Cour d'appel de Douai, 24 mai 2018, n° 17/02569

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 24 mai 2018, n° 17/02569
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 17/02569
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lille, 22 mars 2017, N° 16/08366

Texte intégral

EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE

DE LA COUR D’APPEL DE DOUAI

République Française Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 24/05/2018

***

N° de MINUTE: 18 211 N° RG: 17/02569

Jugement (N° 16/08366) rendu le 23 Mars 2017 par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANTE
Madame E A née le […] à […], résidence le […]

Représentée et assistée par Me Véronique Delplace, avocat au barreau de Lille

INTIMÉ
Monsieur F B né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté et assisté par Me Myriam Petit-Poissonnier, avocat au barreau de Lille

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Benoît Mornet, président de chambre Benoît Pety, conseiller Claire Bertin, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS: Fabienne Dufossé

DÉBATS à l’audience publique du 29 Mars 2018 après rapport oral de l’affaire par Benoît Mornet

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2018 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Benoît Mornet, président, et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 mars 2018


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***

Exposé du litige

Les époux G-Z se sont mariés le […] et ont eu deux enfants : X née le […] et Y née le […].

Par ordonnance de non-conciliation du 3 avril 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lille a notamment fixé la résidence de ces enfants en alternance au domicile de chacun des parents; Mme Z a alors interjeté appel de cette ordonnance.

Mme A, psychologue, a reçu en consultation à compter du 21 avril 2015 les enfants à la demande de Mme Z.

Dans le cadre de la procédure d’appel de l’ordonnance de non conciliation, Mme Z a produit une pièce émanant de Mme A intitulée « bilan thérapeutique concernant X et Y ».

Par acte en date du 23 septembre 2015, M B a assigné en responsabilité Mme A devant le tribunal de grande instance de Lille afin de la voir condamnée à réparer son préjudice.

Par jugement rendu le 23 mars 2017, le tribunal de grande instance de Lille a condamné Mme A à payer à M. B la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts outre une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme A a interjeté appel de ce jugement dans des conditions qui ne sont pas critiquées.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2017, Mme A demande

à la cour d’infirmer le jugement, de débouter M. B de ses demandes et de le condamner à lui payer une indemnité de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu’elle n’a commis aucune faute déontologique dans la rédaction du bilan en date du 11 juin 2015, que le rapport n’était pas destiné à être produit en justice, qu’un suivi psychologique ne nécessitait pas l’information du père, que M. B n’a subi aucun préjudice et qu’il n’existe aucun lien de causalité entre le préjudice allégué et le bilan psychologique litigieux.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 septembre 2017, M. B demande à la cour de confirmer le jugement sauf sur le montant des dommages et intérêts et la publication de l’arrêt, de condamner Mme A à lui payer la somme de 2 000 euros résultant de la perte de chance que Mme Z ne fasse pas appel du jugement rendu concernant la résidence des enfants sans être en possession du document de Mme A, de la condamner à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral, ainsi qu’une indemnité de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il soutient qu’en rédigeant un bilan psychologique, Mme A a manqué à ses obligations déontologiques en ce qu’elle aurait dû obtenir le consentement du père pour mettre en place un suivi thérapeutique des enfants, en ce qu’elle critique le comportement du père à l’égard de ses filles sans l’avoir jamais contacté et en ce


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Page 3 de 8 qu’elle a établi ce bilan sans ignorer que son avis était destiné à être produit en justice.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 mars 2018.

Motifs de la décision

En application de l’article 1382 du code civil, devenu l’article 1240 du code civil depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé

à le réparer.

Le code de déontologie des psychologues de mars 1996, actualisé en 2012, s’applique à toute personne ayant le titre de psychologue, quel que soit le mode d’exercice et son cadre professionnel.

En l’espèce, il est constant que dans le cadre de la procédure tendant à voir modifier la résidence des enfants de M. B et de Mme Z, cette dernière a produit, dans le cadre de la procédure d’appel, un « Bilan thérapeutique concernant X de Y » établi le 11 juin 2015 par Mme A, psychologue.

1. Sur la faute imputée à Mme A par M. B

En premier lieu, le code de déontologie des psychologues dispose au titre de ses principes généraux que « le respect des règles du présent Code de Déontologie repose sur une réflexion éthique et une capacité de discernement, dans l’observance des grands principes suivants », et précise en son « Principe 6: Respect du but assigné » que « les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations possibles qui pourraient en être faite par les tiers ».

Il résulte de ce principe 6 que le psychologue, avant toute intervention, doit se demander si les résultats obtenus seront transmis à un tiers et sous quelle forme ; il s’ensuit que le psychologue est personnellement responsable de ses interventions et avis, de la manière dont il les conçoit et formule, de leur mise en oeuvre et de leur conclusion.

Sur ce, la lecture du rapport montre que l’intervention de Mme A auprès des deux mineures a été réalisée « dans le but de les accompagner dans la séparation de leurs parents et de faire un état de la situation actuelle » (paragraphe 1).

Pour autant, elle indique au paragraphe 2 du bilan :

- « Aujourd’hui X et Y sont malmenées par un rythme qui ne leur correspond pas », « Je me questionne fortement sur le mode de garde qui est en place »,

- « Au vu des séances déjà réalisées avec les filles, je constate que ce rythme ne leur est pas du tout favorable et bien au contraire, qu’il les désoriente plus qu’autre chose ».

Elle écrit encore: « Ces déplacements constants sont déroutants pour les filles, qui sont déjà perturbées par la séparation de leurs parents et soumises à l’obligation d’avoir désormais deux foyers » (paragraphe 8).

Elle conclut enfin au paragraphe 11 du bilan qu’il devient urgent de modifier le rythme actuel pour se recentrer sur leur bien être et leur développement psycho-affectif".


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Ces éléments démontrent qu’en prenant position contre la fixation de la résidence alternée des enfants au domicile de chacun de leurs parents, Mme A, par un manque de réflexion éthique, n’a pas fait preuve de prudence et de mesure, et n’a ni respecté le but qui lui était assigné ni répondu aux motifs de son intervention, laquelle consistait, aux termes mêmes du bilan qu’elle a rédigé, à accompagner les enfants au décours de la séparation parentale et à faire un état de la situation actuelle.

En conséquence, Mme A, en remettant ce bilan thérapeutique à Mme Z, ne pouvait pas ignorer, de bonne foi, la possible utilisation par cette dernière de ce document dans l’instance l’opposant à M. B, afin de s’opposer à la mesure de résidence alternée.

En second lieu, l’article 11 du code de déontologie des psychologues énonce que « l’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposé par le psychologue requiert outre le consentement de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux ».

La lecture littérale de cette disposition du code de déontologie montre que consentement des titulaires de l’autorité parentale est nécessaire soit tout d’abord, pour l’évaluation du mineur, soit ensuite, pour l’observation du mineur, soit enfin, pour le suivi au long cours proposé par le psychologue auprès d’un mineur.

En application de l’article 372-2 du code civil, à l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant.

Les actes usuels sont des actes de la vie quotidienne, sans gravité, qui n’engagent pas l’avenir de l’enfant, qui ne donnent pas lieu à une appréciation de principe essentielle et ne présentent aucun risque grave apparent pour l’enfant, ou encore, même s’ils revêtent un caractère important, des actes s’inscrivant dans une pratique antérieure non contestée.

Relèvent de l’autorisation des deux parents titulaires de l’autorité parentale, les actes qui, en raison de leur caractère inhabituel ou de leur incidence particulière dans l’éducation et la santé de l’enfant, impliquent une réflexion préalable sur leur bien-fondé

Si la décision de recourir à un psychologue pour une consultation relève des soins courants quotidiens et doit pouvoir être prise par un seul des parents agissant pour le compte des deux, sous réserve qu’aucun indice ne laisse à penser qu’un désaccord pourrait exister, le psychologue, saisi par un seul des parents, au cours d’une procédure de divorce, d’une demande d’évaluation ou d’observation d’un enfant mineur aux fins

d’établissement d’un bilan thérapeutique, qui ne relève pas des soins quotidiens habituels, et sachant que l’enfant a un autre parent codétenteur de l’autorité parentale et que la séparation parentale est conflictuelle, ne peut faire l’économie de vérifier le consentement de ce dernier à une telle démarche non usuelle.

Sur ce, il est établi que Mme A a reçu en consultation les enfants de M. B, à la demande unilatérale de leur mère qui a agi sans avoir au préalable obtenu le consentement de leur père, ni même l’avoir consulté ou informé en dépit de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, étant noté que Mme A verse au débat un courrier recommandé de M. B par lequel il lui notifie, le 13 octobre 2015, son refus de suivi thérapeutique de ses deux enfants, soit postérieurement à l’acte introductif d’instance du 23 septembre 2015.


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Mme A a notamment écrit dans le bilan thérapeutique du 11 juin 2015:

-« étant comportementaliste de formation, j’accorde beaucoup d’importance à l’analyse des comportements comme mode de communication » (paragraphe 3), « je constate au vu de leurs dires qu’elles n’ont aucun rythme stable et adapté à leur développement compte tenu de la problématique qui les touche » (paragraphe 5), « les horaires sont bousculés et non adaptés à l’âge » (paragraphe 6),

- « X me raconte ces éléments avec le sourire, mais elle ne réalise pas l’impact sur son développement » (paragraphe 6),

- « Elles n’ont aucun repère stable » (paragraphe 7),

- « Il n’y aucun référent stable et pourtant un enfant qui traverse une épreuve telle que celle-ci a besoin de stabilité, matérielle et affective » (paragraphe 7),

- « Ces déplacements constants sont déroutants pour les filles, qui sont déjà perturbées par la séparation de leurs parents et soumises à l’obligation d’avoir désormais deux foyers » (paragraphe 8), « Dans ces conditions là, elles ne peuvent pas s’adapter et créer leurs nouveaux repères » (paragraphe 8),

-« La situation actuelle est également difficile concernant l’éveil des enfants et les soins » (paragraphe 9).

Au surplus, la cour relève que Mme A a écrit : « En thérapie pour ce genre de problématique de divorce, j’utilise beaucoup les contes. (…) Ces guides proposent des conseils pratiquent pour démêler des sentiments contradictoires et résoudre par exemple, des problèmes délicats de loyauté ou d’emploi du temps. Ces conseils là ne sont pas du tout repris au quotidien de ces deux fillettes, malgré les tentatives de la maman restées vaines jusqu’à aujourd’hui » (sic.) (paragraphe 4).

Ces éléments démontrent que Mme A, au cours de différentes consultations, a procédé à l’évaluation et à l’observation des enfants de M. B sur la durée, ayant elle-même indiqué dans le bilan que trois séances ont été réalisées et qu’elle voyait les enfants en alternance à chacune des séances (paragraphe 1).

Mme A, eu égard au conflit opposant les parents sur la fixation de la résidence des enfants après leur divorce, et dont le bilan thérapeutique témoigne qu’il était connu d’elle, savait nécessairement que Mme Z n’agissait pas avec l’accord exprès de M. B, de sorte qu’elle aurait dû s’assurer du consentement de ce dernier sur l’observation et l’évaluation mises en place.

En conséquence, Mme A, en se contentant du consentement d’un seul des parents, a commis un manquement à l’article 11 du code de déontologie des psychologues.

que "les En dernier lieu, l’article 13 du code de déontologie des psychologues prévoit avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportés. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même”.

Mme A a notamment écrit dans le bilan thérapeutique :

- « Ces conseils là ne sont pas du tout repris au quotidien de ces deux fillettes, malgré les tentatives de la maman restées vaines jusqu’à aujourd’hui » (paragraphe 4),

- « Les enfants s’en sortent généralement mieux s’ils savent à quoi s’attendre. Avec X et Y ce n’est pas du tout le cas. Le planning est instable, elles ne savent jamais où elles vont aller, qui va les garder et elles ne sont pour ainsi dire jamais chez elle lorsqu’elles sont avec leur père » (paragraphe 5),

- « Les horaires sont bousculés et non adaptés à l’âge » (paragraphe 6),

- « Elles n’ont aucun repère stable » (paragraphe 7),


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- « Il n’y a aucun référent stable et pourtant un enfant qui travers une épreuve telle que celle-ci a besoin de stabilité, matérielle et affective » (paragraphe 7),

- « Il n’y a aucun temps de partage, d’échanges avec le papa, pas de rituel du soir, qui est un élément moteur pour l’accompagnement à l’endormissement, calmer l’angoisse de la séparation, etc… ce temps est précieux pour renforcer les liens et permettre à l’enfant de s’exprimer » (paragraphe 7),

- "Elles passent la plupart du temps leurs journées chez leur tatie, mais ce dont elles ont besoin aujourd’hui n’est pas pris en compte. Elles ont besoin de retrouver leurs repères, de < poser leurs valises '> et retrouver leur père pour renforcer la relation père-fille" (paragraphe 8),

- "La situation actuelle est également difficile concernant l’éveil des enfants et les soins.

Bien entendu comme tout enfant, il est important que celui-ci puisse jouer, développer les compétences du jeu symbolique, s’exprimer, etc… le milieu dans lequel elles sont accueillies ne permet pas de répondre à ces besoins-là. Elle n’ont pas de jeux adaptées à leurs âges. Elles sont chez leur tatie donc doivent jouer avec des jeux de l’âge de leur cousine plus grande (exemple la Wii), elles ne peuvent rien ramener chez elle comme elles bougent beaucoup et c’est lié à la maman" (paragraphe 10),

- « Toute la dimension affective est quasi- inexistante » (paragraphe 11).

Ces éléments, dont la liste n’est pas exhaustive, démontrent que Mme A a porté un jugement de valeur péremptoire sur le comportement et les aptitudes parentales de M. B, sans précaution dans son positionnement thérapeutique, alors qu’elle n’avait personnellement ni examiné ni rencontré celui-ci et qu’elle ne pouvait pas ignorer que le bilan thérapeutique serait susceptible d’être produit en justice dans le cadre de la procédure de divorce en cours.

De surcroît, Mme A ne pouvait tenir pour acquis les propos rapportés, dans une situation de conflit parental, par deux enfants âgés de 3 et 7 ans, et dont la capacité de discernement n’est pas établie, et ce d’autant plus qu’elle n’a pas confronté les propos des deux enfants aux explications de leur père.

Cette prise de position personnelle de Mme A sur les capacités éducatives de M. B est encore corroborée lorsqu’elle affirme dans ses écritures qu’elle « ne critique pas les relations qu’entretient Monsieur B avec ses filles, mais simplement son comportement en ce que les filles et leur père n’ont aucun temps de repos courant tout au long de la semaine d’un endroit à un autre ».

En conséquence, Mme A, en rédigeant son bilan en dehors de toute retenue et de toute nuance, a commis un manquement à l’article 13 du code de déontologie des psychologues.

En l’état de l’ensemble de ces constatations et énonciations, Mme A a commis des manquements déontologiques constitutifs d’une faute au sens de l’article 1382 du code précité, devenu l’article 1240.

2. Sur le préjudice et le lien de causalité

2.1. Sur la perte de chance alléguée par M. B

La perte de chance, qui implique la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable, peut consister en la possibilité d’éviter un événement malheureux ; toute perte de chance ouvre droit à réparation de l’ensemble des préjudices directs, et non hypothétiques subis, à mesure de la chance perdue, conformément au principe de réparation intégrale sans perte ni profit.


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En l’espèce, M. B sollicite l’indemnisation de son préjudice résultant de la perte de chance que Mme Z ne fasse pas appel du jugement statuant sur la résidence des enfants sans être en possession du bilan thérapeutique.

Sur ce, M. B produit au débat plusieurs bordereaux de pièces de Mme Z dans la procédure les opposant sur la fixation de la résidence de leurs enfants.

A la lecture de ces éléments, il est acquis que Mme Z a produit, dans le cadre de la procédure relative aux modalités de résidence des enfants, le bilan thérapeutique du 11 juin 2015.

La cour observe cependant que Mme Z a notamment versé, outre ce bilan thérapeutique, de nombreuses attestations de témoins, des mains courantes, un rapport d’un détective privé, des dépôts de plainte, des conversations « facebook », un certificat de médecine légale, des certificats médicaux, des procès verbaux de constat, et des avis de professionnels sur la « garde » alternée.

Il en résulte que la preuve que Mme Z ne fasse pas appel du jugement statuant sur la fixation de la résidence des enfant sans être en possession du document rédigé par Mme A n’est pas rapportée.

En conséquence, M. B ne démontre pas l’existence de la perte de chance qu’il allègue, étant surabondamment noté qu’il est certain, au vu des pièces versées par Mme Z dans le cadre de la procédure relative aux modalités de résidence des enfants, que la faute de Mme A n’a pas eu de conséquences sur la décision de Mme C d’interjeter appel de la décision fixant la résidence des enfants en alternance au domicile de chacun des parents, de sorte que cette perte de chance alléguée étant hypothétique, elle exclut toute indemnisation.

2.2. Sur le préjudice moral allégué par M. D
M. B sollicite la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral, composé de la souffrance de lire qu’il n’aimerait pas ses enfants, de l’angoisse de perdre la résidence alternée et du fait qu’il a perdu une chance que la procédure s’arrête après le jugement si Mme A n’avait pas rédigé le bilan thérapeutique ; il ajoute qu’il subit désormais la procédure d’appel, ce qui prolonge et augmente son préjudice moral, notamment lié à l’angoisse de perdre la résidence alternée des enfants et à la situation conflictuelle qui perdure entre les parties et impacte les enfants

Sur ce, M. B verse au débat plusieurs attestations de membres de sa famille et de proches des mois de février et mars 2015, qui font état de l’investissement éducatif de M. B auprès de ses enfants et de son implication dans la scolarité, les activités de loisirs et l’épanouissement de ses filles.

La cour relève que ces attestations font état d’un père présent, attentif et affectueux à l’égard de ses filles, ainsi que de la complicité existante entre le père et ses enfants.

La cour rappelle que le bilan thérapeutique de Mme A est daté du 11 juin 2015 et mentionne notamment l’absence de temps de partage et d’échange entre les enfants et M. B, la nécessité retrouver leur père pour renforcer la relation père-fille, une situation difficile concernant l’éveil des enfants et les soins, ou encore une dimension affective quasi-inexistante.


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Il s’ensuit que ce document rédigé par Mme A, par le jugement de valeur et les critiques qu’il porte sur les aptitudes éducatives et le rôle parental de M. B, a causé, de manière certaine et directe, un préjudice moral à M. B, dont l’investissement auprès de ses deux filles est remis en cause par une professionnelle qui a procédé à une évaluation sans avoir pu examiner elle-même la personne.

M. B verse deux attestations de témoins des 29 juillet et 11 août 2017 faisant état du bouleversement qui l’a subi après avoir pris connaissance du bilan thérapeutique du 11 juin 2015, de son sentiment d’avoir été insulté et bafoué dans son rôle de père et de l’impact dudit bilan sur son état psychologique et physique.

En conséquence, le préjudice moral de M. B sera évalué à la juste somme de 3 000 euros.

Le jugement attaqué sera donc confirmé en ce qu’il a condamné Mme A à payer à M. B la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.

2.3. Sur la publication de l’arrêt sollicitée par M. B

Le préjudice de M. B est justement indemnisé par la condamnation de Mme A à lui payer des dommages et intérêts, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner en plus la publication de la présente décision, étant à titre surabondant noté qu’aucun impératif ne justifie d’ordonner la publication du présent arrêt.

3. Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement attaqué sur ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de condamner Mme A, qui succombe en son appel, aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Petit, et à payer à M. B la somme de 1 500 euros au titre de la procédure d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 23 mars 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Lille,

Y AJOUTANT,

Déboute les parties de leurs demandes,

Condamne Mme A aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Petit, et à payer à M. B la somme de 1 500 euros au titre de la procédure d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile.

POUR COPIE CERTIFIÉE CONFORME

Le Greffier P/Le Greffier D’APPEL Le Président

F. Dufossé B. Mornet

U

A

O

D

[…]

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