la saisie de la totalité des 11kgs de cocaïne à Santa-Cruz, en Bolivie, et la fuite jusqu’en France des deux mis en cause : il s’agissait du 4e voyage de ce type de D E, déjà impliqué dans des affaires d’escroquerie diverses et qui sera lui-même interpellé le 5 avril 2007 et donnera très vite des précisions sur cette opération et celle de 2007, également inaboutie, ayant donné lieu à son interpellation et aussi à la mise en cause de Omer DANIS ;

Selon D E, Omer DANIS avec qui il avait été mis en contact par Can Y était le commanditaire unique de cette expédition particulièrement sophistiquée puisqu’elle faisait appel au savoir-faire et aux contacts du premier dans le domaine de l’aéronautique pour organiser le transfert de moteurs d’avions en Amérique Latine qui devaient revenir chargés de cocaïne en Europe, et au réseau de consommateurs de Omer DANIS pour son écoulement ;

Une divergence persiste entre les deux hommes sur la somme apportée par N O qui prétend qu’elle était de 15.000¿ – pour un gain qu’il estimait au double à l’audience du Tribunal – provenant de la vente de son véhicule, alors qu’D E affirme que celui-ci lui a remis 40.000¿ ;

A ce sujet, après avoir soutenu devant les policiers que le projet concernait le transport de riz, et confronté aux multiples écoutes téléphoniques et dépositions d’autres mis en cause, Omer DANIS finissait par admettre ce qu’il en était ;

Au Tribunal de Lille, il a relativisé son rôle non seulement quant au montant de son investissement financier, mais, une fois la nature de l’opération admise, quant à la connaissance qu’il avait de la réalité de ce projet : il a soutenu aux premiers juges qu’il partait en Bolivie 'pour les femmes’ car à ce moment-là avec sa femme 'ça n’allait pas', et n’avoir appris qu’une fois dans l’avion que le projet dans lequel il avait investi était un trafic de stupéfiants ;

C’est à la suite de cet échec que survient une 'embrouille’ entre les deux partenaires : Omer DANIS ayant de son propre aveu le souci de récupérer 'sa mise', une tractation intervient lui et D E portant sur un kilo de cocaïne dont disposait Amar Z, associé de E lors de ses trois précédentes opérations de trafic de stupéfiants en Bolivie avec AC T U, son relais sur place ;

Le produit n’étant pas, selon Omer DANIS et surtout L M à qui il en avait donné la moitié, de bonne qualité, un conflit très violent avec des menaces d’expéditions punitives s’en est suivi entre les quatre hommes ;

3- la tentative d’avril 2007 en Bolivie préparée également avec D

E :

Cette fois-ci, sur les 11kgs de cocaïne prévus pour être importés en Europe, 5,48kg ont été saisis à l’aéroport de Bruxelles, le reste étant bloqué en attente d’expédition ; le commanditaire, selon D E, était un certain 'B', non identifié ;

Omer DANIS n’a pas contesté devant les premiers juges avoir eu des échanges avec L M en vue d’un projet en Bolivie et a admis avoir communiqué via internet avec AC T U mais a soutenu, comme il l’avait fait devant le juge d’instruction, qu’il s’agissait d’un projet d’importation de riz, projet qui selon lui explique également les contacts physiques qu’il a eu sur Paris avec des membres de la famille du trafiquant bolivien ;

4 -la tentative en Espagne avec L M :

A son retour d’Espagne, et à la suite de son interpellation, Omer DANIS explique qu’avec son ami L M, ils avaient le projet d’acheter un bar à tapas et affirme qu’il n’a jamais pensé à acheter des stupéfiants, puis admet dans une autre audition qu’ils y allaient 'aussi’ pour voir la belle-mère de M qui 'fait dans le schit', puis le nie à nouveau devant le juge d’instruction ;

Ultérieurement il s’explique peu sur les divergences avec M qui, lui, est plus explicite sur le but du voyage ; devant le juge d’instruction Omer DANIS soutient n’avoir fait de transactions avec son ami que sur des parfums et du champagne, puis quand le juge lui pose la question 'et sur les stupéfiants '', il répond : 'oui, juste des échantillons de cocaïne’ dont il ne savait pas 'la nature exacte’ ;

A l’audience des premiers juges, il soutient n’y être allé que 'pour un voyage comme ça : c’aurait pu être Marseille', puis un peu plus tard 'pour un bar à tapas’ ; L M, lui, est plus clair : 'tout le monde sait ce qu’on peut y faire, inutile d’entrer dans les détails’ ;

5 – le transport, la détention, l’acquisition l’offre ou la cession de cocaïne et d’héroïne ;

6 – la participation à un groupement formé ou à une entente en vue de la préparation d’un ou plusieurs crimes punis d’au moins dix ans d’emprisonnement en l’espèce le trafic en question ;

7 – l’importation sans déclaration préalable des marchandises prohibées et fait contrebande de marchandises prohibées dangereuses pour la santé (C 414 et suivants du code des X)

Ces trois derniers chefs de prévention recouvrent les faits développés auparavant et ne sont pas en eux-mêmes contestés par le prévenu ;

Devant les premiers juges et à l’issue de son audition sur les faits qui lui étaient imputés, et répondant au représentant du ministère public qui lui demandait de s’expliquer sur les dépositions de plusieurs consommateurs faisant état de ses méthodes à leur égard malgré les ravages provoqués sur eux par la consommation de stupéfiants, le prévenu assure : 'je le dis à toutes les personnes présentes ici : il ne faut pas toucher à la drogue’ ;

Les autres prévenus, non appelants ont tous été reconnus coupables et ont été condamnés à des peines allant de 12 ans par défaut et 9 ans sur opposition par jugement du 20 juin 2010 (T U) à 5 mois avec sursis (H K, concubine du prévenu depuis 12 ans).

Le casier judiciaire du prévenu porte trace de 3 condamnations : dont deux en 2002 pour des faits d’emploi d’étranger sans autorisation et en 2004 pour faillite personnelle.

Devant les premiers juges, le Ministère Public avait requis 10 ans d’emprisonnement à son encontre ;

Madame l’Avocat Général communique à la cour et à la défense la décision devenue définitive du Tribunal correctionnel de Lille du 11 juin 2010 statuant sur l’opposition formée par AC T U contre le jugement déféré qui avait condamné ce dernier par défaut à la peine de 12 ans d’emprisonnement et à une interdiction définitive du territoire français, et qui, suite à son opposition l’a condamné à la peine de 9 ans d’emprisonnement ;

Devant la cour, le prévenu s’est exprimé sur l’ensemble des faits qui lui sont reprochés : concernant les faits liés au trafic de stupéfiants à partir d’Epernay, il affirme n’avoir été qu’un 'consommateur festif’qui dépannait un certain nombre de personnes mises en cause dans la procédure : il donnait de l’argent à certains pour qu’il lui en ramène des Pays-Bas ; il admet sa participation à l’opération montée avec D E via Can Y et maintient que sa mise était seulement de 15.000 € ; il redit n’avoir appris qu’il s’agissait d’un trafic de stupéfiants que juste avant de monter dans l’avion et décrit son partenaire comme ayant acheté sur place les douaniers ; il conteste de nouveau tout projet lié à un trafic de stupéfiants via la Bolivie en 2007avec AC T U, ou en Espagne avec L M ;

Madame l’Avocat Général requiert contre Omer DANIS la confirmation du jugement déféré tant sur la culpabilité que sur la peine, en soulignant la durée pendant laquelle les faits de trafic de stupéfiants en cause se sont déroulés, le nombre de personnes impliquées comme consommateurs dont certains étaient 'utilisés’ comme 'mules’ au seul profit du prévenu qui entretenait sans le moindre scrupule leur dépendance à cette fin, et son évolution rapide à partir d’un trafic local vers un trafic international de très grande ampleur avec des professionnels de la délinquance chevronnés ;

Elle note que 'l’embrouille’ survenue entre Omer DANIS et D E à la suite de l’échec de leur tentative de 2006 en Bolivie s’est soldée aussi par une opération de règlement ayant consisté également pour le prévenu à se procurer une quantité importante de produits stupéfiants et à la revendre ensuite ;

La défense fait valoir que Omer DANIS n’a jamais été condamné auparavant pour des faits liés aux stupéfiants, et que s’agissant de la tentative reconnue d’importer la cocaïne de Bolivie, il n’avait fait qu’apporter des fonds à un dispositif déjà monté et éprouvé ;

Il est soutenu concernant les faits liés au trafic depuis Epernay que les quantités de stupéfiants et les sommes indiquées par les enquêteurs sont supérieures à la réalité, et que les tentatives imputées au prévenu en 2007 soit en Bolivie soit en Espagne ne sont pas constituées faute de commencement d’exécution ;

Il est enfin soutenu, concernant la peine et à partir de diverses pièces, qu’Omer DANIS est prêt à retrouver sa famille qui l’attend à Epernay où un employeur se dit en mesure de l’embaucher dès sa sortie de prison ;

SUR CE

Sur la culpabilité :

Concernant l’importation notamment des Pays-Bas de la cocaïne et de l’héroïne de courant 1998 au XXX : en dépit de son obstination à se définir comme un simple consommateur en dépannant d’autres, tous les éléments sont réunis dans la procédure pour confirmer la culpabilité d’Omer DANIS, les dites importations ayant été assurées à sa demande et selon ses indications par de multiples consommateurs sous sa dépendance ; tous les mis en cause contestent qu’il ait été un consommateur dépendant, y compris H I avec qui il a vécu 12 ans et pendant la période correspondant aux faits visés dans la prévention, et qui a pourtant tendance par ailleurs à le protéger dans ses différentes dépositions, indique aux premiers juges que c’est lors de l’enquête et au cours des débats à l’audience qu’elle a appris que tel serait le cas ;

Par ailleurs, le prévenu affirme jusque devant la cour ne pas être allé en Hollande, en contradiction avec plusieurs mis en cause, en particulier P Q et V W qui a précisé à l’audience des premiers juges y avoir fait quatre ou cinq voyages pour acheter de la drogue pour le compte d’Omer DANIS , dont deux avec lui ;

La tentative d’importation de Bolivie d’avril 2006 n’est pas contestée par le prévenu qui s’emploie seulement à tenter en vain de minorer la responsabilité qu’il y a prise, alors même qu’à l’évidence, son investissement et sa combinaison avec D E et via ce dernier avec AC T U ne peut s’expliquer que par la perspective le concernant à titre principal, d’écouler ensuite la cocaïne dans son réseau ; le jugement sera confirmé sur ce point également ;

S’agissant des deux tentatives d’importation de produits stupéfiants qui lui sont imputées en 2007, l’une en Bolivie, l’autre en Espagne, s’il est avéré, là aussi en dépit de ses dénégations totalement fantaisistes au regard des données de l’enquête et des déclarations des autres mis en cause à ce sujet qui ont reconnu la réalité de ces projets élaborés avec lui, il n’est pas établi pour autant, que les actes préparatoires ainsi entrepris, consistant pour la première en des contacts même finalisés avec les mis en cause désignés dans la procédure, et pour la seconde assortie de ce qui s’apparente à des repérages en Espagne soient constitutifs du commencement d’exécution tel qu’exigé par l’article 121-5 du code pénal :

S’agissant des autres préventions, à savoir le fait d’avoir, pendant la période visée, transporté, détenu, acquit, offert ou cédé de la cocaïne et de l’héroïne, participé à un groupement formé ou à une entente en vue de la préparation d’un ou plusieurs crimes punis d’au moins dix ans d’emprisonnement, en l’espèce les trafics visés par ailleurs ainsi que l’importation ou la tentative d’importer sans déclaration préalable des marchandises prohibées et fait contrebande de marchandises prohibées dangereuses pour la santé réprimées par les articles 414 et suivants du code des X, elles sont avérées et d’ailleurs non contestées ;

Sur la peine :

L’article 132-28 du code pénal stipule que la peine doit être définie 'de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l’insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions’ ; en l’espèce, Omer DANIS encourt pour les délits dont il est déclaré coupable, la peine de dix ans d’emprisonnement ;

Indépendamment des conséquences nécessairement générées en terme de santé et de sécurité publique par la mise à disposition des produits stupéfiants auprès de personnes fragiles, les faits dont s’est rendu coupable le prévenu se caractérisent en l’espèce par leur durée de près de dix ans, le nombre considérable de personnes identifiées comme ayant été pourvues par lui en produits toxiques, près d’une vingtaine, et l’envergure exceptionnelle de l’opération montée en Bolivie ;

La mise en oeuvre de ce trafic se caractérise aussi par les méthodes utilisées par le prévenu : vis à vis des consommateurs qui jusque devant les premiers juges ont souligné son âpreté au gain et son unique souci d’accroître ses ressources, étant allé jusqu’à exiger d’eux son 'dû’ au moment où les plus en difficultés d’entre eux venaient de percevoir leur Revenu Minimum d’Insertion ; mais également, une fois les faits commis, par des menaces dont en particulier la mère de ses enfants a fait état à l’audience des premiers juges sans que les dénégations du prévenu puissent convaincre lorsqu’il évoque 'un malentendu';

S’agissant de la perspective de réinsertion d’Omer DANIS, celle-ci ne saurait être envisagée qu’à partir de la manifestation par le prévenu de sa prise de conscience de la gravité des faits commis et de données traduisant son engagement dans un processus de retour à la vie libre sans récidive ; force est de constater que tel n’est pas le cas : la mauvaise foi, le cynisme, voire l’inconscience du prévenu tout au long de la procédure et jusque devant la cour où il donne des versions des faits aussi invraisemblables qu’incompatibles avec les données de la procédure, interdisent en l’état d’accorder quelque crédit que ce soit à ses déclarations d’intention ; et à cet égard les pièces qu’il fait produire – une attestation selon laquelle il rencontre une psychologue en maison d’arrêt une fois par mois, et une promesse d’embauche d’un 'gérant de société', sans autre précision que son nom et son adresse) ne sont pas de nature à contredire cette analyse ;

La peine prononcée par les premiers juges, bien que s’appliquant à des faits moins nombreux, sera confirmée pour tenir compte de ces éléments et du fait que si les deux tentatives initialement retenues contre lui ne le sont pas par la cour, il n’en demeure pas moins que les actes préparatoires non juridiquement constitutifs du commencement d’exécution tel qu’exigé par l’article 121-5 du code pénal, il n’en demeure pas moins qu’ils attestent de ce que le prévenu n’avait pas renoncé à l’époque à ses projets ;

Le maintien en détention de Omer DANIS sera ordonné pour garantir l’exécution de le peine privative de liberté prononcée à son encontre.

Il conviendra de confirmer la confiscation des scellés.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement et contradictoirement à l’égard de Omer DANIS (l’arrêt devant cependant être signifié à celui-ci qui n’a pas été extrait pour le délibéré),

Confirme le jugement dans toutes ses dispositions,

Ordonne le maintien en détention de Omer DANIS,

Confirme la confiscation des scellés,

Rappelle au condamné que, s’il s’acquitte du montant de l’amende dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle la décision lui aura été signifiée, ce montant sera diminué de 20 % sans que cette diminution ne puisse excéder 1.500 euros, et que le paiement de l’amende ne fait pas obstacle à l’exercice des voies de recours.

Dit que la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 120 Euros dont est redevable le condamné,

Rappelle que si le prévenu s’acquitte du montant de ce droit fixe de procédure dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle cette décision lui aura été signifiée, le montant sera diminué de 20 % (le paiement du droit fixe de procédure ne fait pas obstacle à l’exercice des voies de recours).

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

E. S A. A

N° Affaire : 09/03572

Dossier : XXX

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Textes cités dans la décision

  1. Code pénal
  2. Code de procédure pénale
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Cour d'appel de Douai, 4ème chambre, 15 septembre 2010